Avon Gale

— Laissez-moi vous montrer quelque chose.

Il tourna son écran d’ordinateur pour qu’Avery puisse le voir et ce qui était sur le moniteur n’eut pas beaucoup de sens pour lui au début. Il se pencha en avant, les yeux écarquillés. Il sortit instinctivement ses lunettes de sa poche avant et les mit sur son nez.

— Fascinant. Est-ce que ce sont ces « feuilles de calcul » dont j’ai tant entendu parler  ?

— Étiez-vous si ennuyeux dans tous vos cours, Hextall  ?

— Oh, oui, rétorqua-t-il sans détacher ses yeux de l’écran. C’est une bonne chose que ce cabinet ait seulement eu besoin de deux lettres de référence ou j’aurais été en difficulté.

Il entendit un reniflement qui pourrait être un rire et puis Lacroix continua.

— C’est excitant et sexy. Ce n’est pas des graphiques à barres et des mathématiques, c’est tout ce que fait Lacroix, expliqua-t-il en adoptant un accent français désagréable pour prononcer le nom de son patron. Il est ennuyeux. Il a un objet sur son bureau et c’est un presse-papier. C’est tellement intéressant. Je parie que chez lui tous les murs sont blancs et semblables et que ses appareils sont énergivores…

— Avery, tu devrais peut-être te redresser…

— Non, répondit-il en maintenant sa tête sur ses bras, mais il se tourna pour que Harlan puisse encore l’entendre, parce que ce qu’il disait était important. Il a probablement un de ces lave-vaisselle qui utilise deux cent quarante litres d’eau. Et je parie qu’il ne sépare jamais ses déchets du recyclage.

— Il est très ivre, dit Harlan en toussant.

— Hein  ? dit Avery en levant la tête pour regarder tristement son ami. Lacroix  ? Non, non. L’alcoolisme mondain le rendrait intéressant et lui donnerait peut-être une personnalité.

Il lui fallut au moins trois secondes pour se rendre compte que Harlan ne lui parlait pas. Il parlait de lui. Il tourna la tête, vit qui se tenait debout à côté de la table et gémit.

— Merde. Je déteste tout. Bien sûr que c’est vous.

Pourquoi diable Lacroix était-il debout là  ? Il devait être maudit. Il n’y avait pas d’autre explication.

— Allez-vous-en, dit-il en reposant sa tête sur ses bras. Je suis en vacances. Je n’ai pas besoin d’être gentil avec vous.

— Je n’ai pas de lave-vaisselle, dit-il d’un ton plat.

Pourtant, il était vraiment fier de lui au sujet de son dernier projet et il était sûr qu’il arriverait au moins sur le bureau du Chef de Projet. Il avait passé trois semaines de sa vie dessus, vivant de café et de barres énergétiques, sans rien manger à part des flocons d’avoine. Il était à peu près sûr qu’il avait dessiné ce fichu projet dans son sommeil , s’il avait réellement dormi. Il n’était toujours pas certain de cela.

Ce dont il était sûr, c’était qu’il avait examiné les plans de chaque immeuble qu’il aimait et de tous ses projets d’études supérieures. Bon sang, il avait même regardé le truc merdique qu’il avait fait dans sa classe d’art en cinquième et avait demandé à sa mère si ses créations en Lego lui avaient paru particulièrement novatrices et durables. Elle lui avait répondu très calmement de dormir un peu et elle avait ensuite raccroché. Avery avait pris cela pour un non. Il avait envoyé tout le dossier à Blake Everett, son ami de l’école d’architecture, lui-même associé dans une société renommée de Seattle. Il avait ensuite déambulé lentement dans sa salle de séjour, fumant cigarette sur cigarette en attendant qu’Everett lui réponde.

Celui-ci lui avait répondu quelques heures plus tard par e-mail, bon sang, tu es un putain de génie, et Avery avait donné un coup de poing triomphant soit dans un oreiller, soit à son chat. Peu importe, il était vraiment fatigué. Il s’était ensuite rapidement couché même si c’était samedi et qu’il était quatorze heures.

— Justin te semble familier parce qu’il est architecte.

Pour une explication, celle-là était assez terrible.

— Oui. Et nous nous connaissons tous au travers de l’Association des Architectes gays. J’ai oublié. Étais-tu au repas le mois dernier  ?

— Oui. J’ai apporté la salade de pâtes, répond Justin sans hésitation.

— C’était vraiment bon, continue Avery en le saluant avec sa bière. J’ai aimé le bacon.

— Elle l’était vraiment. Les architectes hétéros sont les seuls à mettre des morceaux de bacon dans leur salade de pâtes, dit-il en souriant. Je suis à fond dans la vraie viande.

— Ne le sommes-nous pas tous  ? rit-il en claquant sa bouteille contre celle de Justin.

— Oh, c’était une bonne idée de vous présenter tous les deux, dit Brandon en soupirant. Et, Avery, tu te souviens de ce contrat pour ce stade dans le New Jersey  ? Le très gros projet qui a eu lieu, il y a quelques années  ?

« — Y a-t-il un pressing dans cette ville ? demanda-t-il alors qu’il frottait si fort que des petits bouts de l’essuie-tout bon marché se posaient sur le coton doux.
Ryder ricana.
— Sérieusement ?
Adam leva les yeux, ses traits habituellement sévères relâchés dans un authentique sourire. Il n’était même pas un peu crispé.
— Non. Mais j’imagine qu’il aurait eu un genre de nom morbide.
— La laverie s’appelle Nettoyage à sang, l’informa Ryder.
Adam rejeta la tête en arrière et rit. C’était un son détendu, riche et chaleureux et il fit un effet à Ryder que même la meilleure bouteille de bourbon de toute la distillerie ne pourrait lui faire.
— Vous pourriez appeler le pressing La Servante de Fer, suggéra Adam et ce fut au tour de Ryder de rire.
— Ou quelque chose comme Mousse & Mort ?
Adam rit à nouveau. »

— Tout d’abord, pourquoi est-ce qu’il ne le fait pas lui-même  ? Ensuite, pourquoi le fais-tu pour lui  ?

— C’est la même question, Avery.

— Dommage, rétorqua ce dernier.

Son cerveau était à la limite de l’explosion et il savait qu’il devait régler pronto son problème de sommeil.

« Il serra la main d’Heather tout en se présentant. Celle-ci sourit avec un plaisir sincère, sûrement parce qu’Adam était si attirant.
Ryder se rendit soudain compte de la raison pour laquelle le nom de famille d’Adam avait l’air si familier. Keller de Lexington… comme dans les Fermes Équestres Keller ? Doux Jésus. Si c’était vrai, alors ce mec était canon et blindé. Et tellement loin de la catégorie de Ryder que ce n’était même pas drôle. D’accord, cela aurait seulement été drôle s’ils s’étaient appréciés. Oh, bien. C’était pour le mieux, vraiment. Ce genre de passage de la haine à l’amour n’arrivait que dans les fictions Harry/Drago. »