Émilie Aubry rencontre l'auteur François Barcelo au Mouton Village
- Bordel de merde ! s'écria Justin Case.
- Putain de salope ! hurla Oracle Simon.
- Hostie de tabernacle ! gémit Benjamin Tardif.
Bien entendu, sauf pour les gros mots de Benjamin Tardif, on aura compris que ces propos sont traduits librement, et même avec un souci d'éviter de scandaliser les femmes et les enfants qui auraient pu acheter ou ouvrir ce livre en croyant qu'il s'agissait d'un ouvrage sur les espèces animales disparues du Texas.
Je lui ai demandé s'il se rappelait sa promesse. Il a commencé par faire semblant de ne pas comprendre de quoi je parlais. J'ai dû insister : [...]
[lui] — Mais quelle promesse ?
[elle] — Que je pourrais loger gratis quand je voudrais.
Il a mordu. C'est bien, parfois, les hommes qui oublient leurs promesses : on peut les améliorer sans qu'ils s'en aperçoivent.
- Excusez-moi, répéta-t-il, je suis un étranger, et je me suis fait voler ma voiture et tous mes effets personnels. Pour l'amour de Dieu, aidez-moi.
- Chiche, dit la voix.
Elle avait dit "Bullshit", mais si Benjamin Tardif avait eu à traduire cette expression, il aurait sans doute utilisé une expression comme "Chiche", même si ce n'était pas du tout la même chose.
Il ne me reste plus qu'à décider comment me débarrasser de ce bébé [...].
Le tuer, d'abord. Je regarde autour de moi. Je ne vois rien d'inspirant. Le tuer à coups de bûche sur la tête ? Ça prendrait trop de coups. L'étrangler ? Sûrement pas. Je n'en serais pas capable. Je ne suis pas un assassin.
- Dis donc, Ben, t’es homosexuel ou quoi ?
La tête de Justin Case, toujours coiffée de son chapeau de cow-boy patriote, était passée dans la porte coulissante du Westfalia. Benjamin Tardif s’efforça de se souvenir de la soirée de la veille. Cela lui revint rapidement, une fois qu’il se fut rappelé la bouteille de bourbon qu’ils avaient partagée inégalement – une moitié pour Justin et un quart chacun pour Soutinelle et pour lui. Ah oui, il y avait eu aussi une deuxième bouteille de bourbon, dont il avait peut-être obtenu une part plus équitable.
Il lui revint aussi à l’esprit qu’ils avaient commencé à se tutoyer – ou plutôt qu’ils se seraient tutoyés si le tutoiement avait existé en anglais. En tout cas, ils s’appelaient allègrement Ben et Soot, Justin ne se prêtant à aucune abréviation susceptible de plaire à l’ex-shérif.
- Homosexuel ? Pourquoi je serais homosexuel ?
- C’est Soot qui se le demande.
- Pourquoi ?
- Tu lui as pas fait de passe. Même pas mis la main sur la cuisse quand elle a effleuré la tienne par accident hier soir. Moi, je lui ai dit que t’avais plutôt l’air d’un raciste. Mais ça l’a pas consolée. Soot, elle prend ça mal quand elle se sent pas désirée. Elle dit toujours qu’elle a pas assez de seins mais trop de cul.
Du vinyle brun. C'est pour ça que c'est moins cher. Une erreur dans les pigments, a expliqué le vendeur. Ça explique aussi que le brun ressemble à du caca de poule, mais ça n'est pas grave, parce qu'une maison couleur caca de poule, ça ressemble quand même bien plus à une maison qu'a du caca de poule. Et puis le vendeur nous a juré que c'est une couleur qu'on ne verra jamais nulle part ailleurs.
Tiens, tant pis, ça me ferait une belle devise, se dit-il. Même qu’il verrait bien ça sur sa tombe, sous son nom et les dates de sa naissance et de son décès : Tant pis.
(p. 175)
Plus on a de tantes et de cousines, plus on reçoit des cadeaux de Noël .ennuyants, comme des pantoufles tricotées ou des disques de Helmut Lotti.
... les discussions ornithologiques ne sont pas plus intéressantes que les politiques. Elles ne passionnent que la personne qui croit s’y connaitre plus que l’autre, et ennuient l’autre qui n’y connait rien,
(p. 139)
Et c’est là qu’il comprit : le purgatoire était un endroit où on rencontrait les gens que l’on détestait. C’était cent fois pire que de se passer d’alcool ou de manger de la merde à longueur de journée. (p.283)