« This is a snakeskin jacket! And for me it's a symbol of my individuality, and my belief... in personal freedom. »
Qu'est ce que j'ai pu aimer ce film et la garde robe de Sailor et Lula, avec la fameuse veste en peau de serpent. le film était tellement incroyable qu'on a oublié que l'histoire de Wild at heart (magnifique titre) était tirée d'un roman signé Barry Gifford. Ils sont sept en tout à relater les aventures des amants du Deep South, puisque Perdita Durango, Jour de chance pour Sailor, Les Sultans d'Afrique, le Baiser de Consuelo, Rude journée pour l'homme-léopard, et L'Imagination du coeur suivront.
Sailor est décédé il y a dix-huit ans déjà, et Lula, octogénaire, chérit son souvenir, dans sa ville natale de la Caroline du Nord. Elle n'attend plus rien de la vie. L'Imagination du coeur est sa seule arme contre la solitude, et c'est celle d'une femme qui écrit son journal.
Lorsque son amie d'enfance Beany Thorn vient lui rendre visite, les deux vieilles dames décident d'entamer un road-trip et de retourner à la Nouvelle-Orléans ravagée par Katrina, où vit Pace Roscoe Ripley , le fils de Sailor et Lula désormais quinquagénaire.
Cette dernière aventure est digne des précédentes, construite comme des vignettes percutantes, avec de nombreux dialogues formidables et des digressions dont Gifford a le secret. le temps semble s'être figé depuis le premier opus, Lula parait avoir toujours le même âge, celui de l'amour fusionnel et le Deep South nous magnétise.
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A la fin de Sailor et Lula, la terrifiante Perdita Durango mettait les voiles. Nous retrouvons la Nasty Girl Mexicaine en couple avec son double masculin, Romeo Dolorosa, tout un patronyme.
Le couple de tourtereaux n'a rien à voir avec l'univers de Shakeaspeare, mais plutôt avec celui de Tobe Hooper.
Voleur et trafiquant, Romeo est aussi un Santero, qui pratique le vaudou pour terrifier les pauvres gens et il ne dédaigne pas intégrer le sacrifice humain à ses rites, histoire d'asseoir son autorité.
Perdita Durango. Quinze degrés et temps pluvieux est le récit d'un road-tripes sanguinaire, avec enlèvement de gringos, transport illégal de placenta humain pour produits cosmétiques, et rivalités de cartels. Dans l'univers impitoyable des trafiquants mexicains et chicanos -« A trois, on peut garder un secret si les deux premiers sont morts »-, la rencontre explosive de Perdita et Romeo attise les braises.
Riche idée qu'a eu Barry Gifford de consacrer un volume à cette femme énigmatique qui ne faisait que passer dans Sailor et Lula. Sa vie n'a été que violence, elle n'est que violence, ne connait aucune inhibition, aucune barrière morale. Sailor et Lula formaient un couple romantique (version Gifford tout de même), Perdita et Romeo en sont une version nihiliste extrême, qui refuse toute norme sociale.
Comme souvent chez Gifford, les chapitres sont courts, 2 à 4 pages, les scènes se suivent vitesse grand V, comme un cartoon sanglant. Même si Alex de la Iglesia a consacré un long métrage à ce roman en 1997, avec Rosie Perez dans le rôle titre (et Javier Bardem, qui restera dans l'histoire du cinéma avec la coupe mulet à la mexicaine la plus hideuse jamais vue à l'écran), on se souvient davantage de Perdita sous les traits d'Isabella Rossellini. Son rôle, assez court, dans Wild at Heart de David Lynch, a marqué les esprits, et pas juste à cause de ses sourcils, qui faisait d'elle la fille cachée de Groucho Marx et de Frida Kahlo.
L'incursion de Gifford dans le Dark Deep South se poursuit avec Jour de chance pour Sailor, et c'est tant mieux.
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Ce roman américain conte la fugue de la jeune et frêle Lula avec son fidèle petit ami Sailor, fraîchement sorti de prison...
Il y a une belle justesse dans les relations entre les divers protagonistes. L'auteur Barry Gifford porte une profonde tendresse à ses personnages, à la manière de Willy Vlautin, inspiré par Barry et que j'affectionne particulièrement!
J'ai aimé suivre Lula et Sailor dans leur road trip insensé, j'ai tremblé pour eux car le mystérieux Johnnie est à leurs trousses, et je leur ai souhaité (trop tôt) un futur plein de promesses...
Les sujets abordés par les personnages sont tantôt frivoles et superficiels (un peu comme le blabla omniprésent dans les films de Tarantino), tantôt sérieux et empreints de réalisme et de lucidité sur la vie.
Je recommande cette lecture, qui fut très rapide pour ma part, tant les chapitres se succèdent avec fluidité, si vous aimez les histoires de jeunes fugitifs qui ne veulent pas être séparés, les rencontres variées dans des bars et motels et les paysages arides du Sud des USA.
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Un enchaînement de scènes et de répliques noires et réjouissantes dans cette courte cavale états-unienne entre deux doux dingues qui s'aiment.
Je regarderai bien le film maintenant !
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Voilà un court polar très intriguant.
Il est d'abord tropical, et d'emblée, ça intrigue.
Parce que oui, voyez, un polar, c'est New-York, LA, Chicago ou Boston. Pas petaouchnok ou Port Tropique.
Ça n'existe pas, Port Tropique. C'est un lieu inventé, de fantasme, un comptoir de l'ancien temps avec des types genre latinos en marcel, des femmes lascives aux mœurs libérées, de la picole à tous les étages.
Ca n'existe pas, Port Tropique. C'est une invention d'écrivain, un lieu où l'atmosphère compte davantage que la réalité, un endroit moite, perdu, corrompu et usé.
Barry Gifford va épuiser son Port Tropique, y placer une révolution de carnaval et quelques livraisons de mallettes de billets. Il saura nous faire flotter dans l’irréel, dans l'immanent, le ressenti ou le sensuel.
Port Tropique se vit plus qu'il ne se raconte. Un peu comme un film vu tard dans la soirée, qu'on prendrait en cours et dont on aurait peine à raconter les tenants et les aboutissants. On saurait de source sûre l'avoir vu, s'y être surement endormi, aussi. Demeurerait l'atmosphère moite du film noir, un héros, Franz, l'alcool, et Port Tropique.
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Cette biographie fut publiée neuf années après la mort de Kerouac. D’innombrables extraits d’entrevues avec ceux qui l’ont côtoyé la rendent étonnamment vivante.
Kerouac poussa William Burroughs à écrire mais il eut aussi un impact considérable sur Allen Ginsberg. Voici sa réaction après avoir lu The Town and the City, 1er roman de Kerouac : « la lecture de ce texte monstrueux me bouleversa […] elle m’émut tant, que j’écrivis mes premiers poèmes publiés […] le roman de Jack me poussa aussi à devenir un artiste… à vraiment me prendre au sérieux en tant que poète […] je compris soudain que nous avions le pouvoir d’écrire une œuvre immortelle. »
Beaucoup prétendent que Sur la route aurait été écrit en trois semaines à peine. John Clellon Holmes contredit cette hypothèse : « Il écrivit sept, peut-être dix autres débuts de roman mais ça ne collait toujours pas. Tout ça dura pendant au moins dix-huit mois. Nous étions en 1949. Son incapacité à écrire ce foutu bouquin l’écoeurait de plus en plus. […] en 1951, il se dit carrément : «Merde ! Suffit que je m’assoie et que je dise la vérité. » Et c’est ce qu’il fit. » [p. 87]
Sa rencontre avec Neal Cassady, un bum de Denver au style de vie flamboyant, fut déterminante. Cassady exerça une si profonde fascination sur Kerouac qu’il en fit le héros de Sur la route. Kerouac s’est aussi inspiré de lui pour élaborer son style littéraire : « Je dois la découverte d’un style personnel fondé sur le jaillissement spontané aux merveilleuses lettres — prose libre de Neal Cassady. » [p. 97] William Burroughs : « Jack s’asseyait pour écrire pendant des heures. Sans pause, sans la moindre pause. […] Il disait toujours que la première version était la meilleure. […] Bien sûr, c’est tout à fait dans la lignée de Wolfe. Sa méthode de composition était très similaire ; le flux et l’écriture à grande vitesse. » [p. 191]
La publication du manuscrit de Sur la route fut un casse-tête pour Malcolm Cowley, son éditeur : « Je le lus avec passion, en parlai au comité de lecture de Viking, qui décida de le donner à deux autres lecteurs, mais leur réponse fut : «non». Kerouac vint me voir plusieurs fois et je lui dis : « il faut que tu commences par en publier des extraits dans des revues. » Je choisi le passage intitulé « La fille mexicaine », l’envoyai à The Paris Review qui l’accepta avec enthousiasme. » [p. 188] Cowley finit par imposer Sur la route et ce fut le début d’un long processus de réécriture qui dura sept ans : « Je ne m’en faisais pas pour la prose. Je m’en faisais pour la construction du livre […] l’histoire n’arrêtait pas d’aller et venir à travers le continent américain […] Je disais souvent à Jack : « pourquoi ne pas étoffer l’un ou l’autre de ces voyages afin que ton héros cesse un peu de faire la navette entre les deux côtes, pour donner plus de mouvement au livre ? » Et bien Jack fit une chose qu’il refusa d’admettre ensuite : il fit beaucoup de corrections —et d’excellentes corrections. Oh, il le nia toujours, car il était persuadé que les mots devaient couler sur la feuille comme du tube la pâte dentifrice, et que tout ce qui sortait de sa machine à écrire était un pain béni. » [p. 204]
Publié en 1957, Sur la route est une bombe dans l’Amérique puritaine d’Eisenhower. « On lut Sur la route comme des nouvelles d’une autre planète, une planète habitée par un étrange groupe d’hommes et de femmes aussi peu touchés par la guerre froide qu’auparavant par les hostilités. » [p. 228] Joyce Glassman : « Ensuite parut dans le New York Times l’article de Milstein qui fut décisif pour le roman de Jack. Un article dans la rubrique quotidienne, quelque chose d’énorme, dépassant toutes les espérances de Jack, qui en fut bouleversé et effrayé, —il était mal à l’aise quand tous les projecteurs étaient braqués sur lui. » [p. 234]
Du jour au lendemain, Kerouac devint le point d’attention des médias, ce qui s’avéra difficile à assumer. John Clellon Holmes : « … les gens de la télévision et les journalistes venaient de l’interviewer cinq ou six fois et il ne savait plus qui il était, il était littéralement terrifié — au lit, la tête entre les mains. [Pour] la plupart des romans […] les gens se disent : « Tiens, j’ai bien envie de lire ce bouquin. » Mais quand Sur la route fut publié, la réaction fut : « Je veux connaître cet homme. » […] Et l’homme savait de moins en moins où il en était. Il passa à l’émission télévisée de John Wingate ; deux minutes après le début du show, je reçus des coups de téléphone de gens qui me disaient : « Il faut que je rencontre ce type. Absolument.Tu le connais, présente-le moi. » […] Les femmes me disaient : « Faut que je baise avec lui. » […] tout ça était profondément déroutant pour un type comme Kerouac, génie terriblement simple et conventionnel. Ça le déboussola tellement qu’il ne put jamais, jamais, jusqu’à la fin de ses jours, se remettre en selle. » [p. 235]
John Clellon Holmes : «Il fuyait avec horreur cette image monstrueuse de Roi des Beats. Il fuyait tout ça, désirait l’oubli — et c’est là que l’alcool entre en scène. Jack a toujours salement bu. Il buvait toujours trop. Comme nous tous, mais Jack buvait consciemment ; une habitude raisonnée, il buvait pour des raisons précises. » [p. 245] « Je ne suis pas sûr qu’on mérite la gloire quand on sait la supporter. Lui la méritait, car c’était un grand écrivain, d’après moi, mais rien dans sa personnalité ne pouvait y résister, la prendre pour ce qu’elle était, se dire : « Bon, je sais bien qu’ils ne parlent pas de moi, mais de l’idée qu’ils se font de moi. » Jack avait d’énormes zones — je répugne à le dire : d’ignorance mais c’est un fait. C’était aussi sa force. S’il avait compris comment le monde fonctionne, il ne se serait jamais brisé le cœur pour lui. » [p. 306]
Malgré son alcoolisme et ses problèmes, Kerouac publia une quinzaine de livres entre la parution de Sur la route, en 1957, et sa mort, en 1969. Les plus importants sont : les Souterrains [1958], Les Clochards Célestes [1958], Docteurs sax [1959], Le vagabond solitaire [1960], Big Sur [1962] et Anges de la désolation [1965]. Longtemps boudé par l’establishment littéraire, Kerouac a pourtant laissé une empreinte durable sur la société. Malcolm Cowley : « À mon avis, on se souviendra surtout de Jack à cause de Sur la route ; il existe une petite place dans l’histoire de la littérature américaine pour sa découverte d’une nouvelle génération underground défendant de nouvelles valeurs. Il fut évidemment un précurseur de la révolution des années 60. Mais bizarrement, alors que cette révolution a plutôt reflué, on lit toujours Sur la route. » [p. 306]
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Je découvrais cet auteur, mais je connaissais l'histoire puisque j'ai vu l'adaptation cinématographique qu'en a tiré David Lynch. Un film marquant pour un roman qui ne l'est pas moins. Barry Gifford c'est un style, une façon de raconter une histoire par petites touches, des dialogues très réalistes et bien menés. Le récit est une suite de visions, de scénètes courtes, anecdotes, souvenirs drôles, dramatiques, que se racontent les personnages qui instaurent une atmosphère désespérée, en rupture avec la société.
On est ballotés, en apnée car le danger est latent, on sent que, inéluctablement, cette cavale se terminera mal, mais on garde l'espoir, parce que Sailor et Lula forment un couple extrêmement attachant, qui décide de vivre à fond.
Ce roman est le premier d'une suite, et j'en serai pour le suivant, tombé sous le charme je suis, de cet auteur, poète du roman noir
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Je n'ai pas pu aller plus loin que 40 pages. Ce roman m'a clairement irritée ! Des dialogues inutiles, une construction hachée. Ça a mal vieilli je trouve. Bref, j'abandonne.
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Genre : des miscellanées : c’est un recueil de textes en tout genre. Il regorge de lettres, de poèmes, de chroniques, de dessins, de réflexions diverses…
De quoi parle-t-on quand on parle d’art ? (question de l’auteur dans la préface)
Première partie : cinéma
Concentrez-vous, faites comme le commentateur de cette page, écoutez ce que vous voulez pour plonger ailleurs. Prêt ! Ça fredonne dans les tympans ? Alors, allons-y gaiement.
Mr Gifford raconte, explique et partage.
Sa rencontre avec Francis Coppola en 1995, et Gus Van Sand, pour l’écriture du scénario de « Sur la route » d’après le roman de Jack Kerouac, ce qui fût au passage, une expérience frustrante puisque le projet n’a pas abouti. Néanmoins, une belle rencontre dont le titre du livre tire son origine : « la cavalerie charge », trois mots essentiels (question budget pour la naissance d’un film) selon le producteur Francis Ford Coppola.
Que dire sur « La vengeance aux deux visages » ? Seul film (western) qui a été réalisé par Marlon Brando après moult rebondissements. Finalement, le mythique interprète « du parrain » est acteur principal dans le rôle du KID en 1961. Barry Gifford voue une passion certaine pour l’homme et son talent au-delà de ses déboires. Au sujet du film, il émet quelques pointes d’objections contre la critique européenne et présente une critique riche et intelligente des autres acteurs et actrices. Comme les beautés talentueuses latino-américaines qui ont fait chavirer un bataillon de mâle fougueux. Une chronique (qu'il présente comme des notes !!!) méticuleuse sur ce film, sa construction scénaristique, ses acteurs, ses actrices, le producteur Rosenberg…
Enfin, un mot sur le lent et sinueux parcours pour arriver à la fin de « City of ghost ». Scénario qu’il a coécrit avec Matt Dillon, un jeune autodidacte déterminé. Ou comment faire un film réfléchi en cinq ans ?... Multiplication de ses collaborations et amitiés avec des piliers d’Hollywood, la période où il compose ses romans en plus de scénarios… Comme celui de « Lost Highway » coécrit avec David Lynch (1997)...
Deuxième partie : Littérature
Intitulé « Lisez et pleurez ! ».
Les influences fusionnent, faites votre choix…
Simenon : « J’ai beaucoup appris des livres de Simenon. Dommage que ç’ait été un sale type. »
Kerouac à deux reprises, qui avait une relation plutôt tendue avec Hemmingway… Il y en a plein d’autres, des Américains des années 50 ; 60. 70… Il donne envie de lire « Sale temps pour les braves » de Don Carpenter qui « … aimait remuer la merde, la sienne comme celle des autres. ». Des lettres imaginaires adressées à Marcel Proust, et l'importance d'« À la recherche du temps perdu ». Et bien d’autres, à vous de lire.
C’est succulent d’anecdotes concernant des artistes rencontrés ou qu’il aurait voulu rencontrer au fil de ses déplacements à l’étranger ou sur sa terre natale. Des petites perles qui nourrissent un homme, un noyau central inévitable, une source riche et inépuisable du scénario hollywoodien. Comme le précise la fiche du livre concoctée par la maison : « Ce recueil sage et intime n’est pas uniquement destiné aux fans de Barry Gifford ; il peut en effet se lire comme un petit manuel de culture générale ». Un vrai plaisir.
Vous serez intercepté par un œil malin. Un regard critique perspicace, qui, au passage, laisse glisser son feutre régulièrement pour dessiner des portraits minimalistes de ses héros comme Nelson Algren, Albert Camus, Jack Kerouac, William Saroyan, Muddy Waters…
Troisième partie : Poèmes
Le positionnement de mots pour une pensée, un texte poétique ou non, une rêverie, un songe… rend la lecture facile, rapide et agréable. Une construction « déstructurée » pour ce qui par exemple aurait pu être écrit pour une prose douce qui tiendrait en trois phrases linéaires est retranscrite de manière saccadée, ressemblant à un poème de visu… Un sculpteur de textes, mélancoliques et esthétiques.
Quel professionnalisme passionné étonnant, passionnant, un maître d’école, une carrière entourée de grand nom. Ce n’est pas ce qui construit l’homme évidemment, même si ça aide.
Présentez comme des NOTES, il partage son avis affûté sur « La vengeance à deux visages »… Modeste en plus. Le lecteur ne lui en aurait pas tenu rigueur si l’auteur avait signé cela en tant que « 13E Note » (oui, du même nom que la maison d’édition qui dit « c’est la musique suprême, l’inaccessible idéal qui inspire nos auteurs »). Cet ouvrage regorge d’une musicalité suprême, l’ensemble démontre le talent diversifié de l’auteur, la recherche constante de s’approprier un tempo qui passe, qui nous dépasse, où les mots s’accrochent au passage et où plus ils frôlent cet écoulement du temps, plus ils sont justes et puissants, plus, pour 3 lignes ou 3 pages, ils sont proche de la perfection… Indéniablement, une note exquise. C’est cela l’art, atteindre une cohésion inexplicable, mais calculée, impulsive ou tendre aux répercutions significatives, autant pour celui qui lit, écoute, regarde, découvre, que pour celui qui s’exprime à travers un pinceau, un micro ou un clavier… Un artiste complet, qui dévoile ses ruminements, ses réflexions à propos d’un inconnu, ou d’une personnalité renommée, un décès, une rencontre, un souvenir, une influence…
Un auteur éclectique aux influences pointues américano-françaises à la carrière et au talent étonnant, voire exemplaire. C’est un jongleur qui passe d’un style journalistique exigeant à la poésie mélancolique, du langage classique à la grande gueule rock n’ roll. C'est un songeur continu qui note le temps passé à jamais perdu, histoire de figer ce temps, nostalgie retrouvée et souvenir en construction. Un bourlingueur des mots.
Procession de caddies
Samedi
Père, fils et petit-fils vont.
Aux ravitaillements sous un ciel entre deux eaux
Charbon de bois, victuailles.
Terminent leurs courses, hachés menu, brûlés comme il faut.
Les effluves de vins, de bières et de spiritueux.
Endort la retenue.
La boustifaille gonfle les joues, la famille se bidonne.
Combien d’heures déconne-t-on ?
On s’en fou, c’est bon.
Le croissant de lune, mirage du déjeuner du lendemain.
Clame notre fin de soirée au coup de vent frais
.
Échange de bises.
Hips !
Et bonne nuit !
…
Dimanche.
8 h du matin, Crash on the levee.
Pas de sens caché.
Juste un son sacré.
Bob Dylan me blues.
J’enchaîne clopes, café.
Je suis bien, je prends mon Barry Gifford.
Ralliement d’émotions fortes.
La cavalerie charge.
Je sens que ça va être.
Une putain de journée.
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Si vous n'avez pas aimé le film, alors ce livre est pour vous.
Oubliez Lynch et ses délires psychotiques...dont le film n'est qu'une adaptation du "Sailor et Lula" de Barry Gifford.
La Louisiane, la chaleur, la moiteur, la lenteur, les corps fatigués, les routes surchauffées, les pare-chocs chromés des Belles Américaines, le cuir brûlant des très vielles Américaines, une sexualité languissante..
Une musique permanente.... et persistante.
A chaque moment tout peux basculer dans la violence... reste à savoir à quel moment cela va se produire...
Soyez les bienvenus dans ce monde "au coeur sauvage" comme le dit Lula..
Un monde dans lequel, on déracine un arbre pour cueillir le fruit....
Un monde qui ignore que différentes fleurs peuvent pousser dans le même jardin...
"Sailor et Lula" est un peu lent, cependant...
On a l'impression de pagayer sur un marais, mais en ce temps de confinement, on commence à prendre l'habitude de ramer seul...
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Francis Reeves est aux abords de la cinquantaine, quand il commence l'histoire de sa vie dans ses carnets intimes
Nous sommes à l'aube des années 80. Vous avez donc bien calculer : il est né dans les années 30, dans le sud des États-Unis, en Louisiane, à Baton Rouge...
Mais âgé de 3-4 ans il "autorise" un type de 13 ans (son idole) à "la" lui mettre dans la bouche....."tu peux avaler, ce n'est pas de l'urine."
Et puis après s'écoule toute une série d'attouchements sexuels, de jeux sexuels avec adulte et toujours avec le consentement "jouissif" du jeune Reeves....
C'est difficile de lire ces passages... Ce qui est plus répugnant n'est pas l'absence de culpabilité de ces pervers mais la tolérance de ce jeune enfant... Pour lui, cela lui semble "normal", étant donné qu'il passe son temps avec ses copains à faire ces actes entre eux....
A l'adolescence Reeves ne semble toujours pas avoir choisi entre le sexe fort ou le beau sexe... pour lui les deux se ressemblent... Et pourquoi choisir ? Il suffit de prendre ce qui se présente...
Il fait son service militaire dans la Marine...
Il se marie avec une femme, puis divorce quand ils s’aperçoivent qu'ils sont attirés par l'homosexualité...
Les années 70 furent ce qu'elles furent....
Je n'ai pas aimé ce livre, mais je ne dit pas qu'il est mauvais.
Nous sommes juste transportés dans un car Greyhound, conduit par Francis Reeves, qui nous entraine sur la route de sa vie ; commentant les paysages qui la compose, avec un regard glacé et froid....
Vous les voyez défilez devant vous.... étant un voyageur passif.
Paysage avec voyageur, mais voyageur dépaysé par cette vie vécue....
Barry Gifford note dans son entête que : "Reeves est un anachronisme"
Il faut juste que ce livre trouve ses lecteurs....
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Un court roman qui se tient absolument bien dans sa première partie aux phrases courtes incendiaires, à l'humour omniprésent, aux situations foutraques complétement assumées, aux personnages tout aussi loufoques. Et puis on avait la fin de l'histoire, pourquoi nous infliger cent pages supplémentaires ? Un tour gratuit en bus touristique option "sud désoeuvré" ? Aucun intérêt sinon à provoquer baillements et mous désaprobatrices du lecteur. Mais quelle première partie, du grand art !
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Dans les nouvelles de Barry Gifford, on croise un gamin de 10 ans qui tombe amoureux de sa baby-sitter, les souvenirs de l’auteur, qui “évoque” un 25 décembre “perdu” (le garçon a déliré 48h en proie à la fièvre), un réalisateur dont on prend la voiture en otage… Des histoires courtes, souvent très courtes (une page et demie), voire anecdotiques, l’ensemble est cosmopolite (les personnages sont des immigrés de la première ou de la deuxième génération aux Etats-Unis, ou bien vivent à Paris ou à Rome). Les styles, les ambiances, sont étonnament variés, mais unis dans une espèce d’ironie, et d’humour noir assez subtil (d’ailleurs Breton est cité dans une nouvelle). Barry Gifford c’est l’auteur de Sailor et Lula et le co-scénariste de Lost Highway, entre autres. Je passe sans doute à côté de quelque chose, mais si l’art de passer d’un personnage à l’autre est réel, et même si j’aime bien les nouvelles, je n’ai pas été particulièrement touchée par l’écriture de Gifford, par le destin de ses personnages, je me suis ennuyée je crois. Pas de quoi se relever la nuit comme on dit.
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