AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Barry Lopez (27)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Rêves arctiques

Rêves arctiques de Barry Lopez



"Ruth est arrivée une minute avant le dîner, en retard car elle s'était plongée dans un livre intitulé Rêves arctiques et n'avait pas vu le temps passer - ce livre était sans doute passionnant, car Ruth fait partie de ces gens qui arrivent toujours et partout en avance. "

Extrait de Dalva de Jim Harrison (traduit par Brice Matthieussent) :



Oui ! Rêves arctiques est aussi passionnant que Jim Harrison l'écrit dans Dalva.



ATTENTION ! Passionnant ne veut pas dire facile mais (pour reprendre un dicton bien connu à mon compte) : à lire sans difficultés, on triomphe sans gloire !



L'Arctique est un des endroits les plus difficiles au monde pour le développement de la vie... pourtant ce n'est pas un désert ! Des poissons, des mammifères, des oiseaux, des insectes, des plantes et des humains ont fait le choix d'y vivre et se sont adaptés au grand froid, chacun à leur façon, pour y survivre.



L'Arctique est un des endroits les plus mystérieux au monde de par les phénomènes qui s'y produisent... Aurores boréales, multiples soleils, mirages, six mois de jour et six mois de nuit ! Mais il n y a rien que la science ne peut expliquer.



L'Arctique est un des endroits les plus magiques au monde pendant l'été mais ce n'est qu'une illusion car l'hiver y revient toujours et avec lui ce que les "esquimaux" polaires appellent "perlerorneq", une profonde dépression où l'on ressent tout le poids de la vie.



Et L'Arctique, Barry Lopez le connaît parfaitement pour l'avoir arpenté à pieds, en traîneau, en bateau, en avion,... avec des scientifiques ou avec des "esquimaux". Il a visité des lieux de forage, des sites de minerais, ... Et il a également lu la littérature qui concerne cette terre ainsi que les récits des différents explorateurs polaires.

C'est donc à travers son expérience qu'il nous fait découvrir l'Arctique !



Rêves arctiques est découpé en 9 chapitres qui sont chacun consacrés à un sujet bien spécifique : description de L'Arctique, de la banquise et des différents types de glace, des bœufs musqués, des ours polaires, des narvals et autres baleines, des migrations des différents animaux (poissons, mammifères, oiseaux et humains) qui y vivent, du rôle de la lumière et de la glace dans les différents phénomènes qui se produisent en Arctique, des différents peuples esquimaux, des explorateurs, etc.



C'est une lecture riche en connaissances et qui ont très peu évoluées depuis 1986 en raison des difficultés d'observation...



Rêves arctiques est certe un livre complexe et qui demande de la concentration, mais c'est le constat d'un monde qui existait encore en 1986 (date de la parution originale de ce livre) et qui, de nos jours, rétréci comme peau de chagrin à cause du réchauffement climatique.





Rêves arctiques (Imagination et désir dans un paysage nordique)

de Barry Lopez

traduit par Dominique Letellier

Éditions Gallmeister (GF et Totem)
Commenter  J’apprécie          6111
Rêves arctiques



❤️ 📜𝕸𝖔𝖓 𝖗𝖊𝖘𝖘𝖊𝖓𝖙𝖎📜 ❤️

L'exploration de l'océan glacial arctique a toujours fasciné l'homme.

Barry Lopez nous en explique les ressorts et les étapes

au gré des aléas climatiques. Ce livre est une véritable encyclopédie dense et vivante.



Barry Lopez, a une écriture de virtuose pour ses ouvrages sur la nature américaine , il en connait un rayon !



Nous lecteurs nous suivons ce guide qui a le pouvoir de nous enchanter dans cette région de la Terre ,

l'Arctique :

- 38 fois la France (c'est la surface de l'Arctique en hiver, les deux tiers sont de l'océan)

- la température la plus froide -70°C

- 750 km (c'est la distance qui sépare le Pole Nord de la terre la plus proche ,l'ile du Groenland

- la banquise (plaques de glace qui soudent entre elles , elle a environ 3 mètres d'épaisseur.

-En hiver de Novembre en avril on peut marcher sur l'océan et aller à pied du Canada à la Russie.



Et bien d'autres choses que vous découvrirez en lisant ce chef d'Oeuvre.

Vous découvrirez dans ce récit de voyage , de la méditation-réflexion, essai sur la faune et la flore

Anthropologie ,géographie son histoire ; enfin tout l'essentiel que l'on doit savoir sur cette région polaire.

Bien que inhospitalier se dévoile à nous et l' on s'immerge avec un fulgurant plaisir.

"Attention l'eau est froide ,très froide!!

500 pages environ que l'on dévore comme une glace à la crème avec délectation!

Allez couvrez vous de la tenue Inuits d'un parka, d'un pantalon, de mitaines en peau de phoque ou de caribou !

vous voila paré pour un grand voyage

On en sort avec un sentiment d'admiration , mais aussi inquiet , pourquoi ?



Ce milieu fragile est bouleversé par le changement climatique, qui facilite l'exploitation

de ses ressources en rompant peu à peu son isolement.

vous comprendrez quand vous le lirez!!
Commenter  J’apprécie          342
Rêves arctiques

J’ai un peu trop attendu pour écrire mon billet, je vais donc aller à l’essentiel.



Rêves arctiques à reçu le ‘National Book Award for Nonfiction’ de 1986. Barry Lopez y raconte l’Arctique avec une écriture envoûtante qui fait oublier que l’on a une brique de 600 pages entre les mains.



C’est très complet : l’histoire de sa découverte, sa faune, sa flore, comment la vie s’adapte au fait que le Pôle Nord ne profite de la lumière du soleil que 6 mois par an, …



Je n’imaginais pas que la vie en Arctique était si riche. J’ai accompagné ma lecture avec une carte de l’Arctique (j’avais celle du National Geographic), c’est plus facile de se situer.



Un très bon moment d’évasion et de lecture.









Challenge Totem

Challenge pavés 2023

Challenge XXe siècle 2023

Challenge non fiction 2023
Commenter  J’apprécie          323
Le chant de la rivière - Reflets dans un oeil..

Barry Lopez est l’un des grands nature writers américains contemporains (1945-2020). Le recueil le chant de la rivière suivi de Reflets dans un œil de corbeau se constitue de notes et historiettes en milieu forestier et dans le désert du Sonora dans le sud-ouest des Etats-Unis.

Dans un style parfois déroutant (les pensées du narrateur se mêlent à son ressenti physique) le récit donne droit, toutefois, à de belles envolées lyriques.

L’univers poétique des paysages est retranscrit comme vu à travers le prisme d’un microscope, le moindre grain de sable de la rivière est ausculté, la faune et la flore possèdent leur langage et leur âme propre. Mais toute cette magnificence est teintée de tristesse et de drame qui nous rappelle l’âpreté de la nature.

Commenter  J’apprécie          300
Rêves arctiques

Un ouvrage des années 80 mais dont la qualité n'a pas échappé aux éditions "Gallmeister" !

Sauvé de l'oubli donc pour notre plus grand bonheur !



De l'excellent nature writing alliant descriptions de paysage, considérations philosophiques et données scientifiques, le tout présenté par une prose poétique, pétrie d'humanisme.



Une ode à la beauté, à la délicatesse, à la fragilité du monde sauvage, animal ou végétal.

Une sublimation des phénomènes naturels aussi exceptionnels que les aurores boréales ...

Mais aussi , des observations sans condescendance sur les comportements humains .



Mais après cette lecture, une amère réflexion donne le sentiment que la protection des espaces naturels reste un combat de titans, que l'homme moderne réputé intelligent ( ? ) n'a toujours pas compris où est son réel intérêt ,et donc, ces publications sont non seulement salutaires mais d'utilité publique !



Commenter  J’apprécie          280
Rêves arctiques

L’odyssée arctique.

Dans le foisonnement des écrits sur la nature dont nombre d’écrivains d’Amérique du Nord s’en sont faits une spécialité, les « Rêves arctiques » de Barry Lopez tiennent une place à part. Les éditions Gallmeister qui ont bâti en France leur catalogue sur le Nature Writing ne pouvaient pas laisser passer une telle pépite. Retraduit pour la circonstance, le livre de Barry Lopez est à nouveau accessible dans la belle collection de poche Totem de l’éditeur inspiré. Pour constituer son œuvre, Barry Lopez va sillonner le Grand Nord durant quatre années, du détroit de Béring à celui de Davis, accompagnant les scientifiques sur le terrain, approchant l’écosystème de la Terre le plus jeune avec 10 000 ans d’existence seulement. Dès l’entame, le lecteur sait qu’il tient en main un livre exceptionnel. L’approche systémique déployée par l’auteur permet de situer les animaux et les hommes dans un contexte englobant, en mouvement et en interrelation. La couleur et les proportions du bœuf musqué sont soulignés par les contours du paysage. L’ours polaire sait où il va, utilisant à bon escient les ressources du paysage. Plus encore, il emprunte des passages et des itinéraires ancestraux : « Dans certaines régions de glaces stables, les ours peuvent marcher pendant des semaines sans rencontrer la moindre discontinuité dans la pure ligne bleue de l'horizon, en ne voyant devant eux que "l'espace infini de la plaine gelée..." En arpentant leur domaine. En naviguant. En voyageant avec un but ». Les baleines boréales attendent sereinement que le pack se fissure, s’ouvre et leur livre le passage, certaines sur le dos, d’autres le menton reposant sur la glace. Les oiseaux, les narvals, les morses, les renards polaires, tout le bestiaire arctique prend une envergure étonnante sous la plume de Barry Lopez. Les Esquimaux deviennent des hommes extraordinaires, pratiques, malicieux, inventifs, adaptés. L’évocation de leur histoire et de leur vie métamorphose des lieux désolés en espaces vivants. Les traces de leur passage ennoblissent des contrées immenses et vides. Dépassant l’aspect utilitaire d’un harpon, le chasseur en fait un bel objet. Le lecteur pousse souvent des exclamations admiratives silencieuses tant le riche contenu et la portée universelle du livre bouleversent. Les 622 pages défilent et on se prend à parcourir l’index, à dépouiller la bibliographie (un seul livre français cité, celui du monument qu’est Jean Malaurie, « Les derniers rois de Thulé ») afin que le plaisir perdure. La cartographie donne à percevoir un continent qui se joue des frontières russes et américaines notamment. On apprend des mirages, des aurores boréales : « Beaucoup de gens prétendent que les aurores boréales émettent un son, un bruissement étouffé ou un bruit fait de sifflements et de claquements... », de la cartographie, de l’exploration arctique avec la recherche obstinée du passage du Nord-Ouest. En tissant aux relevés scientifiques des pratiques personnelles, en donnant du sens aux données, aux observations de terrain, l’auteur transforme son odyssée arctique en voyage initiatique avec le paysage comme une étoffe sans couture qu’on endosse, sensoriellement et intellectuellement relié au monde. Tout ce que dira l’auteur du paysage ne relèvera pas de la métaphysique ou de l’ésotérisme. « La nature est comme la poésie : sa cohérence est inexplicable, sa signification transcendante et elle a le pouvoir d'exalter la valeur de la vie humaine ». Barry Lopez va quasiment tomber dans un état cataleptique après les péripéties en Mer Arctique quand son bateau est pris par le pack de glace. Sublime et effrayant, le paysage décuple la volupté d’être vivant.
Commenter  J’apprécie          125
Rêves arctiques

Le titre est trompeur, dans ce sens qu’il n’est nullement question ici de bons sentiments et d’images de rêve. Certes, l’auteur, a le don, à chaque chapitre de parler des merveilles de ces contrées extrêmes.

Mais ne nous méprenons pas, le merveilleux côtoie de très près le moins reluisant, et l’aspect le plus vil de l’être humain.

De l’Alaska au Groenland, l’auteur a participé à de nombreuses expéditions au-delà du cercle polaire pour comprendre, observer, expliquer et transmettre.

Le propos se veut exhaustif, et encyclopédique ; parfois ardu, et pointu. On apprendra que le mouvement du soleil ne ressemble pas à ce que l’on perçoit sous d’autres latitudes.

Les capacités d’adaptation de l’ours polaire, du narval, du bœuf musqué, tout comme la sophistication des migrations d’oiseaux n’auront plus de secret.

Que dire de l’homme, et de sa capacité destructrice ? Cela étant, cela n’est pas l’apanage de l’homme moderne ; les peuples premiers n’étaient pas des anges non plus.

L’exploration de l’océan glacial arctique a toujours fasciné l’homme. Barry Lopes nous en explique les ressorts et les étapes au gré des aléas climatiques. Quand on regarde de près une carte des lieux, on comprend facilement les difficultés des navigateurs qui ont tenté l’aventure. Du Groenland à l’Alaska, entre baies, détroits et passages, l’exploration s’est souvent faite dans la douleur et les drames.

Barry Lopez, insiste tout au long de son ouvrage sur l’équilibre précaire du grand nord, dont le sort déterminera celui du restant de la planète. Quelques degrés de plus, une saison de neige un peu trop tardive ou de moindre qualité et tout cet équilibre s’en trouve bousculé, pour l’homme comme pour la faune.

Barry Lopez s’interroge beaucoup sur ce qui a poussé l’homme à exploré le grand nord, et surtout à en exploiter les ressources avec tant d’avidité.



Les éditions Gallmeister ont été bien inspirées de traduire cet ouvrage paru pour la première fois en 1986 ; ce dernier s’inscrit parfaitement dans sa collection Nature writting. Bien écrit, abondamment documenté, en particulier au niveau cartographique, l’ouvrage n’en demeure pas moins exigeant, et demande beaucoup d’attention pour en apprécier le contenu. On en sort enrichi, nourri, émerveillé, mais aussi inquiet parfois révolté.




Lien : https://leblogdemimipinson.b..
Commenter  J’apprécie          100
Le chant de la rivière - Reflets dans un oeil..





Un recueil en deux parties : la première autour de la rivière, la seconde aux confins d’un désert.



Un recueil pour se reculer du monde, découvrir d’autres paysages, écouter d’autres voix. Dans ces pages, on ne reçoit que la visite d’oiseaux, de cerfs, d’ours, de serpents, des saumons étincelants et autres animaux sauvages. On ne rencontre que très peu d’humains, encore ont-ils un lien avec l’imaginaire, un fil qui les relient à un monde plus subtil ou à l’opposé, ne sont-ils évoqués que pour leurs actes qui malmènent la nature.



La rivière comme comme une sylphide tout en gouttelettes, tout en ondulations. Elle étreint le héron, l’hôte de ses bords, oiseau immobile attentif et parfois cruel. Le génie des lieux.

La rivière comme une finalité, un exutoire : celle qui engloutit les chagrins, les peurs. Celle à qui on confie les tourments, certain si elle les recèle, qu’ils disparaîtront.

La rivière qui vit, parle, meurt, donne la vie et la reprend.



Le désert, lieu de recueillement, accompagne l'examen de soi. Il abrite des peuples aux habitudes de vie inconnues, incompréhensibles, des animaux qui se questionnent sur la bonne volonté des hommes. Il ralentit le temps, laisse celui qui ose y pénétrer écouter le sable qui glisse dans le sablier. Il reprend le territoire qu’on lui a dérobé, grignote ruines et vestiges de ce qui est abandonné comme on effacerait des souvenirs qu’on préfère oublier.





Des récits très courts, dans une langue poétique, imagée, créant sensations et jeux de lumière. C’est très beau à lire, parfois un peu hermétique, la clef d’entrée dans ces mondes demande beaucoup de patience et une nécessité de relecture.



Un très beau livre qui ne se raconte pas, qui doit être découvert doucement pour en appréhender toute la sensibilité.

Un recueil presque pour méditer sur ce monde qu’on habite, qu‘on effleure sans réellement le connaître, sans réellement le comprendre.

Un recueil pour permettre comme le dit un des personnages de "savoir ce qu’il faut faire pour éviter l’inutile".



(Mai 2021)
Commenter  J’apprécie          90
À ciel ouvert

En plein air.

La destruction volontaire ou accidentelle des sites archéologiques exposés à tous vents situés dans les déserts californiens représentait déjà en 1980 plus du tiers des vestiges préhistoriques. Quand Barry Lopez accède au cheval géant tracé au sol avec des petites pierres noires par un artiste indien il y a trois mille ans, il espère qu'aucune jeep ne viendra le laminer, que nul visiteur ne le vandalisera.

Dans le second récit, la migration des oies blanches de l'Arctique dans une des dernières zones humides de la Californie entraîne l'auteur, d'observations en interrogations quant au devenir de l'avifaune sauvage. Les chasseurs américains tuent les oiseaux sans discernement, sans connaissance et sans conscience de la portée de leurs actes.

Le troisième texte est à propos d'une randonnée aquatique dans le grand canyon du Colorado où "la nature a des pouvoirs de guérison" : "Tandis que le bateau dérive lentement, vous effleurez du bout des doigts une roche vieille de 1,9 milliard d'années".

Les récits de Barry Lopez se suivent et ne se ressemblent pas hormis le fil conducteur qui les unit tous à savoir comment faire corps avec l’environnement et le paysage, en comprendre les relations, y trouver sa juste place. L'évocation poignante d'amis disparus est révélatrice à ce sujet, des hommes simples et bons, nantis d'une vie riche et d'un savoir exceptionnel, sans esbroufe, généreux, lucides et subtils qui : "aux yeux de très nombreuses personnes... passeraient pour des ratés" car sans autre richesse accumulée que celle de connaissances puisées dans la nature. Entre les rodéos de taureaux, l'échouage des cachalots, l'étude des phoques, la culture des Anasazis ou les splendides volières de Tenochtitlàn, la Byzance aztèque, le même émerveillement mêlé d'effroi subjugue à la lecture. On est atterré puis soufflé par la petitesse et la grandeur des hommes.
Commenter  J’apprécie          80
À ciel ouvert

A l'instar d'une Kathleen Dean Moore (Petit traité de philosophie naturelle) ou d'un Wallace Stegner (Lettres pour le monde sauvage), Barry Lopez nous livre dans "A ciel ouvert" les récits de ses expéditions naturalistes et son regard sur les rapports entre animaux et humains.

Disparu il y a deux ans, il nous lègue un héritage littéraire fidèle à ses principes de protection des écosystèmes pour assurer la pérennité de la vie sur Terre.

En proposant une couverture vive et colorée avec du vert à foison, les Editions Gallmeister nous incitent à tourner les pages de ce livre sentant bon le terroir américain. Alors, laissons-nous tenter de découvrir la prose de Barry Lopez.

Après "Rêves arctiques", ces quatorze histoires nous permettent de comprendre pourquoi il a reçu de nombreuses distinctions littéraires et scientifiques.
Commenter  J’apprécie          60
Le chant de la rivière - Reflets dans un oeil..

Reflets dans un œil d’or de héron.

Le journal naturaliste et poétique de Barry Holstun Lopez (écrivain américain né le 6 janvier 1945) paraît déconcertant dès l’introduction puis on apprend au fil des phrases à voir le monde autrement, à travers l’œil d’un héron et l’esprit habité d’un homme attentif au moindre miroitement ou au plus ténu mouvement d’air : « Ton odeur est pareil à celle du gingembre sauvage. Quant tu lèves ta patte au-dessus de la rivière, l’eau ne s’en écoule pas et ne va donc pas troubler la surface transparente de l’eau des bas-fonds. » Les récits se juxtaposent sans autre lien que le cordon ombilical de la rivière pour la première partie du recueil intitulée River notes, The dance of herons (1976) et traduite par Le chant de la rivière, La danse des hérons. Elles n’ont pas toutes la même force, un impact similaire mais la vision de l’auteur est parfois fulgurante et neuve : « Pensez seulement aux odeurs dont un seul filament peut être pincé entre des rochers […] grâce à ces extensions invisibles, le caractère de la rivière est révélé, une piste nous conduit vers ce qui n’a jamais été examiné ». Dans un autre récit, on peut lire aussi : « Enfoncer ses mains dans la rivière, c’est sentir les cordes qui lient la terre en un seul tenant. » La seconde partie du livre, Desert notes, Reflections in the eye of a raven (1979), Reflets dans un œil de corbeau, Notes sur le désert, est introduite par un court extrait du Voyage d’un naturaliste autour du monde (1836) de Charles Darwin. Puis les feuilles du journal de Barry Lopez se stratifient en fines couches sédimentaires à mesure que les perceptions et les sensations s’accumulent et refluent aux rythmes insondables de la nature. Le lecteur pourrait facilement perdre pied dans cet imbroglio de vision qu’un monde merveilleux enfante sans relâche loin des hommes mais l’auteur revient sans cesse à la réalité. Les choses racontent toutes une histoire comme ce tapis navajo qui passe de main en main et recèle encore dans ses fibres « des odeurs enterrées » et « des bruits qui résonnent ». Il est difficile de conseiller ce livre déroutant de prime abord mais tressé en filigrane de filaments précieux. J’avais noté dans une revue spécialisée les dix livres de voyage choisis par Michel Le Bris, mauvais écrivain au goût sûr. Y figurait à côté du Léopard des neiges de Peter Matthiessen, du Temps des offrandes de Patrick Leigh Fermor, de Pèlerinage à Tinker Creek d’Annie Dillard, ce Chant de la rivière avec le commentaire : « Ce texte du plus secret des naturalistes américains a été un choc dans le monde des lettres outre-Atlantique. »
Commenter  J’apprécie          64
Rêves arctiques

National Book Award 1986



C'est une immersion totale et magnifique dans la région arctique, ses animaux, ses hommes, ses conditions climatiques ; ensemble d'histoires, de réflexions, de ressentis, le tout raconté par un homme intelligent, sensible et fou amoureux de la Nature.



Tout commence par une description étonnement prenante des boeufs musqués, de leurs comportements et de leurs arrangements sociaux ; chaque chapitre correspond à un lieu et à un animal ; mais l'auteur ne se contente pas de décrire l'animal et son comportement ; il y a aussi le comportement de l'Homme (souvent Esquimau) en sa présence et la part qu'il prend dans les légendes.

La partie sur l'ours polaire est remarquable : la beauté de cet animal perspicace et habile, mais aussi la féroce bêtise de certains hommes, évidemment, et ce, depuis longtemps. Des problèmes dus au développement industriel gènent la répartition des phoques et donc de leurs prédateurs, les ours blancs.

L'auteur se questionne - nous questionne - également par rapport à l'activité scientifique de recherche : il est gêné de ce qu' on peut s'autoriser au nom de la Science : poursuite, capture, marquage, suivi, comme une intolérable immiscion dans l'intimité des animaux.



Dans le chapitre sur les migrations, Barry Lopez après avoir parlé des oiseaux, des baleines et des caribous, en vient naturellement aux migrations humaines et en particulier au peuplement de l'Amérique du Nord depuis au moins 14 000 ans ; des cartes, des données archéologiques et ethnographiques viennent en appui de ses explications suivantes et passionnantes sur les différentes cultures esquimaudes. Par exemple, parmi de nombreuses tribus, il y avait celle des Sadlermiuts de l'île Southampton au nord de la Baie d'Hudson ; ils sont tous mort d'une épidémie apportée par un baleinier écossais. " Les Saldermiuts offraient une façon de comprendre l'île Southampton. Quand on réflechit à la dureté du pays et que l'on voit avec quel succès ils s'y étaient adaptés, on est forcé de conclure qu'avec leur disparition nous avons perdu une partie de la philosophie de la vie. Nous ne pouvons plus prendre un de leurs objets, demander "Pourquoi avez-vous fait ceci ?", ni "à quoi est-ce que ça sert ?" et espérer recueillir une réponse... une réponse qui ouvrirait les profondeurs intemporelles de l'esprit humain, qui effacerait des siècles de distance et transcenderait l'objet quotidien."



Ce sont des impressions éprouvées et des réflexions faites sur place que nous livre l'auteur : dans une langue parfaite pour exprimer les sons, les couleurs, la beauté des mouvements, les ressentis humains et décrire les paysages magnifiques ou monotones.

Extrait p 182 : " Pourtant, pendant quelques jours, à la périphérie des troupeaux d'oies, je n'eus pas l'impression d'être un intrus. Je ressentais le calme que les oiseaux apportent aux hommes ; apaisé, je percevais ici les contours des plus anciens mystères de la nature : l'étendue de l'espace, la lumière qui tombe des cieux, le passé coulant dans le présent comme une eau et s'y accumulant."



De la terreur ressenti par les marins des baleiniers quand les blocs se resserraient sur leur bateau en chêne au XIXème siècle au moment de la prise des glaces, à la difficulté qu'a le peintre à représenter l'air de l'Arctique, de la magnificence des aurores boréales au perlerorneq (dépression) des esquimaux pendant le trop long hiver, des motivations des explorateurs de l'Arctique à l'idée que la langue hopi (une des nombreuses langues amérindiennes) "ne fait pas référence au temps comme entité distincte de l'espace", Barry Lopez nous parle de ses multiples expériences et nous entraîne avec lui dans une région riche, souvent bouleversante mais très dure pour les Hommes.



Ce n'est absolument pas un livre triste se désolant sur la disparition de telle espèce ou de tel peuple ; au contraire, s'il nous informe et nous prévient de ce qui pourrait bien arriver, il nous rappelle de façon enthousiasmante à quel point la Terre et la Vie sur la Terre sont belles...



Science, Poésie, Humanité sont les trois mots clés de ce livre absolument superbe !



"La nature est comme la poésie : sa cohérence est inexplicable, sa signification transcendante, et elle a le pouvoir d'exalter la valeur de la vie humaine." (p 305)



Commenter  J’apprécie          64
Rêves arctiques

Comment parler de tant de beauté décrite dans ces pages sans risquer de l'amoindrir ? Et en même temps c'est douloureux de réaliser à quel point l'humanité s'évertue à détruire tout ça par cupidité. Dès le prologue j'ai oscillé entre émerveillement et chagrin mais aussi écoeurement face à l'arrogance des blancs.



Par moments un peu trop didactique à mon goût, voire encyclopédique, ça demande beaucoup de concentration pour que l'esprit ne s'échappe pas. de la course du soleil en arctique à la description très détaillée des forages pétroliers et stations de pompage, en passant par le boeuf musqué, l'ours polaire ce seigneur du grand nord, le narval, la migration des bernaches cravant, des filigules milouinants, des tournepierres à collier, des océanites cul-blanc, des saumons chinook, des baleines du Groenland, des veaux marins, des phoques barbus mais aussi des humains entre 23 000 et 25 000 ans, des icebergs et des naufrages de baleiniers, des couleurs et des luminaristes, ces peintres de l'Arctique, des faux soleils, des aurores boréales avec parfois des envolées métaphysiques, de la sociologie esquimaude et la psychologie humaine, de l'histoire de l'exploration et des hommes qui les menèrent souvent dans des souffrances abominables… C'est passionnant mais parfois un peu long. Et puis c'est triste de voir à quel point l'humanité s'autorise à tuer, saccager, détruire, parfois juste pour le plaisir d'être stupide et cruel. D'ailleurs j'ai appris très récemment que les japonais, qui avaient arrêté la chasse à la baleine, sont en train de construire un navire-usine, en 2023, pour remettre ça, alors que la consommation de viande de baleine a diminué de 99%. Apprend-on jamais de ses erreurs ?



On découvre néanmoins que l'anéantissement des espèces n'est pas quelque chose de nouveau, ce n'est pas le fait que de l'homme blanc. Ça existe depuis très longtemps. C'est juste tristement humain.



Pourtant l'Arctique recèle tant de merveilles ! Qu'un endroit aussi inhospitalier soit peuplé d'êtres qui ont su s'adapter à ce climat d'une rudesse absolue est en soi totalement magique.



À chaque chapitre l'auteur commence par des descriptions sublimes qui donnent l'impression qu'il nous parle d'un Éden glacé inhospitalier, où les différentes espèces vivent dans un écosystème parfait, puis il nous raconte les comportements humains et le rêve s'arrête là car nous vandalisons tout ! À croire que nous n'aimons pas le beau, ni la vie.



605 pages d'extrême beauté puis d'ignominies, à se demander de quel droit une poignée d'hommes commet tant de destructions et de meurtres gratuits. Car oui, il y a pire que la cupidité. Trop souvent de nombreux animaux sont tués pour rien, juste pour le plaisir de faire un carton.



C'est passionnant de découvrir que cet endroit du monde, gelé la majeure partie de l'année, est foisonnant de vie mais malheureusement terriblement convoité et pillé depuis trop longtemps.



D'un bout à l'autre de ces descriptions exhaustives de l'Arctique dans son entièreté, j'ai eu l'impression de voyager à travers l'origine du monde. Pourtant, la vie arctique est très jeune, à peine 10 000 ans. Mais quelle tristesse de penser qu'elle est en train de mourir et que nous en sommes responsables, et plus aberrant encore, que nous allons à notre propre perte et que nous le savons.



Lecture longue mais captivante, mais longue… et qui demande une bonne dose d'opiniâtreté.
Lien : https://mechantdobby.over-bl..
Commenter  J’apprécie          51
Réécrire l'Amérique

La Terre-Mère.

Barry Holstun Lopez (1945-2020), écrivain américain majeur dont l'oeuvre est constamment irriguée par la nature et la place de l'homme en son sein voit trois de ses textes, parus indépendamment, judicieusement assemblés dans la « Petite bibliothèque d'écologie populaire » des éditions Wildproject. La temporalité pourrait articuler ces trois écrits. le premier texte, « La redécouverte de l'Amérique » (1990) est une brève étude historique du passé américain, le second, « Une littérature des lieux » (1996), un essai sur l'art d'habiter la terre au présent, le troisième, « le peuple de la Tortue » (2007), un dialogue avec Oren Lyons, passeur amérindien charismatique, pour entrevoir l'avenir quant à la gouvernance du monde. Les textes politiques documentés de Barry Lopez ouvrent l'esprit par la clarté du style et l'évidence du propos. « Rediscovery of North America » est une contribution à une conférence. Il imagine l'arrivée de « Cristoforo Colombo - littéralement Christophe Colombe », le mal nommé, en 1492, aux Bahamas. Son regard prédateur préfigure les incursions barbares qui vont suivre. La richesse du Nouveau Monde est un dû pour les colonisateurs. L'avidité est sans borne. le saccage des hommes et des lieux perdure aujourd'hui : « Nous avons ainsi perdu des communautés entières de gens, de plantes et d'animaux,…, des langues, des épistémologies, des livres, des cérémonies, des systèmes logiques et métaphysiques – un carnage long et hideux ». L'auteur imagine une autre approche fondatrice, un regard bienveillant et ouvert, cherchant à connaître les lieux et leurs habitants afin d'établir une « intimité ». En se recentrant en un lieu donné, l'homme se trouve. « A Literature of Place » (1996) est, de même, une collaboration à une conférence. Comment la géographie façonne-t-elle l'esprit ? Approche personnelle, connaissance historique et relation éthique rendent le lieu accueillant dans une relation réciproque. L'esprit de compagnonnage supplante celui de propriété. La terre s'exprime alors par les mots et la parole de l'écrivain. « The Leadership Imperative : an interview with Oren Lyons » (2007) est un entretien éclairant avec le leader amérindien qui propose comme une synthèse des deux précédents textes, une autre perspective du monde opposée à la propriété et à la cupidité, le peuple devant prendre collectivement en main son destin et assumer ses responsabilités, toute une sagesse amérindienne jadis appliquée et bafouée depuis. L'essai de Barry Lopez pose les jalons essentiels d'une prise de conscience écologique et d'une gouvernance salutaire.
Commenter  J’apprécie          50
Rêves arctiques

Un exceptionnel tour d’horizon, intense et stimulant, de l’écologie de l’Arctique et de son histoire.



Sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2016/04/13/note-de-lecture-reves-arctiques-barry-lopez/
Lien : http://charybde2.wordpress.c..
Commenter  J’apprécie          50
Of Wolves and Men

Presque 5 mois ! Il m'en a fallu du temps pour finir ce livre au titre bien accrocheur, « Of Wolves and Men ». Bon, une petite pause de 3 mois au milieu, priorités priorités (plus jamais, d'ailleurs : toujours d'accorder du temps de lecture quotidien pour sa santé mentale et son repos psychologique, pour se dépayser des priorités et des responsabilités).

Je n'aurais pas dû mettre autant de temps puisque ce tome, aussi long et d 'apparence complexe et technique soit-il, se lit très facilement. Je me souviens (c'était il y a 4 mois après tout) avoir dévoré la première partie sur le loup en tant que créature sociale, avec tous ces détails scientifiques sur ses comportements et ses hurlements. Et la deuxième partie aussi, à la rencontre du loup à travers la culture des indiens américains, donc à mille lieues de notre culture et des quelques clichés présentés par les médias.

La troisième partie était une horreur. Vraiment. Le véritable acharnement contre le loup dans la conquête de l'ouest américain puis dans la conversion des grands espaces en grandes exploitations de bétail... Des faits aussi intéressants du point de vue politique, qu'horrifiant, du point de vue massacre aveugle, sans scrupules et sans raison.

Et enfin, un petit retour au Moyen-Âge, en Europe et à travers les légendes pré-datant l'image du loup héritée du Moyen-Âge...

Un bon recueil sur le loup, écrit par un auteur naturaliste originaire d'un continent qu'il partage avec son sujet d'écriture. Tout est très digeste et je m'encourage à lire un titre phare de Barry Lopez...
Commenter  J’apprécie          50
Rêves arctiques

« Ce n'est pas tant que le pays soit simplement beau, il est puissant. Sa puissance découle de la tension entre sa beauté évidente et son pouvoir de tuer, de prendre des vies. »



Ainsi Barry Lopez raconte l'Arctique, la limite si fine entre la vie et la mort qui est une partie intégrante de cet écosystème bien plus vivant que ce que ne laisseraient entendre nos préjugés. Avec l'auteur, nous allons suivre la migration des oies sauvages et des caribous, lever une partie du voile de mystère qui plane autour des narvals, découvrir la culture des différents peuples Esquimaux, comprendre la science des aurores boréales, naviguer auprès des explorateurs occidentaux et leurs récits de mort et de gloire. Pépite poétique et scientifique, Rêves arctiques s'attache à la description - biologique, historique, politique, culturelle, spirituelle... - d'un lieu empli de vie, de lumière et de silence, son rythme unique, ses déséquilibres soudains. On y apprend entre autres choses que l'ours polaire a souvent trop chaud en hiver et rejette la chaleur par la plante de ses pattes. Que la période la plus dangereuse pour beaucoup de ces animaux est l'automne, lorsque la glace de la banquise n'est pas encore formée pour pouvoir y chasser. Que les plaques de glace de l'océan arctique permettent de protéger bien des poissons des froids extrêmes. On y découvre aussi l'influence de l'homme, avec un regard très critique sur les conséquences environnementales et culturelles de l'attitude occidentale face à cette région (gageons que, depuis les années 80, cela n'a pas dû évoluer en bien).



Rêves arctiques est exigeant, mais passionnant. Barry Lopez partage dans cet ouvrage sa grande connaissance de l'Arctique avec beaucoup d'humilité, y dévoile de nombreux mystères, et y insuffle beaucoup de magie.
Commenter  J’apprécie          40
Réécrire l'Amérique

Une bien belle lecture que ce petit ouvrage publié par l’excellente maison d’édition WildProject.

En moins de 100 pages, Barry Lopez, nature Twitter américain nous partage sa réflexion sur notre rapport à la nature, au territoire, aux autres vivants et ce que colonialisme et capitalisme ont fait aux cultures indigènes. Sa réflexion personnelle est suivi d’un entretien avec OrennLyons, leader amérindien, du clan de la Tortue des nations Sénécas de la Confédération Iroquoise. Cette réflexion est une véritable claque qui devrait nous réveiller et nous amener à reconsidérer de toute urgence notre (celle des occidentaux) manière de vivre sur les territoires qu’on occupe.

Une lecture forte, qui invite à réfléchir et agir pour changer ce qui doit être changé.

Commenter  J’apprécie          30
Réécrire l'Amérique

D’un grand voyageur arctique, géographe humain et résistant infatigable, un récit, un manifeste et un entretien pour tenter d’enfin habiter notre monde américanisé sans le détruire.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/11/03/note-de-lecture-reecrire-lamerique-vers-une-litterature-des-lieux-barry-lopez/



Du grand Barry Lopez, qui s’est éteint en décembre 2020, on connaît surtout en France ses magnifiques « Rêves arctiques », qui lui valurent le National Book Award for Nonfiction en 1986, formidable et rare analyse authentiquement systémique de l’impact à long terme des changements climatiques sur les écosystèmes, à partir d’une étude minutieuse de l’évolution du boeuf musqué, de l’ours blanc et du narval, et on néglige trop souvent ses superbes nouvelles épistolaires et révolutionnaires, marques d’un terrible crépuscule démocratique, réunies dans le recueil « Résistance ».



« Réécrire l’Amérique – Vers une littérature des lieux », mince ouvrage publié en 2020 chez Wildproject dans leur précieuse collection Petite bibliothèque d’écologie populaire, regroupe trois textes.



« La redécouverte de l’Amérique », conférence de 1990 publiée en 1992, traduite ici par Baptiste Lanaspeze, revisite de manière particulièrement incisive le malheur impérialiste et colonial décomplexé qui s’abattit sur les Amériques au tournant du XVIème siècle, jouant avec les concepts et les imaginations mises en scène par exemple chez William T. Vollmann (même si nous ne disposons toujours aujourd’hui en français que de deux de ses « Sept Rêves », « La tunique de glace » et « Les fusils »), chez le Kim Stanley Robinson – en un creux diabolique – de « Chroniques des années noires », ou chez les Wu Ming de « Manituana », et avec les analyses plus académiques que l’on trouverait chez le Tzvetan Todorov de « La conquête de l’Amérique » ou du Nathan Wachtel de « La vision des vaincus ». Vibrante d’intelligence, cette conférence aiguisée pèse avec brio l’ombre portée de l’avidité impérialiste réputée passée sur la crise écologique contemporaine.



« Une littérature des lieux », traduit par Gayané Zavatto, également issu d’une conférence, a été publié en revue en 1996, offre une belle mise en perspective du nature writing, et de ce que sa (relative) popularité contemporaine peut bien vouloir signifier. C’est peut-être ici que Barry Lopez, tout en s’appuyant sur une longue tradition d’exploration littéraire écologique et spirituelle qu’il maîtrise à la perfection, explicite de la manière la plus claire sa conception d’une géographie humaine et artistique qui sache puiser dans le dedans pour agir au dehors, qui sache lire et écouter avant de vouloir décider et imposer. Composant aussi bien avec des forces rebelles comparables à celles d’Edward Abbey et de son « Gang de la clef à molette » qu’avec des visées intégratives, systémiques et poétiques à l’image de celles du Gary Snyder du « Sens des lieux », Barry Lopez élabore sous nos yeux un usage de la géographie et du voyage, mobile et immobile, qui entre en résonance aussi bien avec l’approche des lieux d’une Hélène Gaudy (on pensera sûrement à son si beau « Grands lieux« ) qu’avec les définitions diplomatiques expérimentales d’un autre lien au vivant agencées par un Baptiste Morizot.



Le troisième et dernier texte, après le récit et le manifeste qui le précèdent, est un entretien de 2007, traduit par Marin Schaffner, entre l’auteur et Oren Lyons, leader amérindien et défenseur des droits indigènes, sage et juriste issu du clan de la Tortue des nations sénécas de la Confédération iroquoise, entretien qui puise dans une autre histoire, précisément, alternative et jadis vaincue, de quoi contrebattre et fragiliser les visions du monde qui prétendent aujourd’hui plus que jamais à l’hégémonie, de toute la puissance de leurs incantations « There Is No Alternative », pour continuer à ne se soucier que de confort matériel, de profit et de domination. Et c’est ainsi qu’au confluent de la littérature et de la philosophie s’élaborent de salutaires mécanismes de défense et de reconquête vitale.
Lien : https://charybde2.wordpress...
Commenter  J’apprécie          30
Le chant de la rivière

Barry Lopez, né à New-York en 1945, est une institution à lui tout seul. Ecrivain respecté et admiré, photographe nature, Barry Lopez est considéré comme l'un des meilleurs représentants du Nature Writing. Je l'ai connu avec le Chant de la rivière, puis j'avais acheté Rêves actiques et un ouvrage sur les loups qui me tenait à coeur, presque une bible pour les amateurs, Of wolves and men - pas (encore ?) traduit en français.



Le livre que je présente ici m'avait attirée pour trois raisons : la couverture, l'éditeur (je pioche souvent dans leur catalogue) et le résumé.



Malgré tout ses atouts, il m'a été extrêmement difficile d'entrer dans Le chant de la rivière. Fragmenté en courtes histoires, ce recueil se compose en fait de deux parties disticntes, The river notes et The desert notes. Il avait 24 ans lorsqu'il rédigea The desert notes et au moment de sa publication en 1975 il travaillait sur les River notes. Un ouvrage de jeunesse donc. Il m'a fallu pour ma part deux lectures, à 7 ans d'intervalle, pour apprécier pleinement ce livre.

Pourquoi cette réticence ? Peut-être parce qu'il me semblait, lors de ma première lecture, que ces textes disparates et sans liens dénotaient une vision chaotique des rapports que l'homme entretient avec la nature. Certains textes m'ont plu immédiatement, comme Le périmètre, le corbeau, le crépuscule. Ils sont empreints de poésie, la relation à la nature est évidente, lumineuse. Barry Lopez me touche davantage dès qu'il parle de paysages, d'animaux. Il se met à la place du héron, devient saumon.



Certains de ces récits sont contés à la première personne, comme celui de l'homme malade. D'autres se focalisent sur un individu, Barry Lopez nous donne alors son nom, nous dévoile un pan de sa vie, dans d'autres textes, le personnage est anonyme. Plus loin, il s'adresse directement... à qui ? au lecteur ? La plupart m'ont déroutée, m'ont laissée perplexe. Je sens confusément ce qu'il cherche à expliquer, à démontrer, mais sans que la forme, le style ne parvienne à m'émouvoir réellement.



Un recueil qu'il faut donc apprivoiser pour mieux en goûter la singulière beauté. Encore que, je ne sais pas à quel point les traductions françaises lui rendent justice. Curieusement, Le chant de la rivière a bénéficié de deux traducteurs... Quoi qu'il en soit, c'est l'un des grands noms du NW qu'il faut découvrir, aux lecteurs de se faire leur propre opinion...
Lien : http://lectures-au-coin-du-f..
Commenter  J’apprécie          30




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Barry Lopez (106)Voir plus

Quiz Voir plus

Polars en titres

Les Hommes qui n'aimaient pas..., de Stieg Larsson

leur travail
les femmes
la bière
les enfants

10 questions
138 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}