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Citations de Baudouin de Bodinat (92)


J'ai pensé aussi qu'on ne s'accommode de ce que ce présent factice et empoisonné nous offre, qu'à la condition d'oublier les agréments auxquels nous goûtions le plus naturellement par le passé et que cette époque n'autorise plus; et de ne pas songer que ceux dont nous trouvons encore à jouir, il faudra semblablement en perdre le souvenir, en même temps que l'occasion; qu'à défaut d'oubli on en vient à devoir s'en fabriquer au moyen d'ingrédients de plus en plus pauvres et quelconques, des fins de série, des objets d'usage sauvés de bric-à-brac, tout imprégnés de temps humain et qui nous attristent; de tout ce qui peut se dénicher en fait de rebuts, de derniers exemplaires, de pièces détachées, de vieilles cartes postales; se réfugiant dans les détails de rues en instance, ciels de traîne, matins d'automne; de tout ce qui fut.


On nous dit, les fanatiques de l'aliénation nous disent, que c'est ainsi, tout change et l'on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, etc. On voit pourtant que ce n'est plus selon le cours des générations; que nous le subissons abasourdis comme une guerre totale qui fait passer sur nous ses voies express, qui nous tient en haleine de toutes ses dévastations.

Aussi ils ironisent, comme d'hallucinations, si l'on évoque le goût des choses autrefois: ce ne serait qu'un effet, bien compréhensible, du vieillissement qui nimberait ainsi notre jeunesse enfuie. Mais il y a là un problème de simple logique: admettons que le regret exagère la saveur des tomates d'alors, encore fallait-il qu'elles en aient quelque peu; qui se souviendra plus tard, s'il reste des habitants, de celles d'aujourd'hui ?

Prétendre à trouver des moments heureux, dans la condition où nous sommes, c'est s'abuser; c'est même se tromper, et c'est de toute façon ne pas les trouver. Chesterton, qui avait sous les yeux la machine du progrès en perfectionnement, en fut perspicace: «Il est vrai que le bonheur très vif ne se produit guère qu'en certains moments passagers, mais il n'est pas vrai que nous devions considérer ces moments comme passagers ou que nous devions en jouir simplement pour eux-mêmes. Agir ainsi, c'est rendre le bonheur rationnel et c'est, par conséquent, le détruire. »

Tel un Midas aux mille doigts la rationalité marchande afflige tout ce qu'elle touche et rien ne lui échappe. Ce qu'elle n'a pas supprimé et que l'on croit intact, c'est à la manière d'un habile taxidermiste; et le durcissement des rayons solaires est aussi pour les hommes qui vivraient toujours enfouis dans la forêt primitive, ils voient dans le ciel les sillages que laissent les vols intercontinentaux et la rumeur des tronçonneuses parvient à leurs oreilles.


J'en suis venu à cette conclusion qu'il faut renoncer : on s'enfonce sinon dans l'illusion qu'il demeurerait, en dépit de ce monde-ci, des joies simples et ingénues, et pourquoi pas des joies de centre commercial; c'est vouloir être heureux à tout prix, s'en persuader, s'accuser de ne pas l'être. C'est, par conséquent, ne rien comprendre à l'inquiétude, au chagrin, à la nervosité stérile qui partout nous poursuivent; c'est jouir de représentations, c'est se condamner à l'erreur d'être dans ces moments le spectateur satisfait de soi-même, de s'en faire des souvenirs à l'avance, de se faire photographier heureux.


Renoncer à cette imbécillité, ce n'est pas être malheureux; c'est ne pas se satisfaire des satisfactions permises; c'est perdre des mensonges et des humiliations, c'est devenir en fin de compte bien enragé c'est rencontrer sûrement des joies à quoi on ne pensait pas.


Un demi-siècle passant, Adorno ajoutait ceci: «Il n'y a plus rien d'innocent. Les petites joies de l'existence, qui semblent dispensées des responsabilités de la réflexion, ne comportent pas seulement un trait de sottise têtue, d'aveuglement égoïste et délibéré: dans le fait elles en viennent à servir ce qui leur est le plus contraire.» Ce serait oublier que ces joies anodines sont les avortements de celles qui sommeillaient en nous, que le mal économique ne voulait pas vivantes; que c'est encore à la faveur de sa condescendance et comme sournoisement. Ce n'est pas sauver l'idée du bonheur, c'est trouve r cette misère bien assez bonne pour soi.


Voici ce que j'ai constaté d'autre: les uns aux autres nous ne trouvons plus rien à nous dire. Pour s'agréger chacun doit exagérer sa médiocrité: on fouille ses poches et l'on en tire à contrecceur la petite monnaie du bavardage: ce qu'on a lu dans le journal, des images que la télévision a montrées, un film que l'on a vu, des marchandises récentes dont on a entendu parler, toutes sortes de ragots de petite société, de révélations divulguées pour que nous ayons sujet à conversation; et encore ces insignifiances sont à la condition d'un fond musical excitant, comme si le moindre silence devait découvrir le vide qu'il y a entre nous, la déconcertante évidence que nous n'avons rien à nous dire; et c'est exact.

Non seulement pour la raison que donne Carême, que s'il n'y a plus de cuisine, « il n'y a plus de lettres, d'intelligence élevée et rapide, d'inspiration, de relations liantes, il n'y a plus d'unité sociale» ; il resterait tout de même le vin; mais plus simplement par celle-ci que la conversation, outre de vouloir cet esprit particulier qui consiste en des raisonnements et des déraisonnements courts, suppose des expériences vécues dignes d'être racontées, de la liberté d'esprit, de l'indépendance et des relations effectives.

Or on sait que même les semaines de stabulation libre n'offrent jamais rien de digne d'être raconté que nous avons d'ailleurs grand soin de prévenir ces hasards; que s'il nous arrivait réellement quelque chose, ce serait offensant pour les autres.


Voici ce que j'en ai pensé: les hommes, en jetant les yeux sur la quantité des productions que l'économie accumule au détriment de la nature, inclinent plutôt à se flatter de la richesse du spectacle, qu'à prendre conscience de leur dénuement; qui est la seule chose dont nous pourrions parler d'expérience et pour commencer: tout cela qui nous comprime et nous oppresse en commun; le regret que l'on a de soi, la déception que nous est cette vie et même le dégoût, la sourde appréhension que l'on traîne à sa suite et qui nous attend au réveil, et en fin de compte l'horreur de la reproduction matérielle de son existence dans le bagne de l'économie.


Sénèque disait de ses contemporains: Il y a bien des choses qu'ils oublient pour de bon, mais il y en a aussi beaucoup qu'ils font semblant d'oublier. C'était à propos de petites infamies, de vices et de débraillements, qu'il jugeait malpropres. Pour nous ce qu'il faut oublier ce n'est pas seulement l'histoire universelle, ni la physionomie du monde il y a trente ou vingt ans, c'est l'époque où nous sommes.

Nous évitons de parler du passé, qui ferait honte à notre étourderie, et l'on se dérobe à envisager l'avenir, qui est sur nous comme l'ombre de la mort. L'intelligence, il est vrai, recule devant le proche avenir qui nous attend ruiné sous les intempéries, exhibant ses trompe-l'œil et ses fonds peints lépreux, où elle disparaît; il lui faut donc renoncer à elle-même dès maintenant.

Sauf à examiner ce présent, et en son sein nos vies déplorables, on se condamne à ne penser à rien; et encore un peu moins à chaque victoire que la terreur marchande publie: ses statistiques de cancer, ses stocks de radioactivité, ses ordinateurs qui parlent; pour finir il ne reste que des sécrétions intellectuelles.
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L'internaute après tout n'est que l'aboutissement délirant d'un long processus d'isolement des individus et de privation sensorielle.
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Qui, s'il en avait le choix, ne frissonnerait à l'idée de revenir sur Terre dans un millier d'années ? se demandait Maeterlinck vieux. Qui, si on le lui proposait, souhaiterait son transfert immédiat à vingt ans d'ici dans l'avenir ? Et qui, si c'était possible, ne souscrirait aussitôt à prendre ses vacances dans le monde d'il y a quarante ou cinquante ans ?
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Quoique sensible et périssable, étant ce qui meurt, l'âme en nous n'est pas matérielle : c'est hors de nous que se place son existence physique ; c'est dans le monde extérieur que se rencontre sa vie secrète : dans le monde sensible où elle nous entraîne, fervente et troublée, à la recherche d'elle-même, de ses formes matérielles, où elle se reconnaît : de ses maisons, de ses rues pavées silencieuses, monuments décrépits, vestiges d'époques plus heureuses que la nôtre, et lumières du soir, matinée d'avril, vieux jardin clos, souvenir d'un livre miraculeux parmi les autres, voix qui résonnent autrefois dans la pénombre du salon, fugitive beauté entrevue il y a longtemps à la vitre d'un autobus ; et le vaste panorama étincelant à nos pieds "d'une mer où courent des voiles rapides", et les noms d'autres pays au loin, atlas d'une vie exaltante et sauvage alors sous d'autres ciels, et villes de province, douces du nom des fleuves, qu'on quitte à pied par les faubourgs, etc. ; courts éclairs qui sont pourtant "toute la clarté, toute la lumière de la vie", autrement sombre, indistincte, enragée ; à la recherche de tout ce qui la fera sortir du cachot organique pour exister un moment heureuse enfin dans la lumière du monde commun.
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...et puis des habitants épars, divers d'âges, plutôt tous des étages d'en bas - dans les couches inférieures des classes moyennes, qui sont les débris dénués de signification d'une société désintégrée - et donc les hommes quelconques de la modernité tardive, le tout-venant précaire du IIIème millénaire, des anonymes de la métropole mondiale sans étonnement de la médiocrité et de l'étroitesse de la vie permise à végéter là, n'y trouvant pas étranges ces interphones, portes électroniques et robots auprès desquels il faut justifier son identité, et même son existence, et caméras qui sont partout (même quand on ne le voit pas) ; et à la physionomie sans beaucoup de vivacité durant qu'ils sont chacun absorbés par le maniement de leur Smartphone, iPad, BlackBerry, portables 3G à écran tactile, e-book, ou bien feuilletant un gratuit avec des fils électriques rentrant dans leurs oreilles.
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La mondialisation heureuse : tout ce qu'elle invente ou entreprend surclasse tout ce qui fut jamais, dont elle triomphe ainsi ; à l'infini multipliant ces miroirs magiques lui vérifiant son excellence incomparable, sa perfection , et par cette entremise en infusant la conviction à ses individus, l'euphorie de s'éprouver si accomplis, son indifférence à tout ce qui n'est pas elle (que manifeste un déficit moral à peu près complet), sa persuasion de porter toutes les modernités à leur dernier degré, de réaliser merveilleusement le projet historique de l'espèce humaine ; d'être en aboutissement de tous ses travaux, de toutes ses sciences, etc. ; en achèvement de son destin évolutif logiquement.
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c'est justement dans cette atmosphère d'Autant en emporte le vent sur fond d'incendies planétaires et dans l'attente de la banqueroute générale qui doit se produire dans très peu de temps, où la peur s'affole de n'avoir nulle part où se cacher, que chaque instant peut prendre, ainsi détaché, cet éclat admirable, d'un sentiment si vif, complexe, presque douloureux ; et que c'est justement dans cette précipitation des circonstances, et l'écroulement de toutes les régularités et conventions de la vie sociale, dans ce trouble universel, que la civilisation se réfugie au fond de ces solitudes à deux, que l'amour recueille ce que l'affolement et la fièvre ne veulent plus : la confiance, le calme, la délicatesse, la civilité, l'amitié, le rire et l'intelligence réciproque ; que l'on y entend parler encore la douce langue natale.
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& dans cet ordre de choses une autre hypothèse, d'abord surprenante, s'est proposée à l'étude : que dans l'état social où nous sommes, où les générations se suivent, passagères, fortuites, isolées : elles paraissent, elles souffrent, elles meurent : nul lien n'existe entre elles, où l'individu se voit entièrement livré au seul jugement de l'argent et à la froideur concurrentielle pour se maintenir à flot quand il n'y en a pas pour tout le monde, à la solitude et à la précarité de ce destin économique, et que par cela la peur, l'angoisse sans répit, lui sont devenues si bien l'état normal, le surmenage permanent imposé par la contrainte de s'adapter, d'humiliations si continuelles qu'il ne les conçoit même plus; que dans un monde social si complètement dénué de toute bonté ou compréhension, sans aucune protection ou refuge de communauté, d'ailleurs instable et incertain quant au futur, où rien ne figure que provisoire, et si dépourvu de charme, de tranquillités, de clartés morales, de beauté ordinaire et pour tout le monde, où l'individu ne peut ignorer que c'est indifférent qu'il soit là ou non dans l'entassement de la collectivité, etc.
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& aussi que la plupart certainement n'avaient pas réclamé, n'avaient pas voulu en personne ces déprédations, n'avaient pas exigé en leur nom cette mise au pillage, tout ce cyclopéen d'extraction et de razzias, de récoltes à blanc, cette dénudation brutale de la vie terrestre - ni rien en particulier de ce qui a fait le lit de ce désordre menaçant; néanmoins qu'ils voulurent bien ce qu'on leur procurait, et non seulement le strict utilitaire mais encore le très superflu par rotation de porte-containers, les commodités flatteuses à la négligence et au manque de goût, toute cette profusion sous blister ou en armoires de congélation; qu'ils furent preneurs volontiers de ces innovations de l'informationnel à porter sur soi qui leur sont maintenant des indispensables à épanouir leur individu; qu'ils aient peu renâclé à cet envahissement : "Je ne suis pas le donneur d'ordre", s'exonèrent-ils ("Je n'y suis pour rien si c'est devenu comme ça", "On n'avait rien demandé, mais c'est là autant s'en servir", etc.) Qui est assez en duplicité le "Je n'ai pas demandé à vivre" de l'adolescent maussade. On lui répondra : Mais si, tu ne serais pas là sinon; et aux autres : Mais si, on n'en serait pas là sinon.
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& si l'on voulait se faire une notion de l'ascendant de ces appareils sur leurs utilisateurs, on le pourrait en étudiant les conduites qui sont par voie de conséquence à leur emploi : voyez ce groupe amical au café, ce couple au restaurant, dont chacun a posé devant lui son interface tactile : il apparaît vite qu'aucun d'eux n'est vraiment tout à fait là avec les autres, que sous le bavardage incohérent chacun se tient plus ou moins en retrait, dans l'aparté de son souci d'être possiblement en train de manquer quelque chose. (...) Qui sont donc chacun à attendre visiblement autre chose que d'être là ...
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Et à les côtoyer ainsi améliorés, l'air en effet satisfaits du branchement direct, on se dit que de toute façon la plupart n'avaient pas tellement le goût de la liberté pour eux-mêmes - et qu'ils avaient saisi là des possibilités innovantes de l'être encore moins.
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Le plus curieux et troublant dans cette métamorphose est qu'elle se soit produite comme à notre insu. On se réveille un jour dans un monde où tout est autrement, qui ne tient plus par rien à celui qui était là encore la veille, comme s'il en avait été toujours plus ou moins ainsi à vivre dans l'étroitesse de l'Âge définitif, à l'intérieur de cet invisible dôme radio-électrique nous séparant de tout ce qui fut antérieurement ; sans s'aviser que ce phénomène s'est étendu jusqu'en soi-même, à ne plus y retrouver les impressions, les pensées et les imaginations que l'on avait dans cette époque après tout peu lointaine, qu'on a connue, où tout se ressentait autrement, où l'on mangeait des huîtres, où les pêcheurs remontaient leurs filets grouillants de poissons ; où les nouveau-nés ne se présentaient pas avec déjà des nanotubes de carbone dans le cerveau, ni additionnés de mimétiques les prédestinant à une dentition désastreuse, aux tumeurs de la sphère reproductrice, avec des équivoques dans les caractéristiques, du déficit attentionnel et des troubles cognitifs ; où l'on apprenait les nouvelles par de grandes feuilles imprimées qu'on achetait dans la rue ; où les saisons étaient habituellement à ramener dans leur cycle les mêmes sortes de jours au long de la vie ; où le temps était devant ses habitants comme une évidence à se perdre au loin, si l'on s'y reporte, etc. ; et comme si beaucoup de générations s'étaient déjà succédées à l'abri de ce dôme depuis son établissement.
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& il peut venir alors à la pensée que si l’on prenait en axiome, ou en loi divine, loi de l’univers, cet avis que Baudelaire laissa pour qui voudrait s’en instruire : victimes des inexorables lois morales, nous périrons par où nous avons crû vivre, il ne serait pas difficile d’obtenir la notification de par où précisément nous périrons, pour commencer et à défaut d’une date précise.
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De même qu'autrefois le monde nous était donné partout dans son immensité - de même aujourd'hui n'en rencontre-t-on partout que les portes closes, les interphones, les contrôles à l'embarquement, les sas de détection avant d'entrer, les codes d'accès et nous est-il refusé partout dans ses restrictions, ses zones de rétention, ses confinements d'air climatisé; ses pays délabrés que filment des drones, ses scènes d'égorgement.
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Qui répudie le passé est empêché d'aimer l'avenir et de vouloir y aller : qui veut ignorer un passé qui l'a porté au monde doit tourner le dos à un avenir où il disparaîtra avec ce monde présent.
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Il ne pouvait donc y avoir de meilleure époque pour la conscience que celle-ci où elle devient si vite un inconvénient.
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L'impression dominante, l'ambiance planétaire dans quoi nous respirons, si l'on trouvait à se reculer assez pour l'envisager, serait plutôt de fuite en avant, d'exaltation à réfuter l'évidence, d'un fanatisme collectif multipliant les expédients de procédés énergétiques pour alimenter la machinerie, assez comme l'autarcie de guerre nazie et ses usines souterraines de carburant synthétique, en croyance désespérée de gagner assez de temps jusqu'à l'innovation miracle : entreprises manifestement absurdes de stockage en sous-sol du CO2, d'exploitation du gaz de schiste ravageant l'hydrographie, ou d'extraction des schistes bitumeux salopant des contrées entières, de forages sous la calotte polaire ou au fond des abysses, de couvrir le Sahara de panneaux électrosolaires fabriqués en Chine, d'élevages de micro-algues à croissance rapide faisant en incubateur du pétrole instantané, de véhicules électriques pour tous avec des réacteurs neufs pour remplacer ceux en fusion et puis déjà ça de tirer avantage de la surpopulation en récupérant la chaleur animale captée dans les transports souterrains pour chauffer les logements de surface, ou un complexe de loisirs aquatiques avec les calories du crématorium voisin.
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En élucidation de la placidité, du peu de réaction, de l'indifférence à vrai dire avec laquelle les hommes s'accommodent de la paupérisation du monde autour d'eux, se blasent du délabrement de la nature à quoi ils assistent et d'innovations climatiques pourtant menaçantes, est invoqué un plausible syndrome de la référence changeante, soit un phénomène inévitable "d'amnésie générationnelle" qui est d'un principe simple : "Chaque génération prend en référence de l'état normal des choses l'environnement tel qu'il était à l'époque de sa jeunesse", impliquant ce corollaire non moins simple que "chaque génération ignore que cet état qu'elle considère comme normal était déjà un état dégradé par rapport à celui que connaissaient les générations précédentes."
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Un même défaut partout de ... de consistance, de fermeté morale, de force d'âme, de quelque personnalité, apparent dans la physionomie ; la généralité d'une même pénurie de caractère propre, d'une impossibilité commune à prendre forme, à devenir quelqu'un - comme parvenus au terme du processus de domestication de l'Homme.
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[…] se jeter en accélération chimique sous des cataractes sonores, etc. Et pour finir au lieu de se réveiller chaque matin avec le sentiment radieux d’être en vie, qui serait la moindre des choses, la conscience du miracle que c’est, de ce privilège excentrique de figurer parmi cet univers prodigieux, on se traîne aussitôt à la cuisine avec la radio allumée pendant que l’appareil à café prépare le stimulant qui enverra rejoindre son poste de travail dans la machine collective de destruction de la nature. (p. 155)
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