Charlélie Couture de
Béatrice Soulé
♪ LA BALLADE DU MOIS D'AOÛT 75 ♪
On a loué une maison
pas très loin d'Avignon
à un vieux Polonais
qui cherchait une mine d'or,
il faisait bon dès l'aurore
à regarder le ciel dans un fauteuil en toile,
et les poules imbéciles
et le coq d'opéra,
quand le café était prêt
une fenêtre s'ouvrait,
et la mère bonne humeur
commentait un de ses rêves
ici j'ai les pieds gelés
mais je me souviens du mois d'août 75.
Tu tissais un gilet
comme un stage d'artisan
en maillot de bain du soir au matin
tes frangins faisaient des sprints à vélo
sur une route déserte
on allait chercher du fromage de chèvre frais
dans la ferme du haut
sur les chaises du jardin
le père barbu chauve pensait à Picasso,
la piscine était loin mais ça faisait du bien
quand on arrivait, quand on arrivait
On buvait du pastis comme si c'était de l'eau
tu voulais que je reste
tu voulais que je t'enlève comme un premier amour
on jouait à la pétanque comme des amateurs
mais y'à guère qu'un amateur pour 100 000 navigateurs
y a un seul conteur pour 100 000 baratineurs
j'ai des crampes dans le coup
et les yeux qui me piquent,
mais je me souviens...
On écoutait le mistral souffler sur la plaine
on faisait l'amour sur le toit
en r'gardant les étoiles
y'avait rien à gagner
les journées passaient
tout était simple
on ne croyait plus à rien
en rien d'autre qu'à l'instant
et ça jouait d'la musique sur tous les sentiments
pas d'intrigues de village, pas d'ambition
juste une manière de vivre, une manière d'être
je me souviens.
Mais il ne reste jamais rien de ce qui est vécu
quelques grains oxydés sur de la paraffine
et des souvenirs idiots
mais qui donnent un peu de lumière
les jours de pluie.
p.96-97
+ Lire la suite