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Citation de Ledraveur


La religiosité de la mort nécessite, elle, un travail verbal. Il faut se rencontrer et créer un lien de paroles pour exprimer nos mondes intimes et se mettre d'accord en élaborant une théorie de la mort que nous pourrons partager. Le sentiment que la vie du mort se perpétue en nous nécessite un échange de paroles : « Je sens sa présence en moi... je l'entends chaque fois me dire... je sens qu'il me protège... » Les représentations cette fois-ci sont verbales et créent un monde de mots échangeables et partageables. En remplissant un vide, le théâtre de la mort et ses théories luttent contre l'angoisse de la représentation du rien.
Les animaux capables d'éprouver des représentations d'images perçoivent le mort et en sont parfois bouleversés. Les hommes capables de se représenter la mort en font une théâtralité qui est à l'origine des deux ensorcellements fondamentaux de la condition humaine : l'art et la religion.
Le monde de l'imperçu prend forme grâce aux représentations de la mort, manque suprême. Mais percevoir un mort, ce n'est pas se représenter la mort. Les animaux sont désorganisés par le mort. Alors que les hommes s'organisent autour de la mort.
p. 267
L'ontogenèse de la représentation de la mort est très lente chez nos enfants. Quand un nourrisson perçoit une stimulation effrayante, il peut crier ou se rétracter. Mais il lui faut un appareil psychique suffisamment construit pour se représenter l'imperçu parfait, le néant. Quand il parvient à la notion du rien, du vide ou de l'infini, il éprouve un vertige physique que certains nomment « angoisse ». Pour se défendre contre cette angoisse de la mort, il doit remplir la représentation du rien par des images et des mots, des œuvres d'art et un travail religieux.
L'ontogenèse du sentiment de mort a été progressive.
p. 268
Ce qu'il met en scène dans ses fictions, vers six-huit ans, ce n'est plus jouer au mort, ce n'est pas encore lutter contre l'éprouvé de la mort, c'est donner la mort. Or un aigle ne donne pas la mort quand il tue un lapin, pas plus que nous-mêmes quand nous mangeons un fruit ou quand nous broutons une feuille de salade. Et pourtant, on interrompt une vie végétale !
p. 269
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