Lécrivain et journaliste sénégalais Boubacar Boris Diop nous introduit au monde des lettres africaines, nous parle de son origine, ses mythes et ses réalités, et nous recommande certains de ses écrivains actuels préférés.
"Etre noir et africain reste une circonstance aggravante"
Interview de Katia Touré pour Bibliobs le 29-09-2015
Cornélius, écoute bien ceci : après un génocide, le vrai problème ce ne sont pas les victimes mais les bourreaux. Pour tuer près d'un million de personnes en 3 mois, il a fallu beaucoup de monde. Il y a eu des dizaines ou des centaines de millers d'assassins et la plupart étaient de bons pères de famille.
Ils appellent ça l'opération Turquoise. Il s'agit, parait-il, de se porter au secours des Tutsis menacés de génocide. On verra comment ils s'y prendront pour sauver des gens morts depuis si lontemps.
Notre existence est brève, elle est un chapelet d'illusions qui crèvent comme des petites bulles dans nos entrailles. Nous ne savons même pas à quel jeu elle joue avec nous, la vie, mais nous n'avons rien d'autre. C'est la seule chose à peu près certaine sur cette terre.
Il se découvrait brusquement sous les traits d'un Rwandais idéal : à la fois victime et coupable.
- Colonel Perrin, nous sommes dans le même sac. Ce qui arrivé au Rwanda est, que cela vous plaise ou non, un moment de l'histoire de France au XXème siècle. Figurez-vous que je ne suis pas un amateur : je suis au courant de ce qui est arrivé à votre convoi de Butare, hier à l'aube. Vous aviez demandé au général canadien Dallaire d'avertir le commandant du FPR : interdiction absolue d'entrer dans Butare, vous ne le permerttriez pas. Vous faisiez votre petit numéro de grande puissance. Les types du FPR ont répondu : Ah oui ? On va voir ça. Et on a vu. Cela ne vous était jamais arrivé. C'est le début de la fin, mon cher ami. Vous quitterez l'Afrique par la petite porte.
Je vais vous dire ceci : vous avez souffert mais cela ne vous rend pas meilleurs que ceux qui vous ont fait souffrir. Ce sont des gens comme vous et moi. Le mal est en chacun de nous.
Le quatrième génocide du siècle restait une énigme et peut être fallait il en chercher la clé dans la tête d’un fou ou dans les mystérieux mouvements des planètes. Cette orgie de haine allait très loin au-delà de la lutte pour le pouvoir dans un petit pays. Il songea à un Dieu soudain pris de démence, écartant les nuages et les étoiles à grands gestes rageurs pour descendre sur la terre du Rwanda.
Notre existence est brève, elle est un chapelet d'illusions qui crèvent comme de petites bulles dans nos entrailles. Nous ne savons même pas à quel jeu elle joue avec nous, la vie, mais nous n'avons rien d'autre. C'est la seule chose à peu près certaine sur cette terre.
"Dans ces pays-là, un génocide ce n'est pas trop important..." François Mitterrand, été 94.