La philosophie a commencé lorsque les êtres humains ont entrepris de comprendre le monde, non pas au moyen de la religion ou en se soumettant à une autorité, mais par l'usage de la raison.
Un argument philosophique ne tire sa valeur que de lui-même, des raisons qu'il se donne. Il fait appel à l'assentiment rationnel, non à la foi ou à l’obéissance. La philosophie tente d'aller le plus loin possible sur le chemin de la raison.
Platon et le christianisme
Cette approche du réel, étendue à un grand nombre de sujets, conduisit à la thèse selon laquelle la réalité est divisée en deux mondes distincts.
Il y a le monde visible, celui qui s’offre à nos sens et nous est familier, dans lequel rien ne demeure identique et ne dure.
Platon aimait à dire que dans ce monde tout se transforme continuellement, rien n’a de permanence.
C’est ce qu’il exprima dans une formule concise : « Tout devient, rien n’est. »
Toute chose vient à l’existence et en sort, tout est imparfait, tout se corrompt.
Ce monde de l’espace et du temps est le seul monde que nos sens puissent appréhender.
Mais il en existe un autre, qui n’est ni dans l’espace ni dans le temps, que nos sens ne peuvent percevoir, où règne un ordre permanent et parfait.
Cet autre monde est celui d’une réalité intemporelle et immuable.
Il se contente d’être et ne subit aucun changement.
(page 28 - Platon)
… l’homme à l’état de nature, selon Rousseau, est un « bon sauvage ».
Mais à l’enfant élevé dans une société prétendue civilisée, on apprend à réfrénez à contrarier ses instincts naturels, à réprimer ses vrais sentiments, à faire prédominer les catégories artificielles de la pensée conceptuelle sur ses émotions, à feindre de ne pas penser et de ne pas sentir toutes sortes de choses qu’il pense et sent, tout en prétendant penser et sentir toutes sortes de choses qu’il ne pense ni ne sent.
Le résultat en est une aliénation par rapport à son moi véritable (le terme « aliénation » ne fut inventé que plus tard par Hegel), ainsi qu’une fausseté et une hypocrisie généralisées.
Ainsi, c’est la civilisation qui corrompt et détruit les vraies valeurs.
Ce n’est pas elle, comme les gens semblent toujours le croire, qui les crée et les propage.
(page 127)
Chrétienté et philosophie
De la chute de l’Empire romain au Ve siècle aux premières lueurs de la Renaissance au XVe siècle, soit pendant près d’un millénaire, l’Église chrétienne entretint presque à elle seule la flamme de la civilisation occidentale. Mais, avant d’accepter de nouvelles idées et de nouvelles découvertes, les chrétiens devaient s’assurer qu’elles n’étaient pas incompatibles avec leurs dogmes. On passa au crible les écrits des plus grands philosophes de l’Antiquité afin de déterminer lesquels de leurs arguments pouvaient être harmonisés avec le christianisme et lesquels devaient être rejetés. Ce fut saint Thomas d’Equin qui atteignit au mieux cette synthèse suprême vers la fin de cette période. Dans ses œuvres, il présenta une vision du monde élargie qui coordonnait les principaux systèmes de pensées d’alors.
(page 49)
Acte de connaissance. Apprendre en agissant.
« Dans l’acte de connaissance, nous commençons toujours par prendre conscience d’une difficulté. Notre première exigence est donc de l’identifier clairement, autrement dit de formuler notre problème. Le processus peut être difficile, et passer lui-même par plusieurs phases. L’étape suivante consiste à trouver une solution au problème. Enfin, il faut vérifier expérimentalement cette solution. Si elle est contredite par l’expérience, nous devrons y réfléchir de nouveau. Mais, si elle est confirmée, nous aurons résolu le problème. »
(à propos de John Dewey)
Avec une perspicacité exceptionnelle, Thomas d’Equin traite de la question de savoir ce que signifie, pour une chose, d’exister.
Si une chose n’est qu’essence, elle existe en puissance mais non pas en acte. Si nous présumons que Dieu a créé le monde selon ses vœux, l’essence du monde a précédé son existence.
Mais l’essence de Dieu lui-même ne peut avoir précédé son existence. Donc, Dieu doit être existence pure.
(page 60)
Ce que nous considérons comme des « choses » ne sont nullement des objets stables, elles changent perpétuellement. Héraclite les comparait à des flammes. Celles-ci semblent être des choses alors qu’elles sont plutôt un processus. C’était là une idée profonde, mais également déconcertante.
Les êtres humains ont toujours cherché à s’appuyer sur une réalité stable et durable.
(page 14 - Héraclite)
La philosophie a commencé lorsque des êtres humains ont entrepris de comprendre le monde, non pas au moyen de la religion ou en se soumettant à une autorité, mais par l'usage de la raison. il semble que cela se soit produit initialement chez les Grecs aux VIe, Ve et IVe siècles avant notre ère. À l'origine, ils se sont demandé : "De quoi est fait le monde ? Qu'est-ce qui le soutient ?" (page 11)
Pour Aristote, il ne peut y avoir qu'un monde à partir duquel philosopher, celui dans lequel nous vivons et dont nous avons l'expérience. À ses yeux, ce monde nous inspire un émerveillement sans fin et il pensait que c'était cet émerveillement qui, en premier lieu, poussait les hommes vers la philosophie. Ils désiraient étudier et comprendre ce monde-là et non un autre.
(page 32)