Citations de Carlos Gimenez (59)
- Vous accordez dont tant d’importance au courage ?
- C’est parfois la seule chose qu’il nous reste, surtout par les temps qui courent, quand tout est objet de négoce, même les drapeaux et le nom de Dieu.
C’était une des vertus de Diego Alatriste : il savait se faire des amis, même en enfer.
Il n’était pas le plus honnête ni le plus pieux des hommes, mais il était courageux. Il s’appelait Diego Alatriste y Tenorio et il avait été soldat en Flandres. Quand j’ai fait sa connaissance, il vivotait à Madrid où pour quatre maravédis, il louait ses services à ceux qui n’avaient ni l’art ni l’audace de vider leurs querelles eux-mêmes. A l’époque, la capitale de l’Espagne était un lieu où la vie ne tenait souvent qu’à un fil, au coin d’une rue, sous les éclairs de deux lames d’acier. Diego Alastriste s’en sortait fort bien.
Dans notre Espagne, mon cher Diego, avec de l’or on peut acheter aussi bien le noble que le vilain. Tout est à vendre, sauf l’honneur national. Et même lui, on le trafique en douce à la première occasion.
Alastriste ne comprenait de l’anglais que les mots que l’on peut s’échanger sur le champ de bataille – Fockyou (allez vous faire foutre) et oui are gouin toucat your balls (on va vous couper les couilles).
Que voulez-vous ! Avec des hommes intègres, on peut sans doute gagner des batailles mais pas gouverner des royaumes.
-Hormiga, tu joues ?
-Non.
-Regarde le clou que j'ai trouvé !
-Non. Je surveille le portail. J'attends mon père. Il vient me chercher. Me chercher ! Je vais rentrer à la maison avec mon père à Madrid ! Pour toujours !
-Veinard, quelle chance ? Maintenant il faut voir si c'est pas des mensonges.
-C'est vrai ! Mon père me l'a dit et il m'a jamais menti !
-Et comment tu sais qu'il t'a jamais menti ?
-Parce qu'il me l'a dit !
Méfie-toi de la qualité. Ici, tout le monde veut être chrétien de vieille souche, hidalgo ou gentilhomme, ce qui revient au même. Et comme le travail est le début du déshonneur, plus personne ne bouge le petit doigt.
Durant l'été, au collège, les enfants doivent obligatoirement faire la sieste après le déjeuner. [Les surveillants font allonger les enfants en ligne dans la cour] Le soleil tape dur. Le sol est brûlant. Faut rester couché tout droit, le menton relevé, les yeux fermés, sans bouger, sans parler. Aujourd'hui c'est Galvez qui s'est fait piquer le premier. Mais petit à petit d'autres viennent le rejoindre. Perucha pour s'être gratté. Hormiga pour avoir ouvert les yeux. Bonilla pour avoir dit « aïe » quand la guêpe l'a piqué. Galan pour n'avoir pas gardé le menton haut. Enrique pour avoir pissé sous lui. Jaïme pour avoir pété. Zampabollos pour avoir rigolé quand Jaïme a pété. Etcétéra... etcétéra... pour avoir etcétéra... etcétéra...
Je veux rester seul. […] Ces derniers temps, chaque fois que je suis sorti, je l’ai regretté. J’aime bien être seul : je dessine, j’écris, j’écoute la radio. J’écoute de la musique. Je dessine surtout. J’ai plein de travail. J’ai pris l’habitude d’être seul. Au début, c’était dur. Maintenant, c’est l’inverse qui est insupportable. Je ne suis pas de bonne compagnie. Je finis toujours par me disputer avec quelqu’un, par regretter quelque chose que j’ai dit ou quelque chose que je n’ai pas dit. Je préfère rester seul.
[Alastriste] Je n’ai aucun plaisir à tuer. Pour moi, ôter la vie n’est pas une passion, mais un métier.
C'est qu'il faut bien parler pour devenir écrivain. Par exemple, au lieu de dire « très gros », on dit « suprêmement obèse » !
- Diego, quelqu’un a besoin de toi.
- De moi, ou de mon épée ?
- Quelle question ? Il y a des femmes qu’on remarque pour leurs charmes, des curés pour leurs absolutions, des vieux pour leur argent… Mais quand il s’agit de gens comme toi et moi, il n’y a que notre épée qui vaille.
Je connais beaucoup de gens qui n’ont qu’une préoccupation dans la vie : ne pas mourir.
Il est bien fait cet Anglais ! Gracieux et élancé ! Avec notre infante, cela fera un beau couple ! Dommage que ce blondinet soit un hérétique. Mais tout peut s’arranger à temps avec un confesseur et un bon baptême… Deux mamelles font plus que viles querelles !
Il y a quelques jours est mort mon ami Raúl. Je devrais peut-être plutôt dire, pour reprendre l’expression précise qu’il employait, que mon ami Raúl a fini de mourir.
Don Francisco de Quevedo, poète boiteux et hardi, putassier et chevalier de Saint-Jacques, célèbre à la cour pour ses bons vers et son mauvais caractère, avait le verbe haut et l’épée facile.
Il arrive un jour où tout autour de nous commence à se former une chrysalide, espèce de cocon, une chrysalide qui, peu à peu, couche après couche, grossit, durcit, nous emprisonne, nous réduite… C’est ce jour-là que nous commençons à mourir. Moi, j’ai commencé à mourir il y a onze ans. Un 11 février pour être exact. Un 11 février. Je le sais parce que ce jour-là, j’ai entamé un journal. Je l’ai appelé Carnet de bord. Dedans, je parlais de la solitude.
Olivares est incroyable ! Un fils de pute avec de grands airs, habile et dangereux, malin comme un singe.
Sa propre mort est un bon sujet pour quelqu’un qui raconte des histoires. Presque personne n’en parle. En revanche, la mort des autres, surtout quand ceux qui meurent sont des Indiens, des noirs des sauvages ou des étrangers, est amusant. Les films, les romans et les BD sont pleins du spectacle amusant de la mort des autres.