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Critiques de Caroline Caugant (112)
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Insula

Re-naissance…



Connaissez-vous Namazu ? La légende japonaise dit qu'il s'agit d'un monstre, d'un poisson-chat géant qui vivrait dans les profondeurs de la Terre. le Japon, qui repose sur son échine, redoute ses réveils : d'un mouvement brusque ou d'un simple frétillement de sa queue, Namazu peut ébranler l'archipel. La légende dit que les séismes naissent de ses colères.



Namazu a du se mettre dans une colère noire ce printemps-là, bondissant, anéantissant la ville de Tokyo, un séisme, le séisme de l'hanami, d'une magnitude jamais atteinte, 9,5 sur l'échelle de Richter. Engloutissant parmi les décombres, avalant en son antre, Line, jeune hôtesse de l'air française qui se trouvait en escale dans cette ville si belle au printemps avec ses cerisiers en fleurs. Elle va passer huit jours et huit nuits sous les décombres, dans un tout petit réduit et devra sa survie à la présence d'une autre femme, Saki. Toutes deux ne vont pas cesser de parler, de raconter leur vie, en se tenant les mains, dans le noir total, et de taper à tour de rôle sur la tôle pour se faire entendre des sauveteurs éventuels. Endurant la faim, la soif, l'engourdissement, l'angoisse. Jusqu'au silence.



« Elle avait allumé la lampe du téléphone, le faisceau avait balayé l'obscurité, révélant l'endroit où elles se trouvaient : un renfoncement, clos, constitué de parois fragmentées, imbriquées, grossièrement les unes dans les autres. Devant elles, de longues fissures, de la poussière, du sable, des murs si près de leurs visages qu'il aurait mieux valu ne pas les avoir vus, ne pas y penser, pour pouvoir continuer à respirer. Elle étaient prises au piège dans un enchevêtrement de béton où brillaient des éclats de verre ».



Line sera une miraculée. Retrouvée saine et sauve, du moins en apparence, très affaiblie mais sans blessure grave, le retour à Paris auprès de son compagnon, Thomas, ne sera cependant pas si simple. En réalité traumatisée, les vraies fissures se situant ailleurs que sur son corps, ne se souvenant pas vraiment de ce qui s'est passé, mais revivant par flashs intermittents la tragédie, cet accident a ouvert en elles de profondes lézardes creusant leurs sillons en des zones invisibles, des fissures pour certaines remontant à l'adolescence.

« Les grandes catastrophes recélaient presque toujours des histoires de survies extraordinaires. Mais après ? Qu'y avait-il après le miracle ? ».



En elle, c'est un champ dévasté à l'image de la ville de Tokyo. Pour pouvoir se reconstruire, elle décide de fuir, un peu à l'image de ces évaporés du Japon les johatsu qui, par honte suite à un licenciement, à une rupture, à un échec, décident de fuir, de s'en aller, en ne prévenant personne.

Sa destination, hypnotique, sera la petite île française où a grandi Saki, sa compagne d'infortune avec laquelle elle a partagé cette longue nuit sous terre, dont elle n'a aucune nouvelle depuis qu'elle a été sauvée. Elle retrouve sa maison d'enfance qu'elle lui avait tant décrite et elle fait la connaissance de l'occupante actuelle de la maison, une vieille femme prénommée Rose.

Sur cette île atlantique battue par les vents, à l'air chargée d'embruns, commence alors sa reconstruction progressive. Combattant ses fantômes, laissant l'ancienne Line au fin fond des décombres, nous allons assister à sa lente et délicate renaissance. Cette nouvelle Line née d'un séisme, « mouvement de bascule qui avait modifié la configuration initiale de son monde ». Une histoire, au coeur du chaos, qui a ouvert un chemin de lumière, envers et malgré tout, un ondoiement tenace et sauvage de la liane, du lierre et de l'eau sous la robe de Line.



J'ai particulièrement aimé l'écriture de ce livre, délicatement poétique. J'ai aimé sa façon de narrer l'île et ses paysages sans cesse mouvants à l'horizon infini, au ciel si vaste. C'est un tel contraste avec le réduit dans lequel nous vivons l'enfermement de Line. Nous avons d'autant plus l'impression de respirer avec elle. Autant j'ai lu presque en avalant ma salive son enfermement, autant j'ai eu la sensation de mieux respirer une fois la jeune femme sur l'île. du noir d'un côté, une luminosité sans fin de l'autre. Tels les yeux de Rose, des yeux vairons. Notons également des descriptions très belles de Tokyo avant et après le séisme.



« On raconta que, lors du séisme, une pluie de pétales avait recouvert Tokyo. Les secousses avaient eu lieu pendant la pleine floraison des cerisiers. Lorsque la terre trembla, que les sols se fragmentèrent, se déchirèrent comme des nappes de papier, les fleurs furent arrachées et soulevées par le vent, retombant n milliers de corolles roses et blanches sur la ville, se mêlant à la poussière et aux gravats ».



J'ai été moins sensible, paradoxalement, aux petits poèmes clôturant certains des chapitres, sortes de haïku, qui n'apportent pas grand-chose, je trouve, car l'écriture de Caroline Caugant se suffit à elle-même et n'a pas besoin de ses ajouts quelques peu surfaits. Certains des personnages secondaires ne sont pas très approfondis non plus notamment le compagnon de Line, Thomas. Mais ces petits bémols mis à part, j'ai pris vraiment plaisir à lire ce livre.





Oui, une belle surprise que ce livre de Caroline Caugant reçu en masse critique privilégiée. Je l'avais commencé avec un peu de scepticisme, pressentant, à tort, une histoire emplie de poncifs sur les notions parfois galvaudées de résilience et de reconstruction, une forme de liste à la Prévert des conséquences multiples des grands traumatismes. Une approche simpliste du syndrome post-traumatique. La peur aussi de voir dans le personnage de Line l'archétype de la victime devant se reconstruire à la psychologie brossée en gros traits brouillon. Ce fut en réalité une lecture agréable, délicate, gracieuse, poétique.



Les scènes d'enfermement, pour moi qui suis claustrophobe, furent éprouvantes à imaginer mais il me semble justement n'avoir jamais lu de roman dans lequel une personne se trouve ainsi piégée des heures et des jours durant dans un réduit minuscule, dans le noir absolu. J'avais été marquée en revanche par un film assez proche dans la thématique de l'enfermement et du piège, le film réalisé par Danny Boyle, 127 heures, qui relate l'histoire vraie d'un alpiniste d'une vingtaine d'années victime d'un accident en avril 2003 dans le grand Canyon, un gros monceau de pierre lui ayant roulé sur le bras dans une des gorges du canyon, bras dont il devra se séparer s'il veut pouvoir repartir et vivre. Et notre homme de se couper le bras avec son couteau suisse…

Comme souligné précédemment, par ailleurs le contraste entre cet enfermement dans une cage de béton et la reconstruction sur l'île, procédé pourtant classique tant l'opposition est évidente, m'a apporté beaucoup de plaisir. Les récits maritimes ont vraiment cette faculté d'apaiser de par leur paysage à la fois immuable et changeant. Suivant le continuel mouvement des marées, les nuages, la lumière, le vent, la densité de l'air se modifient sans cesse. « Quelque chose – une couleur, une voile, la force du vent ou la forme d'un nuage – venait toujours s'immiscer dans le décor pour le bouleverser ». Pour moi il n'y a pas meilleur endroit pour se reconstruire et renaitre, repartir de zéro.





Au final, Insula a été une belle surprise, un bien agréable moment de lecture, au fur et à mesure des pages tournées avec une crainte initiale qui a été peu à peu balayée. le ton est juste, l'écriture délicate, les petites touches sur la mythologie japonaise très plaisantes. Il faut le lire davantage comme un conte que comme un roman réaliste, le conte du soi fragmenté puis réinventé…

Aussi je remercie chaleureusement pour leur confiance Babélio et les éditions du Seuil.







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Les heures solaires

Avec Les heures solaires, Caroline Caugant décline un thème récurrent dans la littérature écrite par des femmes. La relation mère fille est un excellent support de contenu romanesque. Sa complexité, son ambiguïté sont un terreau fertile pour les conflits, pour peu que des non-dits et secrets dans les placards obscurcissent encore davantage le champ de l’improbable communion.



Attirance et répulsion, admiration et mépris, rancune et reconnaissance se mêlent et s’entrelacent dans une confusion que seule l’écriture (ou la parole) peut parfois délier.



Alors qu’est-ce que fait la différence, au sein de l’abondance des écrits construits sur ce thème? L’écriture, bien entendu. Qui va orner le récit et transformer la lecture. Pour utiliser une analogie picturale, le portrait offert au spectateur se décline du bonhomme têtard à la sublime Mona Lisa. Mieux vaut pour être édité et lu pencher du côté de Léonard!



Pas de doute, Caroline Caugant a l’art et la manière. Les paysages prennent vie, nimbés d’une aura poétique et nostalgique. Les souvenirs affluent, du plus plaisant au plus sordide, et la complexité des personnages se décline tout au long de très belles pages.



Le mal plonge ses racines entrelacées sur plusieurs générations : laissant des traces indélébiles et d’autant plus perfides qu’ignorées. C’est un gigantesque travail d’introspection, enrichi au cours des rencontres suscitées par l’événement qui déclenche le questionnement, à savoir la disparition de celle qui part murée dans un silence irréversible.



C’est donc un superbe récit, sans originalité sur le thème mais porté par une très belle écriture.
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Les heures solaires

La violence engendre t-elle la violence ? Éloignement vaut-il oubli ? Ce sont les questions auxquelles Billie, artiste peintre, va devoir se confronter après le décès de sa mère et le retour dans sa ville natale qu’elle a quitté brutalement 20 ans plus tôt. Ce retour aux sources va être l’occasion de revenir sur l’histoire de sa famille, plus précisément sur celle de sa mère et sa grand-mère, et de découvrir des secrets qui vont la bouleverser et modifier le cours de sa vie de femme et d’artiste. Un très beau roman, à la plume superbe, portrait de 3 femmes fortes et indépendantes, écrasées néanmoins par le poids du silence. Il n’y a rien de trop dans ce texte que j’ai lu d’une traite, hymne à la nature avec la rivière très présente et le soleil du Sud, et à la liberté. Une belle découverte ! Merci à Netgalley et à Stock pour cet envoi en avant-première. #LesHeuresSolaires #NetGalleyFrance
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Les heures solaires

On vient de retrouver Louise, la mère de Billie, noyée dans la rivière du home où elle séjournait. Accident ou suicide, le doute plane pour Billie. Sa mère n'avait plus toute sa tête et même en pleine capacité, sa mère s'est toujours montrée absente. Billie devra bien retourner dans son village de V pour revendre la maison.



Ce roman relate l'histoire de trois femmes emprises avec leurs démons: Billie, sa mère Louise et son arrière grand mère Adèle.

Beaucoup trop de longueurs dans ce roman où ni l'histoire ni le fond ne m'ont intéressée. J'ai parcouru les pages sans plaisir ni déplaisir, la tête ailleurs (c'est mauvais signe) sans le moindre attachement ou intérêt. Les heures solaires, un bien joli titre mais où est donc passé le soleil alors ?

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Les heures solaires

****



Jeune artiste peintre, Billie a fui V. depuis de nombreuses années. C'est dans ce village, là où elle a grandit, que les drames de sa vie se sont joués, bousculés et l'ont dévasté. Mais à la mort de Louise, sa mère, Billie va voir les monstres et les souvenirs revenir en force. Elle qui croyait les avoir fait taire...



Les heures solaires porte bien son nom : la lecture de ce roman est comme un flottement, une apnée, un instant suspendu...



Il y a de la poésie derrière chaque mot, chaque tournure de phrase. La construction du récit est finement étudiée et elle nous fait valser et nous berce.

Mais Caroline Caugant nous retourne aussi. Elle ne nous ménage pas...



Ce deuxième roman est parfaitement maitrisé. Trois générations de femmes se retrouvent ici ballotées par l'histoire familiale, par les secrets et les non dits. Car c'est bien de ça qu'il est sujet dans ce roman : quand tout est tu, quand rien n' est dit, quand les silences prédominent, alors les drames se devinent.



Billie porte le poids d'un lourd passé. Elle croit pouvoir l'éloigner en fuyant ce village, cette maison, sa mère. Mais c'est en leur faisant face qu'elle trouvera des réponses et qu'elle pourra alors avancer sur son propre chemin...



Un grand merci à NetGalley et aux Éditions Stock pour leur confiance. Et une nouvelle sélection des 68 premières fois prometteuse !!
Lien : https://lire-et-vous.fr/2019..
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Les heures solaires

Billie croyait avoir oublié son passé. A force de volonté, de temps et de distance géographique, elle avait voulu croire qu'elle avait réussi à couper les ponts, que ses fantômes la laisseraient en paix. Arrivée à Paris à 18 ans à peine, la jeune femme aujourd'hui trentenaire est devenue artiste peintre, et prépare une exposition. Et puis un soir, le téléphone. Louise, sa mère, vient de mourir, noyée dans la rivière près de la maison de repos dans laquelle elle était internée. Accident, suicide dans un éclair de lucidité au milieu de sa démence ? Cette rivière en rappelle une autre à Billie, et c'est tout le passé qui remonte à la surface. le sud de la France, l'arrière-pays, le village de V. où elle a grandi avec Lila, sa seule amie, sa presque soeur, la rivière glacée où elles nageaient l'été, jusqu'à l'adolescence et ses émois, jusqu'au drame.

Billie décide de retourner à V. pour vendre la maison de sa mère, fermée depuis des années. En cherchant une chose elle en trouve une autre, en voulant rester incognito elle se heurte à Henri, et cette découverte et cette rencontre mettent en lumière des pans cachés de l'histoire de sa grand-mère Adèle, de sa mère, Louise, et de la sienne. Trois femmes, trois générations, la tache originelle d'Adèle qui influence la vie et la personnalité de Louise, puis celle de Billie. Un destin est-il conditionné par les erreurs, les fautes des parents et grands-parents ? La transgression, sous quelque forme que ce soit, se reproduit-elle d'une génération à l'autre ?

Dans la grisaille de ce début d'année, ce roman a au moins le mérite de nous baigner dans la lumière et la chaleur du sud. Il ne fait pas pour autant dans la légèreté : secrets de famille honteux, souvenirs d'enfance douloureux, relations mères-filles compliquées, personnages tourmentés, à vif, le passé est lourd à assumer. Malgré une relation entre Billie et Paul peu convaincante et une étrange obsession de l'auteure pour les chevelures de ses personnages, l'histoire, assez prévisible, est agréable à lire. Et, parmi les romans (plutôt sombres) que j'ai eu l'occasion de lire en cette rentrée d'hiver, la fin, qui annonce des « heures solaires » pour Billie, est, jusqu'à présente, l'une des plus optimistes.



En partenariat avec les éditions Stock via Netgalley.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Insula

Le namazu est une sorte de poisson-chat géant de la mythologie japonaise qui vit dans la vase des entrailles de la terre et sur le dos duquel se trouvent toutes les îles du Japon. Il arrive que le namazu échappe à la surveillance du dieu, Takemikazuchi se mette à bouger dans tous les sens et soit à l'origine de violents séismes.

Depuis sa naissance, Line a toujours voulu voler. Elle a d'abord fait de la danse mais un accident de moto a mis fin à ses aspirations. Alors elle est devenue hôtesse de l'air et a parcouru le monde jusqu'au jour où, lors d'une escale à Tokyo, l'énorme monstre l'engloutisse dans les profondeurs de la terre.

Line est une survivante à cette catastrophe. Mais, clouée au sol, elle va devenir un fantôme qui va errer dans les rues de Paris, dans ses souvenirs, à la recherche de Saki, la jeune femme qui a partagé les heures interminables qu'elle a passé dans ce gouffre obscur avant d'être libérée.

La quête de Line va s'arrêter dans une petite île, ou Insula en latin.

Elle va retrouver les traces de Saki, la jeune femme qui a passé son enfance dans cette île et qui va lui parler des jôhatsus, ces "évaporés", personnes qui vont disparaître soudainement de la vie, des déserteurs, des fugueurs, comme les appelle le père de Saki, qui, lui-même deviendra un jôhatsu...

Caroline Caugant nous offre un récit plein de délicatesse et de poésie, empreint d'une douleur sourde, intime. Lecture très agréable, rapide, grâce à laquelle on apprend quelques touches de la mythologie japonaise très liée aux risques presque quotidiens que sont les séismes dans les îles du Japon.

Merci à Babelio et aux éditions du Seuil de m'avoir permis cette agréable rencontre.

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Insula

Line est hôtesse de l’air. Au printemps 2024, Tokyo, où elle se trouve en escale, vit le Big One, ce tremblement de terre que tout le monde attend et redoute. Ensevelie sous les décombres, elle survivra dix jours sous terre avant d’être découverte et sauvée. Insula raconte son retour et l’impact de cet événement sur son existence parisienne.



D’une composition plutôt réussie, dans un entrelacs de courts chapitres dont certains se terminent assez maladroitement ai-je trouvé - ce sera un de mes rares bémols - par quelques vers façon vrai faux haïku, jaillissent d’autres personnages, d’autres temporalités que les secousses auront fait remonter à la surface. D’autres lieux venus absorber, tamiser, apaiser. La progression au fil de ces chapitres permettra d’accompagner Line dans les semaines et les mois qui suivront la catastrophe. A Paris d’abord avec son compagnon. Ailleurs ensuite dans une quête nous valant un joli récit de rencontres, de retrouvailles et de retour au calme.



Il fallait un aplomb et un sens de la subtilité bien affirmés pour écrire Insula. Partir sur une veine à peine dystopique déjoue le piège d’un récit potentiellement dégoulinant d’autobiographique puisque l’événement déclencheur n’a effectivement pas (encore ?) eu lieu quand on lit le roman. Reste que tout péril n’est pas écarté. Il faut encore faire avec un personnage qui a beaucoup d’une caricature : une petite fille qui voulait être danseuse jusqu’à ce que la vie la fasse hôtesse de l’air. Des airs de rebelle parisienne dans un cadre aseptisé, une vie de princesse fêlée. Il faut aussi composer avec la façon dont seront évoqués ces jours sous terre. C’est la substance même du roman, ce qui le nourrit, ce dont il procède. Et pourtant, il ne s’agit pas de faire du spectaculaire, du gore ou du trop factuel car tout le reste du propos serait alors impossible à tenir.



Oui, il faut un sens certain de la mesure et de la nuance.

La place qu’occupe le Japon, la quête d’identité, le retour sur soi m’ont bien sûr rappelé La patience des traces mais j’ai trouvé ici un dispositif bien moins démonstratif que celui mis en place par Jeanne Benameur. Certes, les personnages ont en commun de relever d’une forme d’archétype mais Insula se fait beaucoup plus épuré dans le traitement de la quête. Seuls deux ou trois personnages et une île suffisent à travailler la matière du souvenir, à faire affleurer les récits qui doivent, une fois qu’ils auront joué leur rôle d’éclaireur, retourner à leur place enfouie.



Je n’ai trouvé assénée aucune théorie psychologisante sur le trauma, aucune propension à faire de la bonne santé mentale l’étalon d’une nécessaire performance. Pas plus que je n’ai lu le recours abusif à une symbolique écrasante. La dimension mythique des récits est bien présente, les fonctions symboliques et les résonnances du mot « île » aussi mais comme soutiens et non comme exhibition d’un savoir pédant. C’est un livre qui sait faire discret ses fondements référentiels.



Alors, si on accepte des personnages relevant davantage du conte que du réalisme, Insula peut être salué comme un habile travail d’écriture dont la justesse m’a surprise, une réussite sur le plan littéraire. Je remercie Babelio et les éditions du Seuil pour cette jolie découverte.

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Les heures solaires

Les heures solaires Caroline Caugant chez Stock janvier 2019, #LesHeuresSolaires #NetGalleyFrance

EXCELLENT, EXCELLENT ... Un roman qui doit retenir votre attention.

Billie vit à Paris, ce soir là elle est devant son chevalet, le fusain en main. le téléphone sonne, il est fort tard. La maison de repos où sa mère demeure depuis quelques années lui annonce qu'elle s'est noyée dans la rivière. Sa mère cela fait déjà 3 ans qu'elle ne l'a pas vue. Elle qui pensait à l'instar d'Oscar Wilde qu'il suffisait de ne pas parler de certaines choses pour qu'elles n'existent pas ou plutôt qu'elle n'existent plus. Mais oublie t'on vraiment? Rien n'est moins sur. Billie va devoir retourner sur ses pas, refouler les rues de V., son village natal illuminé du soleil de Provence, repartir sur le chemin des mémoires, de la sienne et de celles des femmes de sa famille.

Un roman époustouflant qui m' a tenue en haleine. L'écriture de Caroline Caugant est à la hauteur de l'enjeu. Les mots, les sons, les couleurs tout y est. Trois femmes, trois générations et le poids du secret ..

Un grand merci aux éditions Stock pour ce partage.

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Les heures solaires

Je remercie les éditions Stock et Netgalley pour cette lecture.



Mon premier Arpège, mon premier coup de coeur de cette année 2019.



Les heures solaires, c'est l'histoire de trois femmes. Billie, Louise, Adèle. Trois générations. Des secrets. V. et sa rivière.



Le roman s'ouvre avec la mort de Louise. Malade, (Alzheimer, sans doute, même si cela n'est pas précisé), elle est sortie de l'établissement où elle vit désormais et elle s'est noyée dans la rivière. La rivière de V. L'occasion pour Billie de revenir aux sources.



"Louise s'est noyée. Seul ce fait compte. Billie doit se concentrer dessus, l'intégrer : le 21 juillet s'achevant, sa mère s'est noyée. La veille de son anniversaire. Elle n'avait pas soixante ans, mais elle avait quitté le monde depuis longtemps."



Billie, qui avait quitté V. très jeune. Besoin de s'enfuir, besoin de liberté. Besoin de mettre de la distance avec ses origines. Pour s'installer à Paris où elle est désormais artiste. Une artiste en manque d'inspiration.



"Billie contemple la page blanche devant elle, se dit qu'elle pourrait dessiner ce qui la bouleverse. Sa douleur. Et l'autre douleur aussi, plus ancienne, qui revient, la prend à la gorge. Peut-être que lui donner une forme précise la calmerait momentanément."



Le quatrième personnage de ce roman est sans aucun doute l'eau et même la rivière de V. Cette rivière qui relie étroitement et éloigne à la fois Adèle, Louise et Billie. La rivière est la gardienne de leurs secrets, de leurs actes. Sereine, fraîche, et mystérieuse, telle une geôlière, la rivière est silencieuse et oppressante. Protectrice et sentinelle, elle met en garde dans le même temps qu'elle rassure.



Les heures solaires, c'est définitivement une histoire de femmes, une histoire de famille dont les liens entre les membres se désagrègent. Une famille où chacune semble être une inconnue pour les autres. Parce que finalement la grande question de ce roman est de savoir si l'on devient un monstre de mère en fille ? La portée des actes est-elle héréditaire ? Des secrets de famille et de la culpabilité découle une grande solitude. Parce que chacune se tait, les autres ne savent pas, ou ne disent rien. Mais le temps et l'éloignement enterrent-t-ils les secrets et les non-dits pour les enfouir dans l'oubli ?



"Comme l'eau de la rivière, les secrets enfouis se faufilent, même dans les creux les plus infimes. Ils vous habitent et habitent vos enfants. Ils dégorgent, reviennent sous une autre forme."



Au fil des pages, Caroline Caugant distille des révélations sur ces trois femmes. On en apprend un peu plus à chaque paragraphe. Mais pas trop à la fois, tout est savamment dosé pour que l'on n'ait pas envie de poser le roman, mais au contraire de lire d'un seul souffle, tellement on est tenus en haleine.



"Flip flop.

Le cerveau cerné par sa propre respiration. le souffle puissant amplifié sous le bonnet de bain.

Inspiration. Les bras musclés vont et viennent à un rythme parfait. Ils percent l'eau, droits comme des dards, et en altèrent à peine la surface.

Expiration lente. Les jambes se tendent et s'ouvrent comme un compas, tous les atomes du corps épousant parfaitement l'eau. La pesanteur désagrégée.

Inspiration. Les bras recommencent leur mouvement vers l'avant. Ils tracent la poupe d'un bateau.

Expiration.

Le corps valse."



La plume de Caroline Caugant est fluide. Ses mots s'écoulent doucement telle la rivière de V. Mais en même temps, le récit est rythmé, comme si un courant nous emmenait par moment dans des rapides. L'auteure maîtrise le suspense. Mais surtout, l'écriture est superbe et ensorcelante.



Les heures solaires, c'est beau, c'est captivant. A lire en retenant sa respiration, pour ne pas boire la tasse, et se noyer dans les secrets de Billie, Louise et Adèle. Un roman bouleversant autant que captivant dans lequel la nature et l'élément eau sont au centre.



"Le temps des papillons noirs et des heures solaires."
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Insula

Voler encore et toujours.



Printemps 2024. Line, hôtesse de l'air, est au mauvais moment au mauvais endroit. Elle se trouve à Tokyo lorsque le Big One se déclenche. Avalée par la terre, celle-ci fini par la recracher huit jours plus tard. Traumatisée, Line va entamer un long et douloureux chemin vers sa renaissance.



Au moment où j'écris ces lignes un séisme de magnitude 7,5 sur l'échelle de Richter vient de secouer le Japon. Fort heureusement les dégâts ne sont que matériels et l'alerte tsunami a été levée (Edit du 2/01: Il y a eu des victimes malheureusement). La réalité n'a heureusement pas rejoint la fiction.



Caroline Caugant place son récit dans une légère anticipation où cette fois-ci le Big One, un séisme de magnitude 9,5, détruit Tokyo au printemps 2024 et fait de nombreuses victimes. Line est l'une d'entre elles. Huit jours vont s'écouler avant la délivrance. Huit jours d'horreur. Huit jours dans le noir, le silence, rayée du monde extérieur.



Physiquement en vie, Line est intérieurement morte. Traumatisée, amnésique puis hantée par les réminiscences de plus en plus fréquentes de l'enfer. L'héroïne disparaît peu à peu du monde. Comment revivre quand la mort nous a effleurée ?



Line s'accroche à une main amie. Celle de Saki. Prisonnière comme elle de ce linceul de verre et de beton, elle est celle qui a permis à Line de revenir à la vie. Line se rend ainsi sur l'île de l'Atlantique où a vécu Saki, pour comprendre, pour renaître.



Cette histoire se lit très agréablement grâce à la plume sensible et poétique de Caroline Caugant. le récit est aussi délicat que le sujet est difficile. le lecteur ressent une immense empathie pour ces deux femmes liées malgré elles par l'indicible.



En somme, ce roman montre un beau chemin de renaissance.



Je remercie les éditions Seuil et Babelio pour l'envoi de ce roman.



MASSE CRITIQUE PRIVILÉGIÉE



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Les heures solaires

Caroline Caugant a imaginé une sorte de thriller familial pour son entrée en littérature. Avec «Les heures solaires», elle nous propose de découvrir les secrets de famille qui entravent la vie de Billie, jeune artiste parisienne.



«Tout semble si intelligible tout à coup. Formidablement évident et formidablement complexe. C’est comme une toile qui se serait tissée dans le temps, modifiant peu à peu l’architecture de base, mais sans rompre les liens primordiaux. D’abord un premier fil horizontal qui se déroule à partir d’un point précis, il se tend, s’accroche quelque part. Un nouveau fil part du premier, et ainsi de suite. Les fils se multiplient, s’entrecroisent jusqu’à former un tissage complexe. On appelle ça les mémoires transgénérationnelles, mais pour Billie c’est une véritable œuvre d’art.» Le premier roman de Caroline Caugant est une passionnante exploration de ces secrets de famille, de ces liens aussi invisibles que forts qui unissent au-delà des générations, à moins qu’ils ne soient la cause de différends à priori inexplicables.

Le roman s’ouvre au moment où Billie apprend la mort accidentelle – ou supposée telle – de Louise, sa mère. Fuyant la vigilance du personnel de sa maison de retraite, elle a été retrouvée noyée dans la rivière attenante. Bien que n’entretenant plus que des relations très épisodiques avec sa génitrice, Billie suspend la préparation de son exposition de peinture prévue dans une galerie parisienne pour assister aux obsèques et organiser la succession. Le notaire lui apprend qu’elle hérite de la maison où elle a passé son enfance, car les frais de prise en charge de sa mère à l’hospice ont été assurés par un «bienfaiteur».

Un mystère de plus pour la jeune artiste qui n’a toutefois guère envie d’en savoir davantage. Pour l’heure, elle entend confier la vente de la maison à un agent immobilier et rentrer à Paris où on l’attend pour mettre en place son exposition.

Mais les derniers événements l’ont passablement perturbée et son inspiration est en panne. Aussi quand on la rappelle pour l’informer que des acheteurs sont intéressés, elle décide de retourner sur place, même si sa présence n’est plus requise. C’est que la conjonction des éléments accumulés a éveillé sa curiosité et conforté son intuition. Elle a désormais envie de comprendre ce qui s’est passé cet été-là entre Henri et Louise. Pourquoi sa mère a choisi de disparaître et quel est l’origine de son mal-être. Des confidences et un journal intime vont éclairer le mystère, expliquer pourquoi Louise n’a jamais rien dit d’Adèle et Jacques, des parents tout simplement effacés de son existence.

Dans le cadre de sa formation de psychothérapeute, mon épouse a longuement étudié la psychogénéalogie, une discipline qui tente d’expliquer les traumatismes à la lumière de l’histoire familiale. Si je me suis attaché avec beaucoup d’intérêt au parcours de Billie, c’est qu’il illustre parfaitement le cheminement souterrain qui façonne une psychologie et qui conduit à prendre des décisions en fonction d’événements passés que l’on peut tout au plus pressentir.
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Insula

Tout d’abord, merci aux éditions du Seuil et à Nathan de Babelio, pour ce livre, dont je ne connaissais pas l’autrice. Une découverte mitigée, j’ai du mal à savoir si j’aime ou non. C’est certain, j’ai préféré la deuxième partie.



« 1855, Edo. 1923, Tokyo. 1995, Kobe. 2011, Fukushima. Il y a les mots des survivants, qui racontent la même histoire : le grondement extraordinaire de la terre, la manière dont celle-ci hurle avant d’avaler les hommes. Certains parlent d’un cri de colère, d’une rage immense laminant les sols, d’autres évoquent une souffrance, déchirante, celle d’un monstre à l’agonie. »



Printemps 2024. En dehors de ses plannings de vol, Line, hôtesse de l’air, était de réserve six fois par an : pendant quatre jours, elle devait se tenir prête à remplacer tout membre d’équipage défaillant. Elle ne savait jamais si elle volerait, ni vers quelle destination. Un matin, elle fut déclenchée sur Tokyo. A son arrivée, elle décida de visiter la ville, elle avait entendu parler d’une coutume populaire au temple Senso-ji et décida de voir ce que l’avenir lui réservait.



« Tokyo au printemps

La saison de l’hanami

La beauté éphémère des fleurs des cerisiers



Sous la voûte du ciel

La grande lanterne rouge

A l’entrée du temple Senso-ji



Puis les cris

Les pulsations de la terre

La pluie de verre et d’acier »



Line venait de quitter le temple, lorsque les téléphones étaient devenus fous autour d’elle et s’étaient mis à sonner « Jishin desu ! Jishin desu ! ». Un mugissement était venu du dessous, comme si une créature se faufilait sous leurs pieds en raclant la voûte du sol. Le cri d’une bête, d’un dieu trahi qui gueulait sa fureur. Puis les immeubles s’étaient mis à bouger, à se tordre, aussi facilement que des roseaux pris dans des bourrasques. Les façades s’étaient déchirées comme du carton. Les morceaux de verre avaient volé. Les rues s’enfonçaient, se hérissaient sous une pression monumentale. Et le hurlement de la terre couvrait cette folie. Un tremblement de terre sans précédent eut lieu. Line se retrouvera sous terre, dans un boyau étroit durant huit jours, en compagnie de Saki. Elles se raconteront leur vie, pour passer le temps, en espérant qu’on les retrouverait et qu’elles s’en sortiraient vivantes. « Tap tap tap »



A son retour Line, souffre de stress aigu, de détresse émotionnelle, d’un sentiment de confusion, le moindre bruit la fait sursauter, des vagues de panique la laisse sans force, les images la hante. La compagnie, juge qu’elle est maintenant inapte et elle sera suspendue des plannings de vol. Elle refuse d’être accompagnée par un psychologue. Elle pense pouvoir se remettre seule, il lui faut du temps et panser ses blessures.



Un jour, elle disparait sans un mot et part se réfugier à Insula, une petite île, où elle peut replonger dans ses souvenirs, sa jeunesse. Elle retrouvera les traces de Saki, qui a vécu sur cette île, jusqu’à ses quatorze ans, J’ai bien aimé la partie qui concerne cette dernière, elle nous dévoilera ce qui la perturbe : le départ du Japon, l’exil sur l’île française, le déracinement, ses peines, sa vie sur cette île assez particulière, loin de tout, surtout en tant que hafu, une métisse qui ne sera jamais vraiment acceptée. Saki était une enfant d’ici et d’ailleurs, écartelée entre deux îles, deux océans, deux continents.



J’ai moins aimé les retours sur le passé de Line, la fin me laisse un peu dubitative, j’aurais aimé en savoir un peu plus.



J’ai aimé cette phrase : « L’espoir n’a pas de fin », prononcée par la mère de Saki, je trouve qu’elle est tellement vraie.



Bonne lecture et bonne fin d’année à tous.

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Insula

Le séisme qui change toute la vie



En racontant comment Line, victime d'un tremblement de terre au Japon, tente de redonner un sens à sa vie, Caroline Caugant explore la psyché humaine après un traumatisme majeur. Un roman aussi éclairant que bouleversant.



Comment se remettre d'un tel traumatisme? Line, hôtesse de l'air, se promène dans un quartier populaire de Tokyo au moment où se déclenche le Big One, ce tremblement de terre tant redouté. Le séisme ravageur l'engloutit littéralement et durant des jours, on n'a aucune nouvelle d'elle. Mais le miracle va avoir lieu. Elle est déterrée vivante au milieu du chaos, ayant pu boire l'eau qui ruisselait autour d'elle.

Après deux soins, elle peut regagner Paris et retrouver Thomas, l'homme croisé lors d'un vol pour Montréal et qui partageait sa vie depuis six mois. Mais la Line qui lui revient n'est plus la même: «Le corps de Line avait gardé, intact, caché quelque part dans une zone inaccessible ce que le choc avait effacé de sa mémoire. Puis un jour, les souvenirs de Tokyo sont remontés avec une telle clarté, une telle intensité, qu’ils l’ont submergée. Alors elle a fui. Elle est partie là où l’appelait sa mémoire.»

Thomas va alors tout faire pour l'aider, mais sans y parvenir. La vie en société, les déplacements, les incertitudes du quotidien sont autant de piqûres de rappel d'un traumatisme persistant. Alors prendre un métro qui s'enfonce sous terre ou voir la nuit tomber hors de chez soi deviennent des épreuves. Si Thomas se dit que reprendre son travail au sol peut servir à retrouver de la stabilité, Line ne va pas pouvoir assumer. Elle n'a alors qu'une envie, fuir.

C'est ce qu'elle va finir par faire, direction une île sur l'Atlantique où elle va pouvoir se confronter à ses fantômes. Un père absent, un premier copain victime d'un accident de la route, le rêve d'une carrière de danseuse qui se brise, mais surtout Saki, son double, celle qui a partagé sa «longue nuit sous terre», celle qui a survécu à ses côtés. «Line le savait maintenant, elle était revenue de Tokyo uniquement parce qu'elles étaient deux. Deux âmes affrontant la folie qui guettait, refusant de s’incliner, se tenant la main, et dialoguant pour ne pas sombrer. Ensemble elles pourraient se souvenir. Et guérir.»

Aux côtés de Rose, une insulaire qui va lui proposer de faire quelques heures de ménage dans sa maison, elle va avancer vers la lumière.

En retraçant ce difficile parcours, Caroline Caugant n'élude rien de ce combat à l'issue incertaine, mais à l'image des courts poèmes, comme des haïkus, qui viennent clore certains chapitres, elle montre la force des mots, l'importance du lien, la nécessité de pouvoir s'appuyer sur des histoires pour se construire et se reconstruire.

Comme dans son précédent roman, Les heures solaires, la romancière s’appuie sur un voyage pour permettre à son intrigue de se dénouer et à son personnage principal de se transformer. Billie gagnait le Sud de la France, Line la côte Atlantique. Mais à chaque fois, cette quête se fait dans la douleur. À la hauteur du traumatisme subi.

NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu’ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.




Lien : https://collectiondelivres.w..
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Les heures solaires

Bien sombres ces heures solaires. Caroline Caugant nous narre la vie de trois générations de femmes, leurs amours, leurs secrets. Quelques longueurs avant d'entrer vraiment au coeur du récit mais cela vaut la peine de s'installer au bord de la rivière de V.



Adèle, Louise, Billie, trois générations d'amoureuses. le village de V. pour écrin. C'est là que s'écoule la rivière immuable qui abrite les culpabilités, les regrets, les dessous de leurs histoires. L'eau qui nettoie, tue, efface. Telle Léthé, une rivière de l'enfer pour témoigner du passé.



Billie, amoureuse intermittente, coupable à temps plein d'un crime qui n'en est pas un. Louise héritière du journal d'Adèle, de sa culpabilité. Ces lignes, fils ténus qui occupent l'esprit et gangrènent l'avenir.





Cette fresque familiale a quelque chose de dramatique, chacune de ses femmes ayant vécu passionnément des heures solaires, lumineuses, puis sombres au coeur de V.



À l'acmé du roman, l'auteure nous embarque dans la quête de Billie pour comprendre cette mère perdue, qu'elle n'a jamais appelé autrement que Louise, fuie à 17 ans. La place de "l'Oncle Henri", son retour dans sa vie.



D'aller-retour dans la vie de Louise et Adèle, Bill va grandir devenir pleinement Billie. Femme capable de choisir comment vivre ou non son amour avec Paul.



Caroline Caugant impose son tempo à trois temps. Une valse pour nous emporter dans ce voyage initiatique qui permet désormais à Billie, de créer, choisir, aimer. de comprendre son héritage, de se l'approprier, de donner une place à chacun.



On se laisse captiver, flotter dans les eaux tumultueuses du récit de ses femmes animées par la recherche du bonheur. Un roman sensible pour évoquer la filiation mère-fille, le poids des non-dits, le modèle. Louise était mère et femme. Billie le découvre au gré de la plume enveloppante, captivante de l'auteure. La rivière tumultueuse de V. denoue les fils du passé, a quelque chose de mystique, berceau des secrets. Elle s'adoucit pourtant au fil des révélations.



Une belle découverte offerte par la collection Arpège des Editions Stock. Premier roman prometteur de Caroline Caugant.



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Insula

"L'insula, ou cortex insulaire, constitue un des deux lobes du cerveau situés en position interne, et fait partie du cortex cérébral.Idéalement située pour recevoir un certain nombre d'informations relatives à l'état du corps, elle intervient à plusieurs niveaux en particulier le contrôle de certaines émotions, peur, colère, joie, tristesse et la conscience du soi"

futura-sciences.com



Line est une jeune femme heureuse. Heureuse en amour auprès de Thomas, heureuse dans sa vie professionnelle, elle est hôtesse de l'air longs courriers. Aujourd'hui elle est décrochée et part à Tokyo ... Sa vie va basculer , elle va être retrouvée vivante dans les décombres du tremblement de terre . 8 jours, 8 jours coincée dans un réduit dans le noir sans boire ni manger. heureusement l'eau de pluie s'est infiltrée.. Vivante oui mais qu'est devenue la Line de Thomas?



Caroline Caugant s'attache à nous décrire les affres par lesquels Line voit les jours s'écouler . Le passé resurgit Line a 6 ans, 8 ans ... Line sursaute à chaque instant, se noie dans des réminiscences mais il manque toujours un maillon, sa mémoire est infidèle .. Il lui faudra partir , s'isoler pour enfin se retrouver.



Un sujet difficile que Caroline Caugant prend à bras le corps. L'écriture est à l'image des tourments de Line, certains passages semblent sortir de nulle part mais sont au final à leur juste place. Une lecture marquante.

Un grand merci aux éditions su Seuil via Netgalley pour ce partage

#Insula #NetGalleyFrance !

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Insula

Line, hôtesse de l'air, fait escale à Tokyo lorsque le Big One - le Grand Séisme - fait s'ouvrir la terre qui l'absorbe toute entière. Coincée huit jours sans secours, ni nourriture ou eau, elle survit. De retour à Paris auprès de son mari aimant, elle ne trouve pas de réconfort. Stress post traumatique, syndrome du survivant: comment reprendre sa vie normalement quand ses pensées restent enterrées à des milliers de kilomètres de là? Alors, elle décide de partir retrouver ce qu'elle a perdu: elle-même.

Superbe roman dévoré d'une traite, quelques heures rares d'une incroyable sensibilité, j'ai été happée par cette histoire et par le parcours de Line, sa vie intérieure, ses doutes et ses peurs, la difficulté d'avancer, de s'arracher à la facilité qui entrave... c'est une superbe découverte, envoûtante, un récit intime mais implacable, avec des personnages fragiles et forts, bref, que du bonheur.

Je remercie Babelio et les éditions Seuil de m'avoir fait découvrir cette autrice et ce livre en particulier (apparemment c'est son second, je vais donc vite chercher le premier...) dans une édition de Masse Critique, c'est un très bon roman pour la rentrée littéraire de janvier.
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Insula

Elle s’envole…plus comme la danseuse d’autrefois mais elle est libre et ouverte au monde avec son métier d’hôtesse de l’air. La terre ferme, ce sont les escales. Son ancre, c’est Thomas. Et puis, un jour, il y a Tokyo. Un bruissement, des immeubles qui ondulent et la terre qui se déchire et la gobe comme un vulgaire parasite, englouti par Namazu, le légendaire poisson-chat.



Le gouffre, le black-out, Line n’est plus…



Tap tap tap



Un son, un souffle de vie dans les entrailles de la terre.



Tap tap tap



Un éclat de lumière dont il faut se protéger et une libération éphémère.



L’âme est restée accrochée à la noirceur du monde. Survivre est-ce vraiment vivre encore? Qui nous donne le droit d’être là et pas les autres? S’évaporer doucement pour disparaître tout à fait. Puiser dans son âme et dans la fugue un moyen de se rappeler et de guérir.



Insula est le roman de la dualité. L’avant-l’après, deux femmes, deux cultures, deux villes, deux îles se mêlent dans cette histoire particulièrement bouleversante. Le traumatisme et la résilience s’habillent de poésie et de légendes et nous embarquent dans un voyage où les sens et les émotions sont exacerbés. Quelle est donc cette merveilleuse île de l’océan Atlantique qui panse toutes les blessures? Merci à Babelio pour cette belle découverte.
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Les heures solaires

Première immersion dans la nouvelle collection « Arpège » des Editions Stock. Première découverte de ses couvertures sublimes et de ses textes « résolument romanesques ». Premier enthousiasme !



Caroline Caugant a une très belle plume et une manière bien à elle que nous mener dans ce premier roman captivant.



Au décès de sa mère Louise, Billie qui ne l’a pas revue depuis trois ans, retourne à V., village de son enfance. Le passé s’impose, lourd et enveloppant, jour et nuit, mêlé à sa propre histoire, son présent complexe, son aventure amoureuse, sa vie professionnelle. Les souvenirs se lient à la rivière – l’eau qui nettoie, tue, efface. Cette eau qui resurgit à chaque pensée.



Qui était Louise ? Qui était Adèle ?



Billie, Louise et Adèle, trois générations de femmes aux destins intimement liés dont on partage un à un les secrets. Les faits s’imbriquent et l’on découvre l’impact des non-dits, les mystères, les interrogations - ces fils ténus qui occupent l’esprit et gangrènent l’avenir.



Un roman sur la filiation, les relations mère-fille, l’enfance, l’amitié, la culpabilité et l’amour.

Un roman passionnant.
Lien : http://aufildeslivresblogetc..
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Les heures solaires

Le lancement d’une nouvelle collection est toujours un événement. Le fait que cela soit Caroline Laurent qui s’y colle pour les éditions Stock n’a fait qu’attiser mon envie de rapidement découvrir les premiers ouvrages. J’ai ainsi découvert Les heures solaires de Caroline Caugant.



« Comme l’eau de la rivière, les secrets enfouis se faufilent même dans les creux les plus infimes. Ils vous habitent et habitent vos enfants. Ils dégorgent, reviennent sous une autre forme. »



Billie, artiste peintre de 37 ans, est en pleine préparation de sa prochaine exposition quand le drame lui est annoncé par un coup de téléphone : sa mère Louise s’est noyée dans la rivière. La rivière… cette fameuse rivière, douloureux souvenir pour Billie qui ressurgit des années après alors qu’elle a tant veillé à l’oublier.



Billie stoppe tout et retourne à V. son village d’enfance, renouer avec tous ces démons, ces mystères et non-dits qu’elle avait jusqu'à présent réussis à dissimuler…



Souvenirs et flash-back se partagent avec l’histoire de sa mère Louise et « du monstre » mais également celle de sa grand-mère qu'elle n'a pas connue. Le retour en enfance se transforme en découverte de l’histoire familiale. Et elle n’est pas au bout de ses surprises…



« Je voulais que le temps de ton absence s’évanouisse, que cette période de solitude soit engloutie par la béatitude de nos retrouvailles. »



D’une âme tourmentée (l’émouvante et dramatique amitié avec Lila), Billie se transforme petit à petit… Ces lourds secrets de famille (qui est Henri ? Qui est Jacques ? qui est le monstre ?) lui font voir les choses différemment, mais surtout lui font comprendre les silences, les comportements et les constructions face à l’absence. Ces trois histoires d’apparences distinctes se ressemblent, se répètent quelque part et ne font plus qu’une. Tout se mêle, s’entremêle et finit quasiment par se confondre.



« C’était les vibrations de l’air chaud, la terre prise dans les sandales, succion des pieds nus sur les semelles mouillées, corps fatigués arpentant les côtes raides, mains arrachant les mûres et les fraises des bois le long des chemins, bergeronnettes des ruisseaux traversant les saisons, frelons vrombissants au-dessus des fronts fiévreux avant que les orages ne balayent les heures chaudes. »



Si le fond est riche, la forme n’est pas en reste. C’est extrêmement bien construit et écrit. Jamais l’intérêt ne faiblit bien au contraire on a de plus en plus de mal à lâcher l’ouvrage tant c’est captivant. Les parties sont équilibrées, les chapitres sont de tailles diverses mais on les avale rapidement. On tourne frénétiquement les pages… sans pour autant survoler. En effet, l’écriture est si belle, aérienne et lyrique. Les phrases sont soigneusement construites, les descriptions sont très évocatrices. L’alternance épistolaire de la grand-mère à son amour de soldat, ce fameux carnet qui révélera tant de choses sur l’épopée familiale ainsi que les souvenirs de Lila (ses premiers amours, son amitié fraternelle avec Lila et ses parents, ...) rend le récit extrêmement attractif et fluide.



Doux et poétique à souhait, ce roman va être une merveille en lecture audio. De même, les relations complexes mère/fille, les lourds secrets de famille, les commérages dans les petits villages dans lesquels tout se sait... tout semble si réel et réaliste sous la plume de Caroline Caugant. Chapeau bas à l’auteur pour cet immense travail et réussite !



« Dans les rues de V. les accents chantaient, planaient au-dessus des peaux burinées par le soleil. Mais plus bas, au ras des portes cochères, là où couraient les fissures, se glissaient les cafards, les fourmis géantes, les scorpions et les têtes de diable, à la recherche d’ombres salutaires. Après les heures solaires, le clair-obscur apportait avec lui ses silhouettes fuyantes, pullulantes, dont les grouillements ressemblaient à des chuchotements. »



On s’attache très facilement aux personnages et aime accompagner Billie dans sa construction, sa reconstruction ou même sa vraie naissance finalement. Cela a beau etre une histoire très féminine, elle m'a passionné.

Les monstres engendrent ils les monstres ? Telle est la question sous-jacente tout au long de l’intrigue.



Cerise sur le gâteau, last but not least comme dirait nos amis britanniques : ce final… quel superbe bouquet final ! A l’instar d’un feu d’artifice, on repart heureux en refermant la dernière page de l’épilogue. Littéralement et véritablement conquis ! Un roman sublimement terminé, c'est à souligner tant ce n'est pas toujours le cas...



Les heures solaires est définitivement une merveilleuse découverte. Très romanesque, à l’écriture si envoutante et douce, au style si fluide et précis, vous ne pouvez qu’être emportés et conquis par cette histoire familiale de trois générations, trois époques, trois femmes…



Un grand roman se terminant en apothéose que je vous conseille très vivement. Une très belle lecture pour commencer l’année. Merci Caroline, Caroline et Valentine !



5/5





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