Citations - Les Fantômes de Kiev, Cédric Bannel
Les talibans refusaient ainsi les rasoirs et le papier toilette car le Coran n'en faisait mention nulle part, mais ils utilisaient sans vergogne explosifs, fusils d'assaut et missiles modernes. Ils critiquaient la liberté d'expression tout en inondant Internet de leurs vidéos afin de diffuser le plus largement possible leur propagande anti-occidentale. C'était kafkaïen et incompréhensible.

Le Premier ministre se tourna vers son ministre de la Santé.
— Je vais avoir besoin d'un sacrément bon dossier.
Mes équipes travaillent déjà dessus. il sera prêt ce soir.
— Les rumeurs ?
Les hypothèses les plus folles courent. Certains journaux à sensation parlent d'une possibilité de cent mille morts à plusieurs millions.
Le vice-Premier ministre s’épongea le front.
— On ne peut pas accélérer le test généralisée pour apprécier le risque à sa juste valeur ?
Le Premier ministre réussit à rester impassible. « Nous y voilà. »
— Nous n'avons pas encore fini ce test de grande échelle et je ne souhaite pas qu'on l'accélère à ce stade. De mauvais résultats pourraient entraîner une panique généralisée. La procédure scientifique doit rester parfaitement rigoureuse.
— Mais nous devons savoir la vérité.
— Non. C'est impossible. Pas de changement dans le calendrier.
— Et un test fait par des médecins militaires ?
Le Premier ministre éleva un peu la voix et jeta un regard circulaire autour de lui.
— J'ai dit : pas de test pour l'instant.
Pas de réactions, les participants semblant être tous tombés en catalepsie au même moment.
En lui-même, il poussa un grand soupir de soulagement. Déjà un point de réglé. Personne ne devait savoir l'horrible vérité. Car elle était impossible à gérer. Donc elle ne devait pas exister.

Chez les campagnards les moins évolués, une femme qui ne donnait pas d'héritier mâle à son mari devenait presque toujours la cible de moqueries dans tout le cercle familial. Un ventre fertile de bonne qualité devait produire des garçons pour pérenniser le clan, c'était ainsi. Ne pas avoir engendré de Male etait le signe d'une faiblesse de constitution. Ou, plus grave, d'une punition d'Allah.
Les belles-mères de telles femmes leur faisaient subir mille tourments, de même que l'entourage et les voisins. S'il arrivait, néanmoins et par malheur, que les maris soient eux-mêmes ridiculisé pour la pauvreté supposée de leur semence, inapte à produire un héritier, la situation était encore pire : ils se vengeaient parfois en assassinant leur épouse à l'occasion d'"accidents" domestiques. Un peu d'alcool à brûler sur la burqa, une allumette, et le problème de ventre mal reproducteur disparaissait dans un grand brasier.
Plusieurs milliers de femmes mouraient ainsi en Afghanistan. Chaque année.
Le monde entier suit les exploits du Mossad sans réaliser que, depuis la guerre contre le terrorisme, la France a renoué avec son expérience gaullienne de riposte violente contre ceux qui s'en prennent à elle. Le tableau de chasse des services secrets français est ainsi devenu quasiment industriel. Mais la France, elle, ne communique jamais sur ses opérations secrètes. Comme l'a écrit un ancien dirigeant des services, les réussites des agents secrets sont trés rarement connues, leurs échecs plus souvent relevés.
De ce passé riche et multiculturel, les talibans avaient voulu faire table rase. Ils avaient échoués : de tout le pays, des volontaires venaient aider à la reconstruction du site - Pachtouns, Tadjiks, Ouzbeks, Baloutches... un même peuple, toutes les ethnies confondues, uni dans la volonté de reconstruire ce précieux morceau de culture issu de leur passé commun. Un morceau de culture qui symbolisait la paix, le respect, tout ce que le pays voulait redevenir.
Edgar fouilla rapidement le cadavre de son assaillant. Il mit la main sur un permis de conduire au nom de Liviu Caudescu, une liasse d'euros et un téléphone portable. Il vérifia qu'il pouvait le déverrouiller en utilisant le doigt du mort. Voyant que cela marchait, il déchira un morceau de la chemise de ce dernier avant d'entourer son index.
— Toumez-vous, ça ne va pas être beau à voir, lançat-il à Cécile qui s'approchait pour aller aider Kateryna Mykoulyna.
D’un coup de couteau, il trancha la moitié de l'index, qu'il enveloppa du morceau de tissu avant de le glisser dans sa poche.
— On peut y aller maintenant.
Vous savez, je ne suis sans doute pas la première à avoir trompé son mari, mais provoquer sa mort en lui envoyant un commando de tueurs russes, ça, c'est quelque chose que je ne me pardonnerai jamais.
Dessous, dans l'obscurité, accroupies dans les immondices, plusieurs centaines de silhouettes, deux ou trois cents peut être, se terraient, serrées les unes contre les autres, recroquevillées comme une meute grouillante. Il semblait n'y avoir pas un centimètre carré de libre, juste cette masse d'êtres recroquevillés dans le noir en train de planer, de s'injecter, ou de fumer de l'héroïne.
Les rats de pont.
Les flammes des briquets embrasant les cristaux d'héroïne brillaient ici ou là, dévoilant par intermittences les silhouettes accroupies. Le bruit de la fumée avalée goulûment par les drogués résonnait. Chuiiiiit chuiiiiit chuiiiiit. Une sorte de bruissement parcourait la masse par moments, comme une onde invisible.

CIA, Mossad, MI6, DGSE, GRU : tous les services secrets du monde sont confrontés à la révolution des réseaux sociaux, dont les algorithmes rendent les fausses identités de plus en plus difficiles à protéger. Une seule photo en ligne, prise dans le cadre amical ou familial, peut ainsi être rapprochée d'autres clichés par les intelligences artificielles, et une identité fictive qui aura mis des mois à être montée se voir démasquée en quelques secondes.
C'est la raison pour laquelle les grands pays sont contraints de mettre sur pied des unités d'agents pouvant agir sous leur vrai nom, avec de vrais prétextes pour se déplacer à l'étranger. Évidemment, ces unités ne peuvent être composées que de civils, les anciens militaires étant par principe susceptibles d'attirer l'attention des renseignements adverses.
Une remise en cause forcée et complète du modèle traditionnel de l'agent action ex-militaire des forces spédales intervenant sous une identité fictive...
Les talibans refusaient ainsi les rasoirs et le papier toilette car le Coran n'en faisait mention nulle part, mais ils utilisaient sans vergogne explosifs, fusils d'assaut et missiles modernes. Ils critiquaient la liberté d'expression tout en inondant Internet de leurs vidéos afin de diffuser le plus largement possible leur propagande anti-occidentale. C'était kafkaïen et incompréhensible.