Anne-James Chaton Populations éditions P.O.L - où Anne-James Chaton tente de dire de quoi et comment est composé "Populations", à l'occasion de sa parution aux éditions P.O.L, à Paris le 20 janvier 2022. Et où il est question notamment de "L'Origine des espèces", de Charles Darwin, de "L'Interprétation des rêves", de Sigmund Freud, de "Témoignage", de Charles Reznikoff, de "l'Ancien Testament", de "La Rechercher du temps perdu", de Marcel Proust et des populations des cinq continents, même s'il en manque un.
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J’ai peur
Des sottises
que j’ai dites.
Je dois faire régime
De silence ;
Me fortifier
Dans le silence.
Le vagabond aux souliers éculés
Et aux vêtements sales et fripés –
Mains et visage sales –
Retire de sa poche un peigne
Et peigne avec soin ses cheveux.
En ce matin d’hiver enfumé
Ne méprise pas le diamant vert dans la ramure
Parce que c’est un feu de circulation.
Ayant travaillé tout le jour à ce qui est mon gagne-pain
J’étais las. Encore une journée perdue pour mon propre travail,
Me disais-je, mais j’ai commencé avec lenteur,
Et avec lenteur la force m’est revenue.
Assurément, la marée monte deux fois par jour.
J’allais dans 42ème rue à la tombée du jour.
De l’autre côté de la rue se trouvait Bryant Park.
Derrière moi marchaient deux hommes
Et j’entendis un peu de leur conversation :
« Ce que tu dois faire, disait l’un d’eux à son compagnon,
C’est décider ce que tu veux
Et puis t’y tenir. T’y tenir !
Et tu finiras sûrement par réussir. »
Je me retournai pour regarder celui qui proférait si bon conseil
Et ne fus pas étonné de voir qu’il était vieux.
Mais son compagnon,
À qui ce conseil était donné avec tant de conviction,
Était tout aussi vieux ;
Et à cet instant précis la grande horloge en haut d’un immeuble de l’autre côté du parc
S’illumina.
Her kindliness is like the sun
toward dusk shining through a tree.
Her understanding is like the sun,
shining through mist on a width of sea.
Sa bonté est pareille au soleil
filtrant à travers l'arbre au crépuscule.
Son indulgence est pareille au soleil
perçant la brume sur l'étendue marine.
Rails du métro,
Que soupçonniez-vous du bonheur
Quand vous étiez minerai dans le sol ;
Maintenant les lumières électriques scintillent sur vous.
and all I say
blown by the wind
away.

Je suis allé chez mon grand-père pour lui dire au revoir :
je m'étais inscrit dans une école dans l'Ouest.
Quand je suis entré,
mon grand-père, assis devant la fenêtre, s'est retourné vers moi
(malade, la peau jaunie, les yeux chassieux -
mais les cheveux toujours aussi noirs,
parce que mon grand-père n'avait pas un cheveu, pas un poil
de barbe gris -
il était assis devant la fenêtre, il lisait un livre en hébreu).
Il s'est levé avec difficulté -
il avait dû m'attendre, je pense -
il a tendu les bras et, à haute voix, il m'a béni :
en hébreu, évidemment,
et je ne savais pas ce qu'il disait.
Quand il a fini sa bénédiction,
mon grand-père a tourné la tête et a éclaté en sanglots.
"Je ne serai pas parti longtemps, Grand-père, ai-je dit
en mauvais yiddish, je reviens en juin."
(En juin, mon grand-père était mort.)
Il n'a rien répondu.
Peut-être n'était-ce pas pour cela que mon grand-père était
en larmes :
peut-être est-ce que malgré toutes les connaissances que j'avais
acquises au lycée,
je ne savais pas un mot du texte sacré de la Torah
et je partais dans le monde
sans la moindre parcelle de sagesse accumulée par mon peuple
pour me guider,
sans la moindre prière pour parler au Dieu de mon peuple,
une âme -
car ce n'est pas facile d'être un Juif, ou d'être un homme, peut-être -
que son ignorance condamne à trébucher et à échouer.
Jim entra dans sa maison
et prit une paire de guides
et ensuite dans l’écurie
et en passa une à l’âne
et sortit l’âne
et l’attacha à une clôture ;
et passa le noeud coulant de l’autre guide autour de la tête de
l’âne
et commença à tirer.
L’âne commença à faire un sacré bruit.
On trouva son corps le lendemain matin,
à quatre ou six mètres de la porte de l’écurie ;
le cou, juste derrière la tête,
affreusement meurtri.