Charlotte Davril

Nous apprenons de nos erreurs, nous grandissons de nos échecs. C’est peut-être pour cela que la vie continue de me foutre des bâtons dans les roues. Pour savoir ce qui arrivera à m’abattre. Malheureusement, ou bien heureusement selon le point de vue, je ne suis pas fabriquée pour baisser les bras. Mais je suis fatiguée de mener toutes ces batailles. Quand j’étais enfant et que mes parents coulaient encore des jours heureux je pensais qu’être adulte était merveilleux. On pouvait faire ce que l’on voulait. Je m’imaginais comme toute petite fille, avoir un travail, un mari, des enfants, une maison. Tout ce que les codes de la société nous inculquent.

Dans ta force de vivre malgré toutes tes épreuves, dans ta gentillesse malgré tous ceux qui t’ont fait mal. Tu es une femme forte, généreuse, et aussi intrépide. Mais cette dernière il faut que tu la découvres par toi-même. Tu n’es pas cette femme qui, montre au poignet, calcule toute sa vie à la minute près. Tu es un électron libre que l’on a essayé de brider beaucoup trop longtemps. Commence par t’ouvrir aux autres, va sur des sites de rencontre, accepte quand on t’invite boire un verre. Mais ton chemin commence dans ta tête et dans ton cœur.

Être sénile n’empêche pas de respecter les règles de bienséances. Vous êtes à une caisse prioritaire alors bougez votre cul fripé et laisser passer la dame. Elle va pour se rebiffer mais le caissier vient à mon secours en attrapant d’autorité les articles de la femme. Je vois bien que l’autre peau de vache bout de colère. Mais elle l’a bien cherché. Franchement j’hallucine. Les gens sont d’une incorrection à toute épreuve. Surtout les vieux. Ils se croient tout permis.

Elle fait mine de regarder son ordinateur de façon hautaine. Bon sang que je déteste ce genre de bonne femme. Celles qui pensent que leur âge leur confère un droit, que la politesse devient surplus. Dégoûté et passablement agacé je lui fais signe de m’y inscrire puis je sors rapidement de la mairie. Mais comme si cette journée de merde ne pouvait avoir de fin, je suis stoppé par une petite qui me rentre dedans. Tout se passe rapidement, elle me percute et sans que je ne comprenne comment se mélangent les pieds et tombe sur les fesses son sac se vidant complètement par terre. Je m’excuse et l’aide à ramasser ses affaires. Elle lève les yeux et mon cœur loupe un battement. Elle est magnifique. Pas mon type en général, car j’aime les petites brunes aux yeux clair mais là… une petite blonde, voir je dirais presque fausse blonde, aux yeux marrons me fait face avec un sourire des plus éclatant.

Ce n’est pas un baiser timide ou même doux. Il est vorace, dévastateur. Je vois qu’il ressent la même chose car il m’attrape par les hanches et me pose à califourchon sur lui. Je peux sentir son désir durcir contre moi. Il ne m’en faut pas plus pour me rendre complètement dingue. J’attrape le bas de son tee-shirt et le fais passer par-dessus sa tête. J’ai besoin de le sentir. Il en fait de même avec mes vêtements et avant même que j’aie eu le temps de dire ouf on est tous les deux nus. Bon sang c’est un régal pour les yeux. Il est taillé juste comme il faut. Ni trop ni pas assez. Ses abdos sont dessinés d’une telle façon que j’ai envie d’en faire le contour avec ma langue. Il doit voir le désir dans mon regard car un air de canaille s’affiche sur son visage. Sans un mot il m’attrape et me porte jusqu’à ma chambre.

Les bonnes habitudes sont dures à leur apprendre par contre toutes les mauvaises manies sont bien vite intégrées. Bien que fatiguée de ma journée je prends sur moi pour qu’il ne le remarque pas. Il joue avec ses dinosaures dans le salon pendant que je fais tourner une lessive.

je suis peut-être mère mais il n’en reste pas moins que je suis une femme avec des besoins et des envies. Doucement la porte s’ouvre sur Léna, une grande brune aux formes plantureuses. Que j’envie secrètement. Elle entre sans faire de bruit et m’apporte une tasse fumante de café. Oh délice ! je sors tout en laissant la porte ouverte pour surveiller les gosses. Elle arbore un grand sourire moqueur.
— Courte nuit ?
Je grogne et me réfugie dans ma tasse.
— Bande de commères ! ça faisait trop longtemps !
Je m’exclame pour me justifier. Elle rigole.
— Tu veux rire ? deux semaines ! sceptique je la regarde de travers.

L’âge est totalement subjectif. Il y a des personnes qui sont vingt ans plus vieux, qui ont des enfants alors qu’ils sont de très mauvais parents. Il suffit de voir dans les journaux. Tous ces enfants mal traités, battus, tués… Pour le travail, il est vrai que ce n’est pas un vrai boulot. Plusieurs fois j’ai essayé de la pousser à chercher ailleurs, à reprendre ses études. Mais elle élude toujours le sujet. Elle se sent bien comme elle est. La seule chose qu’elle me répond toujours c’est « J’ai confiance en l’avenir. Ne t’inquiète pas, je suis débrouillarde ».

J’aime passer du temps avec eux. Beaucoup trop de temps a passé loin les uns des autres. Mes mousquetaires me manquent. On a chacun nos vies, Maria bosse comme une dingue pour avoir son diplôme, les garçons sont souvent en régiment ou en mission sentinelle ou même en Opex. Parfois je me dis que la vie était plus simple quand nous étions adolescents. Pas de tracas de la vie adulte, notre vie tournait autour des potes et point barre. Le seul souci était de réussir à convaincre nos parents de nous laisser faire ceci ou cela.

Il n’y a que depuis que je suis seule avec mon fils que je taille la route avec lui. Mais aucun homme ne m’a jamais suivie. J’ai enfin l’impression de pouvoir être moi. C’est tellement libérateur. Je ne sais pas où notre relation nous mène mais elle me fait tellement de bien. Et surtout il me rend heureuse. Mais dans le fond je continue d’avoir peur. Je ne me connais que trop bien. Je sais que je ne vais plus pouvoir me retenir longtemps de tout lui donner. D’être entièrement à lui.