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Critiques de Chris Dingess (25)
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Manifest Destiny, tome 1 : La faune et la f..

Chris Dingess, le scénariste, a détourné le récit de l’expédition de Lewis & Clarke dans les terres encore inconnues de l’Ouest américain, en 1804, pour en faire un western violent et décalé dans lequel sont mêlés l’horrifique, le fantastique et même un zeste de mythologique.



Dans ces contrées sauvages, les hommes de cet odyssée découvrent une faune et flore monstrueuses et envahissantes que l’illustrateur Matthew Roberts a su mettre en valeur avec un perfectionnisme quasi réaliste (souligné par les couleurs vives d’Owen Gieni).



Bestiaire et monstruosités végétales restent impressionnantes d’inventivité et il en va de même pour la variété d’expressions que le dessinateur a su peindre sur les visages humains.



C’est donc avec intérêt et un grand enthousiasme visuel que j’ai suivi les aventures de ces conquérants d’un « Nouveau monde ».
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Manifest Destiny, tome 2 : Amphibiens et in..

Quelques semaines après les aventures horrifiques du premier tome de ce comics, nous retrouvons Lewis et Clark, continuant leur exploration du territoire nord-américain. Voguant sur une rivière qui leur réserve de nouvelles surprises et devant faire face (comme le sous-titre de ce tome l’indique) aux amphibiens et insectes aussi étranges que monstrueux.

Or, les deux explorateurs auront également fort à faire à essayer d’endiguer les envies de l’équipage masculin, depuis que (à la fin du premier volume) des survivantes sont montées à bord, dont une bien jolie jeune fille...



Comme dans le tome précédent, on suit la narration très terre à terre de Lewis qui consigne les découvertes des espèces dans un journal de bord et qui invente une technique risquée -pourtant logique- pour sortir son équipage du pétrin.

Malgré une faune pour le moins insolite (mais elle sort d’où celle-là et surtout pourquoi ?), à aucun moment on se dit : « c’est tiré par les cheveux, tout ça », non, on y croit !

Comme on ajoute foi aux dessins détaillés et marquants de Matthew Roberts qui « chatouillent » toujours agréablement les rétines. (mais âmes sensibles... etc., les quelques planches gore sont tout autant fouillées).

Une réussite narrative aussi bien que graphique.
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Manifest Destiny, tome 3 : Chiroptères et car..

L'expédition Lewis & Clark continue sa difficile progression dans une Amérique fantastique peuplée de créatures "lovecratfiennes"...



Cette fois, les aventuriers capturent une étrange créature à l'aspect d'oiseau, dotée de la parole et de dents acérées.

Ils sont aussi victime d'une chauve-souris démoniaque, qui rappelle d'ailleurs beaucoup le monstre des films "jeepers creepers"...



La qualité de cette série, est outre une originalité certaine, l'absence de manichéisme.

Les personnages, sont très réalistes, avec leurs faiblesses et leurs défauts.

Entre l'officier borné et bigot, les brutes épaisses, et le chercheur obsédé par ses découvertes au point d'y perdre son esprit humaniste, les protagonistes de Manifest Destiny ne sont pas des enfants de chœur, comme le démontre la conclusion de cet album qui regroupe les épisodes 13 à 18 de l'édition américaine.

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Manifest Destiny, tome 3 : Chiroptères et car..

Un comics un tantinet moins apprécié que les deux tomes précédents dans lesquels on avait tendance à croire dur comme fer à l’existence des créatures fantastiques qui peuplent les récits.

Ce n’est pas le cas ici, l’espèce « d’oiseau » aux crocs qui attaque un des hommes de l’expédition de Lewis et Clark n’est -physiquement- pas très crédible... bien plausible par contre, est l’exécrable comportement de l’Homme se sentant éternellement obligé de massacrer ou de détruire ce qui le gêne.

J’apprécie toujours autant les dessins aux traits quasi-réalistes, surtout dans l’expression des visages.
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Manifest Destiny, tome 1 : La faune et la f..

Mai 1804, le président Jefferson envoie un corps expéditionnaire à la découverte de l'Amérique sauvage.



But officiel: favoriser l'expansion des jeunes Etats-Unis.

But officieux: libérer le terrain de mystérieuses et monstrueuses créatures.



L'expédition fluviale s'apprête à rejoindre une étape quand elle est confrontée à une créature monstrueuse, sorte d'hybride de minotaure, de centaure et de bison.



Pensant trouver un abri au fort de La Charrette, elle est de nouveau la proie des créatures, puis doit faire face à une effrayante épidémie, sorte de lèpre végétale qui a décimé la population du fort....



Ce comics, est une belle découverte, le scénario est original et cohérent, les graphismes superbes quand ils représentent les panoramas naturels, effrayants quand ils nous montrent les "zombies".



Ce premier album réuni les 6 premiers n°s du comics .

Un tome 2 est prévu, j'espère qu'il paraitra comme annoncé (Delcourt est un éditeur sérieux, mais on n'est pas à l'abri d'une mauvaise surprise !)

J'attends la suite avec impatience !
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Manifest Destiny, tome 1 : La faune et la f..

Quand on mélange le western avec un autre genre, cela ne donne pas forcément quelque chose de sympa dixit Cowboys & Envahisseurs. Le western est quand même un genre à part qui possède ses propres règles. Là, on se situe en plus dans la période de découverte de l’Amérique du Nord où la carte des Etats-Unis n’était pas encore tracée. Il fallait explorer de nouveaux territoires souvent hostiles.



Là, nous avons un univers plutôt assez intéressant. C’est un comics ce qui rend la chose encore plus attractive. Cette même collection nous avait proposé Outcast qui était une véritable réussite. Bref, on sent une certaine qualité mise au profit de cette collection Contrebande de Delcourt aussi bien dans la mise en page que dans le scénario. C'est à découvrir.
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Manifest Destiny, tome 7 : Talpa Lumbricus ..

Ce tome fait suite à Manifest Destiny Volume 6 (épisodes 31 à 36) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 37 à 42, initialement parus en 2019/2020, écrits par Chris Dingess, dessinés et encrés par Matthew Roberts, mis en couleurs par Owen Gieni.



Avril 1805, enfin la neige a fondu, le printemps est arrivé et les premières fleurs commencent à pousser. L'une d'elle est écrasée sous la botte d'un soldat en train d'avancer. Le temps est venu pour l'expédition Lewis & Clark d'abandonner le fort Mandan et de reprendre leur voyage vers l'ouest. Le fort a rempli sa fonction d'abri quand le climat s'est avéré trop rude pour progresser, mais il recelait aussi son lot de mauvaises surprises. Trois soldats discutent et Randolph résume bien leur sentiment : ce sera peut-être le dernier lieu qu'ils pourront qualifier de foyer, mais les indiens peuvent bien l'investir, et il leur reste à oublier Pryor et sa ferveur religieuse. D'un autre côté, Meriwether Lewis n'en revient pas de l'effet que Jean-Baptiste, l'enfant de Sacagawea a sur les hommes : ils fondent devant ce jeune enfant de moins d'un an, se mettant en quatre pour le distraire. Néanmoins, Clarke a du mal à supporter l'attention que Toussaint Charbonneau porte à Jean-Baptiste, en particulier parce qu'il lui a donné un couteau de chasse dans son fourreau comme doudou. Pourtant, il est bien obligé de constater que l'enfant y est très attaché, au couteau comme au trappeur. Lewis est un peu préoccupé du fait qu'une seule personne semble insensible au charme du bébé : sa propre mère. Sacagawea remplit bien toutes les fonctions attendues, à commencer par le nourrir, mais ne fait montre d'aucune affection maternelle ou autre.



29 avril 1805 un petit détachement descend à terre pour recueillir des échantillons de flore. Un bruit étrange de se fait entendre prenant de l'ampleur. Soudain une énorme créature couleur chair sort brusquement de terre faisant voler un soldat dans les airs, puis l'écrasant de tout son poids. La riposte ne se fait pas attendre : les soldats font feu sur le monstre, avec leurs fusils. La créature monstrueuse meurt sous les balles, et les soldats ont tôt fait d'y accrocher des câbles pour la déplacer et récupérer le corps d'Etten. Mais le bruit comme un miaulement n'a pas cessé et il gagne même en intensité. Il ne semble y a voir qu'une seule initiative à prendre : descendre dans le trou d'où la créature a surgi. Clarke ordonne à Jensen de prendre quelques hommes avec lui et de descendre. Jensen se plaint d'avoir été choisi pour sa petite taille. Pendant ce temps, une chaloupe a amené Magdalene Boniface à terre pour qu'elle aide Lewis à examiner la créature. Il apparaît rapidement qu'il s’agissait d'une femelle, d'une créature herbivore, et qu'elle venait d'avoir une portée il y a peu. Pendant ce temps-là, le détachement de soldats est parvenu devant la source du couinement incessant.



Ouf : la série repart de plus belle, après un tome 5 qui avait montré une baisse de la qualité de la narration visuelle, et une interruption de parution significative entre le numéro 36 (août 2018) et le numéro 39 (octobre 2019), soit 13 mois de hiatus. Dès la première page, le lecteur est rassuré : la narration visuelle est revenue à son meilleure niveau. Owen Gieni réalise une riche mise en couleurs, certainement à l'infographie, qui évoque parfois la peinture (gouache). Il ne s'agit pas juste de refléter la couleur naturelle d'une étoffe, de la végétation, ou de la peau (l'horrible couleur chair de la créature femelle) : le coloriste apporte des éléments d'information visuelle supplémentaires. Il montre l'ambiance lumineuse Il rend compte des textures dans les surfaces détourées par un trait d'encrage. Par les couleurs, il peut ajouter un camaïeu en arrière-plan qui reprend la couleur dominante du décor des cases précédentes, s'il n'est pas dessiné dans la case correspondante. Il peut ajouter des éléments visuels comme la silhouette d'arbres, les nuages, la transparence de l'eau. Cette première rencontre avec un monstre met également en avant le travail de Rus Wooton : le lecteur ne peut pas ignorer le couinement Squeeee. Du coup, il remarque également l'écriture manuscrite de Lewis quand son journal apparait en commentaire d'un événement ou d'une réaction, ainsi que les quelques autres onomatopées judicieusement placées, bénéficiant toutes d'une police de caractère spécifique crée pour l'occasion.



Matthew Roberts est également revenu en bonne forme après cette année d'interruption. Le récit raconte une version officieuse de l'expédition Lewis & Clark, qui a traversé pour la première fois les États-Unis de camp Dubois dans l'Illinois jusqu'à Fort Clatsop dans l'Oregon, à proximité de l'embouchure de la rivière Columbia. Le lecteur éprouve vraiment la sensation de participer à cette expédition et d'assister à la découverte de nouveaux paysages, mais aussi de monstres, puisque cette version alternative imagine que l'expédition avait également pour but de clarifier les racontars sur l'existence de monstres présents à l'intérieur des terres, et de les éliminer si leur existence était avérée. Les dessins montrent bien ces terres sauvages que voient les soldats pour la première fois : la rive enherbée où les chaloupes ont été remisées pour regagner le navire, les plantes qui sont recueillies comme échantillon pour le botaniste, les galeries souterraines creusées par le monstre, l'eau pure de la rivière que les explorateurs peuvent boire, la forêt dense où nul être humain n'a encore pénétré, une vue du ciel des bras de rivière pour montrer la difficulté à choisir le bon chemin pour l'équipage, une plaine avec de hautes herbes jaunies par le soleil, une magnifique cascade à l'écart de tout.



Bien sûr, le lecteur attend également de voir les monstres. Là encore, l'artiste ne déçoit pas, à la fois par leur apparence, à la fois dans la manière dont ils s'en prennent aux êtres humains. Le premier monstre évoque donc un ver de terre anthropomorphe géant absolument écœurant avec sa chair à nue. Le second apparaît le remps d'un dessin en pleine page : horrifiant et imposant, le lecteur ressent l'effroi des explorateurs qui se retrouvent face à cette créature. Les suivants sont d'une nature très particulière, mais il est certain que le lecteur ne regardera plus jamais les lièvres de la même manière. L'avant-dernier est un serpent ailé dont l'artiste réalise une interprétation terrifiante et en phase avec le réalisme des autres éléments visuels. Le dernier est très mignon, et le lecteur sourit en le découvrant, tout en se doutant bien qu'il s'en révélera d'autant plus redoutable et sans pitié que sa forme est insidieusement trompeuse. Roberts a conservé toutes ses compétences de metteur en scène et de directeur d'acteurs. Les personnages sont tous uniques dans leur apparence et leur façon de se tenir. L'artiste privilégie une direction d'acteurs naturaliste qui participe à la sensation de suivre une expédition réelle. Il conçoit des plans de prises de vue différents en fonction de la nature de la scène. Le lecteur est tout autant aux abois quand Lewis retire une fleur non digérée couverte de sang des intestins du premier monstre (une petite case en insert) que lors d'une fête nocturne autour d'un grand feu qui mange une bonne partie de cases de la largeur de la page, révélant des situations cauchemardesques lorsque la flamme baisse d'intensité.



Même s'il est bien rompu à la routine de la dynamique de la série, le lecteur n'est pas au bout de ses surprises. Le scénariste tient ses promesses : l'expédition progresse dans sa route vers l'ouest et à chaque nouvelle étape elle est confrontée à un nouveau monstre (ou des nouveaux monstres) qui se montre agressif. Il sait varier le déroulement de chaque rencontre, qu'elle dure le temps de 2 pages, ou de deux épisodes. Le lecteur voit bien la répétition du schéma narratif (nouvelle halte = nouveau monstre) sans jamais trouver le récit répétitif, grâce à la diversité des monstres et de chaque affrontement. Les personnages ne sont pas sacrifiés : Dingess montre leurs relations interpersonnelles, les inquiétudes de Meriwether Lewis quant au comportement de certains, et le risque que ça dégénère. La réaction des adultes face au bébé est bien vue et tout à fait crédible. Le lecteur se délecte des agissements du lieutenant Arturo Maldonado, toujours aussi fourbe, semant la zizanie avec un savoir-faire consommé, un risque majeur pour l'expédition. À nouveau, le scénariste fait en sorte de ne pas répéter le schéma narratif déjà observé avec les agissements insidieux de Maldonado.



Le retour retrouve avec plaisir cette série, ayant eu très peur que les auteurs l'aient abandonnée en cours de route. Il a vite fait de constater que la narration visuelle a retrouvé son niveau de qualité initial : de superbes paysages, des monstres réellement horrifiques, des individus au comportement vraiment humain. Le scénario se fonde sur la dynamique basique de la découverte de nouveaux monstres au fur et à mesure des haltes de l'avancée, sans jamais tomber dans la répétition ou la redondance, avec une inventivité remarquable. Cette exploration de Lewis & Clarke réserve encore de nombreux moments forts, car ils ne vont pas arriver à Fort Clatsop avant quelques épisodes.
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Manifest Destiny, tome 4 : Sasquatch

Ce tome fait suite à Manifest destiny, tome 3 : Chiroptères et carnivores (épisodes 13 à 18) qu'il faut avoir lu avant. Dans la mesure où il s'agit d'une histoire continue, il faut avoir commencé par le premier tome. Celui-ci contient les épisodes 19 à 24, initialement parus en 2016, écrits par Chris Dingess, dessinés par Matthew Roberts, et encrés par Tony Akins & Stefano Gaudiano, avec une mise en couleurs réalisée par Owen Gieni.



Une expédition avait précédé celle de Lewis & Clark. En novembre 1801, à l'approche de l'hiver l'expédition précédente est obligée de s'établir pour se préparer à affronter les rigueurs de la saison. Les soldats construisent une longue cabane en rondins de bois, pendant que le capitaine Helm prend des notes dans son journal. Il passe rapidement en revue les événements qui ont conduit l'expédition à cette situation : des morts réguliers en affrontant des créatures monstrueuses, encore des morts cette fois-ci mangés par des herbes cannibales, le naufrage de leur bateau coulé par des monstres dans la rivière. Il ne leur restait plus qu'un seul recours : s'installer pour passer l'hiver, abattre autant de gibier que possible et cueillir toutes les baies semblant comestibles et pouvant se conserver. Mais fin décembre 1801, le rationnement commence à affecter le comportement des survivants, et l'un d'eux se pend à l'extérieur pendant la nuit ne pouvant plus supporter ces conditions de vie.



Au matin les hommes constatent le suicide et sortent pour dépendre le suicidé. Ils se rendent compte qu'ils ne pourront pas l'enterrer dignement car la terre est gelée. Le major Flewelling propose une autre utilisation du cadavre : le manger. C'est d'abord la stupeur chez les autres soldats. Le major refuse de céder quant au devenir du cadavre, par contre il indique qu'il n'obligera personne à consommer de la viande humaine. Certains hommes cèdent avec lui à la tentation car la faim est trop forte. Quelques jours après, le major Flewelling détecte un traître. Il l'exécute sur le champ. À nouveau, il refuse de gâcher de la chair fraîche. Le lendemain, le capitaine s'éloigne du campement. Il a décidé de mettre fin à ses jours, mais dans un endroit isolé pour ne pas servir de repas. Il éprouve l'impression d'assister à l'apparition d'un spectre qui prétend s'appeler le lieutenant Arturo Maldonado. En octobre 1804, l'expédition Lewis & Clark a atteint la cabane construite et occupée par l'expédition de 1801. Ils y retrouvent le crâne d'une créature avec un seul œil et des excroissances en formes de corne sur le sommet du crâne.



Le lecteur se retrouve décontenancé par l'entrée en la matière de ce quatrième tome. Il ne reconnaît pas les personnages. Il a beau fouiller sa mémoire, il ne se souvient pas d'un membre de l'équipage s'appelant Helm ou Flewelling. Il prend le temps de revenir en arrière pour reparcourir les notes du journal de bord et il fait plus attention à l'année portée dans la date : 1801. Tout s'éclaire : il ne s'agit pas de la même expédition. En voyant le crâne d'une créature monstrueuse, il se souvient qu'il a déjà été question de ces créatures surnaturelles dans le premier tome. Il comprend qu'il assiste à la déroute de l'expédition qui a conduit le président Thomas Jefferson à mandater l'expédition de Lewis & Clark. Il comprend qu'il lui faut faire l'effort de retenir le nom de ces nouveaux personnages qui constituent la première équipe ayant tenté de traverser le nouveau continent d'est en ouest. Dans le même temps, il se doute bien que tous ne vont pas en revenir. Il commence alors à échafauder des hypothèses en prenant en compte la rigueur de l'hiver, le comportement meurtrier du major Flewelling qui voit des traîtres partout, le cannibalisme et le titre qui évoque le monstre légendaire Sasquatch (aussi appelé Bigfoot). Pour un peu, il serait tenté de relier cannibalisme et existence du sasquatch du fait de la veine du récit.



Plus de la moitié du récit est donc consacrée à cette première expédition. Chris Dingess prend bien soin de ne pas se répéter. Il évoque en 1 case chaque rencontre avec des créatures monstrueuses précédemment affrontées par l'expédition de 1801, et il s'attarde plus sur les conditions de leur survie pendant l'hiver. D'une manière assez habile, il développe moins la découverte des ruines de la cabane de 1801 par l'expédition de 1804, consacrant un nombre de pages en opposition : plusieurs pour une époque contre une ou deux cases pour l'autre, et inversement lors de situations différentes. Par ce jeu des contrastes, le lecteur en vient à s'interroger sur ce qui a fait la différence pour l'expédition de 1804, comment elle a pu mieux s'en sortir que celle de 1801 face aux mêmes menaces. Mais la réponse n'est pas dans ce tome. Même en se doutant que l'expédition de 1801 aura toutes les difficultés du monde à survivre, le lecteur ne s'attend pas à ce que vont devoir affronter Helm et Flewelling. Il éprouve également un fort contentement à revenir en 1804 pour voir comment l'expédition Lewis & Clark réussit à progresser. Dingess leur consacre une quarantaine de pages sur 120 au total.



Comme à chaque fois qu'il ouvre un tome de cette série, le lecteur retrouve la narration visuelle épatante de Matthew Roberts et Owen Gieni. En découvrant que l'artiste n'a pas encré ses dessins par lui-même, il éprouve une petite appréhension, mais celle-ci est bien vite dissipée car les 2 encreurs respectent ses traits au point que le lecteur ne s'aperçoive même pas du changement. La complémentarité entre dessins et couleurs est toujours aussi épatante : Owen Gieni effectue lui aussi un travail d'artiste. Il sait donner de la consistance, du relief et de la texture à chaque surface, pour un résultat intégrant traits encrés et couleurs sans aucune solution de continuité. Il suffit de prendre pour exemple cette page composée de 4 cases de la largeur de la page qui montrent l'avancée d'une horde de bisons. Il faut que le lecteur fasse un effort conscient s'il veut dissocier les couleurs d'avec les traits de contour. Sous réserve de réussir à se livrer à cet exercice, il prend conscience que Matthew Roberts n'a pas dessiné grand-chose, mais la fusion entre ses traits et la couleur donne l'impression que c'est l'œuvre d'un seul artiste pour un reportage qui met en avant les nuances de la luminosité, ainsi que le plaisir d'observer un paysage naturel.



Comme dans les autres tomes, Matthew Roberts investit du temps pour donner de la consistance à la reconstitution historique. Le lecteur peut donc passer du temps à observer les tenues militaires des 2 expéditions, ainsi que leurs armes, et les vêtements des civils qu'ils soient américains ou indiens. L'artiste adopte une direction d'acteurs de type naturaliste, ce qui donne plus d'impact aux comportements. Par exemple, les soldats ne surjouent par leur dégoût vis-à-vis de la proposition de manger de la chair humaine. Le lecteur n'en ressent que plus fortement l'enjeu qui se joue : braver un tabou culturel et social majeur, ou se laisser mourir à moyen terme. Dans le même ordre d'idée, la rencontre formelle entre l'expédition de 1804 et la tribu Teton se fait dans l'ordre et la discipline, les dessins montrant le rapport de force établi par le nombre de personnages dans un camp et dans l'autre, ainsi que la maîtrise de soi des chefs pour mener les négociations. Ce choix naturaliste permet également de donner plus d'impact aux comportements plus agités d'individu sous le coup d'une émotion intense, par contraste.



Dès les pages 2 & 3, le lecteur se souvient également que les artistes (Roberts & Gieni) ont l'art et la manière pour donner de la consistance aux monstres, tout en leur conférant une réelle originalité. Les créatures insectoïdes présentent des caractéristiques répugnantes, et le champ de maïs fait peur du fait de sa banalité. Ils savent conserver toute l'ambiguïté voulue par le scénario concernant les sasquatch. Ils les montrent comme des sortes de grands singes adaptés à un hiver rigoureux, avec une morphologie un peu plus proche de celle de l'être humain, que de celle d'un singe. Pour autant ils évitent de les humaniser entretenant le doute sur leur nature réelle. La description des affrontements reste très pragmatiques également, sans dramatisation outrancière systématique, avec conséquences bien réelles sous forme de blessures plausibles. Roberts & Gieni réservent l'utilisation du spectaculaire pour l'apparition de Navath, une créature surnaturelle plus impressionnante que les autres. Tout au long de ces 6 épisodes, le lecteur se régale de représentations magnifiques dans différents registres : le calme paisible régnant dans une forêt clairsemée enneigée, le calme plus inquiétant dans la cabane détruite découverte en 1804, le doigt de Helm plongeant dans la plaie d'un sasquatch pour en goûter le sang, une vue du ciel d'une crique accueillante et verdoyante, un individu écrivant comme un fou sur les murs de sa chambre avec ses propres excréments comme crayon, le vol d'un aigle au-dessus d'une plaine, l'implacable révélation de la dernière page, etc.



Dans le tome précédent, le scénariste avait rappelé au lecteur que l'expédition de Lewis & Clark n'a rien d'une opération de charité. Dans cette nouvelle étape, il développe essentiellement les comportements adoptés par les individus pour assurer leur survie. L'épopée de l'expédition de 1801 prend un tour fort inattendu, contraignant, entre autres, Helm et Flewelling à accomplir des actions qui leur répugnent, mais qu'ils estiment indispensables pour survivre. L'auteur montre comment cet objectif devient une obsession qui écrase toute autre considération, au point de générer des stratégies psychologiques irrationnelles, à commencer bien sûr par la paranoïa. Le lecteur peut donc voir l'acte d'Helm étranglant un aigle comme une métaphore de l'abandon de toute valeur morale comme étouffant la nation. Suite au tome précédent, le lecteur appréhende le contact entre Lewis & Clark et les tribus indiennes. Son inquiétude ne provient pas de savoir s'il va y avoir des morts, mais de la volonté et des motivations des blancs, car leur mission ne relève pas de la prise de contact, ni même d'une colonisation en douceur, encore moins d'un projet de société pacifique.



Dans le même temps, le scénariste fait en sorte de bien mettre en évidence la différence de destin entre les 2 expéditions, suivant le même itinéraire, mais des trajectoires différentes. Cela incite le lecteur à relever les écarts de comportement et de stratégie. L'expédition de 1801 n'était pas constituée d'enfants de chœur ; ce n'est pas sa naïveté ou sa gentillesse qui a conduit à sa perte. Le lecteur remarque que l'expédition de 1804 se conduit plus comme une équipe (mais le tome précédent a rappelé que le maintien de la discipline ne se fait pas tout seul) et elle bénéficie d'une aide indigène en la personne de Sacagawea. Cette dernière caractéristique reste ambigüe : à la fois par l'origine de la motivation de la jeune shoshone, à la fois par la tutelle très équivoque de Toussaint Charbonneau, trappeur canadien-français. Chris Dingess laisse planer l'incertitude sur le sens à donner à ces différences, et sur son propre jugement de valeur quant à ces comportements.



Ce quatrième tome confirme l'excellence de cette série, fonctionnant sur la dynamique imparable d'une exploration, avec des découvertes aussi inattendues que dangereuses et macabres. Matthew Roberts & Owen Gieni donnent l'impression au lecteur de se tenir aux cotés des personnages, de pouvoir toucher la végétation, de sentir l'odeur des bêtes, de devoir se mettre à l'abri lors de chaque attaque. Chris Dingess augmente progressivement l'ambition de son récit en confrontant ses personnages à des problématiques éthiques qui dépassent le simple combat contre la nouvelle population de monstres.
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Manifest Destiny, tome 5 : Mnemophobia & Ch..

Ce tome fait suite à Manifest Destiny Volume 4: Sasquatch (épisodes 19 à 24) qu'il faut avoir lu avant. Dans la mesure où il s'agit d'une histoire continue, il faut avoir commencé par le premier tome. Il comprend les épisodes 25 à 30 initialement parus en 2017, écrits par Chriss Dingess, dessinés par Matthew Roberts, encrés par Tony Akins, et mis en couleurs par Owen Gieni.



En novembre 1804, les membres du corps exploratoire achèvent de construire leur fort, celui dans lequel ils s'apprêtent à passer l'hiver. Sacagawea (guide et interprète shoshone) se contente de ramasser les lièvres pris dans ses pièges, n'étant plus trop en état de chasser du fait de sa grossesse avancée. Meriwether Lewis se réjouit de cette étape sédentaire car il va pouvoir consacrer du temps à l'étude des spécimens qu'il a collectés jusqu'alors. Le second lieutenant William Clark organise des patrouilles régulières aux alentours du fort pour sécuriser les parages. Assisté par Toussaint Charbonneau, Lewis effectue quelques sorties pour rendre visite à la tribu indienne des Mandan, et accepter leurs cadeaux, essentiellement des plantes diverses et variées. Il en expérimente les effets directement sur lui-même, avec quelques crises de courante. Magdalene Boniface accompagne Sacagawea pour relever ses collets, tout en essayant de la raisonner sur le repos qu'elle doit prendre.



Les soldats ont décidé d'appeler la camp Mandan en l'honneur de la tribu indienne, étant prêt à prétendre qu'il s'appelle Teton si des représentants de l'autre tribu viennent le visiter. Le sergent Welgoss se moque du visage défiguré du sergent Burton, alors que celui-ci vient lui signaler la fin de son tour de garde. Il s'en suit une bagarre. Clark y met fin. Le lendemain, un épais brouillard recouvre les alentours du fort. Afin de forcer la réconciliation et l'entraide, Clark constitue une équipe de patrouille composée de Welgoss, Burton et du caporal Imes. Ils sortent du camp fortifié et commencent à avancer dans la purée de pois. Imes entend du bruit et s'éloigne des 2 autres, bientôt suivi par Burton qui part à sa recherche. Welgoss s'inquiète de leur disparition dans le brouillard, fait quelques pas et se retrouve face au caporal totalement rongé de l'intérieur par les plantes, à l'instar de l'épidémie contre laquelle ils avaient dû lutter quelques semaines auparavant.



À l'issue du tome précédent, le lecteur y voyait un peu plus clair sur la mission réelle de Lewis & Clark et avait constaté que l'expédition s'était installée pour passer l'hiver. Il avait aussi pu voir qu'elle n'avait pas choisi le meilleur endroit du fait la présence insoupçonnée d'une arche d'une nature inconnue. Comme à chaque tome, il s'attend à la manifestation d'une nouvelle créature surnaturelle, ce qui ne manque pas d'arriver. Il constate également que Tony Akins est de retour pour l'encrage, ce qu'il regrette par avance, car il aurait préféré que l'artiste initial Matthew Roberts continue à s'encrer lui-même. Il remarque effectivement que les dessins ont un peu perdu de leur substance. L'encrage d'Akins est professionnel et de bonne qualité, respectant les traits du dessinateur, mais sans les enrichir par des variations d'épaisseur, comme le fait Matthews lui-même. Du coup, les tracés de contour perdent en richesse, et en relief. De même les traits de texture à l'intérieur des surfaces deviennent plus uniformes et les matériaux et tissus plus neutres. Matthews n'a pas changé sa manière de dessiner. Le lecteur découvre régulièrement des paysages ou des scènes étonnantes : les baies dans la paume du chef Mandan, Sacagawea découvrant une arche pour la première fois, sous la tutelle de son mentor Morning Fox, la statuette de bois taillée au couteau par Reed, les plantes à sécher sur la table de travail de Lewis, un accouchement à haut risque, etc.



Mais alors que le brouillard à couper au couteau s'installe dans la durée, le lecteur constate que c'est l'occasion pour Matthews de s'affranchir de dessiner des arrière-plans (tous mangés par le brouillard), et de laisser Owen Gieni donner de la consistance aux fumerolles rapidement esquissées. Là aussi, il éprouve l'impression que le coloriste a mis en œuvre un mode de colorisation plus rapide, en diminuant les couches de couleurs qui donnaient tant de relief à chaque surface. Les teintes utilisées sont moins riches, plus ternes, ce qui est cohérent avec le brouillard omniprésent, mais ce qui obère d'autant la texture des surfaces, à commencer par la peau humaine maltraitée par l'infection florale, ou celle inhumaine des monstres. De fait, Owen Gieni n'arrive pas à donner de la consistance à cette brume omniprésente, appliquant une mise en couleur beaucoup plus traditionnelle, faisant ressortir qu'il habille des dessins pauvres en décors, sans arriver à pallier ce dénuement. Le lecteur ressent une forme de déconvenue à ce qu'il perçoit comme une diminution du degré descriptif des dessins, et donc une baisse dans la qualité d'immersion induite.



Roberts, Akins et Gieni s'investissent toujours autant en ce qui concerne les personnages. Le lecteur les identifie aisément, et il peut également apprécier la qualité de leurs tenues vestimentaires, que ce soit les uniformes des soldats, les tenues des civiles, ou celle indienne de Sacagawea. Le scénario se concentrant sur les affrontements dans le brouillard, l'artiste doit mettre en scène des affrontements physiques dont il varie les mises en scène par le découpage des pages et par les angles de prises de vue, mais il n'arrive pas à masquer que ce passage est étiré au-delà du raisonnable. En particulier, il doit montrer les individus en train de sa battre contre des monstres, tout en ménageant systématiquement le suspense sur l'issue du combat, ce qui l'amène à représenter des blessures mais pas trop graves pour que le combat puisse s'étirer. Ce mécanisme se répétant, le lecteur finit par repérer la technique et se dire que ces affrontements n'offrent pas beaucoup d'intérêt du point de vue de l'intrigue, et pas assez du point de vue visuel. Dans le même temps, quelques individus sont amenés à réfléchir sur ce qui se passe vraiment pour essayer de trouver une parade adaptée. Là encore, Roberts se retrouve vite à dessiner des têtes en train de parler dans les cases, limitant l'intérêt de la narration visuelle, même si le lecteur aime bien les personnages en question.



Pourtant Chris Dingess ne manque pas d'idée pour le scénario, avec toujours une pincée d'humour pince-sans-rire, se manifestant ici par les problèmes de transit intestinal, mis en scène avec taquinerie, sans tomber dans la vulgarité. Au début du tome, le lecteur apprécie de pouvoir regarder Meriwether accomplir ses tâches de botaniste, étudiant les plantes. Il regarde les soldats devoir vivre ensemble sans ennemi commun à affronter, l'oisiveté générant des tensions entre individus. Il découvre une scène du passé de Sacagawea apprenant à utiliser un arc, sous la tutelle de Morning Fox, avec un objectif sous-entendu quant au destin de Sacagawea. Il sourit en voyant s'exprimer la tension qui existe entre Lewis et Magdalene Boniface. Le scénariste n'a rien perdu de sa capacité à faire exister ses personnages, générant une empathie savoureuse chez le lecteur. L'arrivée du brouillard se produit de manière organique par rapport à la région et l'époque de l'année. Le suspense qui s'installe quant à ce que recèle le brouillard est classique et efficace. L'auteur montre que les 2 chefs d'expédition réagissent de manière raisonnée et intelligente par rapport à la gestion de cette crise, en appliquant une quarantaine et des mesures conservatoires pour éviter des lynchages.



Puis le brouillard s'installe et les membres de l'expédition commencent à se conduire d'étrange manière. Quelques individus sont épargnés par ses effets : c'est expliqué pour quelle raison pour certains, pas pour d'autres. La solution arrive d'un élément présenté en début de tome, auquel le scénariste a su donner assez de consistance. Par contre, les affrontements s'étirent, Dingess usant d'arbitraire pour décider du sort de chaque combattant, en ménageant certains de manière artificielle, uniquement pour les besoins de l'intrigue. Le lecteur finit par se désintéresser de ces combats factices, la narration visuelle n'arrivant pas à leur insuffler assez d'ampleur ou d'horreur. Les dilemmes moraux entre combattants manquent également de tension parce qu'ils s'appliquent à des personnages pas assez étoffés. Il faut attendre la fin de cette phase pour que l'intrigue reprenne le dessus et redevienne intéressante, avec une nouvelle arche, et un membre de l'expédition qui comprend intuitivement comment l'utiliser, et qui le fait pour son gain personnel.



Ce quatrième tome est la première déception (relative) de la série. Les dessins perdent en consistance et en relief car Tony Akins n'arrive pas à se montrer aussi tactile que Robert quand il s'encre lui-même, et Owen Gieni semble avoir simplifié son processus de mise en couleurs, diminuant là aussi la finesse des informations visuelles. Chris Dingess a imaginé une nouvelle épreuve pour l'expédition Lewis & Clark dans la droite ligne des précédentes, mais avec une réalisation pataude qui fait ressortir le côté mécanique des affrontements. Fort heureusement, le premier tiers et le dernier quart ne sont pas phagocytés par le brouillard et racontent une histoire dans la droite lignée des tomes précédents, avec un niveau de qualité analogue.
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Manifest Destiny, tome 3 : Chiroptères et car..

Ce tome fait suite à Manifest destiny, tome 2 : Amphibiens et insectes (épisodes 7 à 12) qu'il faut avoir lu avant. Il faut avoir commencé la série par le premier tome. Il contient les épisodes 13 à 18, initialement parus en 2015, écrits par Chris Dingess, dessinés et encrés par Matthew Roberts, avec une mise en couleurs réalisée par Owen Gieni.



Le caporal White a succombé à un virus transmis par un fungi et l'équipage lui organise un enterrement adapté aux circonstances : son corps est placé sur un radeau de bois auquel il est mis feu. Une nuit suivante, le caporal Perason a pris une chaloupe dans laquelle il se livre à une danse, complètement saoul. Le lendemain l'expédition Lewis & Clark détecte une nouvelle arche. Les Capitaine Lewis & Clark doivent faire face à l'hostilité de l'équipage à débarquer pour aller explorer les parages de l'arche. Ils se lancent dans un discours explicitant clairement les devoirs des uns et des autres, militaires comme civils, ainsi que les sanctions qu'ils sont en droit d'appliquer, tout en rappelant l'objectif de l'expédition. Finalement, ils débarquent. Sur la rive, ils retrouvent Toussaint Charbonneau (trappeur canadien-français) et Sacagawea (guide et interprète shoshone). Ils constatent que cette dernière à l'air malade malgré ses déclarations allant dans le sens contraire.



Le groupe arrive au pied de l'arche sans encombre. Lewis décide qu'ils vont inspecter le périmètre par groupe de 2. Celui qui inspecte l'arche constate qu'elle est constituée de fumier. Sacagawea s'éloigne un peu et vomit à 2 reprises. William Clark prend sur lui de raccompagner Sacagawea sur le navire, avec une des chaloupes. Aux alentours de l'arche, Burton et son compagnon entendent un bruit de brindille brisée. Ils regardent rapidement dans la direction correspondante et font feu. Ils ne voient que quelques plumes bleues. En levant les yeux, ils découvrent un oiseau d'une espèce inconnue, perché sur une branche, qui les dévisage bizarrement. Alertés par les coups de feu, les autres hommes arrivent immédiatement, prêts à défourailler. L'oiseau fond sur Etten, le soldat le plus proche et le mord au bras droit, sans lâcher prise, avant que quiconque n'ait pu réagir.



Que plaisir de retrouver le pauvre équipage du vaisseau d'exploration de Lewis & Clark, composé de soldats et de repris de justice, s'enfonçant toujours profond dans le continent nord-américain encore vierge et sauvage. Le lecteur retrouve Meriwether Lewis (1774-1809) & William Clark (1770-1838), les 2 capitaines de l'expédition, ainsi que Toussaint Charbonneau (1767-1843) et Sacagawea (1788-1812), personnages historiques ayant réellement existé, pour une variation sur la fameuse expédition Lewis & Clark (1804-1806). Ce tome commence en août 1804, avec les funérailles d'un caporal emporté par un mal mystérieux. Pour représenter l'état de son corps alors qu'une main s'apprête à mettre le feu à son radeau, les auteurs ont choisi un dessin en pleine page, et le lecteur retrouve immédiatement le haut niveau de qualité des images, colorisation comme traits encrés. Owen Gieni donne une teinte verdâtre à la peau du pauvre caporal, des plus maladives et malsaines. Il joue sur le blanc de la peau, le vert de de l'élément végétal, et rehausse de terrible manière la pupille encore visible du cadavre. En deuxième plan, le lecteur peut apprécier la texture du bois des rondins utilisés pour le radeau de fortune.



Tout du long de ces 6 épisodes, le lecteur se délecte de cette mise en couleurs, riche en saveurs, sans être écœurante, complémentaire des dessins sans les écraser. Le résultat donne la sensation d'une mise en couleur directe comme si chaque case avait été peinte, par le dessinateur lui-même. Au fil des séquences, le lecteur contemple le ciel pour un incroyable lever de soleil magnifique, ou pour le vaste ciel bleu qui domine l'arche. Il a l'impression de pouvoir tâter la terre des berges, de voir le feuillage onduler sous une petite brise, de toucher la granulosité du bois des planches du navire, de se laisser hypnotiser par les reflets changeants de l'eau du fleuve, de sentir la vague élasticité du matériau composant l'arche ou la rugosité des tissus, etc. Il constate que le coloriste travaille également les ambiances lumineuses en fonction du niveau d'éclairement. Il ne baigne pas les pages ou les cases dans une teinte principale qu'il décline en nuances ; il intègre l'impact la luminosité sur les différentes surfaces, que ce soit les teintes un plus sombres sous les frondaisons, les teintes plus vives dans la clairière, ou encore la semi pénombre dans la cabine du navire où Sacagawea est alitée. À plusieurs reprises, le lecteur reste bouche bée devant une case grâce à l'apport des couleurs, pas du fait d'effets spéciaux spectaculaires, mais grâce à la consistance qu'elles apportent, par exemple lors de la guérison d'une plaie suppurante avec un fluide très inattendu.



Matthew Roberts effectue un travail tout aussi impressionnant et spectaculaire que Owen Gieni. Le premier dessin en pleine page montre juste le cadavre d'un individu, mais les détails mettent la puce à l'oreille du lecteur : le cordage pour être sûr que le cadavre n'aille pas plus loin, les clous dans sa gorge et son bras, l'œil dont la paupière n'est pas fermée. Il n'est pas facile pour un dessinateur de surprendre un lecteur avec des images d'horreur, encore moins quand le lecteur les attend, comme c'est le cas dans cette série. Pourtant l'artiste y parvient à chaque fois, et pas seulement grâce à la mise en couleurs extraordinaire. La mise en scène de la découverte de la bestiole qui se cache aux abords de l'arche est impeccable pour que la révélation complète fasse un effet choc, mais pas par son apparence. Les plaies suppurantes d'Etten ont une apparence écœurante. La créature qui se cache vraiment dans l'arche nécessite d'avoir le cœur bien accroché. C'est donc la combinaison de leur apparence et de leur manière d'attaquer et de se comporter qui produisent un effet d'horreur réussi, comblant l'horizon d'attente du lecteur.



Matthew Roberts réussit également à rendre les premières créatures (les Ferzon) inquiétantes, malgré une apparence d'oiseau bleu vaguement mignon. Il doit montrer leur habitat, et il crée une vision parfaite de ce qu'il est, tout en surprenant le lecteur. Il sait jouer avec les yeux larmoyants de la créature pour la rendre touchante, tout en lui donnant des expressions de gueule irrésistibles. L'artiste se montre tout aussi convaincant quand la séquence ne comprend que des êtres humains normaux. Le lecteur est sur le bord de son siège en observant le combat à main nue qui oppose Meriwether Lewis à Finn Fricke, le grand costaud choisi par les autres pour rabattre le caquet au capitaine, et entériner qu'ils n'obéiront pas à son ordre de se rendre à terre pour explorer les pourtours de l'arche. Il fait preuve de la sensibilité nécessaire pour montrer le caractère indomptable de Sacagawea, mais aussi les preuves d'attention de Magdalene Bonniface quand elle s'occupe de l'indienne malade. La direction d'acteurs est naturaliste et les expressions des visages sont nuancées. Enfin, il s'investit dans les éléments de décor du navire, les armes, et les tenues pour une reconstitution historique de bonne qualité. Le lecteur éprouve donc vraiment la sensation de se trouver avec l'équipage de l'expédition Lewis & Clark… mais confronté à une faune inattendue.



Chris Dingess tire le meilleur parti de son idée. Au premier degré, le lecteur est happé par l'esprit d'exploration du récit. L'équipe doit progresser pour rallier l'autre côté du continent, tout en documentant la faune et la flore qu'ils découvrent. Le lecteur sait qu'ils vont être confrontés à des dangers, y compris des espèces inventées pour l'occasion, et qu'il y aura des pertes et des blessés, ce qui diffère de l'expédition historique. Il guette donc l'arrivée des monstres, en se demandant si l'équipe est bien préparée ou non. Le scénariste fait preuve d'inventivité pour la création des monstres et leur mode opératoire, à chaque fois spécifique. En outre, il sait glisser les détails qui attestent des tensions existant entre les militaires et les repris de justice contraints de participer à l'expédition, ainsi que les difficultés engendrées par le comportement en électron libre de Toussaint Charbonneau et Sacagawea. Il intègre régulièrement des extraits du journal intime de William Clark, ce qui a pour effet de faire apparaître sa personnalité dans ses jugements de valeur, ainsi que celle de Meriwether Lewis. En outre, le lecteur découvre des pans de l'histoire personnelle de Sacagawea, et du jeune Collins, ce qui leur insuffle plus de consistance également. Il prend donc grand plaisir à cette intrigue mêlant exploration et horreur, en pouvant se projeter dans différents personnages, avec une histoire personnelle spécifique, et des motivations spécifiques.



La narration ouvre également la possibilité au lecteur de considérer d'autres aspects de cette aventure. Il peut observer comment Lewis & Clark font pour conserver une autorité suffisante sur les soldats et les civils pour accomplir la mission qui leur a été assignée. Cette autorité n'a rien de naturelle et le scénariste se fait un malin plaisir de montrer comment ils manipulent leurs subalternes, parfois en payant de leur personne. Il peut également observer cette équipe s'enfoncer dans une zone inexplorée et voir quels sont leurs objectifs. À nouveau Dingess ne se montre ni naïf, ni angélique, et la dernière scène de ce tome le rappelle de manière éclatante. Il ne s'agit pas d'une mission de charité, ou d'une mission purement scientifique, ni même d'une mission d'évangélisation. Il y a là une illustration de l'esprit de conquête de la race humaine (au moins pour sa partie masculine) qui n'a rien de charitable. Le lecteur peut aussi observer le portrait psychologique qui se dessine progressivement pour différents personnages, dans ce tome pour Lewis, Sacagawea et Collins. À nouveau, le scénariste n'hésite pas à prendre en compte les comportements destructeurs de l'individu qui peuvent s'exercer contre lui-même.



Ce troisième tome est une grande réussite, aussi bien sur le plan de la narration visuelle maniant avec la même intensité le plaisir d'explorer et l'horreur des affrontements, que pour l'intrigue, riche en surprises bonnes et mauvaises, avec des personnages complexes et adultes, et un regard sur la nature réelle de l'exploration humaine.
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Manifest Destiny, tome 2 : Amphibiens et in..

Ce tome fait suite à Manifest Destiny, tome 1 : La Faune et la flore (épisodes 1 à 6) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 7 à 12, initialement parus en 2014, écrits par Chris Dingess, dessinés et encrés par de Matthew Roberts, avec une mise de couleurs d'Owen Gieni.



Ce tome commence le 18 juin 1804, peu de temps après la fin du premier. Meriwether Lewis continue de tenir 2 journaux de bord : l'officiel et celui qui relate les vrais objectifs de la mission. Alors que la remontée de la rivière se poursuit, le navire s'échoue sur un obstacle immergé. Le capitaine William Clark prend la décision de débarquer une partie des hommes à terre pour explorer, pendant le capitaine Meriwether Lewis reste à bord pour essayer de comprendre ce qui bloque le bateau.



Parmi les rescapés du village de La Charrette, Irène Lebrun obtient la permission de descendre à terre, chaperonnée (ou plutôt protégée) par le caporal Hardy. Madame Magdalene Boniface choisit de rester à bord pour servir d'assistante au capitaine Lewis. À terre, comme sous le navire, les hommes découvrent des créatures bizarres, et une nouvelle arche.



Après un premier tome enchanteur, le lecteur retrouve cette variation sur le voyage vers l'ouest de Clark & Lewis, commandité par le président Thomas Jefferson. Dingess et Roberts continuent leur amalgame élégant pour cette exploration, mélangeant horreur générée par la présence de monstres, et horreur provenant du comportement des individus. De manière habile, ils ont bâti la structure de leur récit sur cette expédition historique réelle, en jouant sur le fait que ces explorateurs s'attendaient en partant, à découvrir des vestiges extraordinaires, tels que des mammouths ou des montagnes de sel (véridique). Le lecteur peut également identifier des individus ayant eu une réalité historique comme les 2 capitaines, mais aussi Sacagawea et Toussaint Charbonneau.



Cette dynamique s'avère très efficace, le lecteur découvrant avec une grande curiosité les surprises de cette expédition. Pour commencer, il y a le plaisir immédiat dérivé du récit de genre "horreur", devant les monstres imaginés par les auteurs. Le parti pris naturaliste de Matthew Roberts donne une grande vraisemblance à ces monstres (amphibia & insectia), avec des caractéristiques empruntées au règne animal. Cette approche est en phase avec le principe d'une expédition à visée scientifique, avec un botaniste à son bord. Non seulement Matthews a un vrai don pour représenter les bestioles et les monstres, mais en plus Owen Gieni réalise des mises en couleurs sophistiquées qui rehaussent et nourrissent les dessins, sans les écraser.



Tout du long, le lecteur peut se plonger dans cet environnement naturel, dense et authentique, grâce à la combinaison des dessins et des couleurs. Il peut voir le courant du fleuve, examiner les herbes poussant dans son lit, constater la densité de la forêt, détailler la forme des pétales d'une fleur aux vertus essentielles, apprécier l'humidité de la peau des grenouilles, ou la carapace mate des insectes. Le lecteur a le plaisir de voir une nouvelle arche, tout aussi bien intégrée dans l'environnement que celle du premier tome, avec ce gigantisme qui provoque immédiatement un sentiment d'émerveillement mêlé d'effroi.



Le lecteur côtoie également les individus de près, grâce aux notes du journal de Lewis. Dingess s'en sert à la fois pour rappeler au lecteur le nom des personnages, Lewis notant comment les rescapés de La Charrette s'intègrent au reste de l'équipage, et à la fois pour exposer les réflexions du personnage. Les dessins et la mise en couleurs donnent une identité visuelle spécifique à chaque personnage, sans recourir à des artifices grossiers. Certes, le lecteur identifie Charbonneau à la forme de son chapeau, et Sacagawea à la couleur de sa peau. Mais tous les personnages disposent de leur propre tenue, et d'un visage qui est leur propre.



Sans bulle de pensée ou cellule explicative, Dingess compose chaque scène de manière à faire ressortir le comportement de chacun, en fonction de ses motivations. Le lecteur peut ainsi apprécier la fragilité de l'équipe composée de militaires et de repris de justice. Il n'éprouve aucun doute sur le fait que la majorité des marins considèrent les 3 femmes comme des proies potentielles, et que ces dernières mettent en œuvre des stratégies pour ne jamais se retrouver seules. De même il n'y a pas de personnage lisse. Même les 2 capitaines ne se limitent pas à des héros au cœur pur. Ils ont aussi leur propre motivation et leur part d'ombre. Dingess n'en fait pas des enfants de chœur, et il sait montrer que la discipline dans une telle équipe doit être appliquée sans hésiter.



À la fin du premier tome, le lecteur émerveillé pouvait craindre que, l'effet de surprise étant passé, le deuxième tome perde de sa capacité de divertissement. Il n'en est rien. Matthew Roberts et Owen Geni continuent de créer une nature sauvage séduisante et dangereuse. Ils apportent un grand soin à la conception graphique des monstres pour qu'ils semblent naturels dans ce milieu. Ils dépeignent des individus crédibles et réalistes, avec leurs particularités tant morphologiques que vestimentaires.



De son côté, Chris Dingess développe son récit avec une grande habilité. Le lecteur sait que cette expédition s'enfonce en territoire inconnu (pour l'homme blanc) et que les surprises sont nombreuses. Néanmoins le récit ne se réduit pas à une succession d'apparitions monstrueuses. Dingess dose avec soin et finesse ses composants : vie quotidienne sur e navire, dynamique de groupe complexifiée par les criminels et les survivants du village, stratégie pour se défendre contre les monstres et contre les prédateurs humains, mission officielle et mission officieuse, personnalités complexes et affirmées. Il rythme sa narration avec adresse, trouvant le bon équilibre entre les scènes d'action haletantes, et les périodes calmes, au rythme de la nature et de la progression du navire.
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Manifest Destiny, tome 1 : La faune et la f..

Une intrigue qui va toujours de l’avant (...) un dessin nerveux et précis à la fois, qui donne à cette Amérique fantasmée et sauvage une spectaculaire profondeur.
Lien : http://www.bodoi.info/manife..
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Manifest Destiny, tome 1 : La faune et la f..

Ce tome contient les épisodes 1 à 6 (initialement parus en 2013/2014), d'une nouvelle série indépendante de toute autre. Le scénario est de Chris Dingess, les dessins et l'encrage de Matthew Roberts, et la mise en couleurs d'Owen Gieni.



Le récit commence le 23 mai 1804 alors que le second lieutenant William Clark renseigne le journal de bord du navire. Il s'agit d'un équipage militaire missionné par le président Jefferson pour explorer l'intérieur des terres du continent nord américain, dans le cadre de l'expansion de la nation (l'idéologie qualifiée par la suite de "Manifest destiny"). L'équipage est composé de soldats de l'armée régulière, ainsi que de repris de justice peu recommandables à qui on a promis la liberté ou des remises de peine. Seuls le capitaine Meriwether Lewis et son second lieutenant savent que le président craint que des créatures surnaturelles et malveillantes n'errent dans ces contrées inexplorées. Alors que le camp fortifié de La Charrette n'est plus très loin, les navires font une halte. Une partie de l'équipage débarque ayant aperçu une arche végétale monumentale, ils furètent et affrontent une créature mi cheval, mi bison.



Fin 2013, début 2014, Image Comics publie énormément de nouvelles séries, dont certaines réalisées par de grands noms des comics (Ed Brubaker, Matt Fraction, Greg Rucka). Au milieu de toutes ces nouveautés, il n'est pas certain que le lecteur ait la curiosité de jeter un coup d'œil aux séries dépourvues de têtes d'affiche. Pourtant en feuilletant "Flora & Fauna", il découvre des dessins de bonne qualité avec des éléments surnaturels originaux et une attention portée aux détails qui fait exister cette reconstitution d'époque.



Matthew Roberts réalise des dessins réalistes, avec un réel souci de rendre compte des uniformes, des tenues vestimentaires, de l'état des techniques de construction, de l'environnement naturel, etc. Le lecteur apprécie en particulier de voir ces clairières, ces forêts insondables, ces formations rocheuses. Roberts donne pas un cours de botanique, mais il sait mettre en valeur la verdure, un rayon de soleil à travers le feuillage, ou encore la forme particulière d'une fleur. Le lecteur ne reconnaît pas chaque essence d'arbre ou chaque plante composant un fourré, mais il éprouve la sensation d'évoluer dans ces sites naturels.



Cette approche graphique (réaliste sans être photographique) se retrouve également dans les animaux (le magnifique héron de la page d'ouverture), les costumes, et les constructions. Ainsi le lecteur éprouve le plaisir de se sentir immergé dans cette époque et à cet endroit. Roberts représente les éléments surnaturels avec la même approche, profitant pleinement du fait qu'en bandes dessinées le budget est illimité. Dans la mesure où Roberts utilise le même style graphique, ces éléments sont naturellement intégrés au reste de la narration visuelle. L'ache végétale est montrée comme un état de fait normal, mais dans une case avec un point de vue à partir du ciel, montrant ainsi son gigantisme par rapport aux minuscules embarcations, tout en bas sur le fleuve. L'espèce de centaure apparaît la première en contre jour, sa silhouette se détachant contre le soleil, dans une planche pleine page très impressionnante, une menace réelle et très proche, aux contours très nets, mais à l'apparence indiscernable.



À plusieurs reprises, le lecteur apprécie pleinement l'intelligence de la mise en page qui trouve le juste point d'équilibre dans une description factuelle rehaussée par un élément sensationnel ou horrifique. Roberts dispose d'une sensibilité qui fait qu'il peut représenter des éléments horrifiques, sans en faire le seul intérêt d'une image.



Grâce aux qualités d'artiste de Matthew Roberts, le lecteur entre facilement dans le récit dont le principe est assez efficace. Lors du déploiement des colons vers l'Ouest du continent, les explorateurs ont découvert des créatures inconnues. L'intelligence de Dingess est d'avoir fait en sorte que si elles sont bien inconnues, elles ne sont pas totalement inattendues par l'équipage qui dispose de quelques ressources pour les combattre. En intégrant des créatures chimériques dans un terrain à découvrir, Dingess place le lecteur dans la même situation que les soldats, les uns comme les autres ne sachant pas à quoi s'attendre.



De page en page, le niveau de divertissement ne faiblit pas grâce à l'apparition de personnages bien campés (avec des noms savoureux comme Magdalene Boniface, ou Sacagawea, ou encore Toussaint Charbonneau), des créatures avec assez d'originalité pour être remarquables tout en s'intégrant harmonieusement avec la faune et la flore de la région. Dingess sait doser sa narration pour que chaque endroit soit singulier, pour que quelques personnages disposent de la place nécessaire pour exister au-delà des stéréotypes, et pour que leurs comportements soient motivés (par exemple monsieur Jensen cherchant comment fausser compagnie aux soldats réguliers pour recouvrer sa liberté). Dingess introduit également quelques informations qui montrent que cette opération n'est pas menée par des enfants de chœur, qu'il s'agisse des châtiments corporels infligés à ceux qui ne respectent pas la discipline, ou du fait que tous les soldats constituant la troupe ont été choisis parce qu'ils n'ont plus de famille.



Attiré de prime abord par des dessins descriptifs bien pensés, le lecteur bénéficie d'une narration visuelle de qualité, détaillée avec une savante mise en scène. Il découvre également un récit d'aventures original avec un peu de mythologie, un peu d'horreur, 2 ou 3 personnages sympathiques sans être fades. C'est avec plaisir qu'il s'aventurera plus avant dans le continent, avec le capitaine Meriwether et le lieutenant Clark, pour l'explorer.
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Manifest Destiny, tome 6 : Fortis & Invisib..

Ce tome fait suite à Manifest Destiny Volume 5: Mnemophobia & Chronophobia (épisodes 25 à 30) qu'il faut avoir lu avant. Il faut avoir commencé par le premier tome pour pouvoir apprécier le récit. Il comprend les épisodes 31 à 36, initialement parus en 2017/2018, écrits par Chris Dingess, dessinés par Matthew Roberts, encrés par Tony Akins et mis en couleurs par Owen Gieni.



Le mercredi 5 décembre 1804. Il s'est écoulé seize jours depuis la fin de l'épisode du brouillard. Les hommes du fort ont commencé à creuser des tombes dès le lendemain, avec deux de plus en prévision des semaines où la terre sera trop gelée pour creuser. La reconstruction du fort s'est achevée le 30 novembre. Le capitaine Meriwether Lewis a choisi d'établir une simple tente à l'extérieur pour pouvoir observer l'arche en continu, jour & nuit. Il dispose de deux soldats qui montent la garde, et qui changent tous les jours. La courbure de l'arche n'apparaît que sous la pluie, ou sous la neige. Dorénavant, c'est le second lieutenant William Clark qui s'occupe de tenir le journal de l'expédition. Il supervise également les réparations dans l'enceinte du fort. Le sergent Pryor s'est pris au jeu de prêcher la bonne parole, de lire les écritures aux soldats et de les commenter. Cela a pour effet de les réconforter et de diminuer leur niveau de peur. À l'extérieur, Lewis s'interroge sur la nature de l'arche (Un portail ? Une borne ? Un signal ?). Mais il n'est pas vraiment seul car le spectre du lieutenant Arturo Maldonao continue de lui apparaître et de lui donner des conseils à un rythme soutenu. Il lui parle de tactique pour survivre.



Dans le camp, Sacagawea accepte d'allaiter son petit, à la demande de Magdalene Boniface, mais elle ne lui a toujours pas donné de nom. En dehors des périodes d'allaitement, elle refuse de s'en occuper. Boniface s'en ouvre à Clark qui ne peut que constater que ce nourrisson a l'air tout ce qu'il y a de plus normal. Ce jour-là, 2 soldats ramènent Toussaint Charbonneau, nu comme un ver. La cuisinière du camp lui fait respirer les plantes permettant de se soustraire à l'action du brouillard. Il donne un nom au nourrisson : Jean Baptiste. Afin de passer le temps, le forgeron du camp a fabriqué une jambe de bois pour Hardy. Ce dernier l'essaye et se rend compte qu'il a retrouvé sa mobilité et qu'il peut à nouveau se rendre utile. Lorsqu'elle s'en aperçoit, Irène Lebrun (rescapée du village de La Charrette) sait qu'elle ne pourra jamais faire confiance à Hardy du fait de ses actions pendant l'épisode de brouillard. Il lui faut trouver une solution pour le mettre hors d'état de nuire.



Le lecteur ouvre ce tome avec une pointe d'appréhension. En effet, Matthew Roberts n'avait pas encré ses dessins dans le tome précédent, et la différence s'était fait sentir, encore accrue par des décors mangés par un brouillard omniprésent. Du coup la narration avait beaucoup perdu en intensité visuelle et en potentiel d'immersion. Le lecteur constate que le nom de Tony Akins figure sur la couverture, et la page de crédits confirme que Roberts n'a encré que 4 pages (90, 104, 106, 118). Néanmoins l'épisode de brouillard est passé, et il n'y en a pas de nouveau dans ces 6 épisodes. Il note dès les premières pages que les traits de contour ont retrouvé de la précision et un peu de souplesse, en tout cas significativement plus que dans le tome précédent. De même, il subsiste des pages dont toutes les cases sont dépourvues d'arrière-plan, mais pas de manière aussi manifeste que dans le tome précédent. Sans être revenu au niveau des 4 premiers tomes, la narration visuelle a regagné une capacité d'immersion satisfaisante. Owen Gieni aussi semble plus en forme, avec une utilisation des nuances de couleurs suffisante pour habiller les fonds de case de manière convaincante. Le lecteur veut bien accepter que le relatif rationnement des richesses visuelles reflète la diminution des ressources directement causée par la période hivernale du récit.



Le lecteur apprécie donc de retrouver des personnages mieux définis sur le plan visuel : le visage sérieux du capitaine Meriwether Lewis, le visage plus viril du second lieutenant Clark, l'air courroucé de Magdalene Boniface, l'expression parfois lunatique de Charbonneau, la mine enjouée de Maldonado. Ce regain de justesse dans les dessins apparaît vite indispensable car l'évolution de plusieurs situations tendues se joue entièrement sur des regards ou des postures corporelles. Il en va ainsi quand Irène croise Hardy avec son pilon, quand Sacagawea regarde son enfant, quand Maldonado jauge son interlocuteur, ou quand Jensen (ancien prisonnier) surveille York (esclave de Clark). Ainsi le lecteur éprouve la sensation d'évoluer dans un drame psychologique, avec des jeux d'acteur de qualité.



Le récit ne se compose pas que de scènes de discussion où des acteurs compétents se lancent dans des dialogues bien ciselés. Il y a effectivement des personnages en train d'échanger, mais occupés à différentes tâches. Le dessinateur peut donc introduire de la variété visuelle et des informations supplémentaires. Ça commence par les différentes tenues vestimentaires : la chemise et le gilet de Clark, la toque de fourrure, l'écharpe et le chaud manteau de Lewis, l'habit espagnol de Maldonado, le bonnet particulier de Charbonneau, l'habit d'indien de Sacagawea, etc. Les personnages évoluent dans différents lieux : dans les espaces du fort (cour, entre les bâtiments), à l'intérieur des constructions du fort, à l'extérieur de l'enceinte du fort dans la forêt avec ses arbres ayant perdu toutes leurs feuilles. Roberts sait placer le nombre d'éléments nécessaires pour le lecteur sache précisément où se déroule chaque scène, même s'il n'est pas revenu au niveau de détails des premiers tomes. De temps à autre, il surprend le lecteur avec une vision originale, comme l'esquisse de l'arche par la neige accumulée dessus par endroit, ou les troncs d'arbre dénudés en vue du ciel.



Comme dans les tomes précédents, Matthew Roberts gère également les plans de prises de vue des séquences d'action, avec un bon flair pour les cadrages adaptés. Ça commence dès la première page avec une case qui s'attarde sur les 2 tombes préparées à l'avance, une vision sobre et parlante. Par la suite, le lecteur sent un frisson le parcourir en voyant arriver Charbonneau nu comme un ver, marchant dans la neige. L'exaspération de Magdalene le heurte de plein fouet, pour ce qui est de l'absence d'amour maternel de Sacagawea. Il retient sa respiration en regardant Hardy tester sa jambe de bois, en voyant son équilibre instable pour ses premiers pas. Le meurtre de nuit dans la neige est d'une violence inouïe. Lors de la rébellion, la tension est à couper au couteau quand le groupe de Lewis & Clark se retrouve mis en joue par les autres. Le lecteur s'attend à chaque case que la tension entre Jensen et York escalade et dégénère en affrontement physique. Il se sent apaisé par la sérénité et la confiance en soi de Lewis alors qu'il est à quelques jours de mourir de faim et de froid.



La narration visuelle a effectivement regagné un bon niveau et le lecteur retrouve son plaisir de lecture, avec la curiosité de découvrir quels revers l'expédition va encore subir. Pourtant l'hiver n'est pas passé, et l'expédition est bloquée, ne pouvant pas progresser. Il se doute bien que le mystère des arches ne sera pas dévoilé alors qu'il reste énormément de chemin à parcourir. De fait, le scénariste se concentre sur 3 fils directeurs. Le premier concerne bien sûr l'insurrection des hommes de l'expédition, contre Lewis & Clark. Cet enjeu était présent dès le début du récit, et les 2 chefs ont déjà dû calmer les envies de leurs hommes à plusieurs reprises, par des méthodes soit viriles, soit dictatoriales. Cette fois-ci, l'avènement d'un meneur prend une forme originale, émanant à la fois de la situation présente, à la fois d'une caractéristique socio-culturelle de l'époque. Le scénariste se montre très habile à la fois dans l'évolution progressive de la situation, à la fois dans la résolution du conflit, logique et implacable car Lewis & Clark ne sont pas des enfants de chœur, comme il a déjà été montré précédemment. Le deuxième fil narratif concerne le fils de Sacagawea. Il s'agit d'une intrigue secondaire qui progresse lentement. Elle a déjà été évoquée dans les tomes précédents, et le lecteur comprend bien qu'il s'agit d'un élément essentiel de la résolution qu'il convient de développer de manière organique.



Ledit développement apparaît naturel car les auteurs savent donner vie à leurs personnages, les faire exister de manière à ce que le lecteur puisse y croire. Cette caractéristique est tout aussi vitale pour le troisième fil directeur qui concerne les monstres, ou plutôt leur existence et leur présence proche. L'hiver immobilise les membres de l'expédition, et il semble bien avoir aussi imposé une pause dans l'apparition des monstres, puisque l'arche à proximité du camp a déjà révélé le danger qu'elle génère dans le tome précédent. Il reste pourtant bien une présence surnaturelle à la dangerosité bien plus insidieuse que les blessures infligées par les monstres lors des combats. Le lecteur la voit opérer sous ses yeux, avec une bonne idée de la manière dont elle fonctionne puisqu'elle a déjà fait l'objet d'une histoire dans un tome précédent. Mais il ne se rend compte qu'assez en avant dans le récit que l'ampleur du danger est proportionnelle à l'effet cumulatif de cette menace surnaturelle, et à la zizanie qu'elle instille progressivement. Le lecteur retrouve là toute la finesse des auteurs et leur capacité à l'impliquer viscéralement dans les épreuves des personnages.



Ce sixième tome redonne espoir au lecteur, après un tome précédent en demi-teinte. La qualité visuelle reprend du poil de la bête, et l'intrigue retrouve des nuances, des saveurs et un impact grâce à des personnages très attachants. L'arrêt de la progression de l'expédition imposé par l'hiver n'induit pas une diminution des dangers, et ceux-ci prennent une nouvelle forme aussi insidieuse qu'impitoyable.
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Manifest Destiny, tome 1 : La faune et la f..

L’enfer vert.

Le président américain Thomas Jefferson a confié aux deux officiers Lewis et Clark le soin d’organiser une expédition scientifique de reconnaissance des territoires de l’ouest, en remontant le Mississippi. Accompagnés de marins et de repris de justice sans attaches familiales, ils tentent de rallier le poste avancé de La Charrette. Des créatures fantastiques, effrayantes et belliqueuses surgissent et l’équipage médusé doit assurer sa survie. Les marins atteignent in extremis le fortin dont les habitants ont presque tous été décimés.

Le comics paru en 2014 sous le label Skybound est édité en 2016 chez Delcourt qui reprend les fascicules 1 à 6. Une suite est annoncée et c’est une bonne chose tant le premier volume est intrigant et bien mené avec des apparitions, des rebondissements, des personnages étonnants, un humour détonant entre la raideur militaire de Clark et la curiosité scientifique de Lewis. Le dessin de Matthew Roberts est séduisant et plein d’allant que des cadrages et mises en page mettent en valeur. La couleur est superbe, gaie, naturelle, champêtre et boisée, contrastant avec l’enlisement de l’expédition coloniale.
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Manifest Destiny, tome 1 : La faune et la f..

1804, sous l’ordre du Président Jefferson, une grande expédition, d’Est en Ouest est lancée. Le Capitaine Merriwether Lewis et le Lieutenant en second William Clark, accompagnés de leurs soldats et de toute une bande de malfrats à qui on a promis fortune et rédemption vont être confrontés à de drôles de créatures.



Un comics entre fantastique et western à l’époque de la conquête de l’Ouest.

Une aventure fourre-tout, avec au programme des monstres, de l’horreur à la Lovecraft, des indiens, un peu d’écologie, quelques méchants, de l’historique et du fantastique !



Un bon début de série, originale et au final un bon moment de lecture

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Manifest Destiny, tome 3 : Chiroptères et car..

Un troisième tome toujours aussi impressionnant et prenant. Vivement le prochain épisode.
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Manifest Destiny, tome 3 : Chiroptères et car..

Le duo Chris Dingess & Matthew Roberts crée une ambiance tonitruante, mêlant histoire et fantastique. Un must des éditions Delcourt.
Lien : http://www.actuabd.com/Manif..
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Manifest Destiny, tome 3 : Chiroptères et car..

Troisième volet, dans la continuité de la série, entre aventure, histoire et fantastique
Lien : https://www.avoir-alire.com/..
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Manifest Destiny, tome 2 : Amphibiens et in..

Un cran au dessus du premier opus, Amphibiens et insectes, tout en s'autorisant une avancée dans l'intrigue foldingue, met l'accent sur l'humain, ses forces et ses faiblesses en temps de crise.
Lien : http://www.bdgest.com/chroni..
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