Citations de Christa Wolf (88)
Cette histoire m'a beaucoup appris. Elle m'a appris qu'il n'est de mensonge, aussi grossier soit-il, que les gens ne croient pourvu qu'il réponde à leur secret désir d'y croire.
Nous, gens d'aujourd'hui, nous croyons que l'homme est capable de tout. Nous pensons que tout est possible. Nous sommes au courant. Peut-être est-ce là la différence la plus importante qui sépare notre époque de celles qui la précédèrent.
Les poèmes sont un baume sur ce qui ne peut être apaisé dans la vie.
Le passé n'est pas mort ; il n'est même pas passé. Nous le retranchons de nous et faisons mine d'être étrangers.
(...) Et il lui a demandé, tout bas bas, pour que les autres n'entendent pas : tu es triste ? Et Lilo lui a répondu tout bas : Oui. Et August a senti, comme aujourd'hui encore, que jamais il ne serait plus proche de Lilo que dans cette minute, découvrant que tristesse et bonheur peuvent être confondus.
Quiconque veut mettre la main sur son enfance ne peut espérer aller vite en besogne.
Des révolutions ? Pourquoi pas ? Mais faîtes-nous grâce de vos illusions… D’ailleurs vous devriez bien le savoir : la révolution dévore ses propres enfants.
Mais comment se faisait-il qu'un grand nombre pouvait écrire couramment sur "l'espace vital" ou "l'esprit nordique dans la poésie antique", mais était totalement incapable de venir à bout d'un sujet aussi simple que "la première neige"? Nelly n'en savait rien, et elle n'aurait pu exprimer ce qu'elle supposait : à savoir qu'il est beaucoup plus difficile d'écrire sur soi-même que sur des idées générales qui vous sont familières.
Enfant de l'étoile ne veut pas dire enfant du bonheur, enfant du dimanche. Chaque étoile ne brille pas claire et constante. On connaît des étoiles capricieuses, de lumière inconstante, disparaissant, resurgissant, parfois visibles mais pas toujours. Ce n'est pas ce qui compte. Qu'est-ce qui peut bien compter alors?
La mort est un juge cruel.
Dans ce froid glacial j'étais trempée de sueur, ma peur devenait puanteur, cela ne m'était encore jamais arrivé, quelque chose remuait en moi, que j'avais maintenu enfermé et presque oublié, quelque chose de vivant dans ce caveau de mort.
La recherche du paradis a partout conduit à l’installation de l’enfer. S’agirait-il d’une loi inéluctable ?
Je n'aurais pas dû quitter la Colchide. Aider Jason à s'emparer de la toison. Convaincre les miens de me suivre. Me lancer dans cette longue et terrible traversée, vivre toutes ces années à Corinthe comme une Barbare que l'on craint tout autant que l'on méprise. Les enfants, oui. Mais qu'est-ce qui les attend. Sur ce disque que nous appelons la Terre, il n'y a plus rien d'autre, mon cher frère, que des vainqueurs et des victimes. Et maintenant j'aimerais savoir ce que je vais trouver en franchissant ses bords.
L'amour est brisé. La douleur a cessé elle aussi. Je suis libre. Sans aucun désir j'écoute en moi le vide qui m'emplit totalement.
Même les dieux morts gouvernent.
Combler une lacune en décrivant sa genèse : peut-on imaginer prétexte plus brillant pour vous soumettre ces informations ?
Seule l implacable lucidité vis à vis de soi même peut donner le droit de juger les autres
Je crois que derrière tout cela, c’est l’histoire de ma peur que je retrace. Ou, plus exactement, comment elle s’est débridée, plus exactement encore : comment elle s’est libérée. Oui, effectivement, la peur elle aussi peut-être libérée, ce qui montre bien qu’elle s’apparente à tout ce qu’on opprime, à tous ceux qu’on opprime.
[...] que le sang lave la faute du sang.
Tu te souviens encore de cette illumination, le long de cette forêt de sapins, quand ton ami a dit: À présent nous le savons, cet État, comme n'importe quel état, est un instrument de domination. Et cette idéologie est comme n'importe quelle idéologie, une fausse conscience. Nous n'avons plus d'illusions à nous faire à ce sujet. Vous vous êtes arrêtés. Tu lui as demandé: Que faire, alors? Il y eut un long silence puis ton ami a dit: Rester honnêtes.