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3.63/5 (sur 8 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Alger , le 23/04/1949
Biographie :

Christian Jambet est un philosophe français.

Il est professeur agrégé de philosophie en classe de lettres supérieures (Khâgne) au lycée Jules Ferry (Paris IX), spécialisé notamment en philosophie islamique, discipline qu'il enseigne à l’Institut d'Études Iraniennes (Université de Paris III-Sorbonne nouvelle).

Dès sa jeunesse, Christian Jambet est attiré par le maoïsme, et il partira en Chine avec une délégation de la Gauche Prolétarienne dont il était dirigeant en 1969 .

Puis, il rencontre Henry Corbin, spécialiste de l'Iran, qui l'emmène avec lui apprendre le persan et l'arabe, après son agrégation de philosophie. Par la suite il enseigne à Auxerre, avant de devenir islamologue et iranologue.

Il est également directeur de collection aux Éditions Verdier (collection « Islam spirituel »).
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Source : Wikipédia
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Présenté par Robert Maggiori, philosophe co-fondateur des Rencontres Philosophiques de Monaco et critique littéraire. « le philosophe et son guide. Mullâ Sadrâ et la religion philosophique », Christian Jambet, @Gallimard , 402 pp., 22€


Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
La distinction de l'intelligence en soi et de l'intelligence en nous est affaire de point de vue, selon que nous prenons le point de vue du foyer générateur ou de l'image qui en procède. Le monde intelligible, cette écriture du calame divin, est bien une esthétique généralisée, et fonde l'esthétique de l'art islamique, qui figurera, sous des formes abstraites ou des figures sensibles, cette expansion des ombres spirituelles. L'art des miniatures ou des scènes sensibles sera l'art de l'intelligible, non pas un art réaliste et représentatif, mais l'imagination seconde de ces images premières, idéales, qui procèdent de la surabondance de l'être. Les schèmes de l'imagination sont aussi bien des structures de l'espace intérieur que des modulations du temps, et non l'iconoclasme, ils offrent aux intelligences une configuration sensible. L'icône est ainsi essentielle à l'ontologie de l'islam. Les arts sont témoins des grandes fractures théologiques de l'islam, parce que leur pratique ou leur condamnation impliquent une prise de position engageant le sens de la révélation. L'ontologie sadrienne, contemporaine du grand essor artistique de l'époque safavide, ne déroge pas à l'interdit de la représentation imagée, mais le contourne en une esthétique de la manifestation sensible de l'Idée.
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Adam reçoit l'insufflation de l'esprit, qui demeure vivant en son intériorité cachée. La tâche des hommes est de réaliser la révélation de l'esprit prophétique, jusqu'à rejoindre l'archétype foncier, le père spirituel, Muhammad. L'événement historique de la révélation muhammadienne, et de l'exégèse développée par les Imâms, est l'accomplissement de ce retour, en une réconciliation de l'ordre temporel, gouverné par la paternité adamique, et de l'ordre spirituel, commandée par l'anthropomorphose de l'esprit dans le plérôme originel. Mais cet accomplissement n'est pas temporel. Il est retour à l'origine spirituelle, et il dépend de l'aptitude des fidèles à la connaissance de l'esprit. Le temporel s'évanouit, conformément à sa nature évanouissante foncière, tandis que demeurent les divers degrés de la remontée dans le monde de l'impératif, l'homme psychique, l'homme intelligible, l'homme spirituel divin. Telle est, ici condensée, l'intuition de l'histoire propre à l'ontologie de l'islam, qui est une liturgie de l'esprit et non pas, comme la phénoménologie occidentale chrétienne, une incarnation dans l'effectivité concrète temporel.

Henry Corbin a soutenu que ce schème était le privilège de l'islam shî'ite, et qu'il était aussi bien la chance offerte à l'ontologie de l'islam tout entier. Nous pourrions soutenir, en déplaçant notre regard, que cette chance a un prix. Que l'esprit absolu ne soit jamais destiné à devenir esprit objectif dans la temporalité sensible, mais à s'en évader jusqu'à faire retour au point d'origine de l'acte révélateur divin, cela produit le schème de la liberté humaine en islam. C'est une liberté impérative, indissolublement unie à la connaissance de la condition éternelle du servant, de la 'ubûdîya constitutive de l'Anthropos primordial, miroir de Dieu et khalife de Dieu.
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Sadrâ énonce cette maxime capitale : "la religion est chose intérieure" (al-dîn amr bâtinî), maxime qui n'en fait pas un bâtinî, un "ésotériste" au sens technique que prend ce terme quand il désigne l'ismaélisme. Mais qui en fait un philosophe averti du danger de confondre l'ordre apparent de la cité et l'ordre de la religion. Non qu'il propose une quelconque séparation de l'Etat et de la révélation, ce qui serait bien surprenant. Il distingue plutôt la discipline juridique, née de l'histoire et liée indissolublement aux statuts du monde sensible extérieur, auquel appartient l'homme de la cité, de l'ensemble des vérités qui relèvent, rigoureusement parlant, de la "religion".

Il cite une tradition importante, qui dit que "quand Dieu s'épiphanise pour une chose, opère en quelque chose sa révélation éclatante, il soumet à lui l'apparent de la chose et son ésotérique". La religion est cette soumission de l'ésotérique de l'homme, tandis que les statuts juridiques n'ontéressent que son extériorité sensible. L'obédience réelle n'est donc pas le respect des interdits, qui sont pure négation des fautes et des délits. Elle est pleinement affirmative, et elle est un concomitant de la gnose et de la certitude, "la vue spirituelle complète pénétrant da ns la réalité de la religion". Elle culmine dans l'extinction mystique en Dieu (hosûl al-fanâ'). La religion est le mouvement essentiel de l'acte d'être, sa croissance et son perfectionnement, et ne se confond pas plus avec la loi que la liberté ne se confond avec la contrainte.
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Sadrâ ne cache pas sa profonde affection à l'égard des animaux, le souci qu'il a de leur réserver un destin dans le cadre du retour à Dieu de toutes les créatures. Nous le voyons proposer une analyse remarquable de l'âme animale, qui est, aussi bien, l'âme des hommes quand ils n'exercent pas leur puissance intellective. Le vivant animal reste identique à soi, il possède une individualité permanente en tous ses états. En outre, les bêtes ont une certaine conscience d'elles-mêmes. Elles fuient ce qui leur cause du déplaisir, et elles recherchent ce qui leur procure du plaisir, elles fuient les douleurs dont elles savent qu'elles sont pour elles une douleur, ce qui implique une certaine connaissance qu'elles ont d'elles-mêmes.

Or, qui dit connaissance ('ilm) dit nécessairement séparation d'avec la matière. En effet, la connaissance que l'animal a de son propre soi est permanente, et elle n'est pas acquise par les sens. Il s'agit d'un savoir immédiat, qui n'a besoin ni d'une preuve par une certaine pensée réflexive, ni d'un témoignage des sens. Cette connaissance antéprédicative de soi, cette présence à soi et à son acte individuel d'exister, l'animal n'en est pas privé. Il témoigne ainsi de l'immétarialité de ce soi.
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Si l'intelligence est notre vraie réalité, si l'homme intelligible est au centre d'une anthropologie, héritée de Plotin, qui en fait l'origine et le terme de l'homme psychique et de l'homme sensible naturel, l'intelligence est bien la puissance métaphysique par excellence. Or l'intelligence ne fait qu'un avec le coeur, de sorte que "l'amour s'ensuit de la perception de l'être, parce que celui-ci est bien pur. L'intuition de la présence de l'être conduit aux pratiques suprêmes de la contemplation, que Mollâ Sadrâ ne craint pas de désigner par les trois modulations suivantes de l'amour : l'amour fou (al-hayamân), l'amour spirituel (al-'ishq al-rûhânî) et l'amour divin (al-mahabba al-ilâhîya). La métaphysique instruit une pratique de la liberté, à l'imitation de la liberté divine, et cette liberté s'inscrit dans la nature même de l'intelligence, qui n'a de lien qu'avec Dieu et exprime éminement la spontanéité créatrice de l'Impératif divin : intelliger, c'est libérer son propre soi de toutes les attaches mortelles, de toutes les oppressions de la matière et des passions. Inversement, la pratique de soi impose d'intelliger, c'est-à-dire de saisir l'être en son évidence immédiate, en son surgissement ordinaire.
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Pour conclure, j'aimerais citer une phrase de Proust, aussi fidèle au tempo de la mélodie intérieure qu'elle est proche de ce que Sadrâ nous dit de la sensation d'outremonde : "Tout à coup je m'endormais, je tombais dans ce sommeil lourd où se dévoilent pour nous le retour à la jeunesse, la reprise des années passées, des sentiments perdus, la désincarnation, la transmigration des âmes, l'évocation des morts, les illusions de la folie, la régression vers les règnes les plus élémentaires de la nature (car on dit que nous voyons souvent des animaux en rêve, mais on oublie que presque toujours nous y sommes nous-mêmes un animal privé de cette raison qui projette sur les choses une clarté de certitude ; nous n'y offrons au contraire au spectacle de la vie qu'une vision douteuse et à chaque minute anéantie par l'oubli, la réalité précédente s'évanouissant devant celle qui lui succède, comme une projection de lanterne magique devant la suivante quand on a changé le verre), tous ces mystères que nous croyons ne pas connaître et auxquels nous sommes en réalité initiés presque toutes les nuits ainsi qu'à l'autre grand mytère de l'anéantissement et de la résurrection."
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La sagesse est révélation, dans la mesure où elle dévoile les réalités des choses, depuis les Intelligences immatérielles jusqu'aux substances vouées à la génération et à la corruption. Elle est révélation encore, puisque Dieu lui-même, en son être qui s'identifie à sa science, se manifeste en la sagese humaine, en laquelle sont expérimentées les épiphanies de ses noms les plus beaux. Elle est révélation enfin, en ce qu'elle ouvre aux hommes la voie d'une connaissance d'eux-mêmes où ils s'éveillent de l'oubli, savent leur destin, accèdent à la réalisation des exigences morales, où ils éclairent de leur intelligence pratique les décisions de leur volonté et font de leur liberté une liturgie et une glorification perpétuelle. La gnose est transfiguration du sujet par l'actualisation de ses plus hautes potentialités, qui ne s'achèvent pas avec les promesses de ce monde-ci (perfection naturelle) mais portent en elles des perfections surnaturelles, la constitution du corps de résurrection dans l'outremonde et l'ascension vers les réalités intelligibles angéliques. La sagesse est un devenir angélique de l'homme.
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La notion de « révolution permanente » fut forgée par Trotski. Le concept, pourtant revient plutôt à Lénine, qui définit la révolution sous dictature du prolétariat comme une révolution « indéfinie » à étapes ; et Mao Tsé-toung en fit l’essence de sa révolution culturelle. De fait, « permanent », « indéfini », contredisent l’idée d’un terme, d’une clôture de l’histoire. Voici l’une des plus profondes visées parmi celles que le marxisme a engendrée : par cette idée d’une révolution ininterrompue, telle que jamais la dualité des mondes ne soit obturée, que jamais l’universel ne s’instaure sur les ruines d’un monde vivant, contradictoire, que jamais le combat de la lumière ne cesse, Mao offrait à la politique son issue dans une sorte de « gnose » de l’histoire. Il métamorphosait l’histoire, ses labeurs, et ses sacrifices, en l’instrument d’une jouissance infinie, toujours à venir, sans limite historique. Qui, pour une telle promesse, ne renoncerait à sa demande, à sa pensée, ne « combattrait pas l’égoïsme » ? L’infini, disait Descartes, est incommensurable au fini, il n’est pas un fini toujours plus grand, il le dépasse en être, car il est acte pur, et le fini est puissance avant d’être acte. Le maoïsme fut la promesse inouïe que l’histoire, ce lieu de la vie en puissance, pût être comme le Dieu de Descartes, un infini en acte.

Puisque le caractère, propre au prolétaire, de l’essence de l’homme transparente à elle-même, est de ne posséder rien que la pure force de travail, le prolétaire est la négation permanente de tout ce qui vient à être au prix de son oppression. Le monde est l’envers d’une douleur illimitée : le mettre « à l’endroit », c’est en détruire l’édifice entier, en l’affrontant à une révolte infinie, née d’une absence infinie d’exister. La rupture révolutionnaire ne saurait s’achever avec l’acte insurrectionnel qui offre le pouvoir politique au prolétariat. Car le peuple veut non une société nouvelle, mais une société impossible. Sans autre lien que l’égalité devant le sol ou la machine. Il faut, dès lors, conserver de l’État ce qu’il offre de puissance, la pousser au maximum, mais détruire ce qu’il éternise, ce qu’il universalise.

Ce rêve, aussi bien que les révolutions prolétariennes, les séditions l’ont fait, qui transformaient la famille des ‘Alides, et l’Imâm attendu, en sauveur des humbles : soulèvements qarmates, hérésies ultra-shî’ites, comme celle d’Abû’l-Khattâb, et enfin l’épopée ismaélienne. Déjà, l’attente historique de la parousie supprime tout recours à l’universel, au droit, à la nature ou à la culture. Il n’y a pas de nature humaine, il y a deux natures, l’angélique et le démonique. (pp. 100-101)
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La connaissance n'est pas une réceptivité passive, mais une sorte d'investigation permanente, qui renforce le pouvoir central de l'intelligence. La psychologie se construit en l'horizon de la monarchie de l'âme. Il faudrait écrire l'histoire de cette politique monarchique de l'âme, à laquelle nous sommes devenus si étrangers depuis que Hegel a dessaisi la conscience de toute unité originaire. Peut-être est-elle encore à l'oeuvre dans la doctrine kantienne du sujet. En tout état de cause, elle régit le vocabulaire sadrien, influencé par le lexique polémique de Sohravardî et par les données de ces médecins et physiciens que, par ailleurs, il critique. L'âme est libre parce qu'elle est, en son fond, souveraine, et la saisie du monde extérieur est un espionnage attentif, une paranoïa instructive, par laquelle le prince intérieur se maintient au pouvoir.
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Le prix d'un tel schème est l'ineffectivité du monde temporel. Dans sa relation ineffable à soi-même, Dieu n'introduit aucune négation. Ou plutôt, nous le verrons, la négation de l'essence dans les noms divins n'a pas les caractères nécessaires à ce qui offrirait un statut effectif au monde temporel. La scission passe, jusqu'à l'anéantissement de la création, entre monde de l'esprit et monde des corps matériels d'ici-bas. La matérialité des existants naturels détermine un seuil dans l'obscurcissement des miroirs théophaniques. Le temps naturel ne parvient pas à acquérir une dignité ontologique authentique. Il est l'expression inférieur de l'éternité, image mobile de l'éternité comme disaient Platon et Plotin
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