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Critiques de Christiane Levêque (2)
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Le Mokafé

Ce recueil est un vrai petit bijou. Constitué d’observations méticuleuses et non en moins poétiques de la vie de tous les jours d’un café bruxellois. On y rencontre toutes sortes de personnes, – on peut parler de personnages –, jeunes ou vieux, des deux sexes avec leurs manies, leurs habitudes ancrées au plus profond d’eux- mêmes, leurs réflexions et leur langage propre.

Christiane Levêque se délecte de tracer ces petits portraits, jamais cruels, présentés façon « recueil de poésie », agrémentés de fines illustrations dues à l’illustratrice Garène tout au long de cette soixantaine de pages au format carré.

Certaines de ses annotations sont capables, en trois lignes de décrire une situation humaine, comme ce portrait ou plutôt cette touche :

Perte de vingt kilos en quelques semaines. La mort de son mari s’est glissée dans les plis de son cou. Nul doute qu’elle y prendra souche.

Et cet autre :

Il dit que sa femme est redevenue une petite fille. Alors, il lui achète des livres de la collection « Martine » parce qu’elle les aimait quand elle était enfant.

Que dire de plus, tout est dit en si peu de mots. Cette façon d’écrire me fait songer à l’œuvre de Philippe Delerm, Toute en nuance, en petites touches successives.

Ici, la gageure était de nous faire pénétrer dans ce lieu relativement fermé qu’est un café bruxellois, le Mokafé, fréquenté pour l’essentiel par des habitués.

Le style adopté est concis, en phrases courtes, sans fioritures avec des mots simples, peu de virgule, le point règne en maître.

Les illustrations au nombre d’une dizaine à peine sont là pour souligner tel moment, donner un cadre au lieu, nous mettre davantage encore dans l’atmosphère du Mokafé. Garène vit à Bruxelles depuis 1991, en plus d’être illustratrice, elle est céramiste et anime des ateliers artistiques en milieu psychiatrique. On peut découvrir son travail de création sur http://garene.blogspot.be. Tout son travail sur plusieurs années est ici montré.

Nous devons ce joli travail à Jean-Louis Massot, directeur des éditions Les carnets du Dessert de Lune, bien connu des réseaux sociaux comme facebook. Où il tient en permanence informé ses lecteurs sur son travail d’éditeur. Visitez son site : http://lescarnetsdudessertdelune.hautetfort.com/

À la lecture de ce recueil, une pensée vient à nous et nous questionne : serions-nous capables, à ce point, d’observer les gens qui nous entourent quand nous nous trouvons dans un lieu public ? Capable de décrypter un signe, un détail dans l’habillement, un mot prononcé d’une façon différente, une réflexion, un presque rien, pas si sûr !

Un petit bijou, vous dis-je !

© Michel Ostertag in Francopolis

Avec ce recueil de petits poèmes en prose, on pénètre dans un café qu’on ne connaît pas, et on en ressort, quelques pages plus loin, comme un habitué. Christiane Levêque livre un album formé d’instantanés de la vie à la fois familiale et sociale de ce lieu public. Elle se tient au centre comme un peintre, une chroniqueuse, et chaque regard porté vers les autres est l’occasion d’écrire quelques lignes ou un paragraphe. Convivialité et tendresse font le reste. Tous les âges et tous les métiers se voisinent. Chiens et chats sont même de la partie. On mange, on boit, on parle, on rêve comme chez soi, mais ensemble. Aucune caricature mais l’art du croquis, les dessins de Garène qui accompagnent l’écriture en finesse permettent encore mieux de saisir l’ambiance du bistrot bruxellois Même accent wallon que celui de pépère. On est au cœur de la ville et de la vie, dans une connivence bienveillante

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des gens. Christiane Levêque a l’œil pour ficeler cette galerie de portraits sympathiques. Et ne manque pas d’humour pour glisser ses sourires au lecteur. On n’a qu’une envie : aller boire à son tour une bière blanche au Mokafé, on est déjà client.

© décharge

Établissement connu de Bruxelles, le Mokafé, abrité dans la Galerie du Roi, est un lieu d’observation par excellence, comme la plupart des tavernes. Christiane Levêque y a glané des notes, au fil des jours. Elle les restitue en brèves proses. Il y est question, comme le souligne Eva Kavian dans sa préface, de « ces reflets de nous que sont les autres ».

Il y a souvent de la solitude dans ces personnes qui viennent s’installer à une table de brasserie. Les portraits défilent, comme les clients. Ce sont des photos instantanées. Elles dessinent des silhouettes ténues. Elles suggèrent des existences entières en des croquis rapides. Les mots ne disent pas tout ; derrière eux, ce qui n’est pas dit laisse le lecteur imaginer, soupçonner ce qui a pu se passer au cours de la vie de ces êtres un moment posés en un lieu plutôt protégé au cœur du va-et- vient, du brouhaha de la ville. Parfois même, trois lignes suffisent.

L’âge se devine entre les phrases. Un caractère surgit au détour d’une parole prononcée. Une tension s’esquisse entre deux convives. Un drame transparaît à travers une larme versée dans un verre de Duvel ou via un geste répétitif au cours d’une attente improbable ou encore d’une fille en quête de la reconnaissance d’un père. Une robe provoque une bouffée de souvenirs. Un afflux de touristes provoque un hoquet snobinard. De vieux couples témoignent d’attentions touchantes.

Un vocable déclenche et dévoile un rapport subtil avec la réalité : un homosexuel commande une salade folle, un colombophile acheteur se demande s’il n’est pas un pigeon... Le trait parfois, lapidaire, rappelle Jules Renard : « ‘Ma place est prise’ dit- elle, rageuse. Voyons, quel affront à l’habitude. »

Sans cesse, le lecteur passe de l’image vue à la connaissance, partielle sans doute mais profondément tendre, des êtres entrevus, humains ou félidés. Un peu comme lorsqu’on s’attarde sur des photos de Jacques Doisneau.

© Michel Voiturier

« Le Mokafé est un théâtre » que nous donne à voir l’auteur avec une écriture sobre et sensible. De l’enfant de 8 mois à la vieille dame de 80 ans, chacun essaie de tenir son rôle, plus ou moins aisément, plus ou moins joyeusement. Parfois « l’instant se la coule douce » avec des « sons familiers, complices, câlins au cœur et à l’oreille ». Dans ce café qui doit son nom à une dynastie de chats, certains clients tiennent à retrouver leur place. Là ils sont connus et reconnus, entrent en relation avec d’autres s’ils le souhaitent, nous offrent un petit fragment de leur vie. Comme au théâtre, nous sommes spectateurs mais aussi partie prenante de ce qui se passe : scènes qui ont « toute la grâce du monde », scènes qui disent toute la solitude du monde. Comme un miroir de nos joies, nos manques, nos peurs. Histoires familières auxquelles nous ne prêtons pas souvent attention, pris dans nos propres scénarios. Et comme l’écrit Eva Kavian, peut-être que Christiane Levêque écrit aussi « ce que nous ne voyons pas, ce que nous n’entendons pas, quand nous sommes sourds, ce qui nous échappe, .... Ces destins côtoyés et ignorés, ces reflets de nous que sont les autres, dans le miroir de l’humanité. »

© Jacqueline Persini

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Café-vie quotidienne. Le « Mokafé » du nom d’une célèbre dynastie de chats, Moka 1, Moka 2 et d’une non moins célèbre pâtisserie qu’un vieux monsieur savoure, ravi, miette par miette. Oui, tous ces habitués du Mokafé, celui qui lit son livre de philo « siège deux, celui qu’il préfère », celle qui narre le délice d’une sole, celle qui pleure son fils mort dans un accident de voiture, celle qui attend son amoureux, un homosexuel qui commande « une salade folle », ceux qui sont en terrasse abandonnés à la torpeur de l’été. La description du mangeur d’omelette est savoureuse de précision. Des bribes d’histoires, des rencontres, des sentiments, la vie comme elle va : « Le Mokafé est un Théâtre » !

Adorable petit livre délicatement illustré des aquarelles de Garène: scènes d’intérieur de café avec les habitués, les chiens attendant un petit bout, les chats alanguis. Auteure et illustratrice captent « des instants de vies,/discrets moments d’éternité »

© Inter CDI
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Ostende

Christiane Levêque. Ostende

Les Carnets du Dessert de Lune, 2015, 70 p. 10 €



Le temps d’un été dans la ville côtière, Christiane Levêque croque une série de scènes du quotidien à la mer du Nord. Le livre est un recueil de petits textes en prose empreints d’une poésie réservée. Liée au monde du théâtre, l’auteure a écrit deux pièces ainsi que des nouvelles et de la poésie. Ostende est sa deuxième collaboration avec Garène, dessinatrice et céramiste dont le travail entre joliment en harmonie avec celui de l’auteure. Elles avaient déjà composé ensemble, dans le même esprit, le recueil Mokafé, chez le même éditeur.

Ce petit livre prend la forme d’une galerie d’instantanés comme pris sur le vif, de moments, de portraits successifs. Ces textes courts – un simple paragraphe pour la plupart – sont ponctués de scènes illustrées par Garène. Mots et images s’accompagnent, se complètent avec une belle continuité.

La drache estivale belge, les vacances aux airs d’automne, les moments de paresse à observer la lumière du soleil se déplacer. L’auteure dépeint Ostende, ainsi que ses estivants : du chien se fichant des ordres de son maître à l’enfant faisant rebondir un ballon. Du gamin du sable plein les yeux au veuf qui noie sa solitude dans la marche et les moules. Des Wallons aux Flamands. Du jeune couple au vieux garçon venu avec sa maman. Des barres d’immeubles aux dunes où se cacher. Des bouts de conversations entendus aux gestes entre-aperçus, l’auteure observe, décrit, esquisse quelques pensées dans ce qui ressemblerait à un carnet de notes à peine retouchées, qui invite à une lecture flâneuse.

Le ton est délicat, la tendance est à l’économie de mots. L’auteur en donne juste assez pour que le lecteur puisse saisir les scènes. Celles-ci sont au final à peine esquissées. Christiane Levêque confère de la signifiance aux instants que d’autres jugeraient banals. Elle se garde de forcer la main à son lecteur et de lui signifier ce qu’il devrait en penser. Et si ces instants nous parlent, sans doute est-ce parce que nous y avons déjà assisté, les avons déjà vécus sans nous en apercevoir. Christiane Levêque les collectionne comme d’autres ramassent les coquillages sur la plage.

© Fanny DESCHAMPS in Le Carnet et les instants, avril 2015



Avec la même subtilité et fluidité que dans son dernier recueil aux Carnets du dessert de lune : Le Mokafé, Christiane Levêque prend cette fois comme sujet diffus la ville d’Ostende. Elle applique sa technique expérimentée, à présent, à base de croquis, petites touches et anecdotes furtives, à tout ce qu’elle observe, entend et attrape au vol de sa curiosité sur le qui-vive en permanence. Son écriture est souvent à la limite de la prise de notes Soleil gâteux laisse filer les heures. Elle observe avec empathie les amoureux, jeunes et vieux, les uns dans leur exclusion absolue du monde, les autres dans leur tendresse réservée. Elle entend joyeusement les accents et les nuances des langues qui se chevauchent entre flamand et wallon. Tous ces destins d’enfants, de veufs, de familles qui s’entremêlent, un instant dévoilés, dépliés et projetés. Toujours un peu en reportage sur le lieu-titre, Ostende dégouline. C’est bien Ostende dans son côté multiple et polymorphe, qui demeure le cœur du recueil. Ostende, la ville, et ses cafés, Ostende la plage, et ses promeneurs, Ostende la mer, Charme blafard. Le regard s’ensable. Le ciel s’en sort par un clin d’œil bleuté. Et toute cette matière feuilletée dresse un portrait à la fois charmant et complet d’Ostende, ville qui mélange idéalement rudesse et douceur.

© Jacques Morin in revue Décharge.


Lien : http://www.dessertdelune.be
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