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3.69/5 (sur 112 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1968
Biographie :

Diplômée d’HEC, Christine Avel s’est spécialisée en microfinance dans les pays du Sud et a publié des ouvrages professionnels dans ce domaine. Après plusieurs années un peu partout dans le monde, elle vit actuellement à Montpellier.
Elle a publié deux livres aux éditions Le Dilettante : un roman, Double Foyer, et un recueil de nouvelles, L’Apocalypse sans peine (prix Jean Monnet des lycéens 2006). Elle écrit également des nouvelles pour la radio et en revue (Décapage), et pour des ouvrages collectifs (Dictionnaire des personnages populaires de la littérature, Seuil, 2010). En 2011, elle réalise un projet d’écriture au Cambodge dans le cadre d’une mission Stendhal de l’Institut français.

Source : http://www.m-e-l.fr/ et http://www.ledilettante.comhttp://www.ledilettante.com
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Bibliographie de Christine Avel   (10)Voir plus


Entretien avec Christine Avel à propos de son ouvrage Autoportrait à la valise :



27/05/2016

L’Autoportrait du titre fait référence à un tableau offert à la narratrice. Dans quelle mesure ce mot s’applique à votre livre, présenté comme un roman ? Quelle part de vous dans cette narratrice voyageuse ?



Ce livre est bien un roman et non une autofiction. J’ai besoin du détour de l’imaginaire pour écrire.
Bien sûr, je prête à la narratrice des éléments qui viennent de moi et certains de mes défauts (pas tous quand même), je puise dans tout cela et mon imagination fait le reste… c’est une fiction.
Mon premier roman (Double foyer) était écrit par un homme à la première personne, il y a avait beaucoup de moi aussi dans ce roman, peut-être plus, mais personne n’a eu l’idée de me poser la même question. Ici la narratrice est une femme, et j’ai aussi beaucoup voyagé, je comprends que la question paraisse plus naturelle.



On attend généralement des grands voyageurs mille anecdotes et récits d’aventure, le Livre des Merveilles de Marco Polo. Pourtant, votre narratrice n’en livre qu’une poignée, du bout des lèvres, et se concentre plutôt sur les départs. Comment expliquez-vous ce choix ?



C’était un choix très clair dès le début. Je ne voulais pas écrire un récit de voyages. Pour reprendre une phrase assez connue de Nicolas Bouvier « on ne voyage pas pour se garnir d’anecdotes comme un sapin de Noël, mais pour que le voyage nous rince, nous essore… ».

Ce qui m’intéressait, c’était de mener l’enquête avec ma narratrice sur son envie de partir, et de la voir évoluer dans le temps. Les anecdotes à l’étranger (quand elle part en Patagonie, en Birmanie, les scènes ubuesques d’aéroport ou d’hôtel) sont là comme des pièces de puzzle, pour nous permettre de comprendre peu à peu son parcours.



On croise dans le livre quelques autres voyageurs. Existe-t-il selon vous une race de voyageurs, se reconnaissant entre eux, comme le « one of us » que le narrateur de Lord Jim, de Conrad, reconnait immédiatement en Jim ? Ou chaque voyageur porte-t-il son histoire ?



Chacun part pour des raisons personnelles, rarement les mêmes. Malgré tout, des points communs se créent, une complicité : je voulais raconter cela aussi, par petites touches. Le snobisme de certains qui comparent les restaus et hôtels du monde entier, par exemple, et prétendent que le meilleur restau thaï qu’ils connaissent est à Abidjan, ou la meilleure trattoria milanaise à Bangkok. Et qui passent des heures à en débattre, bien sûr…



Vous citez les Villes Invisibles, d’Italo Calvino. Votre description des bars d’hôtels internationaux interchangeables rappelle la Trude de Calvino : « Tu peux reprendre un vol quand tu veux, me dit-on, mais tu arriveras à une autre Trude, pareille point par point, le monde est couvert d’une unique Trude qui ne commence ni ne finit : seul change le nom de l’aéroport. » Est-il encore possible de voyager, ou le monde n’est-il devenu qu’une unique Trude ?



Quand on se déplace pour son travail par exemple, d’hôtel standard en hall d’aéroport, on a vite l’impression que les lieux sont tous les mêmes : cet effet de l’uniformisation du confort, j’avais envie de le montrer dans une scène plutôt extrême (tous les hommes croisés dans tous ces hôtels et ces aéroports – ses amants potentiels - deviennent semblables, sans identité…), un peu comme dans Lost in Translation.



Mais c’est une forme d’illusion aussi : on s’enferme vite dans un milieu social précis (celui des cadres d’entreprises internationales, en l’occurrence) ; ce n’est pas parce qu’on nous offre le même Coca-cola ou Lipton Yellow à Lagos ou Phnom Penh que l’on ne peut pas sortir du cadre, voir autre chose, loger ailleurs. Pas besoin d’ailleurs de voyager pour être curieux de la singularité de chacun, de ce qui fait la beauté particulière d’un lieu et la diversité du monde.



La narratrice fait remonter son goût du voyage aux grands départs en vacances de son enfance. Pourtant, devenue adulte, elle insiste sur la nécessité de voyager seule. Comment passe-t-on du voyage en équipage au départ en solitaire ?



Je ne crois pas qu’elle plaide pour le voyage en solitaire, d’ailleurs elle embarque son fils en voyage. Je dirais plutôt qu’elle a grandi, la transhumance familiale l’été c’est fini ; elle ne veut plus s’embarrasser des projets et des envies de voyage des autres, tout simplement.



Les départs de la narratrice ne sont pas toujours acceptés par son entourage. Est-il plus compliqué d’être voyageuse quand on est une femme, a fortiori une mère ?



C’était le point de départ de mon livre. J’ai dévoré, un été, des tonnes de recueils de nouvellistes contemporains, surtout américains, dont les héros étaient plongés dans des pays en guerre ou des contextes très difficiles.
Je trouvais très peu de femmes dans ces histoires : j’ai pensé aux amies, aux collègues (femmes) croisées un peu partout dans le monde, qui voyagent, dans des conditions parfois très compliquées. J’ai pensé que peu de livres en parlaient, que c’était assez injuste, et le sujet me tenait à cœur.

Bien sûr il y a de grandes voyageuses, des Ella Maillart ou des Florence Arthaud, mais on sait moins à quel point le départ, c’est aussi le quotidien de femmes « ordinaires », qui composent avec une vie nomade et des départs incessants.
La place des femmes, pour beaucoup, a longtemps été (est encore pour certains) celle de Pénélope. C’est notre culture, nous venons de là. Et les femmes qui voyagent, y compris par nécessité professionnelle, même lorsque ce choix est accepté (en apparence souvent, car en pratique, ce n’est pas du tout évident), en gardent une sacrée dose de culpabilité si elles on des enfants. Ne pas en avoir génère aussi de la culpabilité, en tous cas des questions…



Votre livre constitue une interrogation sur l’appel du large. Votre narratrice cherche sans relâche une explication : atavisme, maladie, puissances occultes, psychanalyse, héritage accepté ou refusé etc. En définitive, peut-on l’expliquer ?



J’espère bien que non, tout le plaisir est dans l’interrogation, non ? Un bon teasing serait de dire qu’il y a la réponse à la fin du roman, mais pour être honnête….pas gagné.



Christine Avel et ses lectures:



Quel est le livre qui vous a donné envie d’écrire ?



Des dizaines sûrement, c’est dur d’en isoler un. Quand je peine à écrire, je lis, la lecture est vraiment à l’origine de l’envie d’écrire, pour moi en tous cas. Bon, un quand même, lu quand j’étais ado : Fictions, de Jorge Luis Borges. Cela changeait de ce que je connaissais alors (les classiques et un peu de science-fiction). J’ai tenté d’écrire du très mauvais sous-sous-Borgès à cette époque.



Quel est l’auteur qui aurait pu vous donner envie d’arrêter d’écrire (par ses qualités exceptionnelles...) ?



Quand j’ai lu La splendeur du Portugal, d’Antonio Lobo Antunes, j’ai pensé que vraiment, il avait parfaitement atteint sa cible. J’ai lu ce livre dans des conditions assez incroyables, dans un village kenyan, la nuit, à la bougie, je l’ai dévoré. J’étais très admirative, cela correspondait exactement à mon envie d’écrire de l’époque, sur le fond et la forme.




Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?



Le livre je ne sais pas, mais des auteurs oui, Georges Perec, Henri Michaux, Fernando Pessoa, Virginia Woolf, Italo Calvino.



Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?



J’ai un problème personnel avec Ulysse de James Joyce. Certains de mes proches admirent énormément ce livre, alors vraiment j’ai essayé plusieurs fois, je n’y suis jamais arrivée. J’ai du mal à voir plus qu’un exercice de style malin et érudit – mais je crois sur parole tous ceux qui m’expliquent pourquoi ce livre a changé la face du monde et la littérature. Je réessaierai, peut-être. (En fait, je n’ai pas honte du tout.)



Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?



Insomnies, de John Cheever. Cheever est un formidable portraitiste, et il a un humour dingue. Il est meilleur à mon avis en nouvelles qu’en roman. Il a un vrai don pour croquer ses contemporains (les années 60, des familles américaines aisées avec l’abri antiatomique au fond du jardin…) et en même temps, on se reconnaît forcément (ou sa belle-mère, ou ses voisins). Quand je lis Cheever, je ris toute seule, je passe pour une dingue dans les cafés.



Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?


J’adore la littérature jeunesse, raison pour laquelle je publie aussi à l’Ecole des loisirs pour les enfants / ados. Mais la Comtesse de Ségur, je n’ai jamais accroché. Une de mes amies a relu dix fois Les malheurs de Sophie (bon, elle s’appelle Sophie, on peut comprendre), moi franchement je n’arrive pas à m’y intéresser.



Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?



« On lit ce qu’on veut, on écrit ce qu’on peut. »
Je crois que c’est de Jorge Luis Borges, qui à mon avis a plutôt réussi à écrire ce qu’il voulait. Mais je trouve cette phrase très rassurante. Surtout quand on s’efforce d’écrire !



Et en ce moment que lisez-vous ?



En ce moment j’avance dans l’écriture d’un roman, cela me rend monomaniaque : je lis, mais je pioche en librairie ou chez moi tout ce qui pour une raison ou une autre (parfois franchement ténue) me semble avoir un lien avec le livre en cours. Donc là, c’est, en vrac sur ma table de chevet : Au pays des mensonges d’Etgar Keret (un auteur israélien que j’adore), Sur la photo de Marie-Hélène Lafon, L`Acacia de Claude Simon, De petits incendies de David Means, Anchise de Maryline Desbiolles, Le temps vieillit vite de Antonio Tabucchi.
Si si, il faut bien chercher mais il y a un lien.



Entretien réalisé par Guillaume Teisseire

Découvrez Autoportrait à la valise de Christine Avelaux éditions du Seuil :



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Chrisitine Avel présente son nouveau roman, "Ici seulement nous sommes uniques", édité à l'occasion de la rentrée littéraire ! Une île grecque pendant l?été. Il y a les adultes : des archéologues venus du monde entier, des scientifiques un peu farfelus, obsédés par ce chantier sur lequel ils travaillent depuis longtemps. À côté d?eux, il y a leurs enfants qui se retrouvent là, chaque année, pour deux ou trois mois. Leur monde est minuscule : un coin d?île aride, une maison cernée d?un jardin luxuriant, une crique où plonger. Un frère et une soeur mènent la bande. Pendant l?été, pour eux, le reste de la terre n?existe plus. Leur domaine se limite à quelques arpents d?eau profonde et de terre rouge contenus par deux sentiers et une frange rocheuse incisant la baie. Ici, seulement, ils se sentent vivre et vivent ardemment leur adolescence. À mesure que le chantier s?agrandit et connaît son heure de gloire, les enfants deviennent grands, puis s?éloignent. Un roman poétique sur l?adolescence et ses éblouissements. Auteur de romans au Seuil et au Dilettante, Christine Avel est spécialiste du développement dans les pays du Sud. Elle vit et travaille à Paris. La fiche du livre : http://www.buchetchastel.fr/ici-seulement-nous-sommes-uniques-christine-avel-9782283032916 © Libella, Éditions Buchet/Chastel 2019 Production exécutive : Resonance Films

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Citations et extraits (31) Voir plus Ajouter une citation
J'ai compris. Je ne suis pas un sorcier né dans une famille de Moldus, mais plutôt un cracmol, un être humain banal, quoi, un gars sans aucun don. Né par erreur dans une famille de sorciers.
J'ai pleuré jusqu'au matin.
Je me suis dit : "ça y est, c'est fini. Tout est fini."
Mais là, je me trompais.
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À vrai dire , j'évitais de regarder dans sa direction. Il était beaucoup plus grand et plus musclé que moi [...] J'enviais sa peau mate; à côté de lui, je me sentais aussi blanc qu'un poulet de supermarché.
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Je pars comme je respire, souffle et cœur léger, un pied devant l’autre, pas un regard en arrière. Je n’ai pas pris le temps de disséquer ce mot, départ, en moi depuis toujours. Dès que j’ai pu tenir sur mes deux jambes et imposer ma volonté, je suis partie.
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Ici commence et finit le monde. Ses limites sont précises et immuables, elles vont du troisième caroubier de la grand-route à l’extrême pointe des rochers de la crique, une poignée de kilomètres plus loin.
Ainsi en a décidé Niso, debout sur le bassin blanc des grandes décisions, celui-là même où, chaque été, nous allons massacrer de minuscules serpents, dans une orgie de hululements sauvages. Ce jour solennel où Niso l’affirme, bras croisés sur la poitrine, relevant le menton comme son père : « Ici commence le monde », nous l’acclamons en chœur.
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La chasse au touriste est une pratique nocturne. Il faut de l'expérience, de la pratique, de la ruse - le touriste est malin, et rapide avec ça.
..... nous partons chasser le touriste comme d'autres les grands fauves armés de courage et d'armes improvisées.
Avec l'ère de la chasse au touriste s'ouvre, sur une note triomphante, l'âge d'or du chantier. Ici seulement nous sommes uniques, p 82
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Ici commencent et finissent nos vies. Nous y passons deux ou trois mois par an : le reste de l'année n'existe qu'à peine, étiré dans une brume compacte de monotomie - une récitation bien apprise et débitée par cœur, à toute vitesse, sans en savoir le sens, oubliée à la seconde de l'arrivée sur l'île, et dont jamais nous ne parlerons entre nous. ...
Puis toujours ce point précis, dans la descente en pente douce vers la plage, où nous sommes d'un coup attirés vers la mer : nous le devinons sans savoir où il est. Arrivés là exactement, les bras en croix, nous nous mettons à hurler, galopons jusqu'à l'eau, nous jetons pêle-mêle dans les vagues, libérant nos poumons de tous les cris contenus dans l'année.
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Dans l'eau, Niso n'a jamais froid. En bas seulement, en profondeur, cramponné d'une main au rocher, quelque chose dans sa poitrine se desserre, se déplie lentement comme un étau et les racines s'écartent (...).
Il reste le plus immobile possible, laissant ses mains flotter comme deux poissons-pilotes dociles autour de lui. Parfois, ultime récompense, un bande sardines argentées frémit devant ses yeux, tout près, au rythme de la houle.
Lorsque le trop-plein de l'année s'est enfui en mille et une bulles d'air, alors seulement, d'un coup de talon, il monte vers la surface.
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Nous savons qu'un jour, il sera archéologue. C'est une évidence. Nous ne savons pas encore que les évidences sont minces et se déchirent au moindre coup de vent.
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Mon enfance est aux deux-tiers immobile, elle m'entraîne par le fonds. Je m'accroche au tiers restant pour ne pas m'embourber.
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Nous n'avons pas peur du temps qui passe, encore moins de mourir, certains qu'un jour, les archéologues du futur nous réveilleront avec les gestes sûrs du vieux Nikos, qui a dégagé un à un les ossements de la fouille.
Les vies enfouies en profondeur nous portent, bien mieux que nos arbres généalogiques malingres. Les vieilles pierres nous rassurent. Elles nous soufflent que rien ne change si vite, que la vie durera.
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