AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Apoapo


4. « Mais le future toxico, lui, se trouve confronté sans relâche à son manque, à sa nostalgie d'identité. Il est constamment rejeté à ce moment à la fois entrevu et inaccompli du déjà presque et du presque plus, dot parle Jankélévitch. Il est constamment renvoyé à la brisure et à l'éclatement.
De là son côté flottant et parcellisé, qui fait qu'il semble présenter successivement toutes sortes d'éléments de pathologie différents : parfois un peu schizophrène, parfois un peu maniaco-dépressif, parfois un peu homosexuel, parfois un peu pervers, un peu tout cela mais jamais vraiment. Son univers intérieur est une succession d'équilibres instables qui se déploient entre la personnalité normale et la personnalité psychotique. D'où le désarroi des psychiatres qui, ne traitant en général que l'aspect de ses métamorphoses qui leur est le plus familier, se trouvent profondément déroutés par la mobilité de sa personnalité et de sa conduite.
[…]
D'expériences en explorations, tous compromis épuisés, il ne lui reste plus finalement que la drogue – à condition qu'il la rencontre (et il ne la rencontre pas toujours). Alors le miroir se recollera, et il épousera son image. Ce sera l'unité retrouvée, non pas seulement totalité réformée mais encore densité d'être, sensations, chaleur, musique. Ce sera le paradis perdu : n'est-ce pas Scacz [Thomas Szasz] qui avait décelé la première drogue dans la pomme d'Adam et Eve ?
Aussi bien paiera-t-il son bonheur, l'effet des produits retombé, par la culpabilité, par le retour à son manque premier, encore avivé d'être redoublé dans l'aventure de la drogue. Son instabilité, sa démesure fondamentale vont s'en trouver multipliées...
Lorsqu'on parle de toxico réel, il y a donc bien le risque d'une sorte de damnation. Seulement, ce risque ne lui vient pas des produits. Il le porte en lui. Mieux encore, c'est à travers lui qu'il se transforme, qu'il devient, non pas, comme le croient beaucoup de psychiatres, un malade mental qui aurait l'usage de la drogue comme symptôme, mais bien un homme autre, original, recréé par l'acharnement toxicomaniaque qu'il apporte à colmater la béance qui fonde son destin. » (pp. 228-230)
Commenter  J’apprécie          00









{* *}