J’ai choisi de parler de Berlin parce que j’ai eu l’idée d’une scène qui se passerait à Berlin, à partir d’une anecdote que l’on m’a racontée. Mais, dans le fond, je ne pense pas vraiment que l’on puisse parler des villes et mon roman vise justement à dégriser cette idée qui me semble propre aux guides touristiques selon laquelle les villes auraient une âme, une essence parfaitement délimitée. J’aime bien quand Roland Barthes dans L`Empire des signes dit « ce pays que j’appelle Japon ».
Oh, non, c’est une très mauvaise décision, car c’est un arpenteur. Et il voit surtout dans ce nouveau territoire quelque chose à conquérir (pas de façon martiale, cela va sans dire). Seulement il est confronté à l’impossibilité d’être ailleurs, réellement ailleurs, parce que c’est un concept purement relatif et qu’il est épris d’absolu.
C’est surtout le retour qui me semble fécond. Ce que la mémoire embaume. Mais le changement d’environnement me paraît impossible, du moins en Europe. C’est une des mille choses qui me paraissent impossibles (que le monde est hostile). Mes deux romans tournent beaucoup autour de l’impossibilité de l’exotisme.
Je suis préoccupé par la question philosophique du propre. Et je crois que chaque idée prend une forme propre, en matière esthétique, même si par habitude, un artiste se met à concevoir chaque idée en fonction du médium qu’il utilise. Je ne suis pas sûr que ce soit une excellente habitude. En même temps, une forme d’homogénéité est bénéfique à l’immersion romanesque. Je tiens un blog qui tourne beaucoup autour de ces questions. Mais le texte et l’image, ainsi que la possibilité d’une cohabitation, occupent mes pensées depuis plus de deux ans. Disons que pour moi il y a dans l’image quelque chose d’irremplaçable et d’indivisible, comme pour le texte, et je cherche ardemment cet irréductible. Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles j’ai inséré des images, je ne peux pas parler de tout, mais cela inclut aussi l’idée d’accréditation de mon récit, qui m’importe.
Ma foi, on ne peut rien vous cacher. Rêveur pratique, toutefois, qui cherche à organiser sa vie de manière pragmatique pour y loger autant que rêve se peut.
Au premier degré déjà, le fait qu’à mon avis les auteurs d’aujourd’hui seraient bien inspirés de prendre la chose à bras-le-corps, car le cinéma ne les a pas attendus. Après, voilà la conclusion du narrateur : les nouvelles technologies rapprochent ce qui est proche et éloignent ce qui est lointain. On trouve ceci dans le dernier livre de Régis Debray : « le médium n’est pas le message, mais il y contribue fortement, comme l’argent au bonheur. » Nous sommes joués par les machines, mais je ne pense pas que ce soit forcément mauvais. Comme toute chose qui semble exister en soi et de manière incontestable, les nouvelles technologies sont fort ambivalentes, comme la pluie qui nous gonfle mais également nous nourrit.
Je ne suis pas sûr de voir à quel passage du livre vous faites référence, mais en tout cas il ne me semble pas que cette insensibilité soit née des réseaux sociaux. Il me semble plutôt que le narrateur (et plus tard le père de Dora dans le livre) sont convaincus que la communication est impossible entre les êtres, que l’essentiel ne pourra jamais être dit. Quand le narrateur veut raconter à Dora un souvenir d’enfance, il a soudain la gorge sèche. Si tant de choses sont indicibles, c’est parce qu’on ne peut transmettre que ce qui est narratif. Or, c’est bien peu. Préoccupation d’écrivain aussi : la corporation a bien du mal à admettre qu’il y ait quoi que ce soit d’indicible, déni compréhensible. Mais quand on voudrait aller à la chose même, à cause de la successivité du langage, on est tenu de tourner autour, de condescendre au langage, à son code. Ainsi parfois nous manquons la cible.
Vaste question sur laquelle je me garderai bien de fournir une réponse définitive. Mais la modernité me semble globalement bonne à prendre, et j’essaie de l’accepter quand je le peux. En l’occurrence, j’ai pris le parti de foncer dedans parce qu’un romancier ne saurait être trop moral, éthique et esthétique étant sœurs ennemies. La modernité demande à ce qu’on lui rentre dans le lard, et sa couenne est vaste. Pour ma part, je connais certains de mes tout meilleurs amis grâce à Internet et aux réseaux sociaux, qui ont cette capacité de centraliser les préoccupations, les intérêts. Internet me fascine pour ceci : si vous voulez une vidéo d’un panda en slip qui fait du skateboard, vous l’aurez. Néanmoins, et c’est ce que j’essaie de montrer dans mon livre par le prisme d’une relation à distance, l’illusion de la présence est peut-être pire que l’absence.
Dans le café de la jeunesse perdue, de Patrick Modiano.
Donna Tartt. Mais je prends plutôt ses livres (et surtout le premier) comme des défis. Même si atteindre ces sommets ne sera pas de la tarte (on peut plaisanter).
Le Portrait de Dorian Gray, d’Oscar Wilde.
La Salle de Bain, de Jean-Philippe Toussaint.
Gargantua, de François Rabelais (vous connaissez l’auteur mais je suis procédurier).
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du Côté de chez Swan..., de Proust (on peut plaisanter). Non, pour être franc, je pense plutôt à L`affaire des vivants, de Christian Chavassieux (Phébus), splendide roman faussement balzacien.
Madame Bovary (s’ensuit un tombereau d’injures sur mon compte Twitter @ClementBenech).
Oui, j’en ai quelques-unes. En voici une, tenez : « Si j’ai pu m’éloigner de Dieu, c’est donc bien qu’il y a des brèches dans son omniprésence. » C’est Eric Chevillard qui le dit, sur son blog l’Autofictif que je lis quotidiennement depuis cinq ans.
Surtout des choses pour mon mémoire universitaire. Mais j’ai lu l’excellent premier roman de Bertrand belin, Requin, il y a quelques semaines, et c’est un coup de maître. Formidable chant du cygne d’un homme qui se noie dans un contre-réservoir, avouez que c’est pas commun. Sa musique résonne encore dans ma crypte interne.
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