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Critiques de Daniel Welzer-Lang (6)
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Les hommes violents

Nous vivons une époque qui a vu passer le mouvement Me Too, la "libération de la parole", la loi pour "l'égalité réelle entre les hommes et les femmes" (doit-on rire ou pleurer ?), la "grande cause du quinquennat" et donc le "grenelle" (doit-on rire ou pleurer ?), la médiatisation morbide des féminicides, l'augmentation de la bibliographie consacrée aux victimes de violences conjugales...



Alors on pourrait penser que ce livre écrit par le sociologue Daniel Welzer Lang au début des années 90 est dépassé. Il n'en est rien. Daniel Welzer Lang s'intéresse depuis longtemps à la masculinité et à la violence de genre. Il a participé à la création, au début des années 90, d'un des premiers foyers à accueillir des auteurs de violences (si ce n'est le premier). Et je vous le dit tout net : cet homme sait de quoi il parle. Je pense qu'aujourd'hui encore (malheureusement) "Les Hommes Violents" est un incontournable pour qui cherche à comprendre le phénomène des violences conjugales. D'ailleurs si vous recherchez des ouvrages traitant des auteurs de violences, vous n'en trouverez pas beaucoup d'autres (j'exclus volontairement la masse d'ouvrages relativement récents traitant des "pervers narcissiques", un terme beaucoup trop médiatisé si vous voulez mon avis, car c'est UN profil d'auteurs parmi d'autres, absolument pas représentatif de la majorité des hommes violents)



Commençons par évacuer les querelles de chapelles : Daniel est assez critique des approches "psychologisantes" des violences faites aux femmes, en bon sociologue il pense que les violences sont avant tout l'expression de la domination des hommes sur les femmes, qu'elles sont donc socialement construites et porteuses de sens. Les tenants du versant psy objecteront le fait que l'on trouve (au vu des données actuelles) de la violence conjugales en proportion à peu près identique au sein des couples homosexuels, et mettront en avant l'histoire personnelle (l'histoire traumatique j'entends). Mais du coup comment expliquer que tout les enfants victimes des violences conjugales de leurs parents (ou carencés, ou maltraités etc...) ne deviennent pas à leur tour soit auteurs, soit victimes à l'âge adulte (on sait aujourd'hui grâce à la sociodémographe Maryse Jaspard que ça multiplie les risques par 5 quand même) ? Et comment expliquer que la très grande majorité des violences conjugales (mais soyons honnête on manque de données sur les hommes victimes) concernent les femmes ? Bref, vous l'aurez compris, ni l'approche psychologique, ni l'approche sociologique ne sont totalement satisfaisantes pour expliquer les violences conjugales. La "vérité" se trouve sans doute dans la reconnaissance du fait que l'organisation sociale influence l'organisation psychique et réciproquement.



Mais revenons en à Daniel ; que nous dit-il ? Que la violence conjugales est donc l'expression de la domination des hommes sur les femmes et qu'un ensemble de mythe, produisant des énoncés et des "mots image" permettent le maintient et la reproduction de cette violence. Quels sont ces mythes ?



Le mythe de l'amour (les femmes placent leurs désirs et besoins en un seul être...en gros le "prince charmant", alors que les hommes segmentent).



Le mythe de la folie : l'homme violent présente une pathologie psychiatrique ( c'est vrai dans seulement 10 à 15% des cas). C'est une façon de créer un repère auquel l'homme ordinaire va pouvoir se comparer et se dire qu'il n'est pas violent quand il cogne sa compagne parce que les lasagnes sont froides. En gros l'homme violent, c'est l'autre (voir d'ailleurs, dans les affaires judiciaires les plus graves, le recours quasi systématique à un "expert psychiatre")



Le mythe de la victime, produisant le mot image "femmes battue" qui désigne les victimes légitimes et réduit la grande majorité des autres au silence (les violences physiques, en proportion, sont largement inférieures aux violences psychologiques) car elles aussi se comparent à ce référent et ne s'y reconnaissent pas.



Le mythe de l'alcool et de l'origine sociale des auteurs. En gros, l'homme violent c'est un alcoolique issu des classes populaires. C'est vrai que la consommation de psychotropes peut être un amplificateur des violences mais elle n'en est jamais la cause.



Je ne vous mets là que les principaux, et vous renvoie à la lecture de l'ouvrage pour en savoir davantage. Pour conclure, j'aimerais vraiment vous dire que ce bouquin est dépassé mais malheureusement j'entends encore très souvent ces énoncés et leurs effets sur les victimes, quand je les reçois au travail.



Certainement qu'on va dans le bon sens...mais la route est encore longue (en moyenne 200 000 femmes victimes de violences par an, en France, depuis plus de 10 ans, un chiffre très certainement sous-estimé)

















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Utopies conjugales

Tous ceux qui ont eu maille à partir avec les affres de la vie conjugale devraient trouver dans cet ouvrage des raisons d’espérer. Ici on ne vous expliquera pas que Les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus.

Pas de recettes pour élaborer son Utopie conjugale clé en main ; plutôt des pistes de réflexion étayées par l’enquête sociologique et le savoir anthropologique. Il ne s’agit pas pour l’auteur d’enfermer l’homme dans une « virilitude » et la femme dans une féminitude, c’est à dire d’enfermer chacun dans une essence indépassable. Sans nier des différences profondes (il existe des conceptions masculines et des conceptions féminines du propre et de l’ordre dans l’hygiène domestique par exemple) l’auteur montre comment les hommes et les femmes ont cherché à redéfinir la masculinité et la féminité tout au long de l’histoire et comment chacun des genres a su évoluer. Sans minimiser l’influence des luttes féministes sur l’évolution des mœurs, Daniel Weltzer-Lang montre comment ces évolutions furent toujours induites par la souffrance causée par les carcans traditionnels de l’identité masculine et féminine. Ainsi, et c’est l’objet du plus long chapitre de ce livre, on apprend à ne pas désespérer de la gente masculine; la condition féminine à certainement beaucoup changé ces 40 dernières années mais un des mérites de ce livre est de nous rendre compte de l’évolution masculine généralement trop peu étudiée.

Pas de solutions toutes faites donc à nos problèmes d’entente conjugale comme dans le best-seller évoqué ci-dessus; mais des éléments objectifs sur la nature de la domination masculine, des études de terrain pour mieux comprendre comment se construisent les identités masculines et féminines. De l’enchevêtrement des antagonismes se dégagent des projets égalitaristes que tout un chacun, à tâtons, essaye d’instaurer ; l’utopie conjugale est précisément cette aspiration égalitaire et constitue probablement le point focal de perpétuels efforts d’invention à deux. Sans crier Victoire ce livre offre un point de vue original qui dépasse la perspective souvent manichéenne par laquelle la question des rapports de genre est complaisamment abordée.

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Les nouvelles hétérosexualités

Le paratexte de ce court essai promet la réflexion suivante : « les interrogations produites par les mouvements LGBTI » ont produit, depuis les années 1990, une multiplication des formes non seulement d'homosexualité (et transsexualité, etc. etc.) mais aussi une pluralité d'hétérosexualités nouvelles, dont une liste apparaît d'ailleurs en guise de sous-titre sur la couverture même : « hétéroqueers, candaulisme, polyamour, libertinage, exhibe, asexualité, pansexualité, hétéronorme, BDSM, non-genre, bi-genre, cis-genre, bisexualités, travestis, aromantisme ». Je me suis senti justifié à m'attendre d'un sociologue universitaire l'éclaircissement de ces termes, et en général une posture de neutralité scientifique – non de militantisme – et de formalisation-analyse des ensembles de concepts proches, toujours problématiques, de sexe/genre/sexualité et d'identités sexuelles/identités de genre/dispositions sexuelles/orientations sexuelles. Au lieu de cela, j'ai trouvé dans ces pages une grande confusion, un certain anti-moralisme (qui est toujours un jugement de valeur), voire par moments un dogmatisme prescriptif dans la sommation à avancer dans la « révolution de genre que nous sommes en train de vivre » (p. 188).

Les confusions. Il faudrait tôt ou tard ouvrir un dictionnaire et relever que le champ sémantique du « normal » possède dans notre langue au moins trois significations qu'il est bon de distinguer : 1) l'ordinaire ; 2) le plus fréquent en termes statistiques ; 3) le résultat d'une norme, d'un pouvoir normatif. Ainsi, « hétéronorme », la norme hétérosexuelle, peut ne pas être toujours synonyme d'une affreuse domination masculine, d'un carcan binaire, d'une discrimination ou persécution homophobe dont il convient de se débarrasser...

L'auteur se revendique expressément d'une analyse queer « qui dépasse les seules assignations sexuelles » (p. 18). Très bien. Jugeons toutefois des présupposés qu'implique cette analyse :

« L'analyse queer est une perspective sociologique et politique. Dans cette approche, la matrice hétéronormative est un dispositif de contrôle social des hommes et des femmes pour leur assigner des places conformes à l'ordre de genre, qui intègre domination et violence masculines, conformité des corps à la division stricte en deux sexes dits "naturels", fétichisation et mise en scène érotique de la différence des sexes, enfermement conjugal dans les deux sous prétexte d'amour, et stigmatisation des sexualités non hétéronormatives. » (p. 17)

Autre postulat difficile à accepter, malgré deux références : « Les dominants [Nicole-Claude Mathieu (1985)] connaissent la machinerie de la domination, partagent des secrets entre eux pour maintenir la domination et occulter les mécanismes de pouvoir [… Maurice Godelier (1982)]. Mais les dominants n'ont que peu de conscience des effets de cette domination. La domination crée une asymétrie des positions et des connaissances. » (p. 23).

En joignant les deux : les hétéronormatifs, hétérosexuels, cis-genre, monogames, et autres adeptes du « couple traditionnel » seraient incapables jusque de la prise de conscience de la domination qu'ils infligent...

Et d'ailleurs, ils ne seraient pas les seuls. Dans un paragraphe intitulé : « L'hétéronorme des LGBTQI » (p. 94 et ss.), où l'on apprend que « Ce sont les queers qui aujourd'hui ont repris le flambeau de la lutte contre les dominations hétéronormatives » (p. 95), ainsi qu'en conclusion de celui qui porte le titre : « Qui sont ces nouveaux et nouvelles venues dans l'incertitude de genre ? », on parvient à l'apparent paradoxe suivant – qui, dans toute autre perspective d'analyse, ne serait aucunement étonnant :

« Observons le cocasse de la nouvelle situation des sexualités : ceux, celles et les autres qui se vivaient comme le socle du système de genre et de sexualités constituent aujourd'hui les marges de ce même système de genre quand les LGBTQI réclament les structures sociales (couple, PMA...) héritées de l'hétéronorme. » (p. 179)

Mais il y a pis. Si, dans la foulée de Judith Butler et de ses disciples, l'explication de la sexualité et du genre consiste à multiplier au libitum les catégories – pourvu de sortir du binaire – et à accepter comme principe explicatif les auto-définitions d'identité de chacun – pourvu de sortir de l'assignation –, nous tombons dans les confusions suivantes : confusions entre sexe/genre/sexualité ; une difficulté à associer une certaine permanence ou stabilité à la notion d'identité – d'où le « genre fluide » ; enfin un évident arbitraire à distinguer entre « identités sexuelles » (trans, intersexes, travesti-e-s, virtuel et réel numérique, les bisexualités, l'asexualité, la pansexualité, l'aromantisme, les queers, le BDSM...), « identités de genre » (cis-genre, bi-genre, non-genre, genre fluide, travesti, hétéroqueer...), et les « dispositions sexuelles » (échangisme, libertinage, coming out libertin, candaulisme, polyamour, anarchie relationnelle, BDSM, dispositions sexuelles à travers le nombre de partenaires, exhibitionnisme). Cette tripartition, qui dans un ordre différent, se reflète dans les ch. 2, 3 et 4 du livre, montre ses limites puisque les contenus effectivement traités ne se recoupent pas exactement dans les trois listes ; peut-être veut-on juste éviter d'invoquer la catégorie « pratiques sexuelles », qui ouvrirait éventuellement la question de leurs régularité et diffusion, voire d'autres questions sociologiques transversales...



En fin de compte, entre a-priori militants, moralisme antimoraliste, manque de clarté des concepts et conséquents défauts dans la structure de l'exposé, il reste ce que l'on apprend de ces « nouvelles hétérosexualités », par une méthode d'enquête de terrain très peu exposée : mais là aussi, je reste sur ma faim, car je n'apprends guère davantage que l'existence de ces « pratiques », sans aucune problématisation sociologique. Pour moi, la « révolution de genre » ne viendra donc assurément pas de là, et ce n'est pas l'écriture inclusive, ni le refrain : « les hommes, les femmes et les autres » qui m'y conduiront...
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Les hommes violents

pense-bete:de la part d'un non-violent
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Nous, les mecs : Essai sur le trouble actue..

Un bouquin qui part un peu dans tous les sens, enfonce des portes ouvertes, et, au final, ne propose guère de concret. L'auteur, si l'en en croit la quatrième de couv', s'est donné pour but de savoir ce que les hommes pensent... et de faire "l'inventaire de la virilité".



Sur ce que les hommes pensent, on n'en apprendra guère. Certes, il y a bien quelques citations tirées d'interviews,... sont-elles représentatives, ou marginales? On en saura plus sur la culture masculine (pas pleurer, protéger les femmes et les enfants, ne jamais se plaindre, se battre), tout cela est bien connu.



Bizarrement, si le portrait qu'il fait des hommes n'est pas particulièrement flatteur, les femmes ne ressortent pas grandies non plus. Certes, selon l'auteur, une petite partie d'entre elles sont libérées, mais la majorité reste prisonnière de schémas culturels tout aussi toxiques, considérant qu'elles sont les seules à savoir s'occuper des gamins ou tenir un logement propre.



Daniel Welzer-Lang est spécialiste de la violence masculine et de la sexualité collective, il accorde donc une large place à ces deux aspects. Il termine en constatant péremptoirement que le couple est mort, que les relations entre genres doivent impérativement évoluer (on s'en doutait un peu). Pour lui, la solution passe par un meilleur dialogue, d'une part, et par d'autres types de relations, par exemple le polyamour, ou l'homosexualité. Cependant, comme l'auteur l'avoue lui-même, on dispose de trop peu de statistiques sur ces cas pour en tirer suffisamment de conclusions. On reste sceptique: est-ce vraiment suffisant pour que les tâches ménagères et le soin aux enfants soient mieux partagés? Ou que dans le contexte du travail, qui occupe quand même beaucoup plus de temps dans nos vies que le sexe, le fameux plafond de verre se brise?



Je sauverai quelques passages où l'auteur ne se fait plus essayiste, mais sociologue. On y glane quelques infos intéressantes. Par exemple, que c'est souvent suite à un remariage que les hommes participent davantage au travail domestique, du fait qu'après un divorce, ils passent par une phase de vie en solitaire. Bon sang, mais c'est bien sûr, la solution est toute trouvée: instituons le divorce obligatoire!
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Prostitution : les uns, les unes et les aut..

Du trottoir aux débuts du minitel rose en passant par les salons de massage, une équipe d'ethnologues trace le portrait de la prostitution Lyonnaise dans les années 90. Par de nombreux entretiens avec les concerné·e·s, les associations et parfois les clients, les auteur·e·s analysent les évolutions en marche suite à l'arrivée du minitel rose et l'augmentation du nombre de prostitué·e·s travestis et transgenres.

Sans misérabilisme, ils étudient les différents parcours d'entrée dans la prostitution, les relations avec les clients/les collègues/la police, les rapports hommes/femmes vus de l'intérieur et de l'extérieur du milieu prostitutionnel, les différence de vécu selon qu'on soit femme/homme/cisgenre/transgenre, les options de sortie.



J'ai trouvé ce livre passionnant, malheureusement un peu vieux, notamment car les lois ont beaucoup changé depuis et je ne parle même pas de comparer le minitel rose à internet... J'aimerai vraiment pouvoir lire une telle étude en version récente.
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