Venez avec moi à la rencontre de l'héroïne de "Lire est dangereux (pour les préjugés)", Clara - lectrice passionnée, bénévole au sein de la bibliothèque de son lycée - qui découvre le jour de sa rentrée en Terminale que le proviseur du lycée a adressé à l'ensemble du corps enseignant une liste de livres censurés au sein de l'établissement... Clara, convaincue du pouvoir des livres, va décider d'entrer en rébellion !
La censure est au cur de cette vidéo, qu'elle soit fictionnelle, ou réelle, comme ce fut le cas à la sortie de l'essai de Pauline Harmange, "Moi les hommes, je les déteste", ou concernant certains albums jeunesses, jugés inappropriés...
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Les livres sont une lumière. Une lumière qui fait disparaître l’ignorance et la haine. Qui montre quelles voies nouvelles emprunter. Ou, parfois, qui illuminent la profondeur d’une cassure qu’on pourrait croire définitive. Les livres éclairent quelque chose de différent chez chacun d’entre nous. Ils changent des vies parce que ce sont des allumettes : ils mettent le feu pour nous montrer la grandeur du monde, la profondeur des autres, une voie qui nous avait échappé jusque-là. Ces feux peuvent s’embraser facilement. Ou péniblement. Ils peuvent nous rendre plus forts. Ils peuvent nous coûter, à nous et à notre entourage. Ils peuvent nous rendre plus courageux. Ils peuvent nous diviser. Ils peuvent nous rapprocher. Ils peuvent nous offenser. Ils peuvent nous rendre heureux. Ils peuvent nous faire souffrir. Ils peuvent nous rendre trop sûrs de nous. Ils peuvent nous décontenancer. Ils peuvent nous donner l’impression qu’on en sait plus que ce qu’on sait. Mais ils nous rendent libres. Et je brûle d’envie que le monde continue à tourner dans leur lumière. Je me battrai toujours pour que les gens aient le choix de s’éclairer avec cette lumière.
Ils peuvent nous rendre plus forts.
Ils peuvent nous coûter, à nous et à notre entourage.
Ils peuvent nous rendre plus courageux.
Ils peuvent nous diviser.
Ils peuvent nous rapprocher.
Ils peuvent nous offenser.
Ils peuvent nous rendre heureux.
Ils peuvent nous faire souffrir.
Ils peuvent nous nous rendre trop sûr de nous.
Ils peuvent nous décontenancer.
Ils peuvent nous donner l'impression l'impression qu'on en sait plus que ce qu'on sait.
Mais ils nous rendent libres.
Les livres sont une lumière. Une lumière qui fait disparaître l'ignorance et la haine. [...] ils mettent le feu pour nous montrer la grandeur du monde, la profondeur des autres, une voie qui nous avait échappée jusque là.
« Ce qu’on possédait sans y faire attention devient indispensable quand on ne l’a plus. »
Le problème, c'est qu'on se jette à corps perdu dans les livres. Avec toute notre noirceur. Notre lumière. Notre passion. Notre souffrance. Nous lisons avec tout ce qui nous façonne et toutes ces couches qui font notre personnalité agissent comme un filtre. Nous lisons avec tout ce que nos yeux ont vu, tout ce que notre cœur a vécu depuis notre naissance. L'humanité est d'une telle complexité que nous ne pouvons être jugés responsables de la mauvaise interprétation d'un livre. Et ce n'est pas à cause d'un livre que les gens se tuent, aiment ou haïssent. Ou qu'ils décident d'être présidents. Ce que nous faisons avant et après un livre relève d'un choix personnel. Et ce choix, c'est la liberté.
L’innocence de l’enfance n’est pas éternelle et elle ne doit pas l’être. Tout le monde s’accorde à dire que c’est la période où on est le plus heureux, alors qu’il me s’agit que d’ignorance. Les enfants sont heureux parce qu’ils ignorent tout du monde, et tant mieux…pour les enfants. Mais pour nous ? C’est bien plus puissant de choisir d’être heureux en sachant ce qu’est le monde. De se battre pour lui. D’afficher notre joie en dépit de tout ce qui se passe.
[...] Tout le monde hait quelqu'un, affirme-t-il. La question est de savoir si on hait quelqu'un d'autre ou soi-même.

-Ashton, les autres et moi, on a failli le [Jack] laisser tomber. Mais on ne l’a pas fait. Tu veux savoir pourquoi ? À cause de Vous parler de ça. Ce roman ne porte pas sur l’homosexualité, mais ça parle aussi de quelqu’un qui souffre tellement que chaque seconde de sa vie en est affectée. C’était exactement l’histoire qu’il nous fallait pour ne pas renoncer. Et si tu n’avais pas lancé ta bibliothèque ? Et si on n’avait pas eu accès à ce livre à ce moment-là, pile quand il le fallait ? On l’aurait laisser tomber. Peut-être que Jack n’aurait eu personne à qui envoyer son texto jeudi soir. Le proviseur peut censurer tous les livres qu’il veut, sous les prétextes qu’il veut, les ouvrages de la biclan [bibliothèque clandestine] ont modifié l’espace-temps. Nous avons la preuve irréfutable que les livres que tu as prêtés ont eu un effet sur ce qui nous entoure.
Elle m’observe. Je lis dans ses yeux qu’elle me supplie de la croire.
- Mais je n’ai pas lancé la biclan pour les bonnes raisons, je proteste. Je n’étais pas en mode défenseuse de la littérature qui voulait que ses pairs aient accès aux livres, comme quand j’ai créé BookFan. J’ai lancé la biclan parce que j’étais furieuse. Je voulais avoir raison. Je voulais gagner. J’ai utilisé les livres comme une arme.
- Ok, rétorque Resi, c’est pas génial, mais on s’en fiche. Ne le prends pas mal, mais ton rôle n’est pas aussi important que tu ne le crois. Ce n’est pas toi qui es responsable du changement. Ce sont les livres. Ils n’ont pas besoin que tu sois parfaite ou que tu portes une auréole. Ils ont besoin que tu les fasses circuler. Et ça fait des années que tu y contribues, pas seulement avec la biclan. Pense à tes toutes petites boîtes à livres. Si cette minuscule bibliothèque dans ton casier a eu autant d’effet sur une période si courte, pense à celui des TPBL ! Les livres ont un côté indomptable. On ne peut pas les apprivoiser. Les gens aussi ont un côté rebelle. On ne peut pas non plus les contraindre. Les deux combinés, personne ne sait ce qui se produira. En tout cas, ce n’est pas de ta responsabilité. Quant à la question de savoir si c’est approprié ou non pour les élèves, laisse donc ce débat aux parents.
Nous lisons avec tout ce qui nous façonne et toutes ces couches qui font notre personnalité agissent comme un filtre. Nous lisons avec tout ce que nos yeux ont vu, tout ce que notre cœur a vécu depuis notre naissance.
Comment a-je pu imaginer une seconde qu'une personne ne pouvait pas souffrir ? La souffrance, c'est comme l'eau de pluie. Elle tombe et dégouline partout. Aucun endroit n'est épargné. Alors de quel droit nier la souffrance de quelqu'un parce qu'on le pense inférieur ? A croire que la souffrance doit respecter des conditions bien précises avant qu'on éprouve de l'empathie pour la personne concernée.