David Groison

Si Robert Capa est bien le seul photographe à débarquer avec les marines sur les plages de Normandie en 1944, une trentaine de ses collègues prennent Marilyn Monroe lorsque sa robe blanche se soulève sur une bouche de métro new-yorkaise. Certaines images passées à la postérité sont posées, d'autres prises sur le vif. Certaines sont intactes, d'autres recadrées. Certaines ont apporté la gloire, et parfois la postérité à leur auteur, quand d'autres sont dues à des photographes restés anonymes ou, comme Lewis Hine, morts dans la misère.
Les images iconiques ont toutes une histoire différente.

Les images iconiques sont-elles uniques, captées par des hommes et femmes qui ont su se placer au bon endroit au bon moment ?

Au premier coup d'oeil, cela ressemble à une jolie photo de famille: le père au centre, la mère et les enfants à ses côtés. Sur le mur, juste au-dessus du père, trône un fusil, symbole de sa force et de sa puissance. (...) Mais cette image est trompeuse, elle ne se comprend qu'à la lecture de sa légende: " Portrait de Mohammed Fazal, 45 ans, avec ses deux femmes, Majabin, 13 ans, et Zalayha, 29 ans, dans un village d'Afghanistan".
Quand la photographe interroge l'homme sur l'âge de son épouse, il répond: " Nous avons un proverbe ici: si elle ne tombe pas quand tu le frappes avec ton chapeau, c'est qu'elle est assez bonne pour se marier".

[contexte : 2010, cinq dirigeants représentant les Etats-Unis, Israël, l'autorité Palestinienne, la Jordanie et l'Egypte avec Hosni Moubarak]

Le quotidien égyptien Al-Ahram a déplacé le président égyptien. Sur la photo originale, il semble sur le côté, comme s'il fermait la marche...Dans les pages du quotidien national, le voilà en tête, guidant les autres. C'est un blogueur égyptien, Wael Khalil, qui a été le premier a repérer la modification. "Ils nous mentent tout le temps. Au lieu de nous parler des vrais problèmes, ils les photoshopent"

Rester nonchalant, même au bord du précipice. Continuer à rouler des cigarettes et à rigoler entre copains, même quand on a l'impression que l'on peut tomber d'un instant à l'autre. Garder le sourire et prendre soin de autres, même quand l'équilibre est instable. Une belle image.

Un ciel gris, lourd et menaçant occupe les deux tiers de la photo. Sur la ligne d'horizon très basse matérialisée par le rocher se tient bien droite une Soudanaise. Cette femme semble soucieuse, elle regarde au loin, comme pour guetter la pluie qui daigne enfin arriver. L'attente de la pluie est le vrai sujet de l'image. Mais comment photographier quelque chose qui n'est pas encore là?

Les photos sont les armes les plus puissantes du monde. Les gens les croient, mais les photographies mentent, parfois sans qu'il y ait de manipulation. Il n'y a que des demi-vérités...

"Si vos photos ne sont pas bonnes, c’est que vous n’êtes pas assez près." Robert Capa (page 26)

Des journalistes ou de simples citoyens découvrent régulièrement des photos truquées. (...)
Certains veulent y voir le symbole d'une info pervertie, qui nous ment et nous manipule. Mais de notre point de vue, si ces images sont des fautes, des erreurs, elles sont aussi et surtout de bons outils pour comprendre la fabrication de l'information. Elles témoignent à chaque fois des rapports de la presse à l'immédiateté, aux pouvoirs en place, au besoin d'incarner l'actualité, au respect des libertés individuelles ou à nos représentations du monde. Ce ne sont pas des épiphénomènes, mais des révélateurs.

Je crois qu'il n'y a pas de photo véritablement dure. C'est la situation qui est dure. La photographie n'est que le reflet de la réalité. (Olivier Laban-Mattei)

Le football américain est un sport violent. Au début du XXe siècle, les matchs se terminaient en bain de sang. Pour la seule année 1905, ils firent dix-neuf morts et des dizaines de joueurs handicapés. Au point que le président Theodore Roosevelt siffla la fin de partie : les responsables devaient édicter de nouvelles règles du jeu ou alors le sport serait déclaré illégal.

Ce samedi 21 octobre 1967, 35 000 Américains sont venus à Washington marcher sur le Pentagone pour protester contre la guerre du Vietnam. Parmi eux, de nombreux lycéens et étudiants, dont Jan Rose Kasmir, dix-sept ans. Elle veut dénoncer l'hypocrisie du gouvernement américain qui parle de maintien de la paix, d'opération militaire destinée à rendre le monde plus sûr. Mais "tuer pour la paix, c'est comme baiser pour la chasteté, rigole-t-elle."

[…] Il a opté pour le jaune pour que le véhicule soit repéré par tous et de loin, que chacun sache qu’il y a dans ce bus-là des dizaines d’enfants (d’ailleurs, quand il est à l’arrêt, la circulation doit cesser dans les deux sens). La couleur est désormais identifiée comme le « national school bus chrome ».

Les journaux sont-ils objectifs ?
NON. En école de journalisme, on raconte souvent que l'objectivité c'est 15 minutes pur les Juifs, 15 minutes pour Hitler. Comme si on devait raconter la Seconde Guerre mondiale en donnant la parole aux uns et aux autres, sans arbitrer, sans affirmer qu'il y a un oppresseur et des opprimés, des faits objectifs et pas seulement deux points de vue. Personne n'a envie de cette objectivité-là ! Donner la parole à tous et laisser les lecteurs se débrouiller avec des versions contradictoires, ce n'est pas faire le travail. (42)

J’ai vu cette femme affamée et désespérée je me suis approchée, comme aimantée. Je ne sais plus comment je lui ai expliqué ma ma présence ici, ni pourquoi j’avais un appareil photo, mais je me souviens qu’elle ne m’apas posé de questions. J’ai pris cinq clichés en m’approchant d’elle de plus en plus. Je ne lui ai pas demandé son nom ou son histoire. ( page 25).