Petit à petit, patiemment, j'ai appris la magie auprès de divinités sylvestres. J'ai fini mon apprentissage il y a peu et je m'en suis servie pour attirer à moi chacun des hommes qui m'avait agressée il y a bien des années. Lorsqu'ils passaient les frontières de mon territoire, je me montrais à eux. Ils finissaient par me reconnaître, bien sûr et par me supplier de les épargner, mais je les ai tous massacrés, les uns après les autres. J'ai gardé leur chef pour la fin, pour qu'il comprenne bien ce qu'il se passait et qu'il tremble de peur à l'idée d'être le suivant. Voilà, tu as compris ce qui était arrivé aux hommes de ton village, mais sache bien que je n'ai aucuns remords pour ce que je leur ai fait. Chaque coup reçu avait été mérité mille fois.
Cela arrive à toutes les femmes de la famille depuis des siècles. Mais c'est de plus en plus tôt au fur et à mesure que les années passent et la diminution de l'âge s'accélère. J'avais trente-sept ans, ta mère à peine trente et tu n'en as que seize. D'ici un siècle, ce changement interviendra trop jeune pour être supportable et notre famille finira par disparaître.
Quand est-ce que tu grandiras et que tu cesseras de dire ces bêtises ? Tu as huit ans, il serait temps que tu sortes de ton pays imaginaire.
— Mais je t'assure qu'il y a des lutins. Et puis, les dames dans l'arbre, elles s’appellent des dryades, c'est elles qui me l'ont dit. Pourquoi tu ne veux pas me croire ?
On disait que certains soirs, le mal rôdait entre ses branches et emportait ceux qui avaient le malheur de se trouver trop près.
Ces ignorants, qui blessaient la Terre comme si tout leur appartenait ne méritaient pas de vivre, pas sous leur forme humaine en tout cas. La divinité soupira, triste de voir que si peu avaient survécu. Seuls ceux qui s'intéressaient réellement à la nature et qui l'aimaient pouvaient demeurer et ce monde n'en comptait presque plus.