Un jour, petite, j'étais allée au théâtre et j'avais surtout été fascinée par la souffleuse, que je voyais de mon siège, très mal situé : j'avais passé la représentation à épier cette femme vieillie chuchotant des mots qui virevoltaient au dessus de la scène avant d'entrer dans les crânes des acteurs par le labyrinthe de leurs oreilles, et d'y trouver ton et rythme, puis de ressortir par leurs bouches. Les voix qui murmurent semblent être plus sorcières que les autres ; celle-là avait le pouvoir de faire parler les hommes, de suppléer à leur mémoire défaillante.