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Citations de Didier Castino (24)


« Comment peut-on mourir avant les vacances, juste avant ? Quand j’y pense… Toute l’année travailler sans vacances d’été au bout, c’est du vol. Le mois d’août, il m’en manque un, on me le doit. Le mois d’aout raté sur le fil, pour presque rien. Le mois d’août 1974, sans moi. Rose et vous trois. Mes fils. Seize ans, dix et sept, c’est ça le mois d’aout 1974. Le mois d’aout que l’on voudrait repousser, que l’on n’attend plus avec impatience mais auquel il faut désormais penser comme un devoir, à une contrainte, comme à une épreuve. »
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Très tôt on comprend que certaines choses nous sont étrangères, tout s'organise entre ceux qui peuvent et ceux qui ne peuvent pas, ceux qui vont à l'école et ceux qui travaillent, c'est l'un ou l'autre. Il n'y a pas de révolte, pas encore, la vie s'épuise ainsi (...) (p. 11)
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Mais je reste un fils d'ouvrier. J'ai des réflexes qui me le rappellent, j'ai des hésitations, des révoltes que je porte en moi et je me surprends toujours à comparer ce qu'il était et ce que je suis. Nos différences éclatent, mais ce n'est pas trahir. Tous les deux de la même famille.
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Je suis quelqu'un qui avant tout travaille, a toujours travaillé. C'est ma vie, la reconnaissance et la sécurité. (...)
Si tu veux raconter ma vie, tu ne peux parler de moi à l'école. J'ai dû y aller comme y vont les enfants de 1930, mais moi c'est le travail surtout. très peu d'argent à la maison , on le met dans des boites et on essaie de le garder , ne pas s'en servir pour être plus riche un jour, alors l'école... (...)Très tôt on comprend que certaines choses nous sont étrangères. (...) il n'y a pas de révolte, pas encore, la vie s'épuise ainsi (...) Aller à l'école, je n'y pense même pas, je gagnerai de l'argent et j'en mettrai dans des boites, à mon tour. (p. 11)
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Ces photos sont la mort de mon père que je découvre sans commentaires, sans larmes, ni trémolos, la mort d'un homme couché au sol, écrasé, broyé sous ce qu'il convient d'appeler moule, tombé sur un sol brut, pas de chape, aucun revêtement, mais de la terre qui mélangée au sange devient boueuse.
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Moi, ce n'est pas pareil. Je ne lis pas mais j'aime les livres. Je choisis des titres. Des auteurs dont j'entend parler autour de moi, dans le journal, au parti... Aragon, je pourrais, mais je me dis que j'aurai toujours le temps. On sait qu'il faut le lire, tout le monde le connaît, on le lira plus tard. Je préfère offrir des classiques. C'est plus solennel, il ne faut pas choisir à l'aveuglette. J'aime les livres parce qu'il y a tout. J'aime le temps que l'on prend, aller lire et revenir muet, maladroit, ne rien dire, ne pas raconter. Lire ne se raconte pas.
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"Je ne suis pas ouvrier et je t'emmerde. Il faut être libre pour pronnoncer cette phrase, être sûr qu'on peut la dire sans blesser personne, que le père en face, entendant cette saloperie, sourie et comprenne au-delà des mots. Je ne suis pas ouvrier et tu dois être fier"
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Très tôt, je répétais que je n'avais pas d'histoire, que je ne faisais pas partie de l'Histoire, je le pense encore aujourd'hui. L'impression d'être né quand tout à déjà eu lieu. Ne pas avoir à choisir, il n'y avait rien à choisir, pas de longues soirées à fumer et à s'affronter, se préparer à des interventions secrètes, pas d'institutions à bloquer, de Bastille à prendre. Non, vraiment, quand j'y réfléchis, il n'y a rien. Né après la guerre, après la Résistance, après la Libération. Même 81, je l'ai raté.
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Je rentre à l'usine. J'ai treize ans. Je me souviens surtout de ça. Un nouvel élan, une ouverture sur un monde inconnu mais dont beaucoup parlent autour de moi, un monde difficile mais grâce auquel on devient un homme. L'usine est donc la promotion qui permet de rejoindre le sillage de mon père et de m'éloigner de celle qui aurait dû être ma soeur, de devenir un peu plus homme, un peu moins enfant. C'est peut-être pour ça que le souvenir est si aigu, me recouvre. Un sursaut, si tu veux, une prise de conscience, comme un traumatisme qui déterminera ma vie et mes désirs, mes révoltes et beaucoup de mes doutes. J'ai vraiment existé à partir de l'usine, comme si je venais d'elle. Excuse-moi d'insister, mais c'est par elle, l'usine, que j'ai pu grandir enfin et devenir un homme.
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J'entends les pages qu'elle tourne sans le savoir, moi quand j'en tourne une, il y a acte, je force le bruit plus que de raison, je regarde la page que je tourne. Je vois Rose et je l'entends lire, c'est le triomphe des ouvriers, le triomphe de la gauche, je suis libre, je ne travaille plus à l'usine, je suis riche, je bois ce que je veux, on a gagné quand elle lit, quand ses yeux bondissent ou glissent sur les lignes, on a gagné...
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Je suis quelqu'un qui avant tout travaille, a toujours travaillé. C'est ma vie, la reconnaissance et la sécurité.
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Ma femme, mes enfants, mes amis. Trop courtes ces heures loin de l'usine et arrive un jour où les heures légères l'on d'elle ne suffisent plus, deviennent lourdes elles aussi. Pendant que je travaille, notre vie continue sans moi, s'organise autour de mon temps passé là-bas. Je suis surtout un homme qui travaille à l'usine, on peut dire ça comme ça, et parfois il m'arrive d'en sortir, d'être là, c'est de plus en plus rare.
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Rose, ta mère, te dira qu'on mesure n'importe comment sur les pièces d'identité, que jamais ton père n'a fait 1 mètre 69, il est beaucoup plus grand que ça, mais quand il a fait faire ses papiers, c'était pas pareil, on ne mesurait pas comme maintenant (...)
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C'est à cause du regard qu'on l'a tué.
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...fils socialiste qui aurait bien voulu voter communiste si ça pouvait réparer...

page 142
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J'aime les livres parce qu'il y a tout. J'aime le temps que l'on prend, aller lire et revenir muet, maladroit, ne rien dire, ne pas raconter. Lire ne se raconte pas.
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Aujourd'hui, je suis convaincu qu'une partie de notre histoire commence là. Le mouvement étudiant, la mort de Malik Oussekine et avant cela, l'année 1986 elle-même, son climat, le jeu avec le Front national pour combattre l'opposition, minimiser l'ampleur de la défaite aux législatives. Sans le dire, le Front national devient un allié, on le laissera répandre ses thèses abjectes, on le laissera nous contaminer pourvu que le camp adverse ne l'emporte pas, ou l'emporte avec moins d'éclat. 1986 est le début de tout. Les racines d'un mal jusqu'alors marginal, mais un mal qu'on ne saura pas soigner et qui nous revient en pleine face trente ans ans après, un mal qui se révèle au grand jour le 16 mars 1986.
A l'issue d'un unique scrutin, le Front national entre au palais Bourbon. C'est une grande première. C'est une grande défaite.
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L'école occupe en attendant l'usine, c'est un réservoir d'ouvriers qui attendent qu'on vienne les prendre et les emporter.
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Les ouvriers votent à droite, les ouvriers qui votaient communiste votent à droite, à l'extrême droite, je te jure que c'est possible, que ça arrive.

page 204/205
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Et puis la fatigue, oui peut-être, disons que je l'ai ressentie vers quarante ans, je me suis senti vieillir, là on se dit qu'il n'y a plus de doute possible, on vieillit, on ne peut plus se tromper sur son âge. Je dis vieillir, tu n'es pas vieux, mais tu te sens engourdi et rétréci par les années répétées à forcer sur les moules, à suer été comme hiver, à toujours prendre des risques que tu ne mesures pas, à les intégrer à tes semaines. Arrivée d'un coup d'un seul la fatigue, sans demi-mesure, toute entière comme une chute. La journée achevée, je me sens écrasé, j'ai besoin, avant de rentrer, de ne rien faire, juste un moment, de ne rien faire que fumer, amer sur cette putain de vie, putain d'usine.
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