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Citation de GabySensei


L'homme et la femme transmettent tous deux autant le corps que l'esprit. L'enfant est autant le produit du sperme de son père que des pensées avec lesquelles sa mère a accueilli cette semence. Mais s'il doit autant à l'utérus de sa mère qu'au désir de son père, ce dernier est plus particulièrement responsable de sa construction psychique. L'homme ne peut porter l'enfant dans son ventre. Il n'a que la tête où l'attendre. Il est donc théoriquement mieux placé que la femme pour le concevoir comme le produit d'échanges et de transmissions mentales.
Ce point de vue est, en fait, comme nous le verrons à propos des rituels de couvade, défendu par toutes les traditions. Mais dans une société profondément structurée par la technicité, l'économie, la rentabilité et la primauté des valeurs matérialistes, la plupart des hommes oublient, s'ils ne l'ignorent, qu'être père est avant tout un acte de pensée. Libérant quelques centaines de millions de spermatozoïdes à chaque orgasme, il leur est difficile de vivre l'éjaculation comme un don de corps. Ce faisant, ils privilégient le rôle de leur compagne au détriment du leur et ne savent plus ce que les hommes grecs ne pouvaient ignorer: qu'être porté et attendu dans la tête d'un père est tout aussi important que d'avoir une mère. Ces hommes assument la présence de l'enfant, travaillent pour lui, le nourrissent, mais n'ayant pas la moindre idée du rôle qu'ils ont à jouer dans sa construction psychique et spirituelle, ils ignorent qu'être père c'est être garant de sa santé mentale.

Le nom que l'on donne à porter à l'enfant est le pivot de sa structure mentale. L'accueillir dans son nom, c'est l'accueillir dans le langage et assumer d'être pour lui une instance constructive se démarquant de sa mère. Accueillant l'homme et sa semence, la mère accueille l'enfant dans son corps pour qu'il y construise le sien. Reconnaissant le bébé qu'elle met au monde, le père l'accueille dans ses structures mentales pour qu'il y enracine les siennes. Voilà la principale raison qui justifie que les pères donnent leur nom aux enfants. Se reconnaître père, c'est assumer d'être une instance responsable de l'enfant, mais c'est surtout se positionner face à lui de façon radicalement différente de celle qui le relie à sa mère. L'accueillir dans son nom, c'est le reconnaître comme le fruit de son désir, mais aussi et surtout le considérer comme le fruit d'une pensée antérieur à sa conception matérielle.

Chez les êtres parlants que nous sommes, éjaculer n'est que la conséquence d'un acte de pensée. Reconnaître un enfant est , de ce fait, l'accueillir dans les pensées, les affects, les sentiments et les propos, qui ont décidé de sa venue. Un père ne fait pas connaissance avec son bébé. Il le reconnaît. Or que reconnaît-il en son enfant, si ce n'est le désir lui ayant permis de le faire! Il n'existe pas d'autre raison à l'emploi de ce mot. Voilà ce que représente le "nom du père". Il représente la somme d'affects, de plaisirs, d'échanges et de pensées qui ont permis à deux cellules de se rencontrer dans le corps d'une femme.

(P69)
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