La nature produit ce que nous mangeons, et en retour nous avons obligation morale, éthique, mais aussi alimentaire et matérielle, d'en être les garants sur le moyen et le long terme.
Même si l'histoire des pêches est très ancienne, c'est réellement au XXème siècle que tout va se jouer. L'homme, en mettant progressivement en exploitation, l'ensemble des ressources marines vivantes va faire une expérience scientifique inédite, une expérience à l'échelle de l'écosystème planétaire. Et cette expérience va nous apprendre une chose essentielle, dont nous n'avons pas encore tiré toutes les conséquences : nous vivons dans un monde fini. p56
Les scientifiques se sont réveillés bien tard, et l’ensemble de la société avec eux. Les consommateurs ont demandé toujours plus de poisson, au moindre prix évidemment. Les citoyens ont applaudi la merveilleuse ténacité d'un Ministère des Pêches qui rentrait chaque année d'une nuit de négociations bruxelloises en se vantant d'avoir obtenu une augmentation des quotas de pêche. Un petit coup de poignard dans le dos de l'avenir d'une pêche durable. Tous, ou presque, par notre consommation ou notre bulletin de vote, nous avons accompagné ou laissé faire. Et nous avons parfois encouragé. p22
Pendant une partie de l'année, les pêcheurs vont en mer pour produire du poisson. et pendant une autre partie de l'année, sans même en avoir conscience, ils consacrent leur effort à réduire l'abondance de la ressource au delà du raisonnable et à détruire ainsi par anticipation leurs captures des années suivantes. [...] Et la surexploitation est donc d'abord une absurdité économique, un dysfonctionnement majeur du système de production. Une aberration, dont les pêcheurs sont à la fois les acteurs directs et les premières victimes. p 187
Du survol de l'histoire des pêches, on peut tirer un enseignement majeur, l'abondance passée n'est pas un mythe. Il fût un temps où la mer était pleine de poissons. Un monde qu'il nous est difficile d'imaginer [...]. Ces récits comportent sans doute une part de lyrisme et d’exagération, mais l'enthousiasme, voire la sidération, des narrateurs ne trompe pas : ce monde là ne ressemblait vraiment pas au nôtre. Il existait sur Terre, un état radicalement différent de la nature. p51-53
Nous vivons désormais dans un monde où une pauvre morue de 10kg nous apparaît comme une bête énorme.
Nous avons impacté les écosystèmes à un tel point que nos activités en sont à leur tour affectées.
Il faut sortir de cette vision erronée, selon laquelle assurer la simple survie des espèces exploitées suffirait à la durabilité.
Le vivant ne se dompte pas.