texte, attribué selon les sources au pasteur Niemoeller ou à Louis Needermeyer :
"Quand ils sont venus chercher les juifs
je n'ai rien dit
car je n'étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les communistes
je n'ai rien dit
car je n'étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes
je n'ai rien dit
car je n'étais pas syndicaliste.
Quans ils sont venus chercher les catholiques
je n'ai rien dit
car je n'étais pas catholique.
Et quand ils sont venus me chercher
il n'existait plus personne
qui aurait voulu ou pu protester..."
Soudain, le plus jeune d'entre nous s'écria :
- Si nous ne faisons rien, le loup va nous dévorer les uns après les autres, jusqu'au dernier. et alors, il sera trop tard pour résister.
Aujourd'hui, nous sommes assez nombreux pour lui tendre un piège. Au lieu de pleurnicher, battons-nous pendant qu'il est encore temps !
Peu à peu, j'ai dessiné autour de nous comme une bulle impénétrable qui flottait sur la musique.
Longtemps après, nous avons fini par nous échouer près du bar, où Axel m'a offert à boire. Les bulles de soda pétillaient furieusement dans mon gosier asséché. Quand enfin j'ai retrouvé l'usage de la parole, j'ai murmuré à l'oreille d'Alex :
-Tu viens ? On s'en va …
3h30 du matin. Ce n'était pas une heure pour quitter la fête. Sauf si on voulait rentrer à pied. Ça tombait bien, nous avions envie de marcher. Besoin d'un petit tête-à-tête avec l'air frais du premier jour de l'année.
En sortant, un type nous à fait ironiquement remarquer que la gare la plus proche était à dix kilomètres. Mais ça ne nous faisait pas peur.
- Tu sais, lui confia Barbara, on apprend à vivre avec ses différences. N'importe quel couple hétéro peut s'embrasser dix minutes sur les quais du métro, au pire ça fera sourire. Nous, on ne peut même pas se donner la main, manifester notre désir en public, ça choquerait. Alors on garde ça pour l'intimité.
- Et ça ne vous gâche pas la vie de toujours vous cacher ? demandai-je tout à trac.
- Tu as raison, se cacher c'est s'aimer à mi-temps, approuva Hanna. Si tu crois qu'on se complaît dans notre ghetto, les bars gays, les boîtes gays, tu te trompes. Tu voudrais qu'on se fasse des bisous dans un bar-tabac-PMU-loto face à des visages dégoûtés ou hilares, qu'on supporte les provocations ? Tu voudrais qu'on se roule des pelles dans la rue pour se faire traiter de sales gouines à longueur de journée et entendre des grosses vannes bien lourdes sur les homos ? Bien sûr, on est contre les ghettos. Mais est-ce qu'on a le choix ?
- Oui ! On a toujours le choix, avança Axel. Si vous ne vous dévoilez jamais en public, les autres ne risquent pas de s'y habituer. (p.109-110)
Ce qui est dur c'est d'être différent... d'être un oiseau sans ailes au milieu d'autres oiseaux qui volent. (p.103)
A part ses maux de ventre et ses insomnies chroniques, rien à signaler. Son père avait d'ailleurs fini par l'emmener chez le docteur.
"Ce garçon souffre de stress", avait déclaré le médecin, en lui prescrivant du magnésium et des vitamines.
Franchement, se rendre malade à ce point-là, pour être le meilleur de la classe, je trouvais ça grave.
Il y a un mur entre nous, toujours ce même mur de verre qui rend difficile toute communication. Je me sens désorienté. Pour la première fois de ma vie, je réalise que c'est dur de ne pas être comme les autres. Dans ce groupe, c'est moi l'handicapé, l'exclu. (p.93)
- Écoute, mon p'tit Yoan, tu sais, tu passeras pas la nuit avec nous. Ce soir, tu vas rentrer chez toi. Nous on fait les fanfarons, mais notre vie, on te la souhaite pas.
Elle prend les autres à partie :
- Moi demain, cette vie, je la quitte sans regret. On peut pas aimer cette vie-là. Les écoute pas, p'tit ! Leur humour, c'est celui du désespoir. (p.96)
Ce soir-là, maîtresse Amandine reste tard à l'école.
Elle attend la maman de Valentin. Une maman qui travaille loin et qui arrive souvent la dernière. Une maman qui écoute la maîtresse lui raconter tout ce qui s'est passé à la bibliothèque.
Une maman fatiguée qui explique en sanglotant comment la vie lui a fait mal depuis quelques temps.
Alors la petite Zoé s'approche de Valentin:
- Moi, je t'appellerai mon loulou...
- Bravo Zoé! et si nous lui donnions tous un petit nom! propose Hélène.
Ainsi, peu à peu, les mots doux chassent les mots durs.