Il est un des rares, très rares, trop rares journalistes dont on peut écrire, sans risque dêtre démenti, quil a du talent, des idées et du courage. Quil a toujours préféré ses opinions à son confort, ses convictions à sa réputation. Rencontre avec un journaliste libre, tout simplement libre. www.revue-medias.com
Je n'ai jamais eu qu'une passion, qu'une maitresse : la France
Le cynique Briand, passé presque du jour au lendemain des utopies du socialisme révolutionnaire à la prise en compte des réalités, les avait rejoints. Depuis qu'en 1910, renégat honni par la gauche, il avait maté par les réquisitions et les révocations la grande grève des cheminots, il était l'idole de la droite qui l'appréciait d'autant plus qu'il venait de plus loin, tel un braconnier devenu garde-chasse, un forçat promu chef de police.
Le cœur d'un homme d'Etat doit être dans sa tête.
Tout était petit chez Barthou. Les yeux. La taille. La barbiche, soigneusement taillée. Le caractère. Tout. Clemenceau, qui ne reculait jamais devant un bon mot, pourvu qu'il fût méchant, l'avait rebaptisé "le foutre de guère"...
Vous les féliciterez de ma part. Bravo à Frey et à ce marchand de pastis de Marseille, Pasqua je crois. Nous allons gagner les élections, et haut la main, je vous en fiche mon billet.
La joyeuse rentrée 1943, dans ma mémoire, c'est ça: des histoires de pension alimentaire, de légitimation, d'argent, les apparitions tardives de monsieur Moustier, des bébés qui braillent, des femmes qui pleurent, un homme qui crie, et nous, dans ce grand appartement lugubre où nous nous terrons comme des bêtes, où nous vivons comme des porcs.
Comment peuvent-ils s'aimer alors qu'ils ne s'estiment pas, et proclament constamment toutes les raisons qu'ils ont de se haïr? Je ne me trompe pas. Ils ne s'aiment pas. Chacun aime chez l'autre que les satisfactions qu'il en tire. Ils vivent une grande histoire de plaisir solitaire à deux. Que peuvent-ils bien faire ensemble, qui les attache malgré tout l'un à l'autre?
L'amour.
(à propos de Robespierre) Homme à système, homme à certitude, il est de la race éternelle de ceux qui ont toujours raison. Espèce amusante, irritante ou exaspérante, relativement inoffensive quand elle se borne à pérorer en famille, au zinc du café du commerce, sur l'estrade d'une salle de classe, à la tribune d'un meeting, effrayante quand elle détient les leviers du pouvoir.
Les "troisannistes" (c'est le néologisme qui fut forgé pour désigner les partisans de la loi, la loi de 3 ans augmentant la durée du service militaire) ne manquaient certes pas d'arguments. La crise franco-allemande de 1911, heureusement dénouée par Caillaux, avait ouvert les yeux aux responsables civils et militaires sur l'exceptionnel état d'impréparation de notre armée. Bien que le monde entier fût censé nous envier notre incomparable corps d'officiers et nos prodigieux sous-officiers à nuls autres pareils, les dernières manoeuvres, en 1912, avaient confirmé et mis en lumière, en présence des observateurs professionnels délégués par tous les pays intéressés, outre les lacunes de notre armement et les insuffisances de notre entraînement, la médiocrité, pour ne pas dire plus, de notre encadrement, du haut en bas de l'échelle de commandement. Notre ceinture de forteresses, notre artillerie lourde, notre marine, tout était à moderniser, à renforcer, à revoir. Dans tous les compartiments du jeu, nous étions inférieurs à l'ennemi naturel et héréditaire que, depuis 1871, notre Etat-major et la plupart de nos hommes politiques présentaient ouvertement et nommèrent comme l'adversaire unique et fatal, en toute hypothèse, de la guerre à venir.
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Sur le fond, il (Maître Labori) rappelle l'antique adage : à qui profite le crime ? S'il y avait deux personnes qui n'avaient pas intérêt à la mort de Calmette, c'étaient bien monsieur et madame Caillaux. Puis il évoque la très longue tradition d'acquittement des femmes en France. Une coutume, presque une règle. En 1885, Madame Clovis Hugues abat le courtier en publicité qui diffamait son mari, député de Marseille. Acquittée. En 1898, l'épouse d'un obscur député, Paulmier, avait résolu de faire taire le journal La Lanterne et son directeur, Alexandre Millerand, qui menaient une campagne contre son mari. En l'absence de Millerand, elle avait déchargé sa rage et son revolver sur un obscur secrétaire de rédaction qui n'avait le tort que de se trouver là. Acquittée. Acquittée, madame Steinheil, pourtant totalement incapable d'expliquer comment il pouvait se faire que les trois inconnus masqués, en longue lévite noire, jamais retrouvés, qui, dans la nuit, avaient expédié ad patres son mari complaisant et sa vieille entremetteuse de mère se fussent bornés à l'attacher fort lâchement aux barreaux de son lit, n'en avait pas moins été acquittée. Acquittée la belle madame Porkës qui pourtant n'avait pas convaincu lorsqu'elle avait raconté que son mari, à ses côtés, dans le lit conjugal, sans qu'elle y fût pour rien, sans qu'elle pût l'empêcher, s'était suicidé d'une demi-douzaine de balles dont quelques-unes tirées dans le dos. Les deux dernières n'avaient eu ni le courage, ni la franchise ni les excuses de madame Caillaux. Car enfin, celle-ci avait été victime d'une campagne dont la violence et la perfidie n'avaient pas de précédent. A quoi d'autre attribuer ce drame regrettable qu'aux excès d'une presse irresponsable qui abuse de la liberté ?
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