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3.97/5 (sur 17 notes)

Nationalité : Haïti
Né(e) à : Port-au-Prince , le 19/02/1940
Mort(e) à : Montréal , le 10/11/2002
Biographie :

Émile Ollivier est un écrivain.

Diplômé en sociologie et en philosophie, il a été contraint à l'exil en 1965, sous le régime de François Duvalier.

Sociologue, il s'intéresse à la formation des adultes, aux phénomènes migratoires et à l'éducation interculturelle.

Il a fait des études de philosophie à l'École Normale Supérieure de Haïti et des études de psychologie en France. Il a été professeur à la faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal.

Le Prix Jacques-Roumain 1985, prix décerné par la revue "Étincelle" à un écrivain de la diaspora haïtienne, lui a été remis pour son premier roman "Mère-Solitude" (1983).

En 1987, il a reçu le Grand Prix de la prose du Journal de Montréal pour "La Discorde au cent voix" et, en 1991, le Grand Prix du livre de Montréal pour son roman "Passages". En 1996, il a obtenu le prix de la Caraïbe pour "Les urnes scellées".

En 2000, il a reçu le titre de chevalier de l'Ordre des arts et des lettres de la France, et a été élu membre de l'Académie des lettres du Québec.

Il meurt en 2002 alors qu’il achevait son dernier roman, "La Brûlerie".
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Source : Internet
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Les Grands Débats - L… comme Lecture : L'amour des lettres Dimanche 23 septembre 2018 de 15h00 à 16h00 Dany Laferrière - Nathalie Crom « La lecture est une félicité qui se mérite » disait le grand écrivain haïtien Emile Ollivier. Un grand lecteur, Dany Laferrière, partage ses grands moments de lecture et reviennent sur les auteurs qui lui ont procuré cette fameuse félicité. Les livres sont-ils un rempart contre la bêtise ? Un outil de liberté ?

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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Construit sur une lande prise à la mer, Fort-Touron date de l'époque coloniale. Restauré sous l'occupation, Fort-Touron représente l'emblème de l'établissement pénitentiaire le plus infernal que les Américains aient laissé dans ce pays. Jumelé à un camp d'entraînement militaire pour soldats et miliciens, la prison de Fort-Touron détient un triste record : six mois d'espérance de vie pour celui qui franchit son enceinte comme prisonnier. Haut-lieu de la torture, de la réduction à des conditions de vie infra-humaines et de l'exécution sommaire, comparable en cela à Auschwitz ou Alcatraz, Fort-Touron, c'est la camp de la mort blanche.
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Il savait qu'il ne pouvait s'intéresser à aucune de ces filles riches, élevées, préparées pour décrocher "un bon parti" dans les hautes sphères de l'administration publique, du commerce, de l'armée et ainsi assurer la reproduction sociale.
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Aujourd'hui, que reste t-il de ma mère ? Cela fait tant d'années...Une odeur, un sourire, une photo ovale que je traîne dans ma poche, des riens qui m'obsèdent au point que je ne regarde même pas les filles que je croise. Elles me sont pour l'instant étrangères. Je ne suis pas né d'elles, ni elles de moi. Je ne les ai pas encore approchées; je ne les ai pas encore nommées. Je n'ai pas non plus appris avec elles, pas encore, l'alphabet des langues parallèles, la géométrie des corps, les théorèmes tremblants du désir.
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Ma mère m'entoura de ses bras, m'embrassa plusieurs fois et partit sans se retourner. Je ne percevais pas, à ce moment-là, toute la portée des paroles que je venais d'entendre, mais j'avais une sorte d'intuition, de lumière spontanée, celle que perçoivent les jeunes animaux lorsqu'ils viennent d'être sevrés par leurs parents.
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Depuis la colonie, rien n'a changé; le scénario est désormais classique. Le vieux vent caraïbe chargé de sel marin et d'odeurs putrides mordra encore le visage des habitants. La soldatesque dansera la meringue de la violence et de l'arbitraire. A la répression de la Semaine sainte où les maquereaux de carême auront servi d'entremetteurs aux harengs de barrique, succéderont les giboulées d'avril.
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Quel besoin pressant d'argent avait motivé cette visite à mon père, ce torride midi de mai ? Une séance de cinéma avec les copains probablement. A cette époque, nous tenions à déshonneur de n'assister qu'à une représentation d'un de ces célèbres films d'aventure dont nous croyions presque les héros. Nous avions vu douze fois "L'Aigle des mers", quatre fois "Fanfan la Tulipe" et là, pour "Les Trois Mousquetaires", ma mère ne voulait pas entendre parler que j'y aille une énième fois. Je ne crois pas que ma mère soit jamais allée au cinéma, ne serait-ce qu'une seule fois, de toute sa sainte vie. Elle pensait que l'existence fournissait au grand jour, quoique parfois piteux, un excellent spectacle. Elle ne ressentait nul besoin de s'enfermer dans un trou noir pour contempler un défilé d'images factices et fades. Le cinéma lui paraissait une trouvaille inutile. "L'humanité, mon fils, aurait bien pu s'en passer". Sentence sans rémission. J'avais déjà tapé Grand'Nancy. Il ne restait plus que mon père malgré l'interdiction maternelle . Mais, c'était cela ou déchoir aux yeux des copains. Je me souviens d'avoir tournoyé longtemps autour du pot, faisant semblant d'être intéressé plus que de raison par cet Emile Ollivier que mon père appréciait tant. Le berger au pipeau se chargea de me rappeler que le temps, lui, impitoyable, ne manquerait pas de signaler mon retard à ma mère qui tenait la liste de mes fautes. J'avais déjà accumulé chez elle un passif excédentaire : actes de désobéissance répétés, graves manquements d'égard à la voisine, madame Choisil, effronteries insupportables. Elle m'avait promis que je paierais le prix fort, à l'heure de son choix. Chaque délit était comptabilisé et correspondait à un nombre déterminé de coups de rigoise, de "ce doigt de Dieu qui chasse les démons". C'était un nerf de boeuf qui laissait sur la peau son empreinte persistante, obstinée, pour rappeler les omissions et leur châtiment. Alors, je pris mon courage à deux mains et bafouillai ma requête. Mon père ne me demanda pas de justifier ma demande comme le font toujours les parents. Il déposa sur son bureau un stylo et une feuille blanche et m'indiqua de l'index la chaise placée devant : "On va jouer à quitte ou double, me dit-il simplement. Ecris-moi une lettre précisant le montant dont tu as besoin ; si tu ne commets aucune faute, je te donne le double."
J'ai senti dès cet instant que j'entrais dans un terrain miné. Je vois le gosse maladroitement installé devant la feuille blanche ; des sueurs de panique lui couvrent tout le corps. Je sens le tremblement qui traverse sa main, la tension qui lui fait un cou raide, car chaque mot, chaque lettre, représente une carte maîtresse que, dans ce jeu à haut risque, il hésite à abattre. Combien lui prit la rédaction de cette lettre ? Une éternité au cours de laquelle son père continuait à vaquer, en toute tranquillité, à ses occupations. Pour la première fois, le gosse écrivait, non dans le cadre de ses travaux scolaires, mais avec une stratégie explicite de séduction. Certes, la langue ne lui venait pas de l'extérieur ; il l'avait intériorisée depuis quelques années déjà, dans une sorte de socialisation sauvage, subie, imposée ; elle lui venait pour ainsi dire du dedans. Il ne s'était jamais demandé pourquoi amour, délice et orgue étaient masculins au singulier et féminins au pluriel. Il le savait comme il savait que le vague, l'indécis, s'enveloppait d'une sensation de féminité, et l'eau, la mer, le vent, de douceur et d'infini. Demande-t-on au danseur de meringue de décomposer ses pas ? On le voit alors mêler toutes les figures et s'embrouiller.
Je date ma naissance à la vie d'écrivain de cet instant où, assis pieds ballants devant le bureau de mon père, sur cette chaise en acajou massif qui, compte tenu de ma taille, m'engloutissait, je dus rédiger une lettre de circonstance. J'avoue qu'aujourd'hui encore, installé à ma table de travail, il m'arrive de ressentir sinon la même panique, du moins un pincement au coeur que j'attribue, à tort ou à raison, à ce premier contact avec la langue comme appât, cette langue française à la fois écueil, refuge et tribune aux dimensions du monde. C'est elle qui donne à ma voix ce ton âpre, comme si ma propre musique, sur un autre clavier, ne peut se jouer que dans le registre du grave. J'écris d'une main tremblante, car je sais quelle violence sourde, retenue, bouillonne en moi. Et si l'écriture est si peu précise, c'est qu'elle hésite, encore aujourd'hui à parler de cet enfant taciturne, petit corps noir aux pieds poudrés, qui n'a cessé de marcher, d'errer depuis l'aube de sa vie. Mais qui regarde qui ? Lequel est le plus futé dans ce jeu de grand schelem , L'adulte ou l'enfant ? Ai-je en main toutes les levées de ce jeu somme toute mortel ! Mettrait-il par hasard, à des années de distance, face à face, l'enfant et l'adulte dans une indéfectible et discrète complicité ? L'adulte que je suis devenu, divisé, malade, esquinté, parviendra-t-il à retrouver l'enfant, à raccommoder les restes de l'enfance comme le pêcheur, son filet ?
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A l'approche de la soixantaine, alors que le portrait de ce qu'a été ma vie se trouve étalé devant moi, comment retrouver cette enfance vive, celle de l'enfant qui regardait, devinait, supputait, attendait, messager-aventurier d'un avenir dont il explorait la douleur en silence ? Comment retrouver ce labyrinthe qui résonnait des pas de ma solitude ? Comment dévider la phrase pour enrichir ses creux de résonances mythiques ? Ma mémoire a-t-elle gardé l'empreinte de ces jours d'euphorie où l'on apprend pour la première fois le bonheur exclusif d'une présence, ou n'a-t-elle conservé comme marque durable que les coups de gueule, les sanglots, les rancunes,les chagrins ? Dans le système fermé qu'était mon univers familial, ne serais-je pas en train de mettre en place un huis clos sur le thème de l'enfer des tribus ? Arriverai-je à libérer un flux d'énergie qui détacherait chaque atome et rendrait aux êtres que j'ai connus et côtoyés leur poids de singularité et de vérité ? J'ai beaucoup hésité avant d'entreprendre ce récit. Je savais de façon obscure qu'en me mettant à repasser par mon enfance, à regarder ma vie de cette rive lointaine et, du coup, à raconter des tranches d'Histoire de ce minuscule pays qui est le mien, j'allais réveiller de multiples histoires, les unes plus douloureuses que les autres, histoires pleines de vicissitudes, histoires à pleurer, mélopées lugubres. Méritent-elles vraiment d'âtre contées à ceux qui leur sont étrangers ? Ces mots légers, en ailes d'oiseaux, quasi impalpables, ces signes arrachés à l'ombre, à l'inachevé, à l'inéluctable pour tenter obstinément de les apprivoiser, reproduiront-ils ce que j'ai appris de la vie ou ne seront-ils que reflets d'un désir têtu de vivre ?
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Amparo revenait de Cuba. Elle n'en revenait pas vraiment. Elle revenait de Cuba sans en revenir. En cela, elle ressemblait à ceux qui, ayant trouvé Jérusalem, continuent à la chercher ailleurs, éternellement, jusqu'au bout du monde, à l'infini, voire au-delà. A cette époque, elle était en difficulté avec Fellipe et lui avait donné rendez-vous à Miami, pour une explication finale, la quatrième en quatre ans. Les deux premières sont toujours les moins pénibles ; la jalousie n'est-elle pas la forme suprême de l'amour ? La troisième, ordinairement épouvantable : elle laisse éclater la douleur des promesses non tenues. La quatrième, toujours la pire : sans amour ni colère, rien d'autre que la lassitude et l'agacement nés de la répétition du même reproche, de la conviction que l'être avec qui l'on vit ne changera jamais, de la triste certitude qu'au fond, on s'en fiche.
La rupture ne se fait pas en sifflotant, les mains dans les poches. Qu'il est difficile de restituer l'autre à la foule ! On crie que tout est fini ; on tremble face à la béance du quotidien ; on recule devant le vide de l'indifférence, on hésite à ouvrir les portes sur les gouffres de la solitude. On peut se payer une fugue, un après-midi tout entier, et se raconter qu'on va prendre le bateau pour mettre fin à des années de vie commune. Au soir, on rentre, on retrouve sa place dans le lit et tandis qu'on s'endort, le bateau s'éloigne de plus en plus. Pour rompre, il faut avoir le courage de franchir l'instant d'après ; pour le franchir, il faut être prêt à utiliser des subterfuges, des moyens qu'on croit éprouvés et qui ne sont que panacées.
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Je croyais dur comme fer, et Amédée le savait, que cette terre sous nos pieds était ce qu'il y avait de plus solide. On est d'ici, pas d'ailleurs, même prisonniers - comment disiat-il déjà ? - claquemurés, dans cette baie de ronces et de bayarondes. J'étais persuadée que le plus beau pays du monde était celui où les rues sont pavoisées de sourires, où les maisons sont identifiées par des prénoms de connaissances, où les arbres recèlent le nombril d'êtres chers, où le vent prend la voix de l'être aimé, le doux bruit de la brindille cassée au tuyau de l'oreille.
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A l'origine du voyage de Normand à Miami, il y avait ce que certains qualifieraient de désoeuvrement ; lui, Normand, y voyait une réponse à une insensible glissade sur le sol sans relief. Qu'aurait-il pu bricoler autour de cette existence ? Comment congédier le nostalgique et l'illusoire ? Longtemps il s'est esquinté à faire des compromis entre le je et le moi. Il y avait eu entre-temps la fragmentation, la perte, ce corps qui se lézardait sous le regard de celui qui l'habitait. Et pourtant, on sentait qu'il était encore heureux de vivre. La chaleur de la vie lui collait à la peau. Il en était le premier étonné et disait avoir lu quelque part - où et quand ? - que nous avons tous deux vies : celle dont nous avons rêvé dans notre enfance et dont nous continuons à rêver, adulte, sur fond de brouillard, la fausse ; et l'autre, celle que nous vivons, la pratique, l'utile, la vraie, celle où l'on finit par être conduit en bière.
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