Jeux de miroirs de
E.O. Chirovici et Isabelle Maillet aux éditions Les Escales
Un agent littéraire, Peter Katz, reçoit un manuscrit intitulé
Jeux de miroirs qui l'intrigue immédiatement. En effet, l'un des personnages n'est autre que le professeur Wieder, ponte de la psychologie cognitive, brutalement assassiné à la fin des années quatre-vingt et dont le meurtre ne fut jamais élucidé. Se pourrait-il que ce roman contienne des révélations sur cette affaire qui avait tenu en haleine les États-Unis ?
Persuadé d'avoir entre les mains un futur best-seller qui dévoilera enfin la clef de l'intrigue, l'agent tente d'en savoir plus. Mais l'auteur du manuscrit est décédé et le texte inachevé. Qu'à cela ne tienne, Katz embauche un journaliste d'investigation pour écrire la suite du livre. Mais, de souvenirs en faux-semblants, celui-ci va se retrouver pris au piège d'un maelström de fausses pistes.
Et si la vérité n'était qu'une histoire parmi d'autres ?
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« Lorsque j’avais décidé de devenir écrivain, à la fin du lycée, je m’étais peu à peu forgé une conception du monde lugubre et empreinte de scepticisme, avec l’aide précieuse de MM. Cormac McCarthy, Philip Roth et Don DeLillo. Pour moi, un véritable romancier ne pouvait être qu’un triste sire solitaire, même s’il recevait de gros à-valoir et passait ses vacances dans des hôtels de luxe en Europe »
On dit que le temps guérit tout. Ce n’est pas vrai. Quand le malheur frappe, le temps divise son cours en deux dimensions. Dans l’une d’elles, vous continuez à vivre, du moins en apparence. Mais dans l’autre, seul existe ce moment qui vous accable, encore et encore.
Pour moi, ce n'est pas un hasard si nous nous retrouvons devant telle ou telle porte à un moment donné, même si nous décidons de ne pas la pousser. Les portes que nous choisissons de laisser fermées sont aussi importantes que celles que nous franchissons. Bien sûr, on est tous tentés d'oublier, et à l'heure du bilan final, personne ne compte les portes qui sont restées fermées, mais seulement les quelques-unes qui ont été ouvertes.
J'avais toujours aimé les livres, aussi l'organisation de la bibliothèque s'apparentait-elle plus à un privilège qu'à une corvée. Les rayonnages regorgeaient d'éditions rares et de titres dont je n'avais jamais entendu parler.

Comme bon nombre de jeunes gens à cette époque, j'étais révolté, radical, et j'avais le sentiment que nous faisions l'expérience d'un moment crucial à l'approche du nouveau millénaire. J'ai pris part à quelques manifestations, mais je me suis vite aperçu que toutes les causes qui étaient probablement intéressantes dans les années 1960 s'étaient déjà désintégrées, laissant dans leur sillage essentiellement un mélange de snobisme pervers, de promiscuité et de paresse congénitale habilement déguisée en rejet de la société.
Il est de bon ton aujourd'hui d'accuser la génération des baby-boomers de naïveté et de prodigalité, mais je crois que nous étions avant tout heureux de pouvoir profiter de nos cités universitaires, de nos campus et de nos belles voitures. Nous ne voulions pas qu'on menace notre bien-être et qu'on nous envoie crever dans les rizières d'Asie alors que l'Amérique jouissait de sa prospérité.
Bien sûr, je vous dis là ce que je pensais alors.
(p. 51-52)
On ignore ce qu'est la souffrance avant d'avoir reçu une blessure si profonde qu'elle relègue toutes les autres au rang de simples égratignures.
Le mythe de ces illustres expatriés parisiens, tels que Fitzgerald, Hemingway, Dos Passos, Hughes et tant d’autres, était encore très présent à l’esprit des jeunes de ma génération. Paris apparaissait comme une Babel brillante, à la fois inspirante et pleine de mystère, alors que New York semblait en pleine déroute au milieu des années 1970.
Je m’imaginais que tous les Parisiens portaient des bérets, mangeaient des pains d’un mètre de long, buvaient de l’absinthe en compagnie de jolies femmes. Là-bas, les idées de génies tombaient du ciel telles des gouttes de pluie, si bien qu’il suffisait d’ôter le béret en question quelques secondes et de s’en servir pour les récupérer.
Je vous ai donné ces exemples pour illustrer le principe à l’œuvre dans l’hypnose : la responsabilité que le sujet transfère sur l’hypnothérapeute est beaucoup plus grande dans les états modifiés de conscience que dans les états normaux
Je me suis toujours méfié des actes de charité motivés uniquement par la foi, de la prétendue générosité de ceux qui signent des chèques pour les bonnes oeuvres de la même manière qu'ils paient leurs impôts, ou qui glissent de l'argent dans le tronc des pauvres comme une offrande à une divinité qu'ils craignent, plutôt que par véritable compassion.
(p. 26)
Mais, à Princeton, il s'était retrouvé confronté à certains des jeunes adultes les plus brillants d'Amérique. La première année, il avait fourni de gros efforts pour prouver sa valeur, sans parvenir néanmoins à s'illustrer. Parmi les fils à papa du campus, il était de bon ton de ne pas faire étalage de sa richesse, voire de s'encanailler à plaisir, mais cela ne voulait pas dire pour autant qu'ils acceptaient les vrais pauvres. Croyez-moi, l'hypocrisie était de mise...
(p. 60)