Citations de Edmond Baudoin (413)
Antonio Tejada, le 21/02/2015, au marché. Que tous les hommes soient égaux. Du travail pour tout le monde et des loisirs par la même occasion. Égalité de droit et de parole. Sans éducation pas d’avenir. Étant enfant, je rêvais d’être aviateur, mais plus tard je me suis rendu compte que je devais entrer dans l’arme pour réaliser ce rêve. J’ai abandonné. Je suis devenu instituteur, une autre façon de conduire des passagers. J’espère ne pas les avoir trop mal conduits mes passagers, j’espère que certains sont arrivés à bon port. J’ai essayé.
Te quiero, ça veut dire Je te veux. Je veux Neige depuis longtemps. Mais comment est-ce possible ? Personne ne peut appartenir à personne. Mais je m’en fous, comme le dernier des crétins, je veux l’impossible.
Dans la classe, ce qui m’intéressait le plus, c’était la fenêtre. Et surtout ce qui se passait de l’autre côté. Grâce à l’école, je suis devenu un grand spécialiste dans l’étude comparative du vol des pigeons, des moineaux des mouettes, ainsi que dans le mystère de la formation et de la disparition des nuages. Et quand le printemps revenait, toute mon attention se reportait sur les hirondelles et, surtout, les martinets, ces écrivains du ciel.
Peut-être serai-je sûre d'exister un jour ?
Quand Michel sort de chez Louise, les rues ressemblaient à des rues, les pigeons à des pigeons. Deux heures après. Après le déjeuner avec Charles, les rues étaient redevenues des égouts à ciel ouvert, et les pigeons des rats volants.
L'obsession, toujours du dérisoire… On naît pour mourir au bout. Créer, c'est être assez fou pour réduire la mort à peu d'importance. Assez fou pour nier l'évidence que la vie humaine est dérisoire et vaine. Et ce fou fait qu'effectivement la vie humaine cesse d'être dérisoire. Il éloigne l'homme des fourmis.
C'est la maman qui parle : C'était en septembre 2007. J'étais dans la maison avec ma famille. Mon époux était à côté, il jouait sur le lit avec ma fille de 9 ans. Soudain entre un homme, il tire des coups de feu, une balle entre dans un œil de Syndy Vanesa, une autre dans le front de mon mari qui meurt sur le coup. Il pointe son arme sur moi, je crie, il s'enfuit. Depuis ce moment, je m'occupe de ma fille. Il faudrait aller souvent à Bogotá, il y a là-bas un spécialiste de la rétine. Au début je pouvais y aller tous les deux mois pour les contrôles, ensuite tous les six mois. Mais je n'ai pas emmené Syndy la dernière fois. Avec le voyage, la visite, l'hôtel, j'en ai pour 200 euros. C'est ce que je gagne en un mois. Ma fille dit que je ne devrais pas m'occuper d'elle. Mais elle risque de perdre l'œil. Aujourd'hui, j'ai donné une lettre au président Santos. Le gouvernement dit qu'il aide les victimes, mais ce n'est pas vrai. Mon époux commerçait avec les FARC quand existait encore la zone de paix. Ensuite les paramilitaires nous ont accusé d'être amis de la guérilla. Je ne sais pas qui a tué mon mari, ni mon frère exécuté en 2005 parce qu'il faisait de la politique. Je ne sais rien.
Miguel veut nous montrer sa ville, quand elle était encore heureuse, quand les touristes venaient remplis les comptoirs et que les nuits étaient vivantes. Avant la montée de la violence, il y a trois ans à peine. Miguel Angel est né dans les années 60, au milieu d'une famille de 8 enfants. Miguel a grandi dans un quartier populaire du centre-ville, où il dit avoir été l'enfant le plus heureux du monde. Il a tenu un bar quand il était jeune, un bar avec du rock'n'roll. Miguel est un poète. Par un poète en chambre. Un poète dans la vie. Il aime les fous de son époque : Dali, les Pink Floyd, et le grand Hemingway. Aujourd'hui Miguel publie toujours des poèmes, mais il écrit surtout des articles dans les journaux, des billets d'humeur et d'opinion sur le monde qui l'entoure. Il a reçu l'année dernier le premier prix de journalisme. Il y a un peu plus de quatre ans, Miguel a eu une embolie cérébrale. Un mois et 13 jours de coma. Un an cloué au lit sans pouvoir parler. Des milliers d'heures de rééducation. Maintenant, il peut conduire, et il marche avec une canne. Une partie de son corps reste encore endormi. Et moi qui ne crois en rien, je me dis en le voyant qu'il y a toujours moyen de sortir du pire. Pour moi, il est l'image d'espoir de cette ville.
On est dans le bus pour Juárez. Dans trois heures on arrive. Arriver, tout arrive, les départs aussi. J'ai tellement voulu arriver là. J'y suis. Dans un mois, qu'est-ce que j'aurai appris, désappris ? De l'autre côté de la vitre, c'est le désert. Des tourbillons de sable s'élèvent, s'évanouissent, que disent-ils ?
En 2007, dans le Michoacàn, au Mexique, j'ai assisté à l'arrivée des papillons monarques. Il y en avait des millions, je respirais du papillon. Le monarque est un migrateur. Ceux qui étaient là dans le ciel arrivaient d'Alaska. Il en meurt des centaines de milliers dans le voyage. Mais le voyage est leur survie.
J'accumule, comme si ça pouvait me protéger de la mort.
Je suis incapable, depuis toujours, d'avoir sexuellement envie d'une femme qui ne veut pas de moi, incapable de bander devant Miss Monde nue si je l'indiffère. Bien sûr, je me régale de sa beauté, je ne m'en lasse pas, mais même en convoquant mes fantasmes les plus pornographiques, je reste impuissant avec mon sexe. Et je ne crois pas être le seul mâle à posséder ce handicap. Comment ça marche dans la tête d'un violeur ?
Le lavoir - Les femmes s'usaient les mains, mais… Jeanne aimait aller au lavoir. Est-ce le plaisir enfantin de toucher l'eau ? Celui érotique de côtoyer d'autres femmes… Elles étaient proches les unes des autres, les bras nus. Quel est le rapport à l'eau ? Aujourd'hui, on ne touche plus l'eau. Lave-linge lave-vaisselle. On ne touche l'eau que pour se laver. Seulement se laver.
Ce (dernier ?) livre sera autobiographique. Depuis bientôt quarante ans je me raconte. Depuis tout ce temps, je reprends le premier livre et lui rajoute des chapitres, comme s'il me fallait toujours préciser. Préciser quoi ? C'est un peu vain.
Vivre c'est être dans la contradiction, la confrontation, les oppositions, les répétitions, l'empirisme.
Et quand on a tout bien préparé, il faut savoir faire face à l'imprévu!
Quand le doute ronge le coeur, la tete n'arrive à rien.
Honore les enfants. Écoute leurs paroles avec révérence et parle-leur avec un amour infini. (Léo Szilard)
Dans la classe ce qui m’intéressait le plus c'était la fenêtre...
... et surtout ce qui se passait de l'autre côté.
Grâce à l'école, je suis devenu un grand spécialiste dans l'étude comparative du vol des pigeons, des moineaux, des mouettes.
... Ainsi que dans le mystère de la formation et de la disparition des nuages.
La nuit, il vaut mieux rester chez soi, c’est une affaire entendue. Et essayer de dormir. Mais il y a : les chiens qui montent la garde et qui aboient entre eux. Ils sont innombrables. Les sirènes de la police, perçantes, tout au long de la nuit. Crissements de pneus. Courses poursuites. On imagine. Et puis, plus subtils, mais tout aussi redoutables, les klaxons des trains, sourds et profonds comme les cornes de brume qu’on entend dans les ports. La gare est du côté USA. L’appel du large