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Critiques de Edmonde Charles-Roux (35)
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Oublier Palerme

Oui, c'est indéniable, Edmonde Charles-Roux était réellement une grande dame et là, je ne parle pas uniquement en tant qu'auteure mais en tant que grande figure de l'histoire. Honte à moi de n'avoir jamais entendu parler d'elle avant le jour de son décès, soit le 20 janvier dernier et jusqu'à ce que le directeur du journal pour lequel j'écris me demande d'en faire une chronique. Aussi, par où commencer, je me voyais submergée par la masse d'informations que je trouvais sur elle et par ses livres que j'avais de plus en plus envie de découvrir. Ne sachant pas trop par lequel commencer, quoi de mieux que de m'attaquer à celui qui fut l'un de ses premiers romans et qui plus est obtint le Prix Goncourt en 1966 ?



"Oublier Palerme" reviendrait à dire oublier ses racines car c'est bien de cela qu'il est question ici. le lecteur découvre deux personnages principaux : Gianna Meri, chroniqueuse pour le célèbre magazine féminin Fair et Carmine Bonavia, d'abord travaillant dans une agence de recruteurs puis président du parti démocrate. Quels point commun rapproche ces deux personnages ? Vous l'aurez sans doute deviné, ne serait-ce qu'en lisant le titre de ce roman ? Leur origine sicilienne bien évidemment, et, plus exactement leur provenance de Palerme. Alors qu'ils vivent tous les deux aux Etats-Unis à l'époque où se déroule cette histoire, à savoir au début du XXe siècle et qu'ils mènent chacun leur propre vie, leur destin va indubitablement les faire se rencontrer ? Simple hasard ? Pas exactement car c'est grâce à la "tante Rosie", chez qui Gianna loge bien qu'elle ne soit pas sa tante mais celle sa collègue de boulot, Babs. Ici encore, un nom qui revient régulièrement tout au long de cet ouvrage comme tant d'autre encore que je ne vais pas énumérer. Bien plus que la banale existence de deux personnes qui ont subi l'exil, celle également de tous ceux qui sont restés au pays et de tout ceux qui n'en sont jamais parti (à savoir les américains qui ont toujours vécu aux States et qui, voyant le luxe dans lequel ils vivent en cette période diifficile, sont bien loin de vouloir en partir !



Un livre dans lequel j'ai eu un peu de mal au départ tant il y avait moult personnages qui se rajoutaient au fil des pages et de flash-back afin de raconter l'histoire de la lignée mais une fois le coche pris, je n'ai plus pu m'arrêter ! A découvrir !

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Oublier Palerme

Quand je pense que ce livre a eu le Goncourt. Enfin, comme le Goncourt est davantage une histoire de sous et de petits arrangements entre amis qu'une histoire de livre mythique, rien de nouveau dans l'ancien temps... Si l'on replace ce livre dans son contexte, cette dame Edmonde Charles-Roux avait perdu son job dans le magazine Elle et avait un réseau suffisamment serré pour qu'un coup de pouce Goncourt lui soit décerné.



Mais franchement, c'est un livre vraiment « oubliable ». Alors que raconte ce livre ? « Babs - diminutif de Barbara est de ces blondes, tout occupées d'efficacité, comme on en rencontre par centaines à New York dans le monde de la presse féminine… N'est-elle pas plutôt prise au piège de son entourage, un petit monde où l'arrivisme est l'unique loi ? »



Et un peu plus loin « Si, comme l'écrit Céline, « on n'échappe pas au commerce américain », Babs alors est une prisonnière. Société féroce. du moins aux yeux de Gianna Meri, l'amie de Babs, une jeune Palermitaine rescapée des bombardements de 1944 qui ont laissé la Sicile meurtrie. » Bon, Céline, c'est pour donner du vernis « grande littérature » à un livre un peu léger. Par contre en effet quelques souvenirs de Palerme joliment dépeints viennent agrémenter le tout. Et il y a une tentative de tracer les contours d'une société immigrée, ce qu'elle garde comme attaches avec ses racines. Mais ça reste une tentative. Franchement pas de quoi faire un livre inoubliable ! Mais vous pouvez vous faire votre opinion, il est disponible dans toutes les brocantes et chez tous les bouquinistes, à prix bas tellement il encombre les bibliothèques familiales de la génération précédente…



De toute évidence Edmonde Charles-Roux était davantage une personne médiatique, avec certainement une grande expérience de la presse dite féminine qu'une grande écrivaine. Et probablement que ce petit livre sera vite oublié dans quelques décennies.



2,5/5
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Oublier Palerme

J'ai rarement été autant touchée par un livre. J'ai lu beaucoup de livres évoquant la Sicile, mais jamais je n'ai eu envie d'y aller auparavant comme j'ai ce désir maintenant car il est évident que je ne pourrai Oublier Palerme. C'est un réel coup de cœur que j'ai eu pour ce roman. J'ai adoré les personnages, leurs histoires, les croisements de destinées sur plusieurs générations, l'écriture et la manière dont le récit est construit. Les paysages de la Sicile, j'avais l'impression de sentir la poussière qui s'élève dans la touffeur de l'été et de voir au loin le château du Baron de D. à Solanto. Un contraste saisissant entre cette Amérique neuve et la Sicile immémoriale. Je comprends pourquoi Agata dit "La mémoire, c'est l'Enfer." C'était si beau ce roman.
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L'irrégulière ou mon itinéraire Chanel

Ce n’est pas tant la vie de Gabrielle Chanel qui est la plus intéressante à découvrir ici : plusieurs récits, reportages, films et téléfilms (Coco avant Chanel 2009, Coco Chanel et Igor Stravinsky 2009, Chanel solitaire 1981…),ont participé largement à divulguer avec plus ou moins de bonheur, de voyeurisme, de respect de la réalité, de vision chimérique, d’édulcoration mièvre, ce qu’elle avait, toute sa vie, tenter de cacher, de mystifier, d’imaginer, de réinventer.

L’intérêt du livre, c’est d’abord le travail minutieux mené par Edmonde Charles Roux pour recueillir le maximum d’informations pertinentes, glaner les témoignages, les analyser, s’imprégner des lieux où elle vécut, décrypter et interpréter les moindres détails , retrouver des témoins, pour écrire une biographie la plus fidèle possible. Elle a mené, tour à tour, un travail de généalogiste, de documentaliste, de détective privée, d’historienne , de psychanalyste et bien sûr de biographe et de romancière….

De ses investigations, elle en fait un récit réaliste, sans concession, elle nous livre une histoire à la fois vraie mais qui s’apparente à une fiction romancée tant la vie de Gabrielle Chanel fut féconde et bouillonnante en événements dramatiques, douloureux, pittoresques voir picaresques.

Plus de 650 pages qui se lisent avec délectation tant le style est éblouissant et l’exposé de ses investigations prenant

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Elle, Adrienne

Dans la France occupée, Ulrich Mulhen, un aristocrate né en Bohême, officier dans l'armée du IIIe Reich, dîne dans un grand restaurant parisien (l'Hôtel de Paris qui ressemble étrangement au Ritz) . Il est intrigué par les éclats de rire d'un couple installé près de lui, derrière un paravent. Le repas s'achève, apparaissent deux femmes. Fulgurance des regards, coup de foudre pour Ulrich qui n'aura de cesse de retrouver cette inconnue. Cette rencontre se concrétisera et ils deviendront amants. Elle, c'est Adrienne, son aînée de vingt ans, la cinquantaine, "l'âge où l'on sait aimer" . Une femme au charme ténébreux , libre, audacieuse, imprévisible, insubordonnée , qu'Edmonde Charles-Roux anime avec la séduction, les traits, l'allure raffinée , le style élégant , le comportement mystérieux d'une femme qui la fascina, celle qu'elle décrit ainsi : une chevelure noire, une frange qui lui tombe sur les sourcils, « un goût barbare pour les bijoux », portant «profusion de perles autour du cour, des blanches, des roses, des noires, emmêlées à la mousseline de son écharpe », « des chaînes en or qui cascadent autour du cou et à la taille » qui s'habille de « jersey noir »… Adrienne est une couturière renommée, elle vit à l'hôtel , tout comme la grande COCO Chanel , elle aussi issue d'un milieu modeste …

Un double histoire d'amour nourrie de mensonges , de constance et d'inconstance, de non-dits, de vérités aussi, que compose un trio : Adrienne, Serge, son très jeune neveu , dix-sept ans, et son amant tchèque . Adrienne qui restera jusqu'au bout une énigme et une femme libre.

Elle disparaîtra à 70 ans, sans rien révéler d'elle, c'est

l' incipit.

C'est aussi L'Histoire, celle d'une période douloureuse pour la France qui se décline au fil des pages : La guerre, l'Exode, l'Occupation, la barbarie, la Résistance, l'Europe écartelée qui se décompose, se recompose, se réunifie péniblement .

Le style d'Edmonde Charles-Roux est élégant, sans être apprêté, le vocabulaire est riche sans affectation.

Une belle lecture .



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Oublier Palerme

Ce magnifique roman a été couronné du Prix Goncourt en 1966, année de ma naissance mais ce n'est que beaucoup plus tard que je l'ai embarqué dans mes valises lors d'un séjour en Sicile. C'est toujours intéressant de lire "en contexte" les romans qui en disent beaucoup sur un pays et ses natifs. Ici, il s'agit de retour au pays, d'ambition, de quête d'identité, d'amour aussi. Bref, tous les ingrédients pour un très joli moment de lecture.
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Un désir d'Orient : Jeunesse d'Isabelle Eberh..

Quelle érudition ! Quelle somme de travail de recherches ! Car, s'il s'agit bien de la jeunesse d' Isabelle, c'est tout le contexte historique de son époque qui nous est offert.

Depuis l'aristocratique famille russe, d'avant sa naissance, jusqu'à l'exil à Genève, du temps de la diaspora des jeunes russes et de leur effervescence.

Elle reçoit une brillante éducation de son précepteur.

Tous les personnages qui gravitent sont parfaitement présents.

C'est une lecture très riche soutenue par l'excellence du style.

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Hommage à Jorge Semprun : 11 juin 2011 - Lycée ..

 

 

 

Je ne résiste pas au plaisir de citer le très bel hommage rendu à Jorge Semprun le 11 juin 2011. Ces textes sont tirés des fleurs du mal de Charles Baudelaire – le voyage – et lus par Cécilia Landman et Michel Piccoli.



Et pouvons-nous ajouter ces quelques vers du même voyage :



Amer savoir, celui qu'on tire du voyage !

Le monde, monotone et petit, aujourd'hui,

Hier, demain, toujours, nous fait voir notre image

Une oasis d'horreur dans un désert d'ennui !



Faut-il partir ? rester ? Si tu peux rester, reste ;

Pars, s'il le faut. L'un court, et l'autre se tapit

Pour tromper l'ennemi vigilant et funeste,

Le Temps ! Il est, hélas ! des coureurs sans répit,

[…]



Nous nous embarquerons sur la mer des Ténèbres

Avec le cœur joyeux d'un jeune passager.

Entendez-vous ces voix, charmantes et funèbres,

Qui chantent : « Par ici ! vous qui voulez manger



Le Lotus parfumé ! c'est ici qu'on vendange

Les fruits miraculeux dont votre cœur a faim ;

Venez vous enivrer de la douceur étrange

De cette après-midi qui n'a jamais de fin ? »



À l'accent familier nous devinons le spectre ;

Nos Pylades là-bas tendent leurs bras vers nous.

« Pour rafraîchir ton cœur nage vers ton Electre ! »

Dit celle dont jadis nous baisions les genoux.



Le voyage //VII //Charles Baudelaire //Les Fleurs du mal

 

 

 

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Nomade j'étais. Les Années africaines d'Isabell..

relu avec plaisir la vie d'Isabelle Eberhardt rebelle, courageuse, indépendante, parcourant le désert à cheval, sachant aimer de toute son âme un homme, un pays. belle et poignante fresque
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Oublier Palerme

Je devais lire Oublier Palerme pour un challenge sur l'Italie, mais comme l'organisatrice a manqué de sérieux dans l'organisation de celui-ci le roman est resté deux ans dans la bibliothèque.



J'ai eu du mal a rentrer dans le récit. Il y a d'abord une phase descriptive ou Gianna fait l'état de son opposition a Babs, le récit du superficiel, de la vacuité de certaines femmes.



Le récit devient plus prenant, plus intéressant à partir du moment où elle rencontre Carmine. Elle va entamer le récit de siciliens qui préfèrent partir dans l'inconnu plutôt que de rester dans leur misère.



Au delà de ses origines siciliennes, Carmine peut être vu comme l'archétype de l'immigré. Avec de la volonté et une bonne part de chance, il réussit a faire quelque chose de sa vie. Mais lorsqu'il veut retrouver ses origines avec un voyage en Sicile, il prend la réalité en pleine face. Les autochtones le voient que comme un Américain, une source d'argent et sa femme, comme une prostituée.



Avec ce roman Edmonde Charles-Roux s'interroge sur la recherche de l'identité des immigrés, sur la difficulté à se trouver une place dans la société d'accueil ou dans le pays d'origine.
Lien : http://kulturenblog.over-blo..
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Oublier Palerme

"Oublier Palerme" c'est une histoire (ou des histoires) de déracinement plus ou moins assumé : Babs travaille à New York et semble enfermée dans cet univers - la rédaction d'un magazine - soumis aux règles de l'arrivisme et de l'hypocrisie. Ce monde, Gianna Meri, une Palermitaine amie de Babs, le refuse. Contrainte à s'exiler après la guerre, elle ne parvient pas à s'insérer dans cette ville trop grande, trop haute, trop symétrique, trop...

Carmine Bonnavia, elle, cherche comme Babs à oublier ses racines siciliennes et à se dissoudre dans cette société américaine dont tant de gens rêvent... A moins que la Sicile ne soit la plus forte pour récupérer ses enfants égarés.

Un thème alléchant...

Je ne sais pas vous, mais moi, je me suis trouvé là dedans aussi étranger à l'affaire que certains des personnages le sont pour New York et la culture américaine. La raison ? Je ne sais pas... Peut-être que New York m’intéresse moins que les bayous du sud... ou que le style d'Edmonde Charles-Roux ne me touche pas... Ou les deux... Oui, c'est ça, les deux ! En tout cas, j'ai lu ce livre il y a quelques années et je me souviens encore de l'effort qu'il m'a fallu pour "en venir à bout". Lecture plaisir, me direz-vous ? Il est sur qu'aujourd'hui je ne serais pas allé au bout.
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Oublier Palerme

Oublier Palerme :



C'est le titre qui m'a accroché, bien sûr, sur l'étal de la librairie. Une fois vu, difficile de repartir sans ce livre dont le titre, et l'image de couverture, m'appelaient droit au coeur.



J'ai pourtant eu beaucoup de mal pour entrer dedans. Commencé et abandonné, je l'ai repris il y a quelque jours pour porter à son terme cette lecture : le récit, en allers-retours entre New-York et la Sicile dépeint des personnages hauts en couleurs, des destins qui s'entrecroisent, mais il est seulement un prétexte à cela. Planter le décor, c'est réussi. On y est : la rocaille, la chaleur, le sang, les cris, les enfants, la Santuzza. Du côté de l'Amérique : le superficiel, la vie facile, moderne, les magazines, la mode, l'apparence. Mais entre les deux on cherche un peu, on a du mal.



Oublier Palerme, n'est pas une évidence. Le livre non plus. Son titre très prometteur me laisse, hélas sur ma faim. Trop d'attentes ? Peut-être. On se régale de quelques descriptions bigarrées, du style agréable, de familles qui se croisent, d'héritiers qui se ressemblent -la famille du Baron de D., dans sa folie et son isolement me rappelle Cent ans de Solitude- mais sans avoir jamais eu l'impression d'entrer dans le roman.

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L'irrégulière ou mon itinéraire Chanel

Pour moi Coco Chanel représente la grande classe, alors dès les premières pages je suis sidérée de connaître sa pauvre et malheureuse enfance. Elle ne va prendre tout de suite le chemin de la gloire. Elle va être entretenue (d'où le titre). Mais elle va toujours avoir la rage de réussir, de se faire un nom, d'y arriver seule, de vite rembourser ses dettes pour être autonome. Elle va rejetté son passé, être détestée des siens. Les oublier, oublier son histoire, l'histoire de sa pauvre mère, de son père volage, comme son grand père.

Elle va sublimer la femme, la mettre à l'aise dans ses vêtements en s'inspirant des tenues masculines.

Ce livre m'a beaucoup apporté sur l'image de Chanel qui finalement n'est pas du tout bourgeoise et haute couture.

Ce livre a été écrit en 1976 mais le ton est moderne et accrocheur. Contrairement à Chanel, Edmonde CR aura un comportement exemplaire durant la guerre. On sent une femme de lettres, moderne pour son époque dont le parcours est aussi intéressant à consulter. Elle va réussir avec ce livre a essayé de démêler le vrai du faux dans ce que va raconter Chanel. Elle nous captive par des recherches incroyables qui vont nous amener à traverser presque un siècle riche en Histoire.
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Oublier Palerme

Étrange roman que celui d'Edmonde Charles-Roux, empreint d'une douce désespérance. Aucun de ses protagonistes ne sort indemne de l'histoire violente et brûlée où les précipitent les liens indéfectibles au sol natal, à cette Sicile auréolée de fatum et de grandeur.

Dans le New-York des années 50, Gianna Meri tient une rubrique voyages et gastronomie dans un magazine à grand tirage, Fair (n'oublions pas que l'auteur a été rédactrice en chef de Vogue). Elle est placée sous la responsabilité de Barbara, une célibataire qui incarne la femme moderne, active, émancipée, maîtresse de sa destinée. Gianna et Babs logent chez Mrs. Mac Mannox – Tante Rosie – qui veille sur sa nièce Babs avec la vigilance d'un mentor parfaitement informé des usages et des codes de la bonne société new-yorkaise. La jeune femme, lisse en tout, doit pouvoir, malgré les années qui passent, faire un brillant mariage en épousant l'un de ces hommes d'affaires, éditeurs, avocats invités à la party annuelle qu'elle donne.

Quelle nostalgie poignante étreint Gianna ? Pourquoi a-t-elle fui Palerme? Pourquoi se refuse-t-elle à parler du passé ? Qu'a-t-elle laissé derrière elle et qu'elle tait même à Babs, surtout à Babs ? Les souvenirs tenus à distance vont pourtant affluer quand elle rencontre Carmine Bonnavia dans une soirée. D'origine sicilienne, il mène une belle carrière politique et brigue la mairie. Son père, émigré sicilien de la première génération, tient un restaurant « Chez Alfio ». Mais le fils a d'autres ambitions, faites de conquête du pouvoir, d'ascension sociale. D'ailleurs, Barbara pourrait être la femme capable de lui ouvrir certaines portes jusque-là fermées et d'effacer l'image du fils d'immigré.

Au contact de Carmine, la Sicile s'impose de nouveau à Gianna, avec la torture des jours heureux qui ont tourné au cauchemar. Elle se souvient de sa grand-mère aimante, de la plage inondée de soleil, du village de Sólanto où enfant elle accompagnait son père médecin chez le baron de D. où il soignait le rejeton de la lignée familiale, Antonio. Les années passant, une amitié est née entre les enfants qui s'est transformée en amour à l'adolescence. Un amour solaire, exclusif, auquel s'abandonnent les deux jeunes gens parce qu'ils se sont trouvés et reconnus. Quand la guerre survient, Antonio rejoint les troupes italiennes qui combattent sur le front grec et y trouve une mort absurde, débarqué avec son peloton sans munitions. Pour Gianna, c'est la première des morts, celle qui frappe avec une douleur fulgurante. Don Fofò, le père d'Antonio, prendra le maquis et le baron sera exfiltré de justesse vers les États-Unis avant son arrestation par la milice. Viendra pour Gianna, la disparition d'autres êtres chers, son père, sa grand-mère et les bombardements qui sèment la destruction et le chaos.

Carmine, malgré lui, est contaminé par la Sicile, comme s'il devait une première fois et une dernière fois boire à la source de toutes les sources avant de poursuivre sa voie et de l'accomplir. Contre l'avis de son père, il décide de faire son voyage de noces avec Babs à Palerme. Cet homme calme, maître de ses émotions, habile tacticien, subit au bout de quelques jours l'étrange alchimie du lieu qui révèle en lui sa part d'ombre : l'Américain, le nanti, le fanfaron est ridiculisé par un petit vendeur de jasmin qu'il va se mettre à poursuivre dans toute la ville par blessure d'orgueil et besoin de revanche. Quand enfin Carmine retrouve Gigino, la rencontre tourne à la rixe et l'enfant est gravement blessé. À partir de ce moment, l'implacable roue de la vengeance va broyer Carmine. Soustrait aux recherches de la police, il est caché avec Gigino dans une cave. Quand l'état de l'enfant devient désespéré, malgré les recommandations, il quitte son abri pour aller chercher un médecin et est abattu en pleine rue. Au moment où il a pleinement incarné toutes les valeurs siciliennes, après la violence et l'orgueil, la loyauté, le sens de l'honneur et du devoir, le secours aux plus faibles, il mourra.

Le roman d'Edmonde Charles-Roux n'a pas pris beaucoup de rides, comme toutes les œuvres fortes. La description du journalisme de mode et du fonctionnement d'un hebdomadaire féminin est toujours d'actualité – ah ! Fleur Lee, la figure incontournable des salles de rédaction – et le portrait de Babs, jeune femme confrontée au vide abyssal des vies gouvernées par le bon ton, les codes étriqués et la sécheresse des sentiments, est percutant. Quand le récit quitte New-York pour la Sicile, la langue se fait riche, dense, chargée de parfums et d'évocations poétiques. Le livre se referme sur l'espoir, celui d'être « prisonnière volontaire de l'oubli ». Car faire vœu d'oublier revient à toujours se souvenir de l'essentiel, comme s'il était vain de terrasser ce qui est inscrit en nous de façon indélébile, la pulsion de vie se chargeant de nous faire avancer sur nos chemins parfois chaotiques.

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L'irrégulière ou mon itinéraire Chanel

OU LA BIOGRAPHIE DE COCO CHANEL LA MIEUX DOCUMENTÉE…



« Coudre, c’est finalement refaire un monde sans coutures… »Roland Barthes (citation du deuxième épilogue de L’irrégulière).



Et un grand bravo à Edmonde Charles-Roux qui retrace ici presqu’un siècle d’Histoire avec celle de Gabrielle Chanel, après avoir accompli un travail de fourmi auprès d’elle, à démêler le vrai du faux, les mensonges, tout ce que Chanel a toujours voulu cacher sans y parvenir vraiment. Ce livre (paru après son décès en 1971) l’a rattrapée et nous en brosse un portrait de femme, magistral de courage, auréolé de mystères et enfin, dépassé par sa légende…



Ce « pavé » de 654 pages (dans ma vieille version poche) est idéal pour exalter vos vacances, sous l’écriture fluide mais non moins rigoureuse d’Edmonde Charles-Roux. Malgré quelques longueurs, il se lit comme un roman d’aventures puisque la vie de Chanel n’a été faite que d’aventures, heureuses, grandioses et pitoyables mais qui l’ont menées là où l’on sait… et ce n’était pas gagné !



Gabrielle Chanel naît le 19 août 1883 à Saumur, quasiment dans le ruisseau d’un père cévenol, camelot de son état, volage et instable et d’une mère épuisée par les grossesses , fourbue de suivre cet homme qui ne l’a pas épousée. Elle mourra de tuberculose et de misère à 32 ans, laissant Gabrielle orpheline à 13 ans. Son père, dépassé, les abandonnera, sa soeur cadette et elle, très vite dans un orphelinat corrézien, puis elle connaîtra le pensionnat des chanoinesses de Moulins où elle apprendra la couture. Le sarrau noir qu’elle portait lui inspirera plus tard, en 1926, la fameuse « petite robe noire ». Elle est plutôt jolie et va se retrouver « poseuse » dans un beuglant de Moulins, ville de garnison où elle poussera la chansonnette et « Qui a vu Coco dans le Trocadéro » ne la consacrera pas comme chanteuse mais elle y gagnera son surnom. Repérée par le châtelain Balsan qui lui ouvre les portes de son château et de ses draps, elle commence l’apprentissage de la vie « d’irrégulière », de femme entretenue, celle que l’on n’épouse pas mais qui revendiquera toujours sa liberté malgré cette blessure qui la poursuivra tout au long de sa longue vie. Elle rencontrera chez Balsan, son seul grand amour, Arthur Capel, dit Boy, d’origine anglaise, ils auront une liaison de huit ans et il ne l’épousera pas non plus, préférant suivre les consignes paternelles et ne pas se mésallier. Mais jamais il ne l’abandonnera et lui prêtera l’argent nécessaire pour acheter son premier atelier du 21, rue Cambon, puis sa boutique à Deauville où elle vend des chapeaux, découvre le jersey et commence à « exploser », aidée de sa soeur, ses nièces pour modèles. En trois ans, elle remboursera Boy.



S’ensuivront les années folles, les rencontres marquantes avec le poète Reverdy (encore un amour qui finira platonique et épistolaire), Jean Cocteau, Diaghilev, Stravinsky, Colette, Picasso et sa chère amie Misia Sert qui lui sera fidèle jusqu’à la mort. Car elle s’est sentie trahie plus d’une fois, la petite Gabrielle et la grande Chanel, abandonnée, humiliée. Mais à chaque fois, elle a opté pour transformer ces humiliations en or, celui qu’elle avait dans ses doigts sans cesse en mouvement. L’âge d’or durera jusqu’à la guerre 1940-45 où là, erreur ! Elle ferme sa boutique de la rue Cambon, licencie tous ses employés et s’installe au Ritz. Elle aurait joué un rôle dans l’Opération Modelhut, initiée par Churchill et De Gaulle, s’improvisant en Mata-Hari trompe-la-mort ! Mais elle va avoir une relation plus que douteuse avec un officier allemand, Hans Gunter Von D.. A la Libération, décrédibilisée, elle s’exilera en Suisse jusqu’en 1953. Morte Chanel ? Que nenni. Tel un phénix qui renaît de ses cendres, elle rouvre le 21 rue Cambon et dirige son empire de main de maître. Sans jamais entrer en Bourse, gardant peut-être de ses origines paysannes le concept que l’or se garde sous les matelas… L’Amérique qui l’a déjà consacrée dès 1929 en la faisant venir pour habiller Marlène Dietrich ou Greta Garbo dans différents films se précipite à nouveau dans ses boutiques et ses petits tailleurs portés par Jackie Kennedy ou le N°5 par Marilyn Monroe la consacreront définitivement.



Certes, elle a payé cette réussite, elle est toujours restée cette « irrégulière » qui n’aimait pas les autres femmes dont elle était jalouse mais les a libérées de leur corset. Coléreuse, excessive mais généreuse, elle jouait souvent les mécènes auprès d’artistes, refusant que son nom soit cité. Féministe avant l’heure et surtout malgré elle, habituée à la discipline, à l’exigence dès son plus jeune âge, elle ne faillira pas en grandissant, puis en vieillissant. Elle s’éteindra seule, dans une chambre du Ritz où elle vivait depuis trente ans, un dimanche de 1971 à presque 90 ans…



Le regard distancié de l’auteure qui traque ses qualités et ses failles lève le voile sur ce mystère qu’elle a entretenu sa vie durant pour cacher ses origines. Ce livre se lit agréablement et j’avoue en avoir appris autant sur Chanel que sur les différentes époques du siècle dernier. Et malgré quelques « longueurs », nous passons outre et nous laissons vite embarquer dans cette histoire où la réalité dépasse souvent la fiction.




Lien : http://leslecturesdasphodele..
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Oublier Palerme

Oublier Palerme, la Sicile.... Est-ce que les protagonistes de ce roman chorale- écrit en 1966 par Edmonde Charles Roux, ancienne résistante, journaliste et amoureuse de l'univers méditerranéen- y parviendront ?

Dans une langue assez classique, précise, l'écrivaine narre l'histoire d'une émigration de femmes et d'hommes arrachés à une île sensuelle, antique, archaïque, violente, injuste, pour la ville de New York City.

S'entrecroisent les destins d'une famille aristocrate, bousculée par la culture sicilienne et par l'histoire dramatique de la Sicile aux XIXe et XXe siècles, et ceux de pauvres chassés par la misère, l'injustice, la guerre ...

Et l'amour passionné, cruel, sensuel s'en mêle....

L'écrivaine réussit à nous faire plonger dans la psyche agressive, entreprenante et superficielle du milieu médiatique des années 60 new yorkais, en alternance avec les descriptions d'une Sicile sensuelle, odorante, violentée par la nature et les hommes.



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Oublier Palerme

Je n'ai pas particulièrement aimé
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Un désir d'Orient : Jeunesse d'Isabelle Eberh..

Une biographie sur le personnage d'Isabelle Eberhardt, ce premier volume m'intéressa d'autant plus qu'il est fort bien documenté sur sa vie à Genève au moment de la diaspora russe du début du XXème siècle.
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Isabelle du désert - Un Désir d'Orient

Souvent, lorsqu’on se penche sur l’histoire des Français en Afrique du Nord, monte un regret : faut-il que l’humanité soit lente à évoluer pour que tant d’erreurs aient pu être accumulées sur de si beaux espoirs ! Mais parfois, telle une comète dans un ciel d’encre, fuse un destin si lumineux qu’il semble tout racheter. Ainsi l’existence fulgurante d’Isabelle Eberhardt, racontée par Edmonde Charles-Roux dans cette biographie remarquable. Laissez-vous emporter du monde des étudiants russes en révolte contre les tsars parmi lesquels la mère d’Isabelle jusqu’aux sables du désert saharien, où la jeune femme exaltée et mystique (née dans une Suisse qui ne pouvait la contenir) allait finir par trouver grâce notamment à Lyautey, qui la comprenait en tout ce qu’elle cherchait depuis toujours : l’amour fou et absolu, en la personne d’un sous-officier arabe qui avait passionnément choisi de devenir français, et pour qui Isabelle opta définitivement pour l’islam avant de finir emportée par un oued en crue, à l’âge de 27 ans
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Un désir d'Orient : Jeunesse d'Isabelle Eberh..

Quel destin singulier que celui d'Isabelle Eberhardt ! Cette biographie, si minutieusement documentée par l'auteur, truffée d'anecdotes et de références souvent puisées dans les rapports de police de l'époque se lit comme un veritable roman !! Il faut dire que les personnages qui jalonnent ce récit ont des caractères hors du commun et une nature profondément romanesque...On y croise un précepteur russe, le père d'Isabelle, féru de culture littéraire et de connaissances linguistiques, la mère, issue de l'aristocratie russe, et les frères d'Isabelle, extravagants aux fugues à répétition, déjà attirés par l'Orient, qui fascinera et aspirera littéralement Isabelle Eberhardt au point d'en faire sa nouvelle patrie.

Ce recit nous replonge au tournant du XXe, et nous donne envie d'en savoir plus sur cette véritable héroïne que fut cette jeune femme écrivain voyageur, si libre et avant-gardiste !!





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Énigme [42]

Pourquoi fait-on des blagues le 1er avril ? De nombreux historiens en font remonter l'origine au XVIe siècle. À l’époque, le calendrier n’était pas le même en fonction de la région, mais en 1564, le roi Charles IX décide que l’année débutera au 1er janvier. Dans le pays, la nouvelle se répand lentement. Certains habitants continuent alors à offrir des cadeaux (souvent des poissons) le 1er avril, pour fêter l'année. Pour se moquer de leur erreur, on prit l'habitude d'offrir de faux poissons ...

explication plausible, mais d'autres sont possibles !
Pfff ! arrêtez de raconter n'importe quoi !

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