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Critiques de Edward Carey (241)
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Petite

Rien à cirer !

Une formule mal venue pour la petite Marie Grosholz, future madame Tussaud. Et oui, c’est elle qui est à l'origine du musée de cire à Londres, cette attraction touristique que je trouve bien ringarde et qui permet au commun des mortels de se prendre en photo devant des répliques de célébrités, dont le regard est parfois plus vif que celui du modèle.

Edward Carey, passionné par le personnage, a mis près de 15 ans à écrire cette biographie romancée, et il est est vrai que sans être passionné par le monde de la bougie, j’ai trouvé le destin de cette femme aussi exceptionnel que passionnant.

Née en 1761, la petite Marie (m’entends-tu Francis ?) grandit façon Cosette mais profite de l’apprentissage de Curtius, un sculpteur sur cire pas très loquace qui la recueille. Après avoir reproduit dans l’anonymat des organes pour les médecins à court de produits frais (Picard n’existait pas à l’époque), Paris va offrir la célébrité au duo. Il est de bon ton d’avoir son masque de cire parmi les notables, si possible de son vivant. L’équivalent à l’époque du Cayenne, du Chihuahua, de la lampe design Pipistrello (palmier qui pousse de façon endémique dans tous les salons) et des enfants aux prénoms de vieux.

Bien que maltraitée par un clone de la Thénardier, Marie va croiser et tirer le portrait de Voltaire, Rousseau, Franklin sans mesurer l’immensité des personnages, ne voyant en eux que des modèles aux physiques plus ou moins disgracieux.

Comme le public a davantage le goût du sang que de celui l’histoire ou de la philosophie, la reproduction d’assassins dont les visages sont moulés avant ou après exécutions vont faire la fortune de la petite entreprise.

Prise d’affection par une petite sœur du roi qui lui trouve un visage encore plus ingrat que le sien, Marie se retrouve à Versailles pour dormir dans un placard et partager sa science.

Vînt ensuite la Révolution et son lot de têtes à couper et à immortaliser. Marie réalisera les masques mortuaires du Sire dans la cire, alias Louis XVI, de Marat dans son bain sans son canard jaune et celui de Robespierre, incorruptible qui fit de sa mort un dernier salut public.

Malgré les dénégations d’Edward Carey, l’histoire est un peu trop belle pour être vraie, mais la lecture est plaisante et les illustrations de l’auteur qui imagent le récit aère sa noirceur.

Si j’ai un vrai reproche à faire à ce pavé de 565 pages, c’est la fadeur de la prose. A vouloir émouvoir un public de 7 à 77 ans (expression je sais à bannir car jugée discriminante par nos congénères des maternelles et des maisons de retraite, dont les meneurs appellent au boycott des jeux de société, à changer le titre « Jeux Interdits » et à des manifs contre cette inégalité qui les privent de cette liberté fondamentale de tricher au scrabble), le roman a le goût d’un steak à point qui aurait mérité d’être dégusté saignant. Trop gentillet donc à mon goût mais sans être une pépite, « Petite » mérite quand même qu’on lui cire les pompes.

Et Grévin, me direz-vous ? Et bien pas une ligne sur ce pauvre Alfred. Pas davantage sur la poupée de cire poupée de son… Il reste des histoires à raconter.

Je souffle sur la bougie.

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Petite

La biographie romancée de Madame Tussaud nous révèle le destin extraordinaire de ce petit bout de femme.



Une femme que le destin n'a pas épargné, sans oublier que cette femme vécu a Paris lors de la révolution française.



Un roman qui se lit très bien, malgré quelques passages un peu longues.

J'ai trouvé l'atmosphère du roman assez étrange, un peu atypique également, mais qui correspond parfaitement à l'histoire de Petite.



L'auteur est sans concession avec ses personnages, on a parfois envie d'en frapper certains, les insulter, ou encore de les secouer.. enfin moi c'est ce que j'ai ressenti.



Une très belle découverte que ce roman, qui attire l'oeil déjà grâce a sa couverture. et qui réjouit le lecteur quand a son contenu
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L'observatoire

Je vais vous parler de mon expérience de lecture de L'observatoire.

Très tentée par les retours de quelques babelamis, je me suis décidée à découvrir cet auteur.

J'avais déjà Petite dans mon pense-nouille, donc pourquoi pas...

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Le narrateur, 37 ans, vivant chez ses parents, gardien de son musée personnel qu'on pourrait qualifier de très spécial, ne quitte jamais ses gants blancs.

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Il vit dans un gigantesque manoir ayant appartenu à ses aïeux, en pleine campagne, jusqu'à ce que la ville envahisse les terrains alentour.

Le manoir ayant déjà perdu en splendeur et en taille, le bâtiment restant a été divisé en appartements, dont seuls sept sont occupés.

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Les résidents sont tous plus que loufoques, et l'auteur les décrit parfaitement.

Je vous laisse découvrir les détails.

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Ma lecture ne fut pas mauvaise, mais d'une lenteur... du sur place.

Je me suis ennuyée, n'arrivant à m'intéresser ni à l'histoire ni aux personnages.

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J'en suis désolée, et si j'ai pu comprendre l'emballement de mes amies, je n'ai pas réussi à accrocher.

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Ce livre n'est pas mauvais, n'hésitez pas à le lire, il n'est juste pas fait pour moi et je suis passée à côté.

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Je tenterai quand même Petite, qui me semble différent.

Si quelqu'un peut confirmer et m'éviter une nouvelle déconvenue, je lui en serais reconnaissante.

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Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

En attaquant cette trilogie, je m'attendais à une lecture décalée et plutôt originale et je n'ai pas été déçu.

Pour parler de l'atmosphère, il y a du Tim Burton ou encore un peu de "Famille Addams" dans ce récit, c'est gris et "so British" avec un humour un peu grinçant que j'apprécie beaucoup, c'est une histoire dont on peut dire d'une certaine façon qu'elle est en noir et blanc, oui côté ambiance c'est plutôt réussi.

Les Ferrayor ont le monopole des détritus de la ville de Londres et de ses environs et il s'agit d'une dynastie autoritaire et impitoyable, on naît et l'on meurt ferrayor.

Chaque enfant reçoit à sa naissance un objet dont il ne devra jamais se séparer et devra obéir aux rituels de sa famille dont celui du passage à l'âge adulte.

L'auteur nous propose un univers fantasmagorique et résolument fantastique assez original et passionnant à découvrir car très cohérent.

Ajoutons une intrigue subtilement amenée ainsi qu'un lourd secret jalousement gardé et nous avons là une histoire à laquelle on n'a aucun mal à s'intéresser, pour ma part je suis convaincu ;)

A noter également une superbe illustration pour chaque chapitre, ce qui est un vrai plus pour se transporter dans le récit.
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L'observatoire

La littérature est un éternel apprentissage : des lettres, de la vie et, plus intéressant encore, des autres et de soi-même. Au gré de différents récits, nous repoussons nos limites jusqu'à lire des choses que nous n'aurions pas pensé aimer. Il y a quelques années par exemple, en lisant que ce roman « ne ressemblait à rien de connu, brouillant magiquement les frontières entre rêve et cauchemar, imagination et maladie, réalisme et fantastique », j'aurais fui. Mais le chemin littéraire parcouru m'a pourtant permis aujourd'hui de m'émerveiller à la lecture de cette curiosité, dont les analyses seront aussi riches et variées que les lecteurs !





Le scénario de départ fait penser à Gormenghast : On accueille un nouvel individu au sein d'un microcosme réglé par sa routine et ses usages, et on observe comment la bulle éclate. le premier personnage de cette histoire est celui du titre : l'Observatoire qui abrite tous les autres « caractères ». Ce bâtiment a subi les affres du temps au gré des époques qu'il a vécues : D'abord manoir du domaine de la famille Orme, entouré d'un parc immense à la campagne, il devient après rénovation par la génération suivante le Manoir de l'observatoire, tandis que la ville tentaculaire se rapproche de son parc ; puis, lorsque l'étau des tentacules urbaines s'est resserré jusqu'à faire de ce curieux bâtiment un simple rond point en périphérie, le désormais nommé l'Observatoire devient un immeuble aménagé en une vingtaine d'appartements par la génération suivante, la dernière. Elle est représentée par Francis Orme, un personnage très particulier dont le portrait ressemble à l'architecture de ce dôme d'observatoire où il vit.





Enfin vivre est bien grand mot quand il se contente d'exister, comme dans un musée, sans toucher à rien, ni influer sur l'histoire, enfermant ses mains dans des gants immaculés chaque seconde que Dieu fait pour n'être pas touché, ni rien tâcher, ne pas s'attacher, lui-même isolé dans son « immobilité intérieure » qui n'est rien d'autre que l'immobilité qu'il souhaite à l'extérieur, autour de lui, pour le restant de sa vie : Que les choses arrêtent de changer sans cesse, de le bousculer, de lui demander de s'adapter, que les gens arrêtent de mourir, les villes de s'étendre, les manoirs de disparaître avec les souvenirs de famille, et les gens de faire battre son coeur. Comme une pendule, le sien s'est arrêté il y a bien longtemps, et personne n'arrive à le remonter, tout comme il ne peut remonter le temps lui-même. On se rend compte que l'observatoire est l'exacte mise en abîme du développement de la ville sur les habitants : On vit très proches les uns des autres mais sans vouloir se connaître, car il est trop risqué de s'impliquer. Et l'on compense ce manque d'affection par l'entassement d'objets que l'on fétichise, souvent jusqu'à l'excès, jusqu'à être envahi d'une masse d'objets inutiles qui nous cachent, nous protègent, puis s'entassent et nous étouffent : déchets, collection, musée… A notre ère d'inflation de la photo numérique, on peut y voir un parallèle avec ces gens qui cherchent à fixer chaque instant par des photos qu'ils accumulent de façon compulsive. L'auteur insère d'ailleurs un tel personnage dans sa galerie. Francis quant à lui travaille dans un musée où tout est figé, immobile, où les gens ne changent jamais car ils sont en cire. Il possède au surplus une étrange collection qui nous intriguera durant de nombreuses pages… Tout l'enjeu de cette lecture sera de comprendre ce qu'elle représente : Que cache jalousement Francis dans la cave poussiéreuse de ce manoir en décrépitude ?







« Chéris l'objet et ignore la femme, cela t'épargnera la douleur que produit tout contact humain. Ainsi tu possèderas l'objet d'amour sans supporter les tracas et les tourments de l'amour. »





Peut-on et doit-on se protéger de tout sentiment pour ne jamais souffrir ? Que sommes-nous sans les objets : plus profonds ou plus rien ? Comment Francis en est arrivé là ? Se demande le lecteur, car on lui dépeint un portrait à la limite du réaliste, du cauchemar voire, n'ayons pas peur des mots, de l'absurde. Nous n'aurions jamais eu la réponse à cette question si une nouvelle locataire n'était pas arrivée, véritable révélateur thérapeutique qui, en chamboulant les habitudes de chacun, va provoquer les réactions inattendues de tous… Et faire resurgir des souvenirs, éclairant le présent à la lumière du passé. Par le récit croisé des souvenirs des principaux protagonistes, entrecoupés du récit du présent qui en découle, nous reconstituons cette drôle d'histoire à laquelle, finalement, nous trouverons un sens, le nôtre : Celui que chaque lecteur apporte à chacune de ses lectures grâce à son bagage personnel. Dans cet observatoire à double sens, dont la construction de l'architecte CAREY offre une parfaite mise en abîme, on scrute à la loupe ces événements et réactions humaines en chaine qui parfois nous enchainent. Jusqu'à ce que tout s'écroule, toutes nos belles constructions mentales protectrices, nos barrières artificielles, ces murs qui nous enserrent. Lieux, objets, gens : on va tous mourir un jour, alors en attendant, même si l'on ne peut pas tout contrôler, autant vivre, non ?





« Je suis vivante ! Je ne veux pas être morte. Ne restez pas assis immobiles comme cela. Bougez s'il vous plaît. Montrez-moi que vous êtes humains ! Pourquoi restez-vous assis sans rien faire ? »





Un page-turner étrange mais addictif !
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Petite

Après avoir dévoré les 3 tomes des Ferrailleurs, j'ai décidé de partir à la rencontre de Petite, intriguée par ce changement de cap d'Edward CAREY. Les Ferrailleurs sont plutôt dans l'esprit Stream punk et famille Adams. Je voyais mal comment un tel style pouvait s'adapter au récit de la vie de Madame Tussaud, célèbre artiste française qui fonda le musée de cire à Londres.

Et bien c'est étonnant, surprenant, décalé et addictif !



J'ai retrouvé cette ambiance inimitable de conte gothique qui est à la fois terriblement séduisante et pleine de surprises. J'ai retrouvé ce rapport aux lieux qui sont de véritables êtres vivants modelés par leurs habitants et pétris du vécu de générations entières. de vielles bicoques, des grandes baraques, des palais, des bâtisses, grandes, petites, sales, étroites, spacieuses, grinçantes, mordantes, vivantes ! Des personnages à part entière de même que les objets doués d'influence, d'un caractère propre, d'une âme. « J'ai étudié la pièce, située au rez-de-chaussée, pleine d'objets coûteux, précieux et courroucés. Jamais je n'aurais cru inspirer le reproche à une pendulette ; je n'aurai pas imaginé non plus qu'un candélabre répugnât à m'éclairer. Je n'avais jamais foulé un tapis que ma présence gênait, ni essuyé l'animosité d'un manteau de cheminée. Et ce tabouret de pied doré, là… ses grosses pattes semblaient vouloir mordre mes chevilles. »



J'ai retrouvé aussi cette capacité à extraire la beauté de tout ce qui ne semble au premier abord n'être rien d'autre que laideur et désespoir. Partout en toutes circonstances il y a de petits bonheurs que peu de personnes savent trouver. Petite est de celles-là. C'est une battante. Malmenée par la vie depuis sa naissance, affublée d'un physique ingrat, elle n'a pas une once de rancoeur et fait preuve d'une capacité à s'adapter et à aimer qui semble être illimitée.

Petite aime sans réserve et particulièrement les êtres que rien ne prédisposent à être aimés. Elle est entière, loyale, d'une patience et d'une naïveté peu communes. Pourtant elle évolue dans un monde d'apparence, de carcan et de conventions. Elle côtoie Versailles et son roi en sursis mais surtout Elisabeth... Un monde en plein bouleversement. le peuple gronde, la révolution française se profile, éclate, et Paris devient un lieu de terreur où Robespierre et Marat officient.



Pourtant les amoureux de roman historiques risquent d'être décontenancés par les grandes libertés prises par l'auteur. Si les faits historiques sont justes dans les grandes lignes, tout est dans les détails et les zones d'ombres. Par exemple, si Mercier a bien existé et écrit l'An 2440 je doute qu'il ait eu la relation qu'on lui prête avec …ses chaussures. Pourtant c'est tout un symbole et cela dévoile une certaine vérité sur ce personnage, tout est dans l'interprétation. Tout comme je ne pense pas que les barons de Bavière suspendaient réellement leurs domestiques sur des porte-manteaux ou que George III de Bretagne entassait les siens dans une commode. Pourtant la symbolique est là et elle en dit long « … la duchesse De Blois aurait hébergé, pendant quarante ans, sa servante bien-aimée dans un cabinet de toilette. »



Autre chose dont Edward CAREY parle avec justesse de cette passion dévorante pour la cire ; pour cette matière qui ne ment pas, ne triche pas, cette matière vivante. Et quand il n'y a pas de cire que la passion devient frustration, il y a les dessins, les croquis, qui parsèment les pages de Petite.



Evidemment il y a aussi la vie de tous les jours avec Curtius, son maître d'apprentissage, la veuve Picot (bouuuuu elle est méchante !), Edmond, Jacques Beauvisage, et tous les autres. Et puis il y a Versailles, les assassins, les âmes perdues, les révolutionnaires, la guillotine, Napoléon,… une galerie de personnages incroyables dont les plus savoureux sont les illustres inconnus selon moi. Des personnages qui offrent une réflexion sur la nature humaine, l'humanité et ses dérives, l'amour ; oui oui il y a même des histoires d'amour et je n'ai pas fui en courant ! Et tout ça sans se prendre au sérieux ! Quelle aventure.



J'avoue aussi que j'ai craqué pour l'écriture d'Edward CAREY qui a un petit côté vieillot et classe à la fois. C'est une écriture avec un rythme particulier et très poétique qui entraine le lecteur dans un ailleurs dont seul Edward Carey semble détenir les clefs.

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Petite

"Petite" , la biographie romancée de Madame Tussaud est écrite et illustrée par Edward Carey qui avoue en fin de livre avoir mis 15 ans pour l'écrire tout en prenant quelques libertés car il a manqué de documents écrits, les faits étant assez éloignés. Son imagination, son style d'écriture et ses illustrations ont fait le reste.

"Petite" est née Anne-Marie Grosholtz dans un village d'Alsace.

Marie est orpheline de père, sa mère devient la servante du docteur Curtius à Berne. Celui-ci modèle des pièces d'anatomie du corps humains en cire, d'après des vrais déchets humains.

Bientôt orpheline de mère également, Marie reste au service du docteur. Ruiné, il décide de partir à Paris emmenant Marie avec lui. Très observatrice, pas du tout effrayée par son travail, elle l'aide.

À Paris, ils vont continuer ce qu'ils avaient commencé : sculpter et modeler des têtes. Ils font la connaissance de personnages très célèbres dans le contexte historique très mouvementé de l'avant et après révolution.

Marie, la narratrice du début à la fin raconte les évènements sur un ton noir, surprenant comme si elle survolait ou dépassait les faits tout en les observant à fond.

À travers la plume de l'auteur, l'ambiance de Paris , boueuse, puante est décrite à merveille. le début de la vie de Marie ne manque pas de détails réalistes. Ce n'est pas de l'humour noir mais c'est tellement décrit de manière forte que les mots y font penser. Je prends ces deux moments au hasard car tout le livre est raconté sur ce ton. Très étonnant. du jamais lu pour moi.

Le récit est présenté en sept parties appelées livres s'étalant sur toute la vie de Marie devenue Madame Tussaud par le mariage . Elles portent chacune un titre chargé de mystère. La 8ème partie se passe à Londres où Marie a ouvert son célèbre musée. Elle a 89 ans et s'apprête à quitter ce monde.



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Les Ferrailleurs, tome 2 : Le faubourg

Un deuxième tome dans la continuité du premier, toujours cette ambiance grise et décalée qui est propre à cet univers que l'auteur a su créer.

Cela dit cela démarre de façon assez poussive, nous allons voir que les objets, incontournables dans ce récit ont un peu plus qu'une âme, la mise en place de ce deuxième tome, consacrée à cet aspect va être un peu longue mais pourtant justifiée.

Il y a une vraie trame dans cette histoire, une réelle cohérence qui suscite un intérêt évident, on ne souhaite qu'une chose, c'est percer ce mystère et savoir.

De la belle littérature fantastique à mon goût, dans une ambiance victorienne que j'apprécie beaucoup !

A signaler les illustrations, encore plus nombreuses que dans le premier tome, un vrai plus ;)

Je passe au tome trois avec une bonne dose de confiance ;)
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L'observatoire

Attention les amis, pénétrer dans L’observatoire n’est pas une mince affaire. Vous ne serez pas bien accueilli parce que ses habitants ne sont pas des gens sociables. Ils ont d’autres préoccupations. Dévoués corps et âmes à leurs souffrances ils n’ont pas de place pour une vraie vie alors pour un nouvel habitant encore moins.

Chez Edward CAREY on ne fait pas dans les relations sociales cordiales et polies. On fait dans la vérité crue jusqu’à l’os. Celle qui dérange et qui démange. Une vérité urticante !

Ses personnages sont pétris de souffrances, en dehors du monde, en dehors du temps et pourtant ils ont quelque chose de tellement représentatifs des dérives de notre monde.



L’observatoire c’est un huis clos. Le personnage central est Francis ORME. Un drôle de bonhomme égocentrique qui porte tout le temps des gants blancs qui a la lèvre inférieure enflée et qui collectionne. Quoi ? L’amour. Des objets aimés. Il entasse dans uns quête effrénée d’amour tout en repoussant continuellement les autres au nom de la sacro sainte solitude. Il l’aime cette solitude. Du moins il en est persuadé. Elle a quelque chose de rassurant. Tout comme il aime son travail qui consiste à se transformer en statut inanimée.

Francis vit avec ses parents eux aussi sont des objets vivants. Ils respirent, c’est comme ça qu’on sait que ce ne sont pas des objet. Mais pour le reste, le doute est permis.



Mais Francis n’est pas le seul pensionnaire de L’observatoire il y a Peter BUGG qui n’est que tristesse, amertume, remords et regrets ; Le Portier qui chuinte à longueur de journées, La femme chien alias numéro 20, qui n’est plus vraiment elle même et Claire HIGG qui vit sa vie par procuration devant son poste de télévision (merci JJG je n’aurai pas pu trouver plus parlant). Tout ce petit monde habite L’observatoire et attend que le temps passe en évitant soigneusement de vivre jusqu’à ce qu’une petite nouvelle fasse son apparition : Anna TAP. De la nouveauté ! Quelle horreur et en plus elle essaie de communiquer et de sociabiliser ! Le diable en personne.



Francis aura beau essayer par tous les moyens de la faire fuir, c’est trop tard le ver est dans le fruit et Anna a ouvert la boîte de Pandore ou plutôt devrais-je dire la malle aux souvenirs. Le lecteur découvre alors le passé des personnages et leur présent prend une autre dimension. Tout le monde s’y met mais les souvenirs sont dangereux ils vous rappellent que vous avez une vie et que la vivre est possible. L’immobilisme est tellement plus confortable. Faire comme la tortue : rentrer dans sa carapace et attendre patiemment que la vie passe. Attendre en dehors du monde. En dehors du temps. Peu à peu les secrets se dévoilent et les vies se croisent. De lourds secrets, des actes manqués, des doutes, des vies suspendues, et beaucoup de souffrances.



Mais L’observatoire ce n’est pas que des personnages c’est surtout une ambiance. On la sent, elle vibre sous les mots. C’est une ambiance gothique, comme un vieux conte trouvé dans un grimoire. Il y a quelque chose de mélancolique. C’est une tristesse douce amère qui se répand au fil des pages. Un univers à la Tim BURTON, à la Lewis CAROLL. Il y a une cruauté enfantine dans ces lignes mais aussi un désenchantement que seul l’age adulte apporte. C’est farfelu, décalé sans être absurde. Edward CAREY en parfait funambule des mots propose un dosage parfait qui rend ses livres si uniques.



En lisant L’observatoire je me suis rendu compte que tout était déjà là : le rapport particulier aux objets que l’on retrouve dans la trilogie des Ferrailleurs, l’immobilité, la cire, et la connaissance du corps humain que l’on retrouve dans Petite… Il y a une cohérence et un univers que l’on retrouve dans chacun de ses livres. Sans oublier l’écriture émouvante et sobre qui là encore a gardé quelque chose de l’enfance. Une trace d’innocence et de vérité.



Une lecture suspendue, hors du temps, qui fait du bien.
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Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Peut-on se définir par un objet ? C'est une question intéressante pour des citoyens d'une société de consommation, qui entassent toujours plus d'objets inutiles en en achetant de nouveaux, persuadés que ceux-ci les représenteront mieux que les précédents, vous ne trouvez pas ? Entasser, c'est précisément ce qui se produit chez ces ferrailleurs anglais du 19ème siècle : Leur royaume est une décharge à ciel ouvert, leur métier, de génération en génération : trier. Leur demeure : un château fait de bout de bâtisses londoniennes récupérées, déplacées et réassemblées en patchwork.





Les objets et ce qu'ils représentent pour l'Homme, aussi bien que notre manie de les thésauriser, sont des sujets qui semblent tenir à coeur à cet auteur : Dans son premier roman l'Observatoire, il explorait déjà cette thématique, ainsi que celle de la solitude et du rapport à l'autre. Au fond, les objets peuvent-ils combler cette solitude ? Est-ce le rôle que nous leur prêtons, ou l'un des rôles, ajouté à la représentation, comme un totem ? Un nouveau sac à main qui représente mieux mes goûts actuels, de nouvelles fringues qui me mettent plus en valeur, des tas de livres que je n'aurais jamais le temps de lire, et tout ce petit monde qui vient habiter mon univers, masquer ma solitude, occuper mon espace vital et mes pensées… Privilégier les objets aux humains est un mal contagieux, de nos jours. On ne devrait jamais laisser les objets prendre le dessus sur nous… Au final, ils seront peut-être tout ce qu'il reste de nous, mais même eux peuvent se briser et disparaître.





Si je devais chercher au fond de mon coeur l'objet qui parle le plus de moi, ce serait je crois une luciole, que le père noël avait accroché au sapin quand j'étais toute petite et qui m'a suivie toutes ces années : machouillée, recollée, perdue, retrouvée, mais jamais oubliée, comme les souvenirs qui s'y accrochent. Et puis cette lumière qui vous tient compagnie et vous éclaire aux moments les plus sombres : quel symbole ! Si elle pouvait parler, elle raconterait certainement quelques secrets. Elle nous dévoilerait peut-être son petit nom, elle aussi, si nous pouvions l'entendre. Ce qui est impossible n'est-ce pas, parce les objets, ça ne parle pas… Si ? Ah, vous aussi vous les entendez chuchoter à leur passage, murmurer à vos oreilles qui possèdent encore la conscience pure des enfants ! Vous me rassurez, je croyais que j'étais folle.





Vous êtes donc comme Clod Ferrayor : A lui aussi les objets lui parlent. Particulièrement les objets de naissance. Vous savez, cet objet qu'un proche vous offre à votre venue au monde, et qui vous suivra toute votre vie, vous représentera aux yeux des autres : un arrosoir, une pince à épiler, un napperon, une poignée de porte, un robinet, ou encore une bonde universelle… La bonde de Clod s'appelle James Henry. Mais Clod connaît aussi les noms de tous les objets de naissance des gens qui l'entourent, puisqu'ils les entend se nommer à tout bout de champ. Un don rare et perturbant, qui sera mis à contribution lorsque Alice Higgs, la poignée de porte de la tante Rosamund, disparaîtra : Il est indispensable de la retrouver rapidement car, sans son objet de naissance, un Ferrayor n'est plus rien et dépérit ! C'est la règle : on ne se sépare jamais de son objet de naissance. Pourquoi ? A vous de le découvrir ! Des objets comme des talismans, à qui l'on pourrait aller jusqu'à prêter une âme… Alors quand des objets et des personnes commencent à disparaître dans le château, c'est le début d'une chasse au trésor géante… et dangereuse !





Dès les premières pages, on se laisse prendre au piège de cette ambiance steampunk très réussie, et de cet univers original et inventif à souhait à la Alice au pays des merveilles. Les pages se tournent toutes seules, au rythme des portraits de chaque personnages qui nous sont physiquement dessinés au crayon, avant de nous être mentalement brossés par les mots. L'histoire nous est racontée tour à tour par Clod Ferrayor puis par Lucy Pennant, la nouvelle servante un peu rebelle qui refuse de perdre son identité en se fondant dans la masse des domestiques et, pour ça, cherche un objet à s'approprier et auquel se rattacher - quitte à le voler, ce qui la mettra en fâcheuse posture. J'ai été émerveillée ou plutôt admirative de cet univers original. Mon bémol, c'est peut-être qu'à vouloir instaurer la solitude et le formatage, j'ai lu l'histoire à petite distance de mes personnages au début, avant de m'y attacher au fil des pages. Ajoutez à cela un enfermement total du début à la fin dans une demeure gémissante croulant sous des tonnes étouffantes d'objets divers et bruyants : Autant vous dire que les claustrophobes peineront peut-être à avancer dans cette histoire, tant l'enfermement de ce huis clos se resserre de plus en plus jusqu'à la fin : on est enfermés dans ce château, par tradition mais aussi à cause d'une tempête d'objets, qui nous ensevelissent de plus en plus jusqu'à ne plus pouvoir ouvrir les fenêtres ni bientôt respirer… ! Etant moi-même condamnée à l'enfermement en ce moment, j'avais hâte de sortir de cette maison de fous ! Aussi, je ne sais pas si je poursuivrai avec les deux tomes suivants mais j'ai apprécié la découverte (merci Yaena !).





Et vous, chers babélionautes, quel est cet objet de naissance qui vous caractérise, et que j'entends déjà murmurer à mon oreille...? Approchez, là, encore plus près, que je saisisse son petit nom…
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Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

« Objets inanimés, avez-vous donc une âme qui s'attache à notre âme et la force d'aimer ? »

Non, je ne vais pas ce soir vous déclamer du Alphonse de Lamartine, mais plutôt du Edward Carey.

Approchez, venez, entrez chers amis, que je vous fasse visiter le lieu.

Ici c'est bien un château, le château des Ferrailleurs.

Il sera dit qu'un dieu facétieux m'aura jeté un sort, celui d'être condamné à passer de maison en maison durant mes lectures estivales, ce qui sera d'ailleurs le cas aussi pour la toute prochaine à venir...

Nous voici aux confins de Londres, en plein XIXème siècle. Sur un océan formé par tous les immondices de la capitale jaillit non pas une île, mais un château, la demeure des Ferrayor. Oui c'est le nom de cette terrible dynastie qui règne en maître depuis des générations sur un superbe dépotoir et qui n'a rien à envier à la famille Adams.

Sur cet océan de gravas et de rebuts, il est difficile voire impossible de pousser une barque. Alors il faut y aller presque en apnée.

On pourrait se demander, en contemplant ce dédale de détritus, où commencent les fondations de cette étrange demeure faite de bric et de broc, construite à partir de morceaux de maisons prélevées dans la capitale, assemblés selon une logique qui rendrait fou tout architecte digne de ce nom.

Autre caractéristique de cette famille : chaque Ferrayor, à la naissance, se voit attribuer un petit objet appelé l'objet de naissance, qui l'accompagnera partout et toujours.

Ainsi, voici surgir dans le texte une bonde universelle à chaînette, un robinet, une poignée de porte en cuivre, une pince coupante, une tasse repose-moustache, un sifflet en forme de groin, un chausse-pied en écaille de tortue... J'en oublie forcément.

Il y a les Ferrayor d'en haut, les maîtres et il y a les Ferrayor d'en bas, ceux qui servent les maîtres. Ici on ne mélange pas les robinets et les crachoirs en argent... Quand on entre dans cette maison, on devient Ferrayor...

Tout commence le jour où la poignée de porte appartenant à Tante Rosamud disparaît ; les murmures des objets se font de plus en plus insistants ; dehors, une terrible tempête menace ; et voici qu'une jeune orpheline se présente à la porte du Château… Elle s'appelle Lucy Pennant. Elle semble sortir tout droit d'un récit de Charles Dickens.

Et voici que Clod Ferrayor, quinze ans et demi, petit-fils de celui qui règne sur cette dynastie, va être ébloui, troublé par la présence de Lucie Pennant, cette jeune fille fragile et lucide, déterminée...

Pour son malheur et pour notre bonheur, Clod Ferrayor a reçu un don singulier : il est capable d'entendre parler les objets, qui ne cessent de répéter des noms mystérieux…

Plus rien ne sera comme avant...

Il est souffreteux, elle a les yeux verts, ils vont s'aimer. Ce sont eux qui vont nous lier à cette histoire, nous faire traverser la maison, traversant le récit, traversant notre coeur au passage, franchissant les zones qu'ils n'ont pas le droit de transgresser... Ces deux-là, on imagine que Shakespeare les aurait adorés, sorte de Roméo et Juliette de la ferraille, des décombres et du gothique.

Voici un conte fantasmagorique à la poésie baroque, mêlant délire fantastique et lucidité grinçante.

Au fil des pages, de nombreuses questions se posent sur ces mystérieux objets, qui ne sont peut-être pas si inanimés que l'on voudrait le croire, et leur lien avec les habitants des lieux.

J'ai posé mes bras, mes mains sur les murs de cette maison. Je l'ai étreinte. J'ai entendu sa respiration. Elle m'a secoué de ses convulsions. J'entendais les bruits métalliques et les cris des objets. J'entendais des voix remonter des ordures et de la puanteur. Je sentais ses odeurs. J'entendais les battements de coeur de Lucie Pennant, crasseuse, souilleuse, mais si lumineuse et la course des pas douloureux de Clod Ferrayor à sa recherche effrénée.

Il y a dans ce texte que j'ai adoré pour son enchantement quelque chose de cruel et de dérangeant, car on se dit qu'il y a un côté absurde et monstrueux de notre monde à la dérive qui ressemble peut-être à cela.

Et puis, objet parmi tous les objets, il y a ce livre, l'objet papier avec des dessins fabuleux réalisés par Edward Carey lui-même, ouvrant de manière magique et ténébreuse chaque chapitre.

Bon, je vous laisse, je suis à la recherche de ma tasse repose-moustache, pas question de trouver le sommeil sans avoir remis la main dessus...

Quoi ? On me dit qu'il y aurait deux autres volumes à lire, car c'est une trilogie ? Alors, j'y cours, j'y cours... Vite, mon chausse-pied en écaille de tortue...

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Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Entrez, entrez, gentils lecteurs.Venez visiter le château des ferrailleurs. Pénétrez dans son antre et découvrez ses pièces grinçantes, grouillantes. Écoutez le respirer, chuchoter, sentez son coeur qui palpite, mais prenez garde ! Restez discret car seuls les Ferrayor de sang peuvent en arpenter les couloirs. Je doute que vous en soyez ! Car dans ce château, amalgame de vieilles bâtisses, bric à brac de grandes demeures et de bicoques vivent les Ferrayor. Des résidents aux allures de Famille Adams pour qui l'ordre, la hiérarchie et l'hérédité sont essentiels. Ouvrez l'oeil, vous les repérerez facilement, ils sont toujours accompagnés de leur objet de naissance. Bonde à baignoire, robinet, crachoir de poche, chaussure esseulée…, non vous n'êtes pas dans une quincaillerie.



Ce château aux allures Victorienne trône au milieu d'un océan de de détritus, une gigantesque décharge : le trésor des Ferrayor. Drôles de gens n'est-ce pas ?En effet, peu sympathiques avec leur allure d'aristocrates des poubelles ils sont craints et respectés. Parfois au milieu des ordures se cache un trésor. Ici c'est Clod. Un jeune Ferrayor qui accompagné de son cousin Timmus dénote étrangement. Clod a un petit truc en plus. Sous ses airs d'oisillon gringalet se cache un petit gars déterminé. Alors quand sa route croise celle d'une orpheline rebelle l'ordre séculaire qui régnait entre les murs du château en prend un sacré coup dans l'aile !



Ces Roméo et Juliette à la sauce Tim Burton vont mettre leur nez partout et tenter de découvrir quels sombres secrets abritent la vieille demeure. Mais tout cela a un prix !



Edward CAREY dés les premiers mots entraîne le lecteur dans un univers sombre et fantasmagorique aux accents steampunk. Un conte ténébreux, parfois cruel qui happe le lecteur entre ses griffes et ne le lâche plus. Les dessins en noir et blanc sont un vrai plus qui renforce le sentiment d'immersion. Quand arrive la dernière ligne il n'y a pas d'autre choix que de se plonger dans le tome II. Mais attention cher lecteur c'est à vos risques et périls...
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Petite

Fin décembre 2021- Découverte à la Bibliothèque Buffon [Paris ]



Petit trésor jubilatoire et insolite à ne pas manquer !



Après mes heures studieuses de recherche à la Bibliothèque Buffon, je me réserve toujours un moment à fureter dans les rayonnages. Bien m'en a pris, car j'ai déniché cet ouvrage aussi vivant que singulier, qui m'a fait passer un moment captivant et fort instructif.



Etant aussi "fan" que l'auteur de ce personnage féminin, Madame Tussaud, dont j'ai découvert, toute jeune, le Musée de Cire , à Londres, bien avant de mettre les pieds au Musée Grévin... , j'ai été ravie de me plonger dans sa vie des plus tumultueuses, qui a épousé les soubresauts de l'Histoire, dont la période sanguinaire de la Révolution Française...



Tout en faisant la connaissance d'une existence hors du commun, j'ai révisé mon "Histoire de France", de manière fort distrayante, car entre le style très coloré de l'auteur , ses nombreux dessins, ne manquant pas non plus de malice et d'humour....je me suis "régalé" !!!



je rejoins totalement la phrase du critique,Nick Hornby : " -Petite- est le roman que Dickens aurait sans doute écrit s'il avait vu les films de Tim Burton" !!!



Née à Strasbourg en 1761, la jeune Marie Grosholz, future madame Tussaud, est employée dès son plus jeune âge comme apprentie par un sculpteur sur cire. Lorsque le duo devient célèbre à Paris pour ses réalisations, Marie a pour modèles les plus grandes personnalités de l'époque : Voltaire, Rousseau, Benjamin Franklin, etc.

Toutefois, avant d connaître la célébrité et la reconnaissance, l lui en faudra traverser, subir des épreuves, des humiliations, des maltraitances; principalement d'une veuve, devenue la compagne et l'associée de son maître-sculpteur, une cupide mégère possédant un sens redoutable des affaires !



Nous croisons tout le beau mond du XVIIIe siècle, les grands de cette société, politiques, gouvernants, révolutionnaires, artistes, philosophes ou écrivains dont le célèbre J.L. Mercier le célèbr auteur des "Tableaux de Paris"



Un véritable OVNI littéraire...qui nous immerge également dans L Histoire, comme dans l'histoire de l'Art, dont des descriptions tout à fait étonnantes touchant le travail délicat et complexe de la "Cire" :

"-Le plâtre ignore tout de la vie, lui dit-il. C'est une matière inerte, stérile, sur laquelle, contrairement aux plantes, la lumière n'a pas d'effet. Il s'en tient aux faits, il copie les pores, les rides, mais ne se préoccupe pas de la personnalité qu'ils incarnent. Une fois mêlé à l'eau, il forme une pâte qui provisoirement, produit de la chaleur, mais une chaleur dénuée de sentiment, de chair. Elle brûle, oui, mais c'est une brûlure vide de sens. C'est la cire qui apporte la chair, la cire qui donne la peau"(p.220)



Il est certain, qu'en plus des multiples détails sur la vie incroyable de cette femme de talent, je ne regarderai plus de la même manière un visage ou un moulage en cire, quel qu'il soit !...

Un livre captivant couvrant une période historique terrifiante, mais où le talent d'illustrateur comme l'ironie fréquente d'Edward Carey, nous fait souvent sourire et rire ! ...

Je trouve totalement "juste" cette comparaison et réunion, pour qualifier au plus près le travail singulier d'Edward Carey : Dickens et Tim Burton, réunis en un seul !!
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Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Après avoir lu « L'observatoire », c'est avec beaucoup d'empressement que j'ai retrouvé l'univers d'Edward Carey dans le premier tome de la trilogie des Ferrailleurs.

On y retrouve tous les ingrédients que j'ai pu apprécier dans « L'observatoire », à commencer par une imagination débordante, un monde original et excentrique, une ambiance gothique empreinte de magie, une écriture sombre et mélancolique, une famille décadente et des personnages bien marqués.



L'auteur nous immerge dans un monde qui rappelle Londres à l'époque Victorienne mais également un monde futur déprimant dans lequel nous serions noyés dans nos propres déchets. Cet anachronisme m'a particulièrement plu.



*

Le rôle principal a été donné aux objets usés, cassés, oubliés, abandonnés, perdus, jetés qui se sont accumulés au fil des décennies, formant des montagnes de déchets instables et dangereux qui affluent, débordent, se meuvent, ondulent, formant un océan d'immondices en mouvement.

La toile de fond que constitue Londres sous cette gigantesque décharge à perte de vue est saisissante. Elle nous amène à réfléchir aux conséquences environnementales de nos modes de consommation et de production et de notre culture du jetable.



Au milieu de ce paysage de grisaille formé de vagues de décombres, s'élève le château des Ferrayor, un ensemble architectural étrange et bizarre. Cette habitation labyrinthique est la demeure d'une famille qui s'est enrichie au fil des générations, grâce à la collecte des déchets de tout Londres : les Ferrailleurs.



« le répugnant et le malodorant, le brisé, le fêlé, le rouillé, l'usé, l'endommagé, le puant, le laid, le toxique et l'inutile, nous les aimions tous, avec quel amour nous les aimions ! Il n'est pas de plus grand amour que celui des Ferrayor pour les rebuts. Tout ce que nous possédons est grisâtre et terreux, poussiéreux et malodorant. Nous sommes les rois de la pourriture et de la moisissure. Je pense que nous les possédons, oui, vraiment. Nous sommes les nababs de la putréfaction. »



*

On découvre ce monde peu à peu, avec ses règles, ses interdits, ses mystères, ses secrets.



La particularité de chaque membre de la famille des Ferrailleurs, nous l'apprenons dès les premières lignes du roman, est qu'ils sont liés, dès leur naissance, à un objet dont ils ne doivent absolument pas être séparés. J'ai eu très vite, envie d'en savoir plus sur cette famille étrange, sur leurs objets de naissance qui parlent.



L'immense maison des Ferrailleurs est tenue par une armée de domestiques. Privés de leur nom de famille, leur mémoire et leurs souvenirs s'effacent peu à peu. Ils font partie de la maison et sont presque assimilés à des objets.



*

Le récit alterne deux voix narratives : celle de Clod, un jeune Ferrailleur, né avec le don rare d'entendre les voix des objets de naissance ; et celle de Lucy Pennant, une jeune orpheline du monde extérieur qui travaille au château depuis peu comme servante. L'arrivée de la jeune femme dans le château va coïncider avec la survenue d'étranges évènements qui vont bouleverser le monde de Clod.



Les deux histoires s'entrelacent, révélant dans une alternance, le monde du bas, celui des serviteurs, et le monde d'en haut, celui des maîtres. Leur rencontre va tout changer.



« Je t'ai donné une bonde, Clodius Ferrayor, ton objet de naissance, pour que, sang de mon sang, tu fasses un choix entre deux choses. Tu nous contiendras, telle une bonde, tu nous garderas en sécurité, tu seras une barrière entre nous et l'inquiétant trou d'évacuation. Ou bien, inversement, telle une bonde qu'on retire, tu nous laisseras tomber, nous écouler vers le rien, nous réduire à néant, nous noyer, nous épancher, dégoutter, ruisseler, tu nous détruiras tous ! »



*

J'ai été immédiatement happée par le monde qu'a créé Edward Carey, à la fois étrange et si crédible. L'écriture de l'auteur imaginative, foisonnante, captivante, nous plonge dans les méandres de ce château mystérieux, impénétrable qui semble avoir une âme.



J'aime beaucoup les histoires de maisons. Sa construction est originale, faite d'un assemblage de maisons collectées, démantelées, insérées, assemblées, à l'architecture existante, créant un ensemble difforme et extravagant.



« Notre château était une mosaïque de cabanons et de palais. C'était une énorme bâtisse, faite de beaucoup d'autres. Mais la structure d'origine, presque impossible à retrouver maintenant, abritait notre famille depuis des siècles. »



En y regardant de plus près, la château des Ferrayor dégage aussi plusieurs impressions : elle apparaît comme un phare au milieu de l'océan, à la fois refuge et soumise aux éléments extérieurs. Elle semble également, tour à tour, majestueuse et imposante, mystérieuse et secrète, fragile et vulnérable par ses fondations qui se craquellent, sombre, dangereuse, ou funeste.



« La maison parlait ; elle chuchotait, jacassait, gazouillait, criait, chantait, jurait, craquait, crachait, gloussait, haletait, avertissait et grognait. Des voix jeunes, hautes et gaies, de vieilles voix, brisées et tremblantes, des voix d'hommes, de femmes, tant et tant de voix, et pas une seule qui vînt d'un être humain, mais des objets de la maison qui s'exprimaient, une tringle à rideaux par-ci, une cage à oiseaux par-là, un presse-papiers, une bouteille d'encre, une latte de plancher, … »



*

Edward Carey révèle tout son talent d'illustrateur en incérant au début de chaque nouveau chapitre, des portraits saisissants des occupants du château avec leurs objets de naissance. Les illustrations donnent l'impression de traverser une galerie de portraits de famille.



Le monde étrange d'Edward Carey rappelle celui de Tim Burton, par son esprit décalé et gothique, par les illustrations en noir et blanc, les personnages dont l'aspect apparait un peu maladif.



*

Pour conclure, ce roman est très différent de ce que j'ai pu lire jusqu'à présent.

Edward Carey a su créer un récit intrigant et prenant, une atmosphère fascinante et menaçante.

Ce premier tome m'a emportée dans le monde des Ferrailleurs et l'épilogue particulièrement bien réussi, totalement inattendu, ne peut qu'inciter le lecteur à poursuivre avec le second tome.



Si vous pouvez envisager une histoire surprenante où les objets ont des noms et chuchotent, où la mer est faite de détritus, alors ce beau roman ne peut que vous séduire.
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Les Ferrailleurs, tome 3 : La ville

Une trilogie brillamment conclue avec "La ville", une suite cohérente et logique en terme d'ambiance et de scénario.

Nous avions laissé Clod et Lucy séparés lors de la fuite de Fetidborough en flammes, que sont-ils devenus ? Quels sont les projets sordides des ferrayors ?

Dans cette ambiance victorienne (nous rencontrerons la reine Victoria), les couleurs sont toujours à dominantes grises et noires, en parfaite harmonie avec un scénario sombre et toujours aussi décalé, l'auteur a créé un univers vraiment original et toujours aussi "so british", un vrai régal.

J'ai trouvé le rythme de ce tome trois plus enlevé, plus vivant et plus intense, une montée en puissance remarquable après deux premiers tomes plus "lents", le tout jusqu'à un final apocalyptique de toute beauté.

A noter les illustrations, encore plus nombreuses et toujours aussi réussies, un plus à chacun des 33 chapitres, au bas mot une centaine toutes dans l'esprit du dessin de couverture.

Une lecture que je conseille vivement à tous ceux qui aiment les univers déjantés.
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Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Dépaysement total, imagination débridée dès les premières pages! le jeune Clod vit avec sa noble famille, les Ferrayor, dans un château construit sur une décharge, dont ils vivent. Dans les soubassements travaillent les Ferrailleurs, chargés au risque d'être englouti par cet océan de déchets, de récupérer des objets exploitables. L'intrigue se passe en pleine industrialisation anglaise, au 19ème siècle.

Les Ferrayor possèdent chacun un objet de naissance qu'ils ne doivent perdre à aucun prix: une bonde pour Clod, une poignée de porte pour tante Rosamud - par qui tout commença. Mais Clod est un enfant particulier: il entend les objets qui répètent, sans arrêt, leur nom. La bonde de Clod s'appelle James Henry Hayward.

Le jour où la poignée de porte de tante Rosamud disparaît, une jeune orpheline, qui a vu ses parents se prétrifier, arrive au château pour y travailler. Elle s'appelle Lucy Pennant, et très vite, Clod la préfère à Pinalippy à qui il est promis. C'est aussi le jour que les objets ont choisi pour se révolter...



J'aimerais vivement vous conseiller ce premier tome à l'esprit gothique dont certains passages sont d'une grande beauté lyrique: l'océan d'ordures qui se déchaîne, le Rassemblement d'objets, le château lui-même et tous ses personnages aussi étranges les uns que les autres, MAIS... Soyez conscients que votre vie ne sera plus jamais la même.

Je ne dors plus depuis que j'ai compris que mon matelas - Mathieu Leroy - me donnait sournoisement des coups dans le dos la nuit, que ma bouilloire s'approche subrepticement de ma main lorsqu'elle brûlante - elle s'appelle Louise Monger - que mes clés, enfin, - Lucio et Monica Ruiz - se glissent subrepticement au fond de mon sac à main - Michelle - dès que je suis en retard. Je dois bien avouer, depuis que j'ai commencé ce livre, d'étranges phénomènes ont lieu autour de moi et je pense que ce livre est maléfique... je vous aurai mis en garde!



Je remercie vivement, et malgré tout, Babelio et le Livre de Poche pour ce beau roman illustré.
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L'observatoire

Ce roman fait sans aucun doute partie de ceux que je n'aurais jamais découvert sans les lecteurs de Babelio, un roman étrange et déroutant.

« L'observatoire » est une histoire de rencontres, d'amitiés, d'amour et de perte.



*

Le monde de Tearsham semble figé dans le passé, tel un îlot cubique perdu au milieu d'un parc arboré autrefois vaste, mais qui s'est réduit au fil du temps, comme peau de chagrin.

Ce domaine était la propriété ancestrale de la famille Orme, mais l'accumulation de nombreuses dettes a contraint le père à transformer la demeure naguère magnifique, en petits appartements devenus vétustes avec le temps, où vivent quelques pensionnaires marginaux et bizarres.



L'un d'entre eux, Francis Orme, le narrateur, est un artiste performeur dans un musée de cire. Il se plaît à se transformer en statue vivante au milieu des statues de cire. Il vit avec ses parents et s'occupe d'eux.



Les autres locataires sont tout aussi étranges et excentriques : apathiques, les deux parents semblent vivre dans deux mondes parallèles qui se frôlent sans jamais se rencontrer ; Peter Bugg, un précepteur à la retraite, se plaint continuellement ; Claire Higg vit par procuration devant son poste de télévision ; le portier est un homme amoureux plutôt revêche et peu loquace. Mais le personnage le plus marquant et le plus insolite est sans contexte « numéro 20 », une femme qui pense être un chien suite à un traumatisme crânien.

Leur quotidien est prévisible, monotone, routinier, ennuyeux sans qu'ils s'en rendent compte.



« Nous nourrissions l'espoir que le nouveau résident serait vieux ou moribond, ou qu'il mourrait dès la première nuit. Nous nourrissions l'espoir que le nouveau résident jetterait un coup d'oeil à l'immeuble et s'enfuirait à toutes jambes. Si cela venait à se produire, nous aurions certes été vexés quelques instants, mais soulagés pour le restant de nos jours. »



Alors, lorsque Anna Tap, une nouvelle locataire, emménage dans la résidence, son arrivée est perçue d'emblée comme une menace et Francis sollicite ses voisins pour chasser l'intruse.

Et ils ont raison, cette étrangère va secouer leur petit monde si ancré dans la routine, perturbant leur quotidien, bousculant leur vie si calme, faisant remonter également à la surface des souvenirs enfouis depuis longtemps au fond d'eux, des vérités oubliées qui se font à nouveau entendre.



*

Edward Carey n'a pas son pareil pour nous introduire avec tendresse et bienveillance dans les histoires de chacun.



« Ils forment un groupe singulier de personnages étranges qui semblent droit sortis d'un conte de fées bizarre et macabre… »



Ils paraissent tous enfermés dans leur propre monde de solitude, de silence, de tristesse, de regrets, d'obsessions, de phobies, de tocs qui les singularise.

En entrant dans leur intimité, on ressent de l'empathie pour eux, malgré leur attitude repliée et peu communicante.



Le personnage principal, Francis Orme, apparaît comme un homme obsessionnel aux manies vraiment bizarres : il ne supporte pas la vue de ses propres mains et les cache par des gants d'une blancheur immaculée. Il est également incapable de refreiner son besoin de voler les biens précieux des autres pour les ajouter à son musée privé.



« N'allez pas croire que je passais mon temps à ramasser tous les objets abandonnés. Ils devaient répondre à certaines exigences. Les morsures sur le cockpit, la roue manquante avaient donné à l'objet une histoire bien à lui. Il avait été aimé. Il devenait signifiant. »



Au fur et à mesure qu'on le découvre, les émotions du lecteur change, alternant tristesse, sympathie, indulgence, et irritation face à son attitude.

Les autres pensionnaires ont également d'autres manies que vous découvrirez en lisant le roman.



*

L'écriture d'Edward Carey se met au diapason de l'état psychologique de Francis. C'est donc un récit assez froid, dénué d'émotions, morose mais sincère, convenant parfaitement à cette atmosphère sombre et triste.

« L'observatoire » est un roman d'ambiance, l'intrigue est très simple, il n'y a que peu d'actions. Son intérêt est ailleurs, dans un mélange subtil et délicat de plusieurs ingrédients : un cadre qui oscille entre le gothique et le baroque, une atmosphère sombre mais fascinante, des personnages minutieusement décrits.



Je suis entrée dans cet univers un peu comme Alice au pays des merveilles qui, en décidant de suivre le lapin blanc, découvre un monde fantastique incroyable. Mais contrairement à Lewis Carroll, le monde vu par Edward Carey est teinté de gris, à la Tim Burton.



J'ai aimé cette atmosphère terne et déroutante, cet univers gothique qui m'a rappelé celui de "Gormenghast" de Mervyn Peake.

J'ai aimé le décor fait de ruine, à la fois obscur, crasseux, laid, intrigant, mais étrangement séduisant.

J'ai aimé ces personnages si singuliers, si mornes, si maussades, et au final si touchants.

J'ai aimé l'écriture où transparaissent la nostalgie et la mélancolie.



*

Pour conclure, « L'observatoire » ne ressemble à aucune autre histoire. Je suis tombée sous le charme de ce roman incroyable, animé par une étrange folie.

Une lecture dépaysante.



Un grand merci à Onee et Paul. Cette lecture m'a beaucoup plu et je ne l'aurais jamais lu sans vous.
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Les Ferrailleurs, tome 1 : Le château

Les Ferrayor habitent un château qui culmine au milieu d'un océan d'immondices. Les membres de cette famille ont fait fortune grâce aux ruines des Londoniens, aux rebuts d'une société qui jette et consomme à tout-va. Ils sont pour la plupart laids, crasseux, pâles, difformes, sinistres, impassibles, et surtout fiers de leur race pure de Ferrayor.



Dans les étages supérieurs trône cette aristocratie des poubelles. Dans les sous-sols et dans la décharge, triment les serviteurs, les orphelins, les misérables, tous de rang inférieur. Ceux-là n'ont pas de noms, ils sont juste Ferrayor. Déshumanisés, sans souvenirs, comme des objets ternes, des travailleurs de l'ombre, invisibles, ils déambulent dans les couloirs, le dépotoir, les dortoirs.



Clod a quinze ans et est un Ferrayor de pure race. Mais il ne ressemble pas aux membres de sa famille. Il a un don particulier, celui d'entendre parler les objets.

Une intruse se glisse dans ce château des Ferrayor aux règles nauséabondes bien huilées. La révolution s'annonce alors, les secrets secouent leurs couches de poussière et murmurent les larmes de cendres. Et tremblent les Ferrayor sur leurs fondations de ruines.



Dans ce roman fantastique couleur gothique, l'océan de rebuts emporte le lecteur dans une tempête judicieusement orchestrée. Ça crisse, ça craque, ça grommelle, ça rouille. On suffoque, on se noie, on déraille. Mais surtout on voyage dans un univers qui nous aimante, nous rassemble sur une vague d'idées improbables mais pas si déconnectées de la réalité qu'on pourrait le croire.

J'aurais aimé poursuivre avec les tomes suivants. Il me faudra attendre…



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L'observatoire

L'observatoire, immeuble délabré, gît comme un rond-point où les voitures bourdonnent. La ville le grignote, elle étend sa masse grise et tourbillonnante, elle étend la vie moderne là où il n'y a plus que passé et décrépitude.



Avant cela l'Observatoire était le manoir de Tearsham, propriété de la famille Orme. Elle comptait de nombreux Francis et des terres verdoyantes alentour. Cinq rangées de portraits ornaient les murs du hall d'entrée. Ils sont devenus poussière, le temps a fait son œuvre, la famille Orme n'a plus qu'un Francis pour lui donner un héritier, un garçon premier né. Francis Orme le dernier rejeton d'une famille aristocrate.



L'Observatoire est divisé en appartements tous plus miteux les uns que les autres. De drôles de locataires y ont imprimé leurs marques, leurs solitudes, leurs histoires ternes et lugubres, leurs secrets honteux, leurs crimes silencieux. Chacun cache et lèche ses blessures comme un chien galeux. C'est poisseux, nauséabond, d'une tristesse s'engluant dans un temps quasi immobile, ou dont les aiguilles tournent dans le sens inverse.



Derrière ce récit décalé, farfelu, d'une noirceur improbable, se cache une émotion pure. Francis Orme, le fils, porte des gants blancs. Il collectionne des objets trouvés, des objets volés. Étiquetés, mis sous plastique, ces objets s'amoncellent, ils sont comme un paravent, un mur. Ils sont comme un secret du bonheur des autres, une part d'amour. À travers un télescope, un microscope, des jumelles, des lunettes, avec des gants, lui et son père flottent au-dessus de la réalité. Ils l'aménagent pour qu'elle soit plus supportable.



Dans l'Observatoire on retrouve la plume particulière d'Edward Carey, celle qui s'intéresse aux ordures, aux objets, aux personnages atypiques, bancals mais tellement émouvants dans leurs difformités, leurs invraisemblances. Ils interpellent. Une plume qui rend la noirceur poétique.



Derrière le silence et la poussière, on entend le bruit de l'amour et de la souffrance. On entend notre monde grouiller.



Un récit noir et farfelu à ne pas manquer ainsi que la trilogie des Ferrailleurs du même auteur, tout aussi captivante que l'Observatoire.



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Petite

Tout se bouscule dans ma tête ! J’ai tellement de choses à vous dire au sujet de ce roman que je ne sais par où commencer ni comment m’organiser…



Déjà, je n’ai pas vu le temps passer : dès que j’ouvrais ce livre, le monde autour de moi se figeait et plus rien n’existait ! J’ai embarqué pour un long périple avec comme point de départ Strasbourg et comme destination finale Londres. Je n’ai pas vu les pages filer et lorsque j’ai refermé le livre, je me suis dit « c’est déjà fini ! ». C’est sans nul doute un énorme coup de cœur.



Cette revisite d’une histoire finalement peu connue que nous propose Edward Carey me laisse sans voix. Je suis entièrement d’accord pour dire que ce que l’auteur nous livre ici est un roman que Dickens aurait pu écrire et que Tim Burton aurait pu adapter à l’écran. Peut-être est-ce parce que deux grands noms qui m’impressionnent ressortent suite à cette lecture que ce livre est un coup de cœur ? A méditer !



Quoiqu’il en soit, vous vous demandez peut-être pourquoi la maison d’édition a fait un choix si particulier pour la cover. Pourquoi ce rouge ? Eh bien en fait, cette couleur rouge vif est probablement un clin d’œil au sang car, dans cette histoire, on a droit à notre lot de cadavres et de morts assez glauques ! Mais le rouge c’est également la couleur de la Révolution et l’histoire de Marie se déroule durant cette sombre période ! Et puis que l’on soit bon ou mauvais, on partage tous une chose, cette couleur rouge qui coule dans nos veines. Oui, je sais, c’est plus le contenu qui vous intéresse mais ici croyez-moi tout est pesé, pensé !



Petite, c’est un tourbillon d’émotion, on balance sans cesse entre espoir et désespoir, entre les moments où l’on respire à plein poumons et ceux où l’on sent que l’on frôle l’asphyxie. C’est un roman qui ne laisse pas indemne, c’est un roman qui parle de la condition féminine et de la rudesse de la vie des petites gens à cette époque.



Mais Petite, c’est également un cours d’art, une mise en avant de la sculpture et de la complexité de cette discipline, autant qu’une belle ouverture sur le monde des artistes. Une partie de l’histoire gravite autour des masques de cire, l’auteur nous décrit un monde inconnu, et qui devrait, comme cela a été le cas pour moi, étonner et fasciner la plupart d’entre vous.



Enfin, Petite, c’est une histoire qui se vit autant qu’elle se lit… C’est une histoire pleine de choses étranges et même un peu magiques. Des personnages atypiques que l’on ne croisera pas dans tous les livres, une écriture un peu noire voire un brin gothique qui ne laisse pas son lectorat indifférent, bref un livre majestueux que je ne peux que vous conseiller.



De la Suisse à la France, de l’ascension vers les plus hautes sphères jusqu’à la descente aux enfers dans une prison crasseuse, c’est une histoire qui nous fait découvrir Madame Tussaud et pas simplement le nom d’un musée… Je suis encore sous le coup de cette lecture, qui m’a valu des moments de rires mais également quelques larmes.
Lien : https://ogrimoire.com/2021/0..
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