AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Nieva


Nieva
05 février 2019
Ma mère m’a légué un mot de son dialecte qu’elle employait pour décrire son état d’esprit lorsqu’elle éprouvait des impressions contradictoires qui la tiraillaient et la déchiraient. Elle se disait en proie à la frantumaglia. La frantumaglia (elle prononçait ce mot en redoublant le m) la déprimait. Parfois elle lui donnait le vertige ou lui faisait monter un goût de fer à la bouche. Ce mot désignait un mal-être qui n’était pas qualifiable autrement, il évoquait une foule de pensées hétérogènes, des rebuts flottant sur l’eau boueuse de son cerveau. Mystérieuse, la frantumaglia engendrait des actes mystérieux, elle provoquait toutes les souffrances qui n’étaient pas associables à une seule raison évidente. Plus tard, dans sa vieillesse, la frantumaglia la réveillait en pleine nuit, l’amenait à parler toute seule puis à en avoir honte, lui soufflait de petits refrains incompréhensibles à chantonner tout bas qui se concluaient bien vite par un soupir, la poussait à sortir subitement sans éteindre la cuisinière sur laquelle la sauce finissait par brûler dans sa casserole. Souvent, elle lui tirait aussi des larmes, raison pour laquelle ce terme s’est ancré dans mon esprit, dès l’enfance, pour définir avant tout des pleurs subits et sans raison consciente : des larmes de frantumaglia.
Commenter  J’apprécie          50





Ont apprécié cette citation (4)voir plus




{* *}