Ce n'est pas juste. Je n'ouvre pas l'enveloppe. Je la jette par terre et la piétine comme une gamine en colère. Je suis très en colère et n’accepte pas une fois de plus que mon dernier choix soit validé et pas le premier. Cela veut dire que mon dossier n'était pas bon et que personne ne postule pour l'Irlande du Nord, pays en guerre, région mésestimée. Qui veut partir en Irlande du Nord ? Personne. D'ailleurs, hormis les « troubles », on ne connait rien de l'Irlande du Nord. On pense que ça doit être moche et que les gens y sont antipathiques. C'est ce que disent les gens du sud de l'Irlande, ceux qui vivent en République d'Irlande. Et puis, leur accent est incompréhensible et leur anglais est mauvais. L'anglais le plus pur est celui de Dublin, tout le monde le sait…
Germaine avait cinq ans quand ses parents ont divorcé, le mariage a duré dix ans. Elle n’en parlait jamais. D’ailleurs, elle ne parlait jamais de sa jeunesse. Elle n’a jamais évoqué l’alcoolisme de son père, elle était trop jeune, probablement. De son enfance, on ne sait pas grand-chose sinon qu’elle a toujours aimé les animaux. Elle avait même acquis un petit singe, où, à quelle occasion, nul ne le sait. Elle a été réglée (formée, comme on dit…) très jeune, à l’âge de neuf ans. Elle a cru qu’elle allait mourir. Les mères ne disaient rien à leurs filles, elles découvraient seules, ce ruissellement, de sang entre les cuisses. Cela ne se disait pas, et encore moins dans le milieu bourgeois.
C’est un jour particulier. Nous partons à l’enterrement de ma grand-mère maternelle.
Alors que mon père et moi faisons la vaisselle du matin, la sonnerie du téléphone gris à cadran retentit dans l’entrée de l’appartement. Sans réfléchir, je me souviens avoir dit à mes parents : ça y est, c’est Lucien, il est mort. Ma mère décroche l’appareil. En effet, Lucien, le frère de ma grand-mère vient de mourir. Mon grand-oncle était dans le coma depuis des semaines, mais il a visiblement choisi de disparaître le jour de l’enterrement de sa sœur.
Depuis que je vis chez le Mc Kendry, j'ai le droit de prendre une douche chaque jour, de laver mon linge quand je le souhaite. Je n'ai jamais connu cela avant. Chez mes parents, je ne pouvais me doucher et laver mon linge qu'une fois par semaine car l’eau est précieuse et ça coûte cher et de surcroît ça use le linge et la peau. Je peux également utiliser toute sente de serviettes ou draps de bain. Tout cela est nouveau pour moi.
Alors que les pantalons à pattes d’éléphant, et que les couleurs orange et vert pétant, régnaient en maître, que Valéry Giscard d’Estaing devenait président de la République, beaucoup d’événements heureux et malheureux se sont déroulés dans notre famille.
Bravo à l’auteure pour ce magnifique ouvrage remplit d’émotions et qui nous fait voyager!