Bouleversante histoire sur l'amour d'une enfant pour sa mère aux lisières de la folie, ce roman d'une grande justesse nous entraîne dans le cercle infernal de la violence familiale
« Ker Kroaz. le manoir où j'ai vécu enfant. Une demeure gigantesque avec une tourelle, entourée d'un parc donnant sur une petite crique, des pièces partout, fermées à clé pour la plupart. Au début des années 1980, de l'âge de cinq ans à l'âge de neuf ans, j'ai habité là avec ma grand-mère, Joséphine Vernois, mon petit frère, Jean-Baptiste, et tante Micheline, la soeur de ma mère.
Ma mère, si tant est qu'on puisse l'appeler ainsi, nous avait pondus, mon frère et moi, pouf, pouf, à deux ans d'intervalle, puis s'était promenée à travers le monde, une fois qu'on n'eut plus besoin de lui téter les mamelles, pour suivre mon père dans ses déplacements. On avait vécu tous ensemble à Palaiseau, mais un beau jour, ça y est, ça s'était décidé du jour au lendemain, mes parents avaient disparu et je m'étais retrouvée au Croisic avec mon frangin de trois ans. Ma mère nous avait confiés à ma grand-mère pour six mois, puis ces six mois s'étaient changés en années. »
La Danse de la tarentule raconte l'éveil douloureux d'une enfant éperdue d'adoration pour sa mère, monstre pervers au masque trop charmant. Dans ce roman, qui dit avec grande justesse l'enfance, Emilie émeut tout autant que sa volonté de rompre le cercle des violences familiales impressionne. le jour où cette mère impose la tragédie, Emilie s'échappe de ses rets et ne la reverra pas de son vivant.
https://bit.ly/2XUWYBL
+ Lire la suite
A qui profite le progrès ?
Pourquoi des journées de 8 heures ?
On pourrait supprimer le chômage en ne faisant que des journées de 4 à 5 heures et employer tout le monde. Apprendre à vivre très simplement : une table, quatre chaises, un lit, cela suffit à apprendre à profiter de nos loisirs, s'approcher le plus possible de la nature. Apprendre à lire, car lire c'est se fortifier l'esprit avec l'esprit des autres, s'imbiber le coeur de sentiments qui vous agrèent, c'est lutter avec un auteur suivant que nos idées ou nos sentiments s'accordent avec les siens ou s'en séparent.
Apprendre à vivre en sachant vivre et laisser vivre. Ne prendre dans la vie que les fleurs, des fleurs le parfum, laisser tomber cette religion qui a le plus d'adeptes, je parle de la religion de l'argent.

Depuis que j'étais petite fille, j'avais tellement désiré devenir maîtresse d'école que j'avais eu le temps de prendre conscience de l'importance de cette mission. A mes yeux les instituteurs sont responsables de toute la société. Ce sont eux qui ouvrent l'esprit aux gosses, qui leur montrent ce qui est bien et ce qui est mal. Cette responsabilité était maintenant la mienne et je devais en assumer les conséquences. Je me sentais suffisamment courageuse et patiente pour y parvenir, parce que, quand on a des gosses avec soi, il ne suffit pas de leur apprendre à lire, à écrire et à compter, il faut aussi leur apprendre à lire entre les lignes c'est-à-dire à réfléchir et à penser par eux-mêmes, et ça, ce n'est pas toujours facile. Ce qui est essentiel, c'est qu'un enfant dans une classe, n'importe lequel, se sente aimé et considéré, qu'il sente que le maître ou la maîtresse ne le prend pas pour un numéro ni pour un polichinelle, et que tout ce qu'on lui demande, c'est pour son bien. A partir de là bien des choses peuvent se passer, mais il faut de l'amour pour y parvenir. Sans amour il vaut mieux ne pas enseigner, il vaut mieux faire un autre métier. Pour moi c'était une vocation.
33 – [Le Livre de poche n° 5226, p. 133]

Apprendre aux gosses à lire et à écrire est une grande chose, c'est important, mais ce n'est pas suffisant. J'avais toujours eu de l'école, de son rôle, et de celui du maître une idée plus élevée. A mes yeux c'est à l'école communale que les enfants prennent la mesure du monde et de la société, après, quels que soient leur métier, leur orientation, c'est trop tard, le pli est pris. S'il est bon tant mieux, mais s'il est mauvais il n'y a rien à faire.
Dans un pays arriéré comme ici, avec la vie que j'avais eue, ce qui me paraissait essentiel, c'était de leur ouvrir l'esprit à la vie, c'est-à-dire de faire éclater les barrières dans lesquelles, ils étaient enfermés, de leur faire comprendre que la terre était ronde, infinie et diverse et que chaque individu, qu'il soit blanc, noir ou jaune, a le droit – et le devoir – de penser, et de décider par lui-même. J'avais autant appris par la vie que par les études, c'est la raison pour laquelle je n'ai jamais pu juger mes élèves uniquement sur le résultat de leurs devoirs, mais aussi sur la manière dont ils se comportaient dans la vie de tous les jours. Par exemple, je ne leur ai jamais caché que tous autant qu'ils étaient ils n'échapperaient pas à la réalité sociale et que, au bout du compte, ils devraient travailler pour gagner leur vie.
19 - [Le Livre de poche n° 5226, p. 275]
C'est toujours étonnant de rencontrer dans les pays des hommes qui ne pensent pas comme les autres, ça l'est d'autant plus qu'ils sont rares...
J'ai déjà évoqué le respect que suscitait l'instituteur, cela était d'autant plus vrai que bien souvent il était le seul représentant de ce que bien humblement j'appelle la connaissance. C'est pour cela que les paysans venaient lui demander conseil. Il arrivait que cette connaissance suscite la méfiance et qu'une autre autorité s'oppose à celle du maître d'école, celle du curé par exemple. (Livre de poche n° 5226, 1977, p.119)
Une amitié qui dure et ne vieillit pas c’est quelque chose d’extraordinaire.

… ici, les gens ne lisent rien, c'est ça le désastre. Mon père que j'adorais était de cette race-là, il n'avait jamais lu un livre de sa vie, ni un journal. Je me souviens, au moment de mon mariage c'est une des choses qu'il avait reproché à Jean, il avait dit comme l'ultime preuve de sa bonne foi : « Il lit trop », montrant ainsi où se trouvait sa méfiance et sa peur. Comment pourraient-ils penser par eux-mêmes après ça, ils ne sont pas avec un auteur ou contre, ni pour une idée, ni contre. En définitive ce manque, ça ne leur apprend qu'une chose, à se taire et à vivre dans un monde qui se tait, tout comme l'eau qui dort. Le moindre souffle, la moindre parole qui sort de l'ordinaire les fait fuir. C'était ça les paysans ici, et à peu de chose près c'est encore ça , car s'il y a eu ces changements c'est uniquement d'un point de vue matériel, pour le reste ils sont toujours les mêmes : la conversation, la participation, tout simplement être contre et le dire si on le pense, ça ils ne le connaissent pas. On peut dire que c'est l’Eglise qui est responsable de cet état d'esprit, elle a eu une emprise formidable sur les gens et elle les a marqués. Par la suite ce fut le patriarcat qui prit le relais, le père était le chef incontesté de la famille, on lui obéissait au doigt et à l'œil et le chef lui-même se pliait aux lois de l’Église et l'Etat. C'est vrai que les instituteurs sont tous fautifs de ce qui se passe dans les écoles, c'est eux qui ont la possibilité de changer la mentalité des gosses, de leur ouvrir l'horizon et de faire en sorte que le monde change.
20 - [Le Livre de poche n° 5226, p. 222]
Quant à mon père ce fut insupportable, avec tout l'amour que je lui dois, je peux le dire encore aujourd'hui, dans ce moment-là il fut atroce. Il ne voulait pas comprendre - ou bien il ne pouvait pas le supporter - que je pleure et que je sois malade à cause de la mort de ma petite fille. Il me dit : " Mais cesse de pleurer, c'est ridicule à la fin, cette petite ne fait faute à personne. " Des paroles comme celles-là étaient insupportables, je ne comprenais pas que mon père puisse dire des choses pareilles.
...je trouve inacceptable qu'un homme ne puisse travailler quand il veut. Comment parler de progrès ou d'humanité ?
Comment oser parler de Liberté, d'Egalité ou de Fraternité ? C'est du vent ! Tant qu'un homme ne peut choisir son métier, tout le reste c'est du vent ...
Les enfants, méfiez vous des beaux parleurs, méfiez-vous des politiques.
Efforcez-vousde juger par vous-même et surtout,
profitez des beautés de la vie.
Je me suis attaquée au patriarcat, à l'alcoolisme, au chauvinisme :
ils n'avaient fait que trop de ravages.