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Critiques de Emmanuelle Bayamack-Tam (329)
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Arcadie

Liberty House ?



C'est à peine âgée de six ans que la jeune Farah fait son entrée dans ce lieu hautement symbolique nommé « Maison de la Liberté ». Elle est accompagnée de ses parents en fuite d'un monde qui les agressse : sa mère, « emmaillotée de tissus blindés » par peur des ondes, menacée « d'une extinction à petit feu dans les souffrances atroces de l'électrohypersensibilité », son père angoissé pour sa femme et sa grand-mère, naturiste patentée dont le sexe est orné d'un piercing bien placé.



C'est toute cette petite famille qui rejoint en pleine nuit ce « refuge pour freaks », la tête pleine d'espérances et de désirs inassouvis. Comme la sécurité, vivre dans une « zone blanche » vierge de toute substance toxique, vivre en autarcie en cultivant et se nourrissant des légumes du jardin, mais surtout vivre loin de leur peur du monde extérieur.

Ils sont une trentaine à cohabiter dans cette communauté hétéroclite. Tous réfugiés d'une société qui les refusent.



L'illusion peut alors commencer. Arcady en est le maître d'oeuvre. C'est lui qui tient les rênes de la liberté, donnant ou refusant son assentiment. Un des premiers commandements est « vivre et jouir sans entraves », ce à quoi s'emploient la plupart des membres de la communauté. Ici, point d'amour exclusif et réservé, l'amour doit être commun et débridé.



C'est assez vite, à l'âge de ses premiers émois de jeune fille, que Farah tombera totalement amoureuse d'Arcady, le gourou de son âme. Commencera alors pour elle une quête de l'amour qui ne la quittera pas.



Mais la recherche de l'amour est du bonheur sera semée d'embûches pour Farah. C'est son corps qui parle en premier : elle se transforme comme tous les adolescents, mais pas elle le voudrait. Son corps prend en effet les atours de plus en plus visibles de la virilité. Virilisme, c'est le nom donné à cette métamorphose. On la surnomme Farah Fawcett, mais elle a le physique de Silvester Stallone.



Elle complète la galerie des « monstres » mais en pire, car même si un des premiers principes est de « s'accepter tel que l'on est, avec ses tares éventuelles », celle de Farah est trop choquante pour être supportée.



Seule et abandonnée, sont les sentiments qui l'envahiront peu à peu. Ses parents l'ont confiée à la communauté et ne s'en soucient guère. Chacun vaque à ses occupations et selon son propre ego. Tous ensemble, chacun pour soi, semble être la règle de vie des habitants de « Liberty House »



Arcady l'oublie, après avoir su profiter de son corps, il préfère s'adonner à d'autres plaisirs dans les bras de jeunes hommes. Elle qui voulait « s'oublier dans cette servitude ». « Biberonnée à l'amour fou » dès le plus jeune âge, elle s'aperçoit vite que c'est un amour faux. « La langue ardente du désir » prend parfois des tournures qui chasse la vérité pour se réfugier dans le mensonge. Elle préfère se cacher et se retrouver dans la nuit : « cette volonté de gagner du temps sur la vie », et la quête éperdue pour l'amour passionné. C'est la nature qui lui fera prendre conscience petit à petit de la réalité.



Drolatique, enlevé, le ton d'Emmanuelle Bayamack-Tam l‘est, et cette dénonciation sans vergogne du phénomène sectaire est sans appel. Utilisant le mode de la dérision ou de la parodie, parfois irrésistible, comme à propos du naturisme, dont « l'un des bienfaits est de dissiper toute illusion sur les ravages du temps », peut aussi en choquer certains. Son récit est cependant parfaitement maîtrisé et limpide aux yeux de tous, car au fond la seule chose que cherche tous ces laissés-pour-compte, c'est l'Amour !



Lu en novembre 2018.



Ma chronique complète à retrouver sur mon blog le conseil des libraires/Fnac :




Lien : https://www.fnac.com/Arcadie..
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Arcadie

Le roman débute avec l'arrivée, au domaine de Liberty House, de la narratrice Farah, avec ses parents, dans la voiture conduite par sa grand-mère Kirsten. le domaine, situé en zone blanche, aujourd'hui refuge pour freaks, était autrefois un pensionnat pour jeunes filles. Cette communauté libertaire et bucolique compte environ une trentaine de pensionnaires avec des obèses, des dépigmentés, des ¬bipolaires, des électro¬sensibles, des grands dépressifs, des cancéreux, des poly¬toxicomanes et des déments séniles. Les téléphones portables et autres technologies de communication y sont bannis.

La vie champêtre, le végétarisme, le naturisme et l'amour libre permettent à ces exclus de s'épanouir. Ils ont fait leur, la devise virgilienne "Omnia vincit amor" : L'amour triomphe de tout. Arcady est le mentor charismatique de cette communauté. Farah, se trouvant laide s'assimile à tous ces êtres fragiles. de plus, à l'âge de la puberté des problèmes sur son identité sexuelle vont se présenter à elle, Elle qui se pensait fille est en train de vivre une virilisation galopante et le syndrome de Rokitanski sera médicalement reconnu.

Qu'à cela ne tienne, Arcadie n'est pas seulement le roman d'une fillette qui devient un homme, c'est aussi celui d'une adolescente en quête d'elle-même, curieuse du monde extérieur. L'intrusion d'un jeune migrant sans papiers venu d'Érythrée va créer un bouleversement et la réaction du gourou et de ses pensionnaires sera pour le moins inattendue dans ce havre de paix ouvert à tous où la nature luxuriante est omniprésente et enchanteresse, véritable éden.

Emmanuelle Bayamack-Tam réussit à décrire la beauté luxuriante des lieux avec réalisme et beaucoup de poésie. Elle nous livre là, un roman audacieux, cru, trivial, une véritable utopie libertaire où, malheureusement va s'inviter la violence extérieure.

Arcadie est une ode à la beauté du monde et des hommes où se côtoient de superbes envolées lyriques et un parler cru tout aussi poétique, un roman très contemporain et en même temps intemporel. C'est aussi un roman politique, il aborde tous les enjeux contemporains, qu'ils soient éducatifs, technologiques, sexuels, écologiques, migratoires.

Arcadie d'Emmanuelle Bayamack-Tam a remporté le Prix Livre Inter 2019, un prix bien mérité pour un roman qui sort franchement des sentiers battus !


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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La treizième heure

De toutes les auteures françaises actuelles, Emmanuelle Bayamack-Tam alias Rebecca Lighieri est à mes yeux la plus fascinante et la plus audacieuse.

Fascinante et audacieuse par sa langue, capable de mêler dans une même harmonie un vocabulaire recherché aux termes les plus crus et les plus triviaux. Je ne vois pas un seul écrivain aujourd'hui qui entrelace avec un si évident talent les circonvolutions de la langue classique aux fulgurances de l'argot, un argot qui, sous sa plume, loin d'apparaître plaqué ou artificiel, insuffle une vitalité et une authenticité inouïes au récit. Elle me fait penser au compositeur de musique électronique Thylacine, qui mixe avec aisance les rythmes syncopés de la techno avec les symphonies lyriques de Verdi ou de Beethoven. La musique est d'ailleurs omniprésente dans l'oeuvre de Bayamack-Tam, où sans surprise, l'opéra dialogue avec le rock n'roll et la pop music. Mais ce qui traverse toute son oeuvre, plus encore que la musique, c'est la poésie et son équivalent populaire : la chanson.



La poésie est bien davantage qu'un agréable passe-temps pour les personnages de ses romans, elle est ce qui les aide à vivre, ce qui leur permet de supporter la laideur ordinaire du monde. Dans Si tout n'a pas péri avec mon innocence, la jeune Kim tente, en vain, de partager son amour naissant pour la poésie, en particulier pour Baudelaire, avec son obtuse famille. Dans Je viens, Charonne la mal-aimée trouve le salut dans sa rencontre ave le fantôme du poète héroïnomane Coco de Colchide. Et dans ce roman-ci, la poésie est placée au coeur de la théologie et de la liturgie de la secte de la Treizième Heure, qui termine chacune de ses célébrations par ce sonnet de Nerval :



« La Treizième revient… C'est encor la première;

Et c'est toujours la seule, ou c'est le seul moment ;

Car es-tu reine, ô toi! la première ou dernière ?

Es-tu roi, toi le seul ou le dernier amant ?… »



La beauté est ce qui confère au monde sa suprême valeur, la poésie est ce qui l'incarne le mieux, elle agit comme un guide spirituel, au même titre que la foi, dans l'existence de ceux qui ont la chance d'être touchés par elle :

« Tout est dit, tout est là, et il n'y a qu'à ouvrir Les Fleurs du mal pour trouver des façons d'exister. »



Mais si la beauté est une raison nécessaire, elle n'est pas une raison suffisante pour assurer le bonheur, ou, à défaut, une vie à peu près digne d'être vécue. Ce qui permet aux êtres de grandir et de s'épanouir vraiment, c'est l'amour. Or, l'amour est précisément ce qui fait gravement défaut aux familles disséquées de livre en livre par Bayamack-Tam. Les jeunes héros et héroïnes de ses romans sont le plus souvent en butte à une mère incapable d'aimer et à un père qui s'efforce tant bien que mal de pallier aux insuffisances maternelles. Ces enfants et adolescents en manque d'amour se heurtent de surcroît à l'indifférence ou au rejet de la part de leurs camarades d'école, quand ils ne sont pas harcelés, ou maltraités.



Parfois, ces enfants mal-aimés grandissent, puis tombent follement amoureux. Et c'est à la fois ce qui les perd et ce qui les sauve. L'amour chez Bayamack-Tam est incandescent, absolu et indissociablement lié à la sexualité, une sexualité décomplexée et solaire, qu'elle décrit comme tout le reste, de cette façon incomparable qui fait entrer en résonance l'image et la métaphore avec le vocabulaire le plus cru :



« Je ne verrais aucun inconvénient à baiser Nelly tout en pensant à Hind, à la fleur ouverte de ses aisselles, au renflement de ses seins, à sa cambrure duveteuse, à la perfection de ses fesses – et à sa verge grossissant dans ma bouche quand elle me laissait la sucer. »



Mais d'autres fois, ces enfants mal-aimés trop doux, trop tendres pour survivre à la cruauté de notre monde, meurent dans la fleur de l'âge. Ce sont toujours les garçons qui meurent. Les filles, elles, développent une force intérieure inexpugnable qui leur confère une aura hors du commun, aidées en cela par l'amour qu'elles savent dénicher là où on ne l'attend pas : chez de très vieilles dames retirées du monde, dans un camp de gitans où l'on vit d'expédients, ou encore dans une secte qui célèbre l'amour tout en récitant du Ronsard.

La secte fait pour la première fois son apparition dans l'oeuvre de Bayamack-Tam avec Arcadie. Elle offre à Farah, jeune adolescente intersexuée, un cocon hyper protecteur dans lequel l'amour règne sans partage, mais duquel elle doit s'extraire pour mener une vie autonome et adulte. Dans La Treizième Heure, nous retrouvons une adolescente hermaphrodite du nom de Farah, placée dans un contexte différent. Élevée par son père, Lenny, qui prépare sa communauté de croyants à l'imminence de la fin du monde, elle est issue d'une filiation extrêmement embrouillée. Sa mère, Hind, l'a abandonnée à sa naissance, mais qui est cette femme, au fond? Est-elle bien sa mère? D'ailleurs qui est la mère, à une époque où le concept de mère est brouillé par l'évolution des pratiques culturelles et scientifiques? Et Lenny, cet homme qui l'aime plus que tout et prend soin d'elle depuis sa naissance, est-il bien son père? Car dans ce roman plus que dans tout autre roman de Bayamack-Tam, les êtres ne sont pas clairement assignés à un genre.



En questionnant, à travers le personnage de Farah ou de Hind, la transidentité, l'auteure perpétue un questionnement qui traverse, me semble-t-il, toute son oeuvre : qu'est-ce que la normalité ? En mettant en scène des personnages qui, par certaines de leurs caractéristiques physiques — handicap, obésité, extrême vieillesse, vulve ou bite atrophiées… — raciales ou autres — beurs, gitans, gays, lesbiennes, queer, trans…— n'entrent pas dans le cadre normé communément admis, elle nous amène à penser à rebours de la pensée dominante. Sous sa plume, l'anormal a l'air d'être la norme ou plutôt, apparaît plus aimable et désirable que la norme, la transgression nous sauve de la normalité morose et du conformisme sclérosant.



Au fil de son oeuvre, tour à tour solaire et crépusculaire, Emmanuelle Bayamack-Tam alias Rebecca Lighieri, « soignant ses images et serrant de près le sens dans le langage » , nous adresse encore et toujours le même message : cultivez vos singularités, tâchez d'être un esprit libre, même si le prix à payer est la solitude. Cependant, même si son énergie, sa force de conviction m'ont paru intactes dans La Treizième Heure, j'y ai décelé, affleurant ça et là, un profond découragement.



« Qui sera là ? Personne. le désastre aura eu lieu. Et je ne parle ni des méga-feux, ni des cyclones, ni même des virus qui menacent de nous décimer, vague après vague, variant après variant. Non, je parle du saccage de l'innocence, je parle du programme de destruction massive de la pensée, je parle de la persécution à grande échelle de tout ce qui est beau, sauvage et libre. »



Aussi, lisons cette auteure étonnante au message profondément humaniste qui sait si ardemment nommer les choses, et célébrons avec elle tout ce qui est beau, sauvage et libre.
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La treizième heure

Entrée très vite dans ce roman, je me suis délectée de l'humour prêté aux propos de Farah, alors adolescente de16 ans, qui soumet son questionnement ses doutes au lecteur. Cette première partie introduit les personnages et leur situation, un père présent sans l'être, aimant et distant, assoiffé de vérité, une vérité toutefois difficile à communiquer, on le comprendra, une mère absente, une foule de personnages venus la pour voir cicatriser leur douleur, leur malaise, pour tenter de se "réparer".



Farah est un personnage plaisant qui décide de mener son enquête concernant ses origines, qui exprime sa façon de voir les choses, et qui a beaucoup à dire étant donné qu'elle évolue au sein d'une de ces églises minoritaires, une secte où la poésie occupe une place de premier choix dont le père fait figure de gourou.



Et Farah pense trouver des réponses, sa logique lui indiquant qu'elle aboutira en menant ses investigations auprès des personnes concernées par sa naissance, mais il semble que son esprit cartésien en prendra un coup… et l'esprit du lecteur aussi, car à défaut de fournir des réponses fermes, à ce stade du roman, le doute pourrait bien s'épaissir.



Cette première partie je l'ai dévorée, ne pouvant me défaire ma lecture.



Puis je m'aperçois, que je suis face à un roman choral, (je n'ai pas cherché à me documenter sur ce livre plébiscité, afin de le découvrir seule). Je recueille alors les confidences du père. Un être dont la bonté et l'humilité ne font pas de doute, qui raconte son histoire et celle de Farah avec sincérité, le ton change, alterne entre dépression, bonheur, désespoir et solution pour sortir de la morosité. on comprendra les réponses évasives de ce père aux questions de sa fille.



Le troisième narrateur raconte l'histoire d'une femme qui a dû forger elle-même cette identité indispensable à chacun, elle tente d'expliquer ses agissements, on comprendra entre les ligne sa souffrance et son mal-être dus à de mauvais choix ou à des rencontres malheureuses. cette partie ressemble à une relecture de vie de la part de cette mère assaillie par le regret.



Trois narrateurs, trois ressentis bien différents qui expliquent l'incompréhension des uns envers les autres. Roman intelligent sur le thème de l'intersexualité.



Si j'ai beaucoup aimé la première partie, les autres m'ont semblé longues sur la fin, certains passage n'étant pas, à mon humble avis, indispensables pour venir à bout de ce pavé.



Question poésie, les passages de grands auteurs ou de chanteurs ne font de cet ouvrage, ni un recueil, ni une narration à visée poétique, la poésie y étant un instrument de transmission des idées et des sentiments sous la forme de citations.



Question érotisme, on est largement servi, les héros ne trouve pas le ciel qu'au travers des réunions de la secte, c'est cru, c'est réaliste, c'est digne d'un Virginie Despente.



Challenge MULTI-DEFIS

Challenge PAVES

Challenge "ABC des titres

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Arcadie

Freaks de tous les pays, unissez-vous!



Créez , contre toute tentative de normalisation, une utopie de l'anormalité, une arcadie du monstrueux, un phalanstère des rebuts, des rebelles et  autres reubeus, une zone blanche impolluée et inviolée, hors radar, hors sol, hors réseaux, une zone de libre échange sexuel où s'expriment,  royalement libertaires,  phéromones et cyprines,  une  jungle édenique où bêtes et gens,  loin des peurs et des haines, proclameront la grande égalité du vivant.



Proclamez la liberté du jouir  et jouissez- en!



Non, je n'ai pas fumé la moquette!



 Liberty House, l'Arcadie varoise d'Arcady, c'est à peu près cela.



La jeune Farah nous en décrit les charmes- ambigus- les hôtes- étranges- ,  les us et coutumes- si particuliers.



Non sans humour - et même avec un humour ravageur!- , car son amour inconditionnel pour le gourou fondateur des lieux,  Arcady en personne,  n'empêche pas cette jeune et sagace narratrice de conserver lucidité et quant à soi à l'egard de son éden libertaire.  Même si elle y vit depuis sa tendre enfance.



D'autant que l'enfance, justement, est en train de la quitter et que la puberté la tourmente de bien étrange façon : plus elle sent naitre en elle un impérieux désir de femme pour son gourou chéri, plus son corps la trahit , optant quant à lui pour une virilité disgracieuse, décevante,  plutôt velue même.



Les meilleures utopies ont une fin, c'est-à-dire,  si l'on joue sur la sémantique, qu'elles ont une limite,  un achèvement et une finalité.



Une limite qui est celle, toute triviale, de la frontière. le meilleur des mondes , même lui, ne peut accueillir toute la misère du monde. Et quand Farah prend la mesure de cette frilosité-là, c'est toute sa mythologie personnelle qui s'effondre. Déception. Désacralisation. Candide quitte Thunder-ten-Tronck...Liberty House ne serait donc qu'une secte parmi tant d'autres?



Un achèvement. "Et in Arcadia ego" dit la Camarde, et cette grande Faucheuse , on le sait, a toujours le dernier mot.



Une finalité aussi, et bien forte. Car l'éducation libertaire laisse des traces, réveille des faims, lève des attentes. Et tout paradis perdu porte en soi le désir d'être retrouvé,  voire recréé,  remodelé. 



Un peu comme ce corps sauvage qui veut assigner à Farah un rôle qu'elle refuse.



Farah n'a pas connu l'utopie seulement pour la renier ou la perdre: elle lui a appris à écouter ses désirs,  sa soif de justice et d'amour. Elle lui à appris à vouloir. 



Et tous les diktats du monde, fussent-ils ceux de son propre corps, ne sauraient infléchir cette loi-là, une loi non-écrite,  impérieuse comme celle d'Antigone.



Une lecture fascinante, rondement menée, fichtrement bien écrite, crue, drôle et décapante, qui secoue bien des cocotiers, abat bien des marronniers,  mais vous laisse des graines et des pousses plein la tête.



De quoi faire pousser un jardin sauvage et beau, prêt pour une nouvelle utopie.



Une  jungle édenique où bêtes et gens,  loin des peurs et des haines, proclameront la grande égalité du vivant...





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La treizième heure

Ce roman est sacrément culotté ! (ou pas).



Ça commence doucement : une adolescente en quête d‘identité nous confie ses questionnements, et nous présente son décor : elle vit au sein d’une communauté millénariste, et son père en est le dieu vivant. L’historique, les caractéristiques des adeptes, tout cela est traité avec humour par cette ado passionnée de littérature, ce qui ne saurait nuire. Le doute survient en fin de première partie lorsque Farah fait un état des lieux de la progression de sa puberté, et émet des doutes sur sa filiation .



C’est ensuite Lenny, le père, le gourou charismatique, qui va lever le voile sur la naissance de sa fille. Avec des révélations fracassantes que je me garderai bien de révéler !



Le clou du numéro arrive avec la dernière narratrice, Hind, mère de Farah, qui fait un come-back remarqué dans ce foyer qu’elle avait quitté avec perte et fracas quelques jours après la naissance de sa fille. Cette fois c’est la révolution, l’inversion de l’ordre des choses, les retournements de situation (sic), déstabilisants, pour une fin en feu d’artifice.



Dans cette histoire, ce ne sont pas tant les particularités de chaque personnage qui étonnent, mais leur coexistence. Ce qui permet à l’autrice de faire un point documenté autour de la problématique de l’identité sexuelle.



Sans oublier le ton humoristique qui allège le propos et qui permet aussi de faire passer des scènes explicites et crues sans choquer.



Surprise par le sujet, la façon de le traiter et l’univers très différent du roman Il est des hommes qui se perdront toujours, j’ai vraiment beaucoup apprécié !



512 pages POL 18 août 2022

Sélection Landerneau 2022


Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Arcadie

Dans Arcadie, la narratrice s'appelle Farah. Elle et ses parents ont poussé les grilles d'une vieille demeure dans le sud de la France, près de la frontière italienne, - Liberty House, alors qu'elle n'avait que six ans. C'est là qu'elle a grandi, entouré des siens, ses parents et sa grand-mère tout d'abord, mais aussi des autres, les membres d'une communauté libertaire pour ne pas dire d'une confrérie. Surtout, ne dites pas secte, car ce serait totalement inexact et cela choquerait ses résidents, à commencer la narratrice...

Il serait réducteur de n'y voir qu'un roman libertaire ou libertin, car dès les premières pages et durant plusieurs chapitres, cela lutine sérieusement dans les coins...

Liberty House est un refuge, un nid, un coin de verdure, un lieu coupé du reste du monde, une zone blanche qui rassemble des gens fragiles, inadaptés au monde extérieur.

Les gens qui vivent ici sont coupés du reste du monde, vivent dans un havre de paix et d'harmonie, vivent nus, font l'amour entre eux sans entrave. Farah, quant à elle, grandit au milieu des arbres, des fleurs et des bêtes alentour, notamment les vaches, - peut-être mon animal préféré après les chats, vous avez déjà vu de près les cils d'une vache ? – les oiseaux, les insectes, les papillons...

Un homme dirige avec charisme le lieu, il s'appelle Arcady. Farah grandit dans l'amour qu'elle porte secrètement pour lui... Ce n'est pas un gourou, on pourrait le croire... C'est autre chose...

Arcady aime autant les hommes que les femmes...

Farah grandit et son corps se transforme. Farah ressemble à une sorte de rencontre entre Farrah Fawcett et Sylvester Stallone. Elle dispose de la force de l'un et de la fragilité de l'autre... Presque une drôle de dame en devenir. Tiens ! Quand j'évoque Sylvester Stallone, je pense souvent à sa maman. Mais oui, car la mère de celle-ci, -donc la grand-mère de Sylvester Stallone, vécut à Brest durant quelques années... Je me souvins qu'en 2009, la maman de Sylvester Stallone, -dont le métier était de lire l'avenir dans les fesses de ses clients, fit un séjour à Brest, rencontra le maire de la ville, toujours encore maire d'ailleurs aujourd'hui, qui spontanément descendit de son bureau à l'accueil lorsque l'hôtesse lui indiqua au téléphone ce message qu'il n'oubliera jamais : « Monsieur le Maire, j'ai ici devant moi une dame qui prétend êyre la mère de Sylvester Stallone et qui souhaiterait s'entretenir avec vous. »

On pourrait sourire, rire de cette communauté en totale contradiction avec les valeurs qu'elle semble prôner...

Et puis, et puis, un événement vient et puis d'autres... À commencer par le surgissement dans le paysage de ce tout jeune migrant érythréen, beau comme Adonis... ayant cheminé dans les Alpes en tongs... Les belles valeurs de cette jolie communauté humaine sauraient-elles accueillir la misère du monde qui vient frapper aux portes de Liberty House ?

Je découvre ici Emmanuelle Bayamack-Tam et son écriture inventive qui m'a enthousiasmé dès le début de ma lecture. Je découvre son ton magnifiquement insolent, irrespectueux contre l'ordre stupide des choses, politiquement incorrect.

Émouvant aussi, car ce roman épris de transgression et de résistance est une très belle histoire d'amour chargée d'humanité.

« C'est bien joli de se faire lutiner, mais je n'aurai pas toujours la chance de tomber sur des amoureux omnivores et pas regardants : si je veux une suite à ce bel été, je dois déterminer si je suis une fille ou un garçon au lieu de rester dans l'indétermination à laquelle mon corps incline irrésistiblement. »

J'ai découvert ici le trouble des émois et des émotions qui façonnent Farah... J'ai découvert son côté vorace, féroce, vers l'amour.

Je me suis heurté à l'opinion publique et sa stupidité. Mais j'ai tant aimé l'irrévérence si élégante et si gracieuse de ce texte.

J'ai tant aimé les personnages si généreux et attachants, à commencer par la narratrice, rebelle, qui ne cède rien, sauf à l'amour.

J'ai tant aimé cheminer dans ce roman et découvrir que son message sublime est celui de la tolérance.

J'ai tant aimé cette ambiguïté sexuelle sur laquelle joue et surfe la narratrice, Farah, surjoue parfois, mais c'est tellement drôle et empli aussi d'émotions, qu'on le lui pardonne...

J'ai brûlé mes doigts dans l'incandescence des pages. J'ai brulé mes yeux dans la lumière des mots et lorsque les larmes me sont venues... J'ai trouvé l'écho du message, du seul message délivré dans ce roman et je l'ai accueilli dans mon coeur fébrile...

Ce seul message d'amour consolatoire et réconfortant qui peut unir les êtres si différents, les uns des autres...

Je referme les pages de ce livre si beau, je referme les grilles de Liberty House. Derrière moi, j'entends encore les voix sublimes et fragiles de ceux qui se sont aimés avec tant d'amour, sans entrave, malgré le cri des hyènes, j'entends des coeurs qui battent comme des battements d'ailes.



Un grand merci à Anna-Choute (@AnnaCan) qui m'a invité à lire ce livre dans le cadre de notre collier de perles littéraires.

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Arcadie

Vagabondages d'une jeune fille dans une secte libertaire

*

C'est un roman très singulier que j'ai eu entre mes mains. Je dirais même plus, une lecture intrigante mais qui m'a mise mal à l'aise.

Des thèmes intéressants sont abordés : l'environnement avec ses dérives, l'intersexuation, les migrants, les nouvelles technologies et leur nocivité ainsi que le véganisme.

*

Mais qui est Arcadie? C'est le petit nom du gourou (enfin le leader) d'une communauté utopique située le long de la Cote d'Azur. De l'extérieur, ça m'a tout l'air d'une secte bien que la jeune narratrice le nie. Endoctrinement pensez-vous? Farah, adolescente au physique ingrat veut perdre sa virginité avec Arcadie, quinquagénaire très dynamique. Autour de ce duo vivent les autres membres très baroques (dont la moyenne d'âge se rapproche des 80 ans).

Dans cet eden sauvage et libre, cette jeune demoiselle est toujours en quête de sexualité joyeuse. Elle voudrait venir en aide à un Erythréen, perdu dans le jardin mais la communauté désapprouve fortement. Déçue par "sa famille", elle cherche ailleurs cette liberté d'expression.

*

Malgré la plume joyeuse et moderne, cette histoire m'a ennuyée. J'ai eu l'impression que l'auteure s'est éparpillée dans des sujets pourtant dans l'air du temps. J'avoue que j'ai sauté plusieurs paragraphes (beaucoup de redites). Je m'attendais surtout , d'après le pitch, à une histoire sur la communauté . Mais c'est plutôt une quête initiatique (et d'identité) d'une adolescente précoce.

*

Néanmoins, le portrait de l’héroïne est touchant de sensibilité et de grâce. C'est ce qui a sauvé ma lecture :)
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Hymen

Bienvenue chez les freaks, chers à Emmanuelle Bayamack -Tam!



Avec une ironie un tantinet moins déjantée que celle qu'elle va, plus tard, déployer dans Arcadie, mais avec un sens du trash et de la démesure déjà bien à elle, l'auteure nous jette sans ménagement dans la Cour des miracles!



Imaginez plutôt : un tailleur pour dames, beau comme un archange mais égrotant, pusillanime et effrayé de vivre, subit les assauts d'une vieille clocharde avinée, aussi sexy que ses cicatrices et folle comme une lapine, qui lui fait une cour harcelante à coups de bouquets de fleurs énigmatiques -le "langage" des fleurs n'a pour elle aucun secret...elle est bien la seule!- .



Harcelé , terrifié par cette femelle décatie mais néanmoins en rut, Daniel - le tailleur- reçoit l'aide de Coco, un nabot perspicace , flic heroïnomane, autrefois fleuriste -et donc assez versé dans le langage des fleurs pour comprendre que Clarisse-c'est le nom de la pocharde- prend Daniel- c'est celui du tailleur- pour le fleuriste que lui, monsieur Chienne, -c'est le patronyme de Coco, le flic- fut autrefois avant de céder sa boutique au tailleur et de consacrer sa belle intelligence à des missions de police exaltantes. ..



Vous suivez toujours?



Clarisse a une fille, obèse, métisse de seize ans et d'une beauté irradiante, placée en foyer pour cause d'incurie maternelle. Pour tirer Clarisse de sa folie galopante -elle se prétend infanticide!- , Coco fait sortir la belle du foyer...et la fille à son tour s'éprend du (vrai) Monsieur Chienne!



Les paranos, les jalousies et les fantasmes s'emballent, dûment aiguillonnés par les interventions cocasses du père de Clarisse, un Réunionnais un peu griot, un peu escroc, et dûment. ..aiguillés, si j'ose dire, par les doses de "blanche" que Coco et Daniel s'envoient dans les veines l'un pour oublier sa laideur, l'autre pour oublier sa peur...



Vous ne suivez plus?

Pas grave!



L'amour avec ou sans langage des fleurs, avec ou sans shoot, va emporter tous ces monstres plutôt sympathiques dans un torrent impétueux!



Une chienne n'y retrouverait pas ses petits?



Monsieur Chienne, lui malgré sa surconsommation d'héro, va finir par reconnaître le sien...

Non sans mal!



Déjà très trop, très hot, très trash, très tout...



Drôle à force de surdose en tout genre -dope, sexe et fleurs!- et plein de tendresse pour ces freaks felliniens et attachants, promus à tour de rôle narrateurs de ce récit loufoque et , ma foi, chaleureux, Hymen est l'histoire fleurie d'une défloration calamiteuse qui se termine, in extremis, en marche nuptiale, pour la plus grande gloire de ces modernes quasimodos et laissés-pour -compte qui réclament hautement leur droit au bonheur et leur part du gâteau!



Emmanuelle Bayamack Tam essaie sa plume ironique et fantasque, quelques années avant le succès d'Arcadie...un coup d'essai déjà prometteur!
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Pauvres morts

" Emmanuelle Bayamak-Tam est une écrivaine hors norme. Ses romans traitent souvent des familles dysfonctionnelles, maltraitantes, des marginaux, des parias, des inadaptés. Elle écrit également des romans noirs sous le pseudonyme de Rebecca Lighieri. Dans Pauvres morts elle s’intéresse au grand âge dans un registre aussi émotionnel que satirique et burlesque.

Renée a 83 ans, un âge où on n’attend plus grand-chose de la vie. Elle vit seule entourée de meubles d’une valeur inestimable, une fortune qui pourrait faire craquer un homme malgré son âge. Elle a perdu son mari, une union issue d’un mariage de raison. Elle est laide, disgracieuse, et affronte son vieillissement avec une lucidité cruelle. Son corps se délite, porte les stigmates du temps passé. Corps difforme, flétri. Corps avachi, flasque, grumeleux. La vieillesse est pour Renée une entreprise de démolition.

Habituée à la solitude, avec comme seules activités la messe, les courses et quelques sorties, elle sait qu’on ne lui adresserait pas un regard si ses bijoux somptueux n’attiraient la convoitise. (...)

Justement, c’est à la messe que Renée rencontre Sandor, jeune homme élégant, séducteur et entreprenant, qui s’intéresse à elle. Les désirs bruyants de Renée s’affolent, remontent à la surface. “Il n’y a pas d’âge pour les rêves de midinettes, les entrejambes moites.” Quel prix devra-t-elle payer pour échapper à la solitude ? Trouver des raisons de se sentir encore désirable et vivre une dernière fois des lendemains aimants ? Elle va jouer son va-tout sur cette relation et tout miser sur un dernier sursaut du désir.

Mais ce jeune homme si délicat, si prévenant, aux allures de mari idéal, veut tout d’elle, non seulement sa richesse, mais aussi son âme. Renée, pas dupe, préfère ne rien savoir de ses motivations. Certes Sandor en veut à son argent mais il est prêt à la sortir de l’enfer. Un jour, Renée fait la connaissance de Nelly, elle aussi embarquée dans un prochain mariage arrangé et également désespérée par le désastre de la décrépitude des corps. Elles partagent leur angoisse de la mort et imaginent un subterfuge pour conjurer la décomposition post-mortem. Un pied-de-nez à la mort et à la putréfaction incontournable. Leur amitié va ouvrir l’horizon des possibles et les conduire l’une et l’autre vers des décisions inattendues.

Emmanuelle Bayamak-Tam essaye d’apprivoiser la mort et nous aide à nous familiariser avec ce qu’elle a de plus effrayant. On frissonne à ces évocations d’une crudité mordante. Aucune complaisance dans l’état des lieux de la déconfiture. Un simple fait. Insupportable, intolérable. Le naufrage d’une vie, c’est tout.

Tout est remarquable dans ce roman. Un style à couper le souffle, une histoire d’une richesse narrative exceptionnelle. Emmanuelle Bayamak-Tam mérite d’être reconnue pour ce qu’elle est : une grande écrivaine."

Francine Klajnberg pour Double Marge
Lien : https://doublemarge.com/pauv..
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La treizième heure

Dans ce roman, qui déroge au politiquement correct, on retrouve les thèmes chers à Emmanuelle Bayamack Tam, à savoir la transidentité, à laquelle se rajoute la procréation médicalement assistée.

Roman vocal, « La treizième heure » nous fait entendre la voix des trois protagonistes de l’histoire. C’est Farah, adolescente intersexuée, qui ouvre le bal. Elle était déjà l’héroïne dans « Arcadie » (que j’avais adoré) mais dans une histoire totalement différente.

Farah est élevée par son père, Lenny, depuis que sa mère les a abandonnés peu après sa naissance. D’elle, Farah ne sait rien et elle va mener l’enquête face à un père qui reste muet sur sa naissance et les origines maternelles.

Père et fille vivent dans une communauté poético-religieuse dont Lenny est le prédicateur. Le legs d’une riche adepte met la communauté peuplée de marginaux à l’abri du besoin. Dans cette secte mystique nommée « La treizième heure », on attend le millénium en déclamant de la poésie, Apollinaire, Aragon, Baudelaire, Villon Césaire etc… on pousse aussi la chansonnette lors de karaokés. Tout cela nimbé de bienveillance mais complètement déjanté.

Lorsque Lenny prend la parole, le récit s’ouvre sur son enfance solitaire et son amour pour la poésie. Puis, c’est l’amour fou lorsqu’il rencontre Hind, dotée d’une beauté flamboyante mais aussi d’un égoïsme et d’une cruauté assumés. L’ardente Hind, qui s’attire tous les regards avec ses tenues sexy et son hyper féminité, est une résiliente qui a coupé les ponts avec sa famille algérienne et conformiste. C’est elle qui désire cet enfant avec Lenny, pourtant elle les quittera pour courir après une chimère.

La troisième et dernière partie s’ouvre sur les confidences de Hind qui nous dévoile sa complexité à la fois anatomique et psychologique. Rien ne doit entraver sa soif de liberté et sa sexualité décomplexée.



Roman d’initiation avec le récit de Farah, « La treizième heure », est aussi pétri d’humanité. On y croise des laissé pour compte qui cherchent l’apaisement et l’amour face à un monde violent qui se fissure. C’est aussi teinté d’humour, même si l’angoisse générée par les guerres, le réchauffement climatique et les épidémies, plombe parfois la béatitude des adeptes de la secte.

C’est Farah qui clôt le récit, une Farah lucide et pessimiste qui dit :

« Quand mon père reviendra, ce sera trop tard : les membres du club seront parvenus à leur fin qui est aussi celle de l’humanité. »

Il faut se plonger dans ce roman humaniste qui prône la tolérance pour la différence, roman écrit avec talent et inventivité, on en sort bousculé et c’est tant mieux.



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Arcadie

Vous avez aimé "Zazie dans le métro"? Vous adorerez Farah in Arcadia. Même gouaille, mêmes ambiguïtés sexuelles et textuelles, même joie à jouer sur et de la langue, même amour de la liberté, même trouble identitaire, même manque de fiabilité des adultes, même insolente modernité...

J'ai gloussé de rire une bonne partie du roman, tout en me doutant que ça n'allait pas durer: on le sait, "ego in arcadia" dit la mort, il n'est de monde rêvé qui ne déçoive.

Farah vit donc en utopie, au milieu d'une nature préservée, jouissant de la bienveillance généralisée des adultes, comblée de livres et de sexe... Généralement, les romans d'éducation nous invitent à une austère émancipation: Candide doit quitter le beau château de Thunder-Ten-Tronck et découvre l'horreur du monde, il ne se consolera que très médiocrement à cultiver son jardin. Pour Farah, si le monde idéal de l'enfance se fissure - et pas qu'un peu -, si elle devient adulte en découvrant les vertus du compromis (mieux vaut des idéalistes petits-bourgeois que pas d'idéalisme du tout), c'est pour s'affranchir de toute limite: nous avons pouvoir sur tout, rien ne nous détermine et surtout pas notre corps, et ce fichu monde idéal, il est hors de question de nous dire qu'il n'existe pas, parce qu'on va le construire, et fissa!

Et comme la liberté demande à se défaire de tout genre assigné, ce liv/bre n'est pas tout à fait un roman et navigue entre conte philosophique et centon, actualité brûlante et sagesse antique, oralité débridée et écriture ciselée.

"Mon héritage est là aussi, dans la certitude que l'infraction doit primer sur la norme, dans la conviction qu'il ne peut y avoir de vie qu'irrégulière et de beauté que monstrueuse. Je suis née pour abolir l'ancien testament, qui a toujours légué le monde à ceux qui avaient déjà tout, reconduisant éternellement les mêmes dynasties dans leurs privilèges exorbitants. La guerre des trônes n'a pas eu lieu, elle n'a été qu'un simulacre, un jeu de chaises musicales, un échange de bons procédés entre nantis, qui excluait toujours les forçats de la faim, les captifs, les vaincus – et bien d'autres encore."

Encore.

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Si tout n'a pas péri avec mon innocence

Kimberley aurait pu s’appeler Anastasia et s’inscrire avec un peu plus de cohérence dans la fratrie. Arrivée en troisième, après Svetlana et Ludmilla, elle précède de quelques années Lorenzo et Estéban. Oui, même si elle s’était appelée Anastasia, la logique n’y aurait qu’à peine gagné. Disons que l’absence de sens aurait paru un peu moins patent. C’est que, dans la famille de Kimberley, foutraque et foldingue ne sont pas des vains mots. Une mère atteinte d’un bec de lièvre au moins aussi massif que son ego, un père bellissime, nain et définitivement infantile, une grand-mère aux abonnés absents la plupart du temps et Charlie, un grand-père pas beaucoup mieux. Tout ce petit monde vit les uns sur les autres dans une grande barraque qui tient par on ne sait quel miracle. Les enfants sont élevés à la va comme je te pousse et si notre Kim développe d’abord une passion pour la gymnastique synchronisée puis, surtout, pour les poèmes de Charles Baudelaire, ce sont des excentricités qui ne déparent pas au tableau global.



On est un peu chez Anna Gavalda, un peu chez Jean-Baptiste Andrea, chez Kusturica aussi, il y a quelque chose chez les personnages qui rappelle les contes, une définition à gros traits permettant la mise en place de forces et le déploiement d’un récit plein d’adversité et de péripéties. On aura donc un abricotier d’abord adoré puis honni, la folie, celle dont on rit avec incrédulité et fascination quand on en contemple les effets bien à l’abri et celle qui tue, un gala de gym, un amant insatiable, une maquerelle sur le retour, une « bizarre déité, brune comme les nuits (…) Sorcière au flanc d’ébène, enfant des noirs minuits » (« Sed non satiata »), bref tout un attirail pour jalonner le chemin initiatique de Kimberley, de sa naissance à ses 18 ans. Ah oui, et une bande son digne du meilleur dancefloor.



Forcément, avec tout ça, ma lecture de Si tout n’a pas péri avec mon innocence m’a fait penser à un après-midi à la fête foraine. Le goût sucré des pommes dégoulinantes de sirop rouge cachant à peine l’acidité de leur chair et le malaise jamais loin à la lecture de cruautés familiales traités avec une apparente légèreté qui n’en souligne que mieux le scandale. Des moments d’exaltation, petit train qui escalade les pentes ardues de l’adversité, force du personnage qui déplace des montagnes, se bat, lutte et parvient souvent à tirer les marrons du feu. Et puis la redescente, celle de la souffrance bien sûr, des drames qui se nouent et de l’histoire de Lorenzo, centrale pour les trois quart du roman. Mais aussi la descente qui vous fait voir l’envers du décor : les arches métalliques pour tenir les paysages peints à la gouache, le bruit des machineries à envoyer du rêve et des bulles. C’est le problème avec les personnages de contes modernes, ils servent souvent une démonstration et j’ai trouvé, surtout dans le dernier tiers du livre, cette dernière outrée. Pas mal de sujets de société y passent, bien trop pour un seul roman, dans une invraisemblance qui n’a plus rien de drôle ou d’efficace mais confine au didactique. Charonne est à ce titre l’emblème d’un personnage sacrifié à la caricature.



Je ressors de cette histoire un peu écœurée et pas tout à fait convaincue. Reste que la peinture de cette famille complètement déglinguée touche quelque chose et que, sous une écriture parfois racoleuse, on saisit l’intensité d’une douleur qui sonne juste, l’énergie mise en branle pour lui résister, la force vitale qui lui est opposée. Et ça, pour le coup, c’est réussi. Merci à Anna d’avoir mis ce roman sur mon chemin.

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Arcadie

Il y a quatre ans, nous sommes partis en vacances avec une de mes grandes copines : Paula. À cette époque - parce que les choses ont un peu changé - Paula n'avait ni téléphone portable, ni ordinateur, ni voiture, ni montre à quartz. Elle refusait de mettre un pied dans un Mac Do, mangeait bio, luttait contre le nucléaire. Un de mes fils se souvient encore du jour où, tandis que nous attendions le train, il lui demanda de bien vouloir tenir quelques minutes son téléphone portable, le temps qu'il déballe un sandwich.

Elle refusa.

Tout net.

Il était hors de question que Paula tienne en main un appareil risquant de propager des ondes nocives.

Eh bien, je me dis maintenant, après avoir lu Arcadie, que Paula aurait presque pu rejoindre Liberty House, une sympathique petite communauté d'êtres sensibles allergiques aux ondes électromagnétiques, aux phtalates, au glyphosate, aux pesticides, aux sels d'aluminium, aux perturbateurs endocriniens, aux réseaux sociaux etc, etc… Une petite bande d'énergumènes antispécistes, amoureux de la nature, du grand air, prenant le temps de vivre, de raconter leurs rêves au petit déjeuner et de s'adonner aux plaisirs de l'amour libre.

Elle aurait rencontré toute une bande d'éclopés de la vie, d'adorables inadaptés au monde moderne, de semi-fous ou de semi-sages terrorisés par une époque dont certains aspects sont, avouons-le, pour le moins effrayants …

Une secte ?

Oui et non...

Bichette (allergique à tout) et Marqui (amoureux de Bichette), parents de la narratrice, ont littéralement fui leur maison pour se réfugier dans une bâtisse ancienne au coeur de la pinède, espèce de zone blanche, de société « idéale » et utopique coupée du monde et de ses fléaux.

Reçus à bras ouverts par une espèce de bon gourou généreux et consolateur, promettant paix, repos et bonheur sans WIFI, ils ne sont jamais repartis, heureux de cette vie protégée où l'on évolue nu, sans tabous et où l'on couche avec qui l'on veut du moment qu'il y a un minimum de réciprocité dans le désir !

Leur fille, Farah, la narratrice, a grandi à Liberty House, parmi les arbres et les écureuils, sans téléphone portable, ordinateur ou télévision. La pauvre ! Contrairement à beaucoup d'ados, il ne lui restait comme occupations que la lecture, l'observation de la nature et des hommes (les habitants de Liberty House!), la discussion et la réflexion. Évidemment, elle a échappé aux diktats de la mode : son corps a poussé sans qu'elle cherche à ressembler aux starlettes du web ni à qui que ce soit d'ailleurs.

À quinze ans, lucide, perspicace et d'une grande intelligence, elle analyse avec beaucoup d'humour, de dérision et de distance la situation hors du commun que ses parents lui ont imposée. Les portraits qu'elle fait des habitants de Liberty House sont hilarants : Arcady, le gourou, avec son blouson Sonia Rykiel en velours matelassé orange, Fiorentina, la cuisinière et « ses beignets de fleurs de courgettes, polenta aux cèpes, tourtes aux blettes et à la tomate sorrentine, flans de pleurotes, tagliatelles aux truffes, ravioles au pesto de roquette... », Kirsten, la grand-mère LGBT ; Dadah, son fauteuil roulant à sept mille euros et son maquillage outrancier ; Epifanio et son « baile sorpresa », sans oublier Victor, un brin obèse sous ses chemises à manches bouffantes et les autres, tous les autres : Nelly, Djilali, Malika, Daniel et Edo, le cochon truffier. Quelle équipe que tous ces extravagants à la fois ridicules et follement attachants !

Mais inévitablement, Farah finit par connaître les joies du collège et les chants tentateurs des sirènes du monde moderne. Elle s'interroge sur son corps (qui ne ressemble pas trop à celui de ses petites camarades) et sur son identité (qui suis-je… fille OU garçon? L'un ET l'autre ? Doit-on forcément choisir ? Difficile question du genre ...)

L'intrusion d'un migrant dans cet éden va avoir des conséquences inattendues sur Farah, l'amenant à remettre sérieusement en cause la philosophie profonde de son gourou adoré.

Bon, je le dis, depuis que j'ai achevé la lecture de ce livre, je le crie haut et fort sur tous les réseaux sociaux, pour moi, c'est le meilleur : il est d'une drôlerie irrésistible - j'ai ri, tellement ri -, il est cinglant et tendre, sarcastique et bienveillant, tendrement ironique, pénétré de l'air du temps, humain, tellement humain et, pour couronner le tout, si bien écrit qu'on se délecte de chaque ligne… Et puis, quelle sensualité, quelle poésie dans l'évocation de cette nature éblouissante, des corps qui s'y épanouissent dans une espèce d'osmose parfaite !

Quant à la fin, magnifique hymne à la liberté et à l'amour, elle est d'une telle beauté qu'elle vous tord le ventre et vous brouille les yeux.

Un grand texte !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Arcadie

Quelle déception ! J'ai eu l'impression de lire un pastiche à la sauce trash et ultra contemporaine de l'Arcadia de Lauren Groff.

Dans les deux romans il est question d'une communauté autarcique, respectueuse de la nature, adepte de l'amour libre, sur laquelle règne un gourou tout puissant et où les enfants sont livrés à eux même etc. Mais autant l'un est beau et poétique, autant l'autre est glauque, à la limite du vulgaire. La communauté d'Emmanuelle Bayamack-Tam ressemble plutôt à une vraie cour des miracles et en fait d'amour, c'est plutôt la lubricité qui fait sa loi. L'auteure a du bien s'amuser à écrire ce roman et j'avoue que son culot m'a fait sourire pendant les 200 premières pages mais malgré la vivacité de sa plume, je me suis lassée de toutes ces obsessions libidineuses. J'ai beau ne pas être prude, j'ai quand même fini par être écoeurée par autant de laideur et c'est sans plaisir que je me suis contrainte à terminer ma lecture.
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Arcadie

Il y a un peu de IQ84 de Murakami pour l’initiation sexuelle, par le ‘gourou’, d’une jeune adepte d’une communauté libertaire. C’est à Liberty House que vit, entre autre, Farah, ses parents, sa grand-mère qui se balade à poil, un piercing sur le clitoris. Dans cette zone blanche, sont bannis les moyens technologiques modernes comme le portable, les PC, etc. Ils se disent ouverts d’esprit, mais de là à héberger un émigrant… Comme ses règles tardent à venir, Farah consulte une gynéco qui lui apprend qu’elle n’a pas d’utérus. Son physique particulier va, peu à peu, se métamorphoser, mais pas comme la norme. Plusieurs éléments ressortent de ce roman. Acceptation des différences - tout le monde couche avec tout le monde sans distinction d’âge et de sexe - et ce qui culmine, et que j’ai aimé, ce sont les petits clins d’œil aux romans, films, chansons qui permettent à notre cerveau de se remémorer de bons souvenirs. Un style fluide, les pages tournent vite. Un ressenti plutôt mitigé. Le recul me dira quoi en penser.

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La treizième heure

J’ai pensé que La Treizième Heure pouvait être une sorte de clin d’œil à La Vingt-Cinquième Heure, mais non, rien à voir, je crois. Trois narrateurs prendront successivement la parole : Farah (la fille), Lenny (le père), Hind (la mère), et de nouveau Farah pour une très brève quatrième partie. Mais rien n’est aussi simple qu’il n’y paraît. Farah, remarquablement lettrée et emplie de maturité pour son âge, commence à raconter son parcours d’adolescente intersexuée. Sa mère a disparu quelques jours après sa naissance. Son père a fondé une sorte de secte – il refuse de toutes ses forces cette appellation – disons donc une congrégation, dont il est le charismatique gourou. Farah juge et son père et ses adeptes avec beaucoup de lucidité, mais aussi de partialité, ce qui n’est pas incompatible : indulgente pour certains, elle dénigre certains autres. Elle brûle de curiosité envers cette mère qu’elle n’a pas connue et dont son père évite de parler autant que possible. Quand elle interroge ses grands-parents paternels, ils se défaussent ou disent n’importe quoi. En fait, ils disent toujours n’importe quoi. Quand Lenny prendra la parole à son tour, le lecteur comprendra certaines de ses réticences : il est des situations bien complexes à expliquer à une adolescente et les apparences sont souvent trompeuses… L’intervention de Hind bousculera ce que l’on croyait savoir. Je ne vois pas comment en dire plus sans révéler trop d’éléments dévoilés progressivement et parcimonieusement dans le roman.

***

Un roman surprenant, parfois dérangeant et furieusement dans l’air du temps… C’est peut-être ce qui m’empêche d’être plus enthousiaste : une sorte de surenchère dans la volonté de traiter les questions de genre et d’identité. L’autrice aborde aussi plusieurs autres thèmes contemporains, mais sans s’y attarder. La plongée dans les interrogations et les souffrances des trois personnages mène forcément à leur propre vision de l’identité, intimement liée à leur histoire personnelle, et dénote une profonde empathie de la part d'Emmanuelle Bayamack-Tan, empathie qu’elle a parfaitement réussi à me faire éprouver. Le personnage de Hind est sans doute le plus étonnant, mais aussi le plus fouillé, celui qui réserve le plus de surprises parce qu’il ne correspond pas à l’image qu’il projette, ni à ce que les autres, même les proches, en perçoivent. Le personnage de Lenny ne m’a pas convaincue, encore moins celui de Kenny, son frère (merci aux parents !) dont le rôle perturbateur est à peine effleuré. Il m’a semblé que la lucidité et le courage de Farah détonnaient avec son âge et la crise d’adolescence qu’elle traversait. Bref, en dépit de mes réserves, je trouve que c’est un bon roman, plein d’humour, de poésie et de chansons, un récit qui traite crûment et sans pudeur de questions délicates dans une optique résolument contemporaine.

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Arcadie

Depuis l’âge de six ans, Farah vit dans une communauté genre secte avec ses parents. Elle en a maintenant seize.

A part les portables et internet qui sont proscrits, la vie est libre, l’amour est libre.

Elle ne sait pas si elle est fille ou garçon.

Arcadie, c’est le surnom du gourou.

A part de la page 200 (sur 435), j’ai terminé en sautant de plus en plus de pages.

Franchement, je ne vous pas l’intérêt de cette histoire.

Certains passages sont amusants, d’autres très crus, mais dans l’ensemble, c’est long et je me suis fort ennuyée

J’ai du mal à comprendre que ce livre ait obtenu le prix du livre Inter.

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Si tout n'a pas péri avec mon innocence

Née dans une famille nombreuse et atypique, d'une mère égocentrique affublée d'un bec de lièvre et d'un père tatoueur, Kimberly a 9 ans quand elle décide de renaître. Désormais, elle continuera de vivre avec ses frères, ses soeurs, ses parents, ses grand-parents mais en gardant ses distances. Mis à part ses petits frères, aucun membre de sa famille ne trouve grâce à ses yeux, ni Gladys, sa mère fantasque qui délègue l'éducation de ses enfants et les problèmes domestiques à sa propre mère, ni son père qui obéit aux désirs de sa femme sans discuter, ni ses soeurs aînées stupides reproductions de leur génitrice, et certainement pas son grand-père Charly, vieux beau qui se croit irrésistible. De toute façon, le seul Charles qui compte, c'est Baudelaire qui lui permet de s'évader grâce à ses vers. Kimberly grandit dans son monde avec la poésie, les jeux avec ses petits frères, l'éveil à l'amour avec sa professeure de GRS, le sexe avec un garçon qu'elle n'aime pas. Mais le fossé se creuse encore avec sa famille quand ils sont frappés par un terrible drame : Lorenzo, son petit frère, son petit agneau, se donne la mort, épuisé d'être le souffre-douleur de ses camarades de classe parce qu'il était roux. Personne n'a su saisir l'ampleur de sa détresse. Pour Kimberly, le choc est violent et l'éloigne encore un peu plus de sa famille pour trouver refuge auprès de la sage-femme, désormais retraitée, qui a assisté à la naissance de Gladys. Auprès de la vieille dame, Kimberly se cherche et multiplie les expériences.





Un joli titre, une écriture sympathique et une histoire familiale qui démarre plutôt bien pour finir par se perdre complètement dans du grand n'importe quoi. Il y a quelque chose de dérangeant dans le récit de cette fillette qui refuse de s'intégrer parmi les siens. Certes, ils sont loin d'être aussi brillants qu'elle mais son absence de sentiments est tout de même effrayante. On peut composer avec ce fait, après tout, on ne choisit pas sa famille et Kimberly a le droit de maudire le hasard qui l'a fait naître chez ces personnes avec lesquelles elle n'a pas d'atomes crochus, soit. Ce qui est plus difficile à intégrer, c'est la façon dont elle veut à tout prix s'en démarquer, allant jusqu'à des extrémités difficilement compréhensibles.

Après un début prometteur, Emmanuelle BAYAMACK-TAM perd son lecteurs dans les méandres de son imagination fertile mais incontrôlée. D'autant plus dommage qu'une gamine qui cite les grands poètes est un personnage plutôt réjouissant...
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Arcadie

Une bibliothécaire enthousiaste, le prix Livre inter 2019, voilà comment je me suis plongée dans Arcadie signé par Emmanuelle Bayamack-Tam.

Un univers fort éloigné du mien, une communauté libertaire établie dans une zone non loin de la frontière italienne. Liberty House offre à ses "pensionnaires" un havre de paix en dehors du monde ou presque. Une zone blanche hors de toute antenne-relais, ni téléphone, ni internet , un régime végétarien, une survie en autarcie, la liberté de vivre sa sexualité à sa guise. Voilà le lieu où se sont réfugiées une trentaine de personnes, tous en butte avec une société qui les rejettent sans vergogne. Farah y est arrivée avec ses parents à l'âge de 6 ans. Les années ont passé, elle a grandi et s'est découvert différente.

Ce roman foisonnant aborde une multitude de sujets de société: l'environnement , les nouvelles technologies, leur nocivité, l'intersexuation, les migrants, les sectes et leurs dérives potentielles. ...Quand l'abondance nuit à la perception du propos.

Beaucoup de longueurs, beaucoup de redites, seule Farah et sa métamorphose physique et psychologique m'ont empêché de fermer ce roman avant la fin.













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