Plus d'une fois, le lecteur est invité à sourire ou à rire, aux dépens des bruyants matamores des abattoirs. Condamner l'antisémitisme, après tout, est un acte de salubrité publique élémentaire. Mais en rire ? L'affaire n'est-elle pas un sujet grave et l'antismémistisme une bête immonde avec laquelle on ne badine pas ? Sans doute. Mais le rire a sa place dans l'écriture de cette histoire, qu'il répond à des méthodes et à des objectifs." (p.12)
La plupart des historiens travaillant sur l’affaire Dreyfus ou sur la montée de la « droite révolutionnaire », pour reprendre l’expression de Zeev Sternhell, évoquaient rapidement l’agitation et les violences antisémites des bouchers de La Villette. Mais ceux-ci étaient réduits à un élément incongru, un détail détonnant. Or, cherchant un sujet de maîtrise en 1996, je voulais étudier les liens entre les faits sociaux et les représentations d’une part et les pratiques de la violence politique urbaine d’autre part. Je cherchai un objet au « ras du sol » ou plus précisément au « ras du pavé » parisien. Ces bouchers, qui constituaient l’élite des services d’ordre antisémites, étaient donc un morceau de choix. (extrait de l'entretien d'Eric Fournier avec W. Blanc du site Goliards, les humanités populaires).
Les émeutiers, menés par ceux des echaudoirs, chargent la rousse,aux cris de "Mort aux vaches"!
Pour la seule fois sans doute de l'histoire des émeutes parisiennes,ce cri convenu est hurlé par des professionnels de la chose.
Un prétendant au trône de France persuadé qu'une poignée de nervis peut renverser la République, sous prétexte que leurs mains ne tremblent pas lorsqu'ils égorgent un bœuf solidement entravé.
Interrogé par le journal, un boucher confirme que les abattoirs ourdissent un "lomplotcrème contre la lépubliquereme". En une journée, le pouvoir doit être renversé. Inquiétant ? Non, risible. Car le journal en question est Le Rire, hebdomadaire satirique.