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Critiques de Eric Reinhardt (796)
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L'Amour et les Forêts

Aïe, une fois de plus, j'ai lu un roman comme on marche pieds nus sur les galets. Entre douleur et perte d'équilibre, j'ai avancé cahin caha sur la plage des pages d'Eric Reinhardt, attentive à chaque mot, à chaque émotion, m'appliquant sincèrement à y dénicher les formes séduisantes ou torturées, les formes mystérieuses qui intriguent et dans lesquelles se niche la magie du temps et de la nature…



En vain ai-je cherché.



De poésie, je n'en ai pas trouvée ; à peine quelques jolies phrases aussi fugaces que des papillons impossibles à prendre au filet.

De séduction, je n'en ai pas trouvée ; à la place, des scènes de sexe quasi cliniques, aussi dénuées de sensualité que de sensibilité.

La sincérité, le naturel, je ne les ai pas trouvés, dérobés à mes regards par le style pompeux, souvent prétentieux, d'un auteur poseur qui, selon l'expression consacrée "se regarde écrire". Le narrateur m'a donné la pénible impression de se masturber à chaque ligne (et pas seulement dans le train).

D'amour - ce que je nomme vraiment "amour" -, peu de traces tangibles mais un court mirage né en quelques clics sur internet et étouffé dans l'oeuf.

Par contre, des forêts, une multitude, je rends à César... Des forêts denses, sombres, impénétrables, encombrées de taillis de mensonges, d'ornières de malheurs, de fûts de violence, d'écorces de haine et de lichens de psychologie, souvent facile et superficielle.



Arrivée au bout de la promenade, j'ai quitté la plage, soûlée d'ennui et déçue dans ma quête ; je ne saurai jamais pourquoi ce titre s'était gravé dans mon cerveau comme un message d'optimisme et d'élévation, je me sens fatalement dupée ; j'ai eu froid, j'ai eu faim d'une beauté qu'on s'est obstiné à me refuser. Bénédicte Ombredanne (quel nom !) fut malheureuse, il semble en effet qu'elle ait été injustement désignée pour subir et souffrir, toute sa vie, elle se sera enlisée dans le malheur, feignant de ne pas voir les issues de secours qui bordaient sa route... Une âme torturée, nulle part à sa place, une âme qui aurait voulu vivre en héroïne et qui n'aura été que victime.



Un récit triste et plombant.

Après, si vous rêvez d'apprendre à tirer à l'arc ou de visiter une clinique psychiatrique vintage, foncez.





Challenge de lecture 2015 - Un livre recommandé par un ami
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L'Amour et les Forêts

Il était une fois Bénédicte Ombredanne, intelligente, agrégée de lettres passionnée de littérature, belle, âgée de trente-six ans, mariée, deux enfants. Elle avait à l'aube de sa vie adulte tout pour être heureuse, une famille aimante, une boulimique et joyeuse envie de vivre. Un portrait d'une jeune femme d'aujourd'hui dans lequel de nombreuses lectrices pourraient probablement glaner des éléments d'identification.



Mais voilà, les parcours de vie apparemment tout tracés achoppent souvent aux vicissitudes du réel et comme dirait un duo célèbre : les histoires d'amour finissent mal, en général !



Éric Reinhardt, par un procédé d'auto-fiction ingénieux nous l'annonce dès le premier chapitre : il a rencontré en 2008 cette lectrice, ému par une lettre admirable qu'il a reçue à la suite de la parution d'un de ses romans. Ayant ressenti des failles chez cette femme, il a poussé l'investigation - le roman - pour découvrir son histoire, et offrir ici le portrait subtil d'une héroïne au bord du gouffre, compatissant certes, mais non complaisant, car elle semble bien s'être laissée enfermée progressivement Bénédicte, à force de renoncements personnels face à un mari, ami d'enfance terne et sans grande envergure, et deux enfants égoïstes.



Alors naturellement, un jour, elle aspire à se retrouver, à jouir davantage de la vie, à ne plus subir, à " un âge auquel il est impardonnable de se priver des plaisirs, des jouissances, des richesses et des gratifications qu'on est en droit d'attendre de la réalité quand on est une femme sensible, intelligente et cultivée. "

Sur un coup de tête, elle s'inscrit sur Meetic - quelques savoureux échanges virtuels - et rencontre Christian, antiquaire habitant à l'orée d'une forêt qui se propose de l'initier au tir à l'arc et plus si affinités.

Pour la suite, ne comptez pas sur moi. Il faut se laisser embarquer dans les valses-hésitations de Bénédicte, la jalousie maladive de son mari, les révélations de sa sœur...l'héroïne brièvement heureuse n'est malheureusement pas tirée d'affaire, empêtrée dans ses contradictions et atermoiements, elle peine à récupérer les rênes de son existence.



Ce roman de révolte d'une femme, mais aussi de l'auteur me semble-t-il, face au harcèlement conjugal et aux renoncements quotidiens d'une épouse et mère est un bijou de précision psychologique, à l'écriture fluide et agréable.

La tension entre Bénédicte et son mari devient insoutenable au fil du roman, la joie et le plaisir qu'elle parvient à arracher au quotidien ne faisant que péniblement contrepoids.

On a souvent envie de la secouer Bénédicte, signe que l'alchimie romanesque opère, d'autant que plusieurs occasions se présentent à elle pour s'échapper, enfin, dont en filigrane le bonheur de l'écriture qu'elle redécouvre.

" Quel bonheur que d'écrire, quel bonheur que de pouvoir, la nuit, souvent la nuit, s'introduire en soi et dépeindre ce qu'on y voit, ce qu'on y sent, ce qu'on entend que murmurent les souvenirs, la nostalgie ou le besoin de retrouver intacte sa propre grâce évanouie, évanouie dans la réalité mais bien vivante au fond de soi..."



Un magnifique roman témoignage qui peut et souhaite peut-être servir de signal d'alarme aux héroïnes du quotidien.
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L'Amour et les Forêts

Ce roman m'a littéralement bouleversée, le coeur serré et les larmes aux yeux, je referme la dernière page de cette terrible histoire.



Bénédicte Ombredanne, trentenaire, agrégée de lettres, se prend d'affection pour l'écrivain Eric Reinhardt suite à la lecture de son roman. L'écrivain se retrouve bouleversé à son tour par cette femme qui semble avoir accusé les mauvais coups toute sa vie. Il nous raconte son histoire.



L'histoire d'une femme emmurée dans une relation toxique, malsaine, destructive, elle se sent prisonnière, ligotée de toute part. Son mari Jean-François est un homme ignoble, un tortionnaire sans coeur. Après une énième dispute violente, Bénédicte n'en peut plus, elle s'inscrit sur Meetic et sur ce marché de l'amour, elle rencontrera Christian, le cupidon de l'amour avec son arc à flèches. Bénédicte se précipite la gueule ouverte, le coeur pendant, la bouche asséchée dans cette rencontre sans lendemain. Tout va très vite. Tout est beau, tout est puissant, la passion, le désir, le bonheur, la simplicité d'être un peu aimée pour ce qu'elle est. Les pages sont comme un rayon de soleil dans la forêt noire, une lumière qui enveloppe ces deux-là avant l'orage. Car ce qui attend Bénédicte à son retour ressemble fort à l'enfer.



La forêt, de manière allégorique est très bien mise en avant ici, que ce soit à travers tous les dangers que celle-ci recèle, l'ombre qu'elle laisse planer sur ses promeneurs, la liberté d'attraper la lumière pour grandir encore, Bénédicte est une femme meurtrie, prisonnière de son mari, mais chez qui brûle une lumière et une envie de liberté magistrale. Qui n'aura de cesse d'être étouffée par le mépris et l'indifférence des siens.



Un roman bouleversant et d'une tristesse infinie où l'agonie d'une femme est travaillée avec brio, une psychologie à fleur de peau pour décrire les ravages de la perversion, une femme comme bien d'autres qui ne s'en sortira pas indemne comme bon nombres de lecteurs...
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Sarah, Susanne et l'écrivain

Eric Reihnart signe un nouveau roman magistral, Une histoire hors norme, menée tambour battant, aucune fausse note, tout retranscrit avec dextérité, sensibilité et poésie Il faillait oser écrire sur un tel sujet , qui m'a littéralement scotchée. L'auteur manipule les mots, écrit ses textes en usant d'un vocabulaire élaboré, qui peut rendre la lecture longue, lourde pour certains lecteurs, mais un conseil, il faut perdurer, trouver la bonne porte pour rentrée dans son monde littéraire,



Sarah suite à un cancer du sein et en état rémission, se rend compte que sa vie, n'est pas on 'est plus comme avant. Elle veut mettre par écrit avec l'aide d'un écrivain, l'histoire d'une partie de sa vie, Sarah devient Suzanne, Suzanne est la narratrice, elle extériorise les désillusions de sa vie de femme, de mère. Elle ne ressent plus les mêmes sentiments vis à vis de sa familles, elle s'aperçoit que son mari, ce dernier possède 75 pour cent des parts du mobilier, un gouffre s'installe entre eux Au fil de la lecture, Suzanne et Sarah sont deux âmes soeurs, il faut se reconnecter pour redéfinir le rôle de chacune dans cette histoire complexe , Suzanne décide de quitter son domicile, pour un laps de temps, à ce moment, des moments douloureux refont surface, une femme manipuler reléguer au rôle de mère au foyer, cette manipulation psychologique, un emprise extrême, l'exploitation financière, cette tomber dans les méandres de la folie, et essayer de refaire surface, reprendre le cours de sa vie, L'auteur s'approprie cette histoire d'une façon remarquable, du début jusqu'au final, déroutant,



Laissez vous transporter, dans l'histoire de Sarah Suzanne et l'écrivain, vous ne le regrettez pas
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L'Amour et les Forêts

Pour mon premier Reinhardt, je m’attendais à un livre bouleversant et réussit. Les critiques élogieuses abondaient dans ce sens. Mais voilà en ce qui me concerne, pour « L’amour et les forêts », je serais bien moins emballé que la plupart. Car, je me suis profondément ennuyé sur la première partie du livre, entre des discussions sur Meetic, un cours sur l’utilisation d’un archer et une certaine préciosité de Reinhardt, ma déception était à la hauteur de l’envie. Et puis, tout à coup, Reinhardt cesse enfin de se regarder écrire et par la voix de la sœur jumelle de Bénédicte Ombredanne, le roman prend enfin son envol. Et là ça devient bouleversant. La souffrance morale, physique de Bénédicte vous éclate à la figure. Comme sa sœur, on aimerait la prendre dans nos bras et la consoler de cet enfer familial. On se révolte devant ce mari abominable dans la manipulation. Et l’on termine le cœur chaviré par les drames vécue par cette femme. « Le système Victoria » m’attend maintenant, histoire de me faire une idée plus précise de cet auteur couronné par le Renaudot des lycéens.
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La chambre des époux

Il y a dix ans de cela, alors qu'Eric Reinhardt peine à finir son roman Cendrillon, sa femme lui annonce être atteinte d'un cancer du sein. Elle lui propose un marché : il termine son roman, elle guérit. le combat commence. Eric écrit fiévreusement et chaque soir lit à son épouse des extraits de son livre pendant qu'elle-même lutte pour sa survie. Finalement, Cendrillon est un succès, Margot est en rémission. L'amour et l'art ont guéri Margot, c'est ce que veut croire Eric qui, quand il rencontre Marie qui lutte contre un cancer du pancréas, croit être capable de la sauver elle aussi.

De cette expérience très personnelle, Eric voudrait faire un roman. Il en a déjà le titre, ''Une seule fleur'', le canevas, mais il n'en fait rien. Et puis l'idée revient. Ce sera La chambre des époux, l'histoire de Nicolas, un compositeur, et de sa femme Mathilde, Elle souffre d'un cancer, il écrit une symphonie et tous les soirs lui la joue. Elle guérit et quand il rencontre Marie, il croit pouvoir la sauver, en l'aimant, en la possédant, en luttant à ses côtés.



Alors bien sûr certains qualifieront ce roman gigogne de brillant exercice de style porté par un style magnifique et j'ai même pu lire qu'il s'agit là d' ''Une ode fascinante à la beauté, à l'art et à l'amour.'' C'est un point de vue et je le respecte mais j'ai tout de même une petite question pour l'auteur, l'éditeur et leurs amis critiques littéraires : et si ce roman était tout simplement un vaste foutage de gueule, une daube, du vide mis en page ? Personnellement, j'ai détesté cette mise en scène de la maladie, cette sublimation du cancer. Je n'ai pas cru un instant à ce romantisme bidon et à ces scènes de sexe ridicules. Non le cancer, ce n'est pas beau ! Même si on aime de tout son coeur le malade, il faut vraiment être tordu pour vouloir infliger un acte sexuel à quelqu'un qui dépérit sous l'action conjuguée de la maladie et de la chimiothérapie. Mais là encore c'est une question de point de vue...Par contre, il faut aimer Eric Reinhardt d'amour pour supporter son omniprésence tout au long du récit qu'il soit Eric ou Nicolas ou le pape, il est partout, il aime, il pleure et il guérit même avec sa semence, du moins le croit-il, bref il est Dieu tout puissant. Et son style ?Lourd et pédant. Les phrases sont looongues, le discours est précieux, le sens parfois s'égare dans une ennuyeuse logorrhée.

Je n'ai donc aimé ni le vrai faux roman, ni le roman dans le roman, ni le roman qui n'a jamais été écrit, ni rien dans ce livre prétentieux, auto-fiction où Reinhardt est présent jusqu'à l'overdose. Ce n'est bien sûr un avis qui n'engage que moi.



Merci tout de même à Babelio et à Gallimard.
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Comédies françaises

°°° Rentrée littéraire 2020 # 27 °°°



Ce roman protéiforme est incroyablement vivant ! J'ai aimé les deux comédies françaises racontées dans ce roman ... à moins qu'il y en ait plus que cela !



Le premier roman dresse le portrait d'un jeune journaliste, Dimitri dont on apprend dès la première page sous forme de faire-part qu'il a trouvé la mort à 27 ans dans un accident de voiture. Eric Reinhardt prend le temps de nous présenter ce personnage aussi attachant, intéressant qu'agaçant. Il déroule le fil de la vie de Dimitri, brillant, mobile et insaisissable à travers une carte du tendre très mouvementée, Dimitri tombant souvent amoureux et courant après une femme qu'il rencontre en plusieurs lieux. C'est assez irrésistible, on a l'impression d'être dans un Truffaut à suivre un personnage qui fusionnerait le Jean-Pierre Léaud de Baisers volés et le Charles Denner de L'Homme qui aimait les femmes, irrésolu, idéaliste et ayant du mal à s'extraire de ses rêves pour vivre dans la réalité.



Le deuxième roman est une enquête, celle que poursuit Dimitri, en fait le récit d'un fiasco français qui a conduit la France à passer à côté de la possibilité de devancer les Etats-Unis dans la création d'Internet. La thèse d'Eric Reinhardt est ultra convaincante et documentée, construite autour du témoignage de l'ingénieur informatique Louis Pouzin : il a conçu le système de transmission de données électroniques, le datagramme. Même si je ne suis pas du tout fan ni experte en geekerie, l'auteur nous ferre en construisant son enquête quasi comme un thriller. Les pages sont mordantes et fort sarcastiques, tirant à boulet rouge sur la vieille France, sur les privilèges d'une classe politique sclérosée par le lobbying, sur le corporatisme stupide des corporatismes et l'impunité des puissants qui ont aveuglé et manipulé le pouvoir en place ( en l'occurence Valéry Giscard d'Estaing qui se targuait pourtant de modernité et a choisi le Minitel plutôt qu'Internet ). C'est acerbe et hautement réjouissant !



Pour autant, est-ce que j'ai aimé que ces deux romans n'en forment qu'un seul ? J'avoue que je n'ai pas toujours vu le lien entre le récit intime centré Dimitri et l'enquête à charge. C'est vrai que dans les deux cas, Eric Reinhardt pointe du doigt ces moments où le destin bifurque, ces événements qui devient le cours des choses et font basculer dans un après. Mais il m'a manqué un autre fil conducteur que le simple fait que Dimitri mène l'enquête lui-même. Bref, je me pose encore la question.



Ce qui est sûr, c'est que ce roman est d'une vivacité remarquable. Que l'acuité sur l'époque dont fait montre Eric Reinhardt crève les pages. Que le style de l'auteur est incontestablement brillant, son écriture, totalement maitrisée, emplie de nombreux degrés, m'a régalée, notamment dans les dialogues. Et quel humour, qualité plutôt rare pour un roman qui se veut aussi sociologique et politique. C'est souvent très très drôle : les lettres qu'écrit Dimitri à un Giscard nonagénaire pour lui demander des comptes à la frontière du harcèlement sont hilarantes.



A noter une passionnante digression ( ou roman dans le roman, un de plus ) sur la façon dont le peintre Max Ernst apprend à Jackson Pollock la méthode du dripping qui donnera naissance à l'art abstrait américain et permettra à New-York de supplanter Paris comme capitale de l'Art.
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L'Amour et les Forêts

Bénédicte Ombredanne désire rencontrer l’auteur car elle a beaucoup aimé son dernier livre. Elle lui raconte sa vie difficile, auprès d’un mari pervers, harceleur, Jean-François, qui lui fait subir tous les jours une maltraitance psychologique sans bornes.

Bénédicte est agrégée de lettres et enseigne dans un collège. Elle a deux enfants Lola et Arthur dont elle suit les études de très près. Chaque instant de son existence est contrôlé par son mari, elle doit justifier son emploi du temps sans arrêt, n’a pas le droit d’avoir un portable car elle pourrait lui échapper, c’est lui qui l’appelle, qui gère le budget au centime près et se met en colère dès que les explications de Bénédicte ne sont pas suffisamment claires.

Un soir, en rentrant, elle le trouve les yeux rivés sur l’écran de télévision, hurlant dès que les enfants prononcent un mot, car on parle de harcèlement moral et il se reconnaît dans le tableau décrit par les femmes qui témoignent. Il passe une partie de la nuit à pleurer et bien sûr, c’est sa femme qui le console.

Cette nuit-là, persuadée qu’il est conscient de son problème, elle a une furieuse envie de liberté, s’inscrit sur Meetic et discute notamment avec un homme qui lui plaît, Christian et qu’elle finit par rencontrer pour passer avec lui une journée mémorable.

Comment va-t-elle réagir après cette rencontre ? Prendre sa vie en mains ? Je vous le laisse découvrir.



Ce que j’en pense :



J'aime beaucoup ce livre. J’ai eu un coup de foudre en regardant la grande librairie où l'auteur a raconté comment est né ce livre. Si on aime les longues phrases, à la Balzac... un thème difficile qui est abordé sans tabou, cette lecture ne peut pas laisser indifférent à plus d'un titre.

L’écriture est très belle, musicale. Enfin un auteur qui fait de belles et longues phrases et ne s’arrête pas à sujet, verbe, complément. Qu’il parle d’un paysage, des arbres dans la forêt, ou qu’il parle des affects, du ressenti et de la fragilité de son héroïne.

Au début, c’est léger, la rencontre entre l’auteur et Bénédicte, leurs conversations dans le bar… et tout à coup la violence surgit et on hésite à continuer à lire, car elle est décrite de façon très réaliste, les mots sont percutants. J’ai détesté Jean-François viscéralement, avec une sombre envie de meurtre et je me demandais pourquoi elle restait, elle, si brillante par rapport à lui, pauvre aussi bien intellectuellement qu’affectivement. On le voit enfermer progressivement sa femme, l’isoler, la surveillant sans cesse avec perversité.



Bref, un livre poignant, sublime et tellement juste qui ne m’a pas laissée indemne, et qui fait réfléchir face à ce fléau. Certes, je suis dithyrambique, mais c’est justifié et je pense qu’il touchera beaucoup de lecteurs, peut-être davantage les amoureux des belles phrases, remplies de musicalité. Donc : coup de cœur, pépite.



Note : 9,2/10



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Comédies françaises

Éric Reinhardt que je lis pour la première fois m’a emmené dans un roman un peu fou, très long, un peu trop à mon goût. Pourtant, je reconnais que la plume de l’auteur est alerte, incisive, efficace, et qu’il sait accrocher l’intérêt de son lecteur tout en révélant des informations très instructives.

Tout commence avec la quête d’une fille croisée dans Madrid, fille que Dimitri, le narrateur, veut absolument retrouver, croit reconnaître mais disparaît avant qu’il ait pu l’aborder. Seulement, avant que cette quête commence, l’auteur avait inséré l’avis de décès de Dimitri Marguerite et les circonstances de l’accident de voiture qui a causé sa mort, le 16 juillet 2016, sur une route de Bretagne. Sa compagne, Pauline, qui conduisait, étant indemne.

Madrid, Paris, c’est en 2015 puis l’auteur permet de faire connaissance avec son héros qui m’a entraîné dans le monde du lobbying puis dans l’enquête journalistique. Spontané et curieux, Dimitri n’a pu poursuivre son travail trouble de consultant et se retrouve journaliste à l’AFP.

C’est à partir de là que sa rencontre avec Louis Pouzin enclenche ce qui est le cœur du livre : l’histoire de l’inventeur du datagramme qui avait mis au point, bien avant les Américains, ce qui deviendra Internet. Oui, vous lisez bien, Internet aurait dû être français si Valéry Giscard d’Estaing, cédant aux pressions du plus grand patron de l’époque, Ambroise Roux (CGE), n’avait sacrifié tout ce que préparait Louis Pouzin et son équipe à l’IRIA (Institut de recherche en informatique et en automatique) de Rocquencourt. Tout cela pour que la France soit la première à mettre au point le… Minitel.

L’histoire, la quête plutôt, de Dimitri est infiniment détaillée. L’auteur répète plusieurs fois certains épisodes, avance, revient en arrière puis m’emmène subitement sur les traces de Max Ernst depuis sa maison de Saint-Martin d’Ardèche jusqu’à New York avec les surréalistes, André Breton, Jackson Pollock, Lee Krasner, sans oublier leur égérie et mécène : Peggy Guggenheim. C’est complet, documenté, agrémenté d’anecdotes savoureuses, étonnantes dont le texte foisonne mais j’ai trouvé cela beaucoup trop long.

Finalement, me revoilà au cœur du sujet : Ambroise Roux (1921 – 1999). Éric Reinhardt, en utilisant la fiction, réussit à rappeler l’histoire de cet homme qui influença tellement les décisions politiques des années 1970. C’est souvent critique, voire caustique et les aventures sentimentales de Dimitri offrent quelques respirations salutaires.

Je ne peux passer sous silence la désopilante analyse de la biographie du grand homme rédigée par une journaliste à particule, reine de la brosse à reluire.

Comédies françaises est un livre à lire, assurément, car ce que nous vivons aujourd’hui avec la toute puissance des Américains grâce à Internet, aurait pu être évité comme le démontre brillamment Éric Reinhardt.


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Le système Victoria

David Kolski est un lâche, comme savent l'être les hommes ... (Semblable à un gamin qui casse son jouet, car il n'a plus aucune prise dessus et ne peut le dominer...)





Dès qu'il s'agit d'amour, ils deviennent lâches. Prenez l'exemple de la rupture : lorsqu'ils n'aiment plus, ils vont se taire et attendre que leur compagne s'en rende compte.





"Ses yeux verts où crépitaient des lueurs d'intelligence, l'attraction qu'exerçait sa poitrine, le plaisir que me procuraient ses cheveux bruns aux reflets roux rendaient piquantes l'autorité de ses convictions politiques (que je trouvais détestables) ou l'arrogance que sur certaines questions son poste de DRH lui conférait."





David a rencontré Victoria, une DRH d'un grand groupe international. Mais la belle Victoria a plusieurs vies, des vies qui ne se croisent jamais.

C'est le « Système Victoria », dans lequel David se retrouve très rapidement emprisonné. Elle est une Business woman, mais aussi une femme mariée à un musicien.

Avec David, Victoria s'enfonce par amour et pour le plaisir, dans des jeux érotiques qui vont aller de plus en plus loin. Victoria va mourir assassinée... Et David se sent responsable!





Avec la fascinante Victoria, il met les pieds dans un monde du luxe qu'il exècre, mais en même temps qui le fascine. David est maître d'oeuvre pour la construction de la tour Uranus, dans le quartier de la Défense et qui doit devenir la plus haute tour de Paris. Mais le projet accumule les retards...





"Il me dit que je suis insastiable, que je semblais ne jamais en avoir assez... mais comment ne pas être insatiable quand le moindre effleurement me met dans des états pareils?"





-"Parce que tu me plais, dit Victoria. Tu me donnes envie d'aller au bout de mes fantasmes, de tout essayer."

Ici, à l'image d'un "Belle du seigneur", l'auteur nous conte une passion amoureuse sauvage et destructrice. David ne parvient pas à éjaculer, ce qui lui permet de faire durer les ébats érotiques pendant des heures, et d'être « à la hauteur » d'une Victoria qui ne semble jamais rassasiée. Au final, c'est également sa vie à lui qui sera réduite à néant.

Car le système est toujours plus fort que l'individu.
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Comédies françaises

Dimitri est un jeune homme né en 1989 dont on apprend dès les premières pages qu'il est décédé dans un accident de la route à l'âge de 27 ans, qu'il était passager d'une BMW dont la conductrice aurait perdu le contrôle, sans explication. La majorité des personnages présents dans le roman sont inscrits sur la page du faire-part, cependant pas tous. Est notée également sur celle-ci : " Que sa curiosité insatiable, son humour, sa colère et son idéalisme nous servent d'exemple à jamais."

C'est donc la vie de Dimitri Marguerite qu'Éric Reinhardt va nous raconter dans Comédies Françaises. Nous rencontrons ce jeune homme rêveur, railleur aussi, une première fois en juin 2015, à Madrid en Espagne. Alors qu'il flâne, en soirée, une jeune femme attire son attention. le hasard fera qu'il sera amené à croiser à nouveau cette belle, mystérieuse et insaisissable inconnue plusieurs fois, à Paris puis à Bordeaux. Cette quête amoureuse est présente tout au long du roman.

Mais faisons connaissance avec ce jeune homme passionné par le domaine du spectacle vivant et le théâtre. Il est un élève brillantissime mais arrête tout en 2008 alors qu'il est en 2ème année de classe préparatoire scientifique, pour le théâtre. Recalé au concours du Conservatoire national de Paris, il s'inscrit à Sciences Po Paris où il peut enfin s'épanouir un peu, allant au spectacle quasiment tous les soirs. Mais c'est un poste dans un cabinet de lobbying qui va se présenter à lui et qu'il va accepter notamment pour le salaire très attractif. Mais sa culture politique d'extrême-gauche le contraindra à démissionner. Ne sachant pas vers quel métier il va pouvoir se tourner, une amie lui parle alors du concours organisé chaque année par l'AFP pour recruter de jeunes reporters. Il se présente et est admis.

Il propose à Louis Pouzin, l'inventeur du datagramme, c'est-à-dire d'Internet de le rencontrer en vue d'écrire un livre d'entretiens. Intrigué et curieux de comprendre pourquoi les recherches de cet ingénieur français ont été brusquement interrompues par les pouvoirs publics en 1974, il mène son enquête. En parallèle, ayant été profondément marqué, à 18 ans par un documentaire sur Max Ernst, il projette d'écrire comment ce dernier a transmis le flambeau de l'avant-garde artistique à Pollock. Il a donc toujours sur lui pour noter, deux carnets : un carnet Clairefontaine bleu à motifs écossais, à spirales et à petits carreaux consacré à ce projet de roman et un carnet rose clair, où s'accumulent ses notes sur le datagramme, Louis Pouzin et la création d'Internet.

C'est un roman d'une richesse inouïe dans lequel le domaine artistique, avec ces magnifiques pages dans lesquelles Dimitri - l'auteur ? - révèle sa passion pour les arts de la scène, avec le surréalisme et comment la peinture abstraite américaine a été autant mise en avant et a connu une telle notoriété, contrebalance le domaine politique avec sa noirceur et ses dessous de table.

Chacun de nous a entendu parler du lobbying et en connaît la définition. Mais la description qu'en fait Éric Reinhardt est absolument remarquable et convaincante. Je n'imaginais pas que ce pouvoir des lobbies était déjà aussi présent dans ces années 1970 et surtout aussi puissant. Que cet industriel Ambroise Roux ait pu être assez influent pour avoir sabordé l'Internet français et la manière dont cet omnipotent patron de la CGE (Compagnie Générale d'Electricité) a mené à bien sa besogne est vraiment époustouflant !

L'auteur aurait pu écrire un vrai documentaire sur ce fait et sur cet homme. Son talent a été d'écrire un roman passionnant en faisant mener l'enquête par son héros. de plus, l'humour vient souvent agrémenter ses propos, notamment lorsque Dimitri lit des passages du fameux roman Un prince des affaires de Anne de Caumont : jubilatoire.

Ahurissant et écoeurant, le pouvoir que peuvent avoir ces lobbyistes sur les hommes politiques et leurs décisions ! Il suffit de regarder ce qui se passe en ce moment, en ces temps de confinement avec les chasseurs pour s'en convaincre.

Comédies françaises est un savant mélange de roman social, de roman historico-politique où la rêverie amoureuse, le sentiment de perte du réel sont aussi présents.


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Sarah, Susanne et l'écrivain

Rééditant le schéma narratif de son roman L’amour et les forêts paru il y a presque dix ans, Eric Reinhardt poursuit son exploration des jeux de miroir et de la mise en abyme multiple avec une nouvelle histoire d’écrivain à qui une femme demande de s’inspirer de son récit de vie pour en faire une fiction.





En rémission d’un cancer, Sarah se retrouve soudain à questionner son existence bourgeoise jusqu’ici sans histoires. Mariée depuis vingt ans, la voilà qui tout à coup ne parvient plus à se satisfaire de ses soirées seule avec leurs deux grands enfants, son époux préférant s’isoler tous les soirs dans son bureau aménagé à la cave. Et puis, naïve qu’elle était, elle vient de réaliser que son mari détient les trois-quarts de tous leurs biens, y compris ceux acquis au cours de leur vie commune. N’obtenant de lui que de vagues réassurances paternalistes, elle décide de provoquer un électrochoc en prenant le large quelques semaines, mais, à sa grande stupéfaction, ne réussit qu’à déclencher un engrenage de brutalité qui la mènera jusqu’aux rivages de la folie.





Sous la plume de l’écrivain, les douloureuses confidences de cette femme donnent naissance à un nouveau personnage, Susanne, création mêlant au reflet de Sarah les propres projections de l’auteur. Le récit avance donc triplement, partie de billard à trois bandes rebondissant sans cesse entre réel, symbolique et imaginaire, à mesure que l’écrivain propose à son premier personnage d’en affiner avec lui le second sans hésiter à faire référence à son vécu personnel. Réalité et distorsions se pourchassent alors à l’infini, le plus diabolique étant sans doute que, bien avant d’apprendre à se regarder au travers de son reflet littéraire, Sarah, brutalement évincée de sa vie par les perverses manipulations d’un mari habile à la faire passer pour ce qu’elle n’est pas, se retrouve réduite à observer les siens en catimini, ombres se découpant la nuit sur l’écran éclairé des fenêtres de leur appartement. Voyeuse espionnant une existence dont elle est sortie, elle a l’impression de ne plus exister. « Elle leur est complètement sortie de l’esprit. Comment peut-on disparaître aussi vite de la vie de ceux que l’on aime ? C’est comme si elle était morte de son cancer et qu’elle avait eu la faculté de revenir les voir vivre une fois décédée. Ils ont fait disparaître Sarah de leur vie aussi sûrement que l’eût fait la maladie si elle s’était révélée fatale. »





Alors, tandis que Sarah raconte, que Suzanne vit la même chose à sa façon, et que l’écrivain vient y mêler des éléments de sa propre histoire, le tourbillon de la narration s’accélère pour, de tous ces fils narratifs, ne plus faire qu’un, celui tout simplement de l’acte créateur dont on ne sait jamais vraiment où il va puiser sa source. Et comme l’auteur conserve tout du long un coup d’avance sur son lecteur, ce dernier, tenu en haleine, aura droit au renversement final inattendu, histoire de ne pas laisser le dernier mot aux réalités les plus méprisables du patriarcat.





Ce livre à la construction vertigineuse donne non seulement une voix à une femme qui refuse d’abandonner ses idéaux face à l’égoïste indifférence de son mari, mais fait aussi voyager le lecteur, avec beaucoup d’originalité, au coeur du processus créatif. Pris par les sentiments en même temps que séduit intellectuellement, l'on ne peut que s’incliner, entre coup de coeur et coup de chapeau.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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L'Amour et les Forêts

Je ne ferai pas un long commentaire car tout a déjà été écrit à propos de ce roman!

Suite à un échange épistolaire Eric Reinhardt rencontre une de ses lectrices: Bénédicte Ombredanne,jeune femme cultivée,agrégée de lettres, mére de deux enfants, victime de harcèlement conjugal par un homme tyrannique, odieux et veule qui ne cesse de l'insulter et de l'humilier, il ne supporte pas qu'elle puisse rayonner et s'épanouir.....

Bénédicte Ombredanne vit un enfer quotidien, d'autant plus révoltant qu'il est vécu comme quelque chose de honteux!

Mais l'auteur construit aussi un roman dans le roman:

Que connaît- on au juste de soi?

Que sait- on des pouvoirs de l'autre?

De quoi sont tissées nos existences?

Qu'est-on capable d'offrir de soi?

Ce roman bouscule le lecteur, l'indigne, le stupéfie,l'émeut, le fascine....

C'est un ouvrage puissant, profond, érudit, ambigu, poignant, un récit sur la condition de la femme dont on ne sort pas indemne...il rend hommage à la puissance de l'écriture et ses mécanismes , à "ses pouvoirs magiques".

Il contient de très belles pages sur la littérature et le " bonheur de la lecture".

Écrire selon l'auteur c'est " être mordu de l'intérieur" par une espèce d'urgence à raconter, à transformer le monde en une œuvre d'art à l'image de Bénédicte Ombredanne devenue sublimée par la grâce de la fiction.......

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L'Amour et les Forêts

L'amour et les forêts - Eric Reinhardt - Lu en Octobre 2017.

- Bénédicte Ombredanne, agrégée de lettres, épouse de Jean-François, manipulateur, harceleur, mère de deux enfants profondément égoïstes, Lola et Arthur.

- Christian, son amour d'une après-midi, rencontré sur internet.

- Marie-Claire Ombredanne épouse du frère de Jean-François, esthéticienne, sans enfants, soeur jumelle de Bénédicte.

- Eric, écrivain et narrateur.



Bénédicte Ombredanne, jeune femme intelligente, gaie, sociable mais manquant de confiance en elle, un peu fragile, mais ne se plaignant pas, après avoir lu le dernier livre d'un écrivain Eric, décide de lui parler de ce qu'elle endure au quotidien avec son mari. Entre eux se tisse un échange de courrier.

Un jour de révolte, elle s'inscrit su rle site de rencontre Meetic et décide de

rencontrer Christian qui paraît correspondre à ses attentes. Il est antiquaire et vit au milieu de la forêt. Entre eux, c'est le coup de foudre.

Ce fut le plus beau jour de sa vie qu'elle conservera dans sa mémoire.

Elle n'aura pas la force ni le courage de revoir Christian, elle a peur.

Son mari l'apprend et je vous laisse deviner sa descente en enfer.

Après une tentative de suicide, elle sera hospitalisée quelques jours malgré sa demande de rester plus longtemps.

Elle continuera à vivre sa triste vie pour finir par contracter un cancer que son mari nie absolument en lui disant que c'est "dans sa tête".

Cancer qui est à coup sûr une réaction violente due à son extrême mal-être psychologique.

Elle s'en est allée seule dans la nuit du 21 janvier 2011.

La seule personne qui a vraiment compris l'immense détresse de Bénédicte, c'est sa soeur jumelle Marie-Claire, mais il était déjà trop tard.

Qu'on aime ou pas cette histoire, elle nous montre cependant combien le harcèlement moral est destructeur pour la personne qui le subit et peut conduire à la mort.

Je dois avouer que je ne sors pas bien de cette lecture, je ressens un grand malaise, mais néanmoins, je ne voudrais pas ne pas avoir lu ce livre.



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Sarah, Susanne et l'écrivain

Le roman est construit sur la dualité entre deux personnages, Susanne et Sarah, avec une mise en abyme assez époustouflante.

Sarah raconte à l’écrivain sa propre histoire afin qu’il la retranscrive de façon fictive (elle ne veut pas être reconnue) Il invente Susanne, qui va vivre sa propre vie tout en traversant les mêmes drames que Sarah.

Toutes deux, mariées et mères de deux enfants, se sentent délaissées par leur mari. Elles vont décider de s’éloigner du domicile conjugal pour réfléchir et se reconstruire, espérant que cette rupture provisoire provoquera un choc positif chez le mari.

Sarah, qui se remet d’un cancer, a besoin de stabilité affective. Elle va pourtant assister à sa disparition dans la vie de son mari et de ses enfants, qui semblent très bien vivre sans elle. Choc aussi d’une vie précaire puisqu’elle a arrêté de travailler et que c’est le mari qui possède la majorité du patrimoine.

De son récit, l’écrivain tisse des similitudes avec son héroïne Susanne qui vit les mêmes affres dus à l’indifférence de son mari, mais il va le raconter différemment, allant même jusqu’à chercher une ville de province où situer son action, et ce sera Dijon dont il explique le choix à Sarah

« Il lui répondit qu’initialement, il avait voulu situer cette histoire dans le ventre du territoire français (si on peut dire), pour activer une sorte de métonymie. ».



Peu à peu, l’histoire se renverse, à la grande surprise du lecteur. On croyait avoir affaire à Sarah racontant son histoire, mais c’est en réalité l’écrivain qui parle de Susanne, à elle comme à nous, lecteurs, et qui mêle habilement les vies des deux femmes au point de nous perdre. Qui est qui, finalement ? Toutes deux frôlent la folie, leur détresse est la même, leur chute aussi, mais la progression qui les mène à ce même point ultime emprunte des chemins différents.

Si le rapport des deux mères avec leur fille Paloma est conflictuel, celui avec Luigi le fils adolescent est plus complexe et j’ai aimé cette connivence entre mère et fils et cette tendresse qui résiste aux assauts du père.

Si j’ai goûté à la forme de ce roman original qui mystifie son lecteur en l’entrainant dans deux histoires qui n’en font plus qu’une, j’ai été beaucoup moins conquise par le fond. Chez Susanne et Sarah, je n’ai pas apprécié leur posture de bourgeoises aisées aux métiers libéraux, et cette façon de se saborder toutes seules d’une vie dont le seul drame est ce mari égocentrique et distant qui deviendra vite toxique.



Ce procédé mettant en scène un écrivain s’appropriant l’histoire d’une femme qui se confie à lui, l’auteur l’avait déjà utilisé dans « L’amour et les forêts ». Mais je le trouve plus abouté, plus subtil aussi, dans « Sarah, Susanne et l’écrivain ».

Je sors tout de même avec une impression mitigée de ce roman qui présente des longueurs et des passages assez décousus. Dans l’ensemble, la lecture n’est pas facile et il faut accepter de se laisser mystifier par le mélange de deux personnages. Parfois, on suit le récit de Sarah pour passer, sans transition, à celui de Susanne et c’est déroutant. L’emprise du mari, la toxicité dans le couple auraient pu être davantage creusés, alors que l’auteur s’attarde beaucoup sur la crise de folie de son personnage et j’ai eu l’impression que l’écrivain cherchait davantage le spectaculaire que l’empathie avec son héroïne.

Pour le lecteur qui apprécie cette dualité entre réel et imaginaire, c’est le roman idéal ; Par contre, on peut être vite agacé par l’abus du procédé.

Un roman intrigant, sans aucun doute.

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L'Amour et les Forêts

Au moment d'attaquer mon petit commentaire je me documente un peu et découvre avec surprise la polémique lancée depuis presque un an autour de ce roman… Eric Reinhardt dénoncé pour contrefaçon et atteinte à la vie privée.



Allons bon.



Parlons donc un peu de l'histoire qui parle de l'histoire dont parle l'histoire de "L'amour et les forêts"…



Pour ce livre-ci l'auteur n'a jamais nié s'être inspiré de plusieurs témoignages féminins d'après lesquels il aurait imaginé son héroïne. Il part en outre d'une rencontre qu'il dit véridique : une lectrice lui écrivit un jour son admiration dans un long et touchant message à la suite duquel un lien plus personnel se tissa entre eux. Au fil des confidences réciproques elle révéla l'enfer conjugal dont elle était victime, faisant même parvenir à Reinhardt le début d'un manuscrit qu'elle avait entrepris d'écrire sur le sujet.



Inspiration d'accord, mais le bât blesse un chouia lorsque la lectrice sus-citée (notons l'allitération en S, c'est pour le côté suspicieux) découvre et affirme que "L'amour et les forêts" relate (presque) intégralement sa propre vie, identifiable au travers de flagrantes similitudes et de détails fort embarrassants pour elle qui plus outre. Certaines phrases issues de ses écrits auraient même été retranscrites mot pour mot dans le roman incriminé (légère allitération en cri pour le côté ça-craint).



Quoi qu'il en soit… Malaise.



Et au-delà de la controverse… malaise aussi, car l'histoire est sombre, qui oscille entre autofiction, fantasme et réalité. L'héroïne, pour le moins déroutante, apparaît comme pétrifiée dans ses idéaux déchus, victime presque inerte d'une conjugalité cauchemardesque qu'elle entend pourtant dissimuler coûte que coûte à l'ensemble de ses proches (que l'ami lecteur qui n'a pas été tenté ici de lui botter les fesses me jette la première bûche). Et puis bien sûr dans la famille Kesskonrigole je demande le mari, remarquable cas clinique de pervers manipulateur narcissique (le gros mot à la mode) du genre à vous pourrir l'entrain d'une escadrille de merles rieurs en moins de temps qu'il n'en faut à une militante écolo pour devenir ministre.



Pourtant j'ai aimé. J'ai aimé à nouveau l'écriture vigoureuse d'Eric Reinhardt qui m'avait auparavant captivée dans "Le système Victoria". J'ai aimé le principe d'autofiction dans lequel il se met en scène. J'ai aimé le portrait psychologique de ses personnages, quand bien même il semble parfois poussé à la limite de la caricature. J'ai aimé enfin cette représentation si édifiante du mécanisme abject de la manipulation mentale – on ne sait jamais ça peut servir. J'ai aimé ce roman Monsieur Reinhardt, et peut-être même vous écrirai-je un jour pour vous le faire savoir...




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La chambre des époux

Allons droit au but : je n'ai pas aimé ce livre.

La quatrième de couverture est alléchante, et laisse entendre que le roman raconte l'histoire de Mathilde et Nicolas ; Mathilde se bat contre un cancer et Nicolas va la soutenir dans son combat, à travers l'écriture de sa symphonie.

L'idée de l'art comme lien entre la malade et son mari, comme vecteur de guérison, me plaît, et je suis ravie d'avoir l'occasion de découvrir Éric Reinhardt, auteur dont je n'ai encore rien lu.

À ce propos, je remercie vivement Babelio pour son opération Masse Critique, toujours très appréciée, et les éditions Gallimard pour leur envoi : recevoir un livre, avant sa sortie qui plus est, est toujours un grand plaisir.

Pourquoi, donc, n'ai-je pas aimé ce livre ?

Pour de multiples raisons, aussi bien sur le fond que sur la forme.

L'histoire n'est pas linéaire, différents récits sont imbriqués, façon "poupées russes". Cela ne me dérange en rien, j'apprécie même ce genre de construction, mais avec Margot, puis à travers les "doubles" que sont Nicolas et Mathilde, ainsi que dans la relation de Nicolas avec Marie, l'auteur ne parle finalement que de lui. Lui, lui et lui. C'est très nombriliste et ça devient vite agaçant ; du moins, ça m'a vite agacée.

Parce que dans chaque récit, c'est toujours le personnage masculin qui est mis en avant, c'est lui qui décide, c'est lui qui agit, bref, il fait tout tandis que les femmes ne sont là que pour leur maladie, et pour mieux mettre en valeur le héros masculin. On connaît tout ou à peu près tout de ses pensées, mais celles des femmes importent bien peu.

L'écriture m'a également beaucoup agacée. Il y a certes quelques jolies phrases au passage, mais diluées dans un ensemble qui ne me séduit pas, et que je trouve déplaisant. Beaucoup d'affectation et de phrases bien ennuyeuses à mon goût.

Je veux bien de longues phrases, mais à condition qu'elles aient une vie, une sincérité, une émotion qui les rendent attrayantes. Ici, j'ai eu la sensation tout au long du livre que l'auteur se regardait écrire, comme certains s'écoutent parler.

À l'inverse, certaines phrases sont comme inachevées, amputées. Cela peut être un effet de style, pourquoi pas, je n'ai rien contre l'innovation, mais leur accumulation dans certains passages fait déborder la coupe. (p 117 : "L'hypocondrie est la parfaite illustration de cette distanciation, scruter son propre corps en imaginant qu'il va te tendre des guets-apens, c'est un truc déjà un peu." ? p 118 : "Elle est tellement inadmissible l'idée que ta maladie." ?)

Un autre point m'a déplu également : l'auteur nous inflige des scènes de sexe à chaque occasion... et même quand il n'y a pas d'occasion. Je veux bien des scènes de sexe dans un livre, mais à condition d'y trouver un minimum d'humain, un minimum de sentiments, et un minimum de rapport avec l'histoire. Là, j'ai eu l'impression que le personnage / l'auteur se faisait plaisir.

Conclusion : pour ma rencontre avec Éric Reinhardt, c'est raté.

Le thème de ce livre m'a intéressée (l'accompagnement d'une femme mourante), mais la façon dont ce sujet a été traité et le style d'écriture ont fait que je n'ai pas été touchée comme j'aurais pu l'être, mais agacée. Dommage !

Au vu des différentes critiques, ce roman ne laisse manifestement pas indifférent : certains lecteurs aiment vraiment, d'autres n'aiment vraiment pas. Je fais partie de la seconde catégorie, et laisse désormais cet auteur à ceux qui l'apprécient.
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La chambre des époux

Il n'a peur de rien Eric Reinhardt, qui dans son tout nouveau roman associe, comme un défi, autofiction et double mise en abyme.



Pour le résumé de l'histoire ne comptez pas sur moi, ni sur une quatrième de couverture fâcheusement réductrice, car dans ce livre en réalité se déploient plusieurs histoires gigognes qui se croisent et se mêlent dans une construction paradoxalement remarquable d'évidence et de clarté.



Ici l'imaginaire intime de l'auteur se lâche plus que jamais. Sophistiqué, romantique et impudique, élégant, tranchant, tourmenté ou exalté parfois jusqu'à la maladresse, il suit inlassablement pourtant son fil conducteur, cette quête de la beauté universelle censée sauver le monde à travers l'amour et l'art.



D'aucuns s'agaceront donc éventuellement d'un certain idéalisme autocentré – voire bobo pour les simplificateurs les plus allergiques – sans percevoir peut-être l'autodérision et l'originalité qui façonnent l'esprit de ce récit très personnel. Bien heureusement je n'ai pas été de ceux-là, car après "L'amour et les forêts" et "Le système Victoria" Reinhardt m'a embarquée, une nouvelle fois.



Ҩ



Merci beaucoup à Charlotte (Babelio) et aux éditions Gallimard pour cette belle avant-première.




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Comédies françaises

Eric Reinhardt raconte qu'à la suite de la lecture d'un article de Libération sur Louis Pouzin, un Français décoré par la reine d'Angleterre pour sa contribution à la naissance d'Internet, lui est venu l'idée de Comédies françaises.



Passionné par l'Expressionnisme abstrait et deux de ses plus grands représentants, Max Ernst et Jackson Pollock, toujours en quête de rencontres décisives avec des femmes dont l'inaccessibilité le pousse à des dérives sexuelles, Dimitri a fait de brillantes études mais, à l'instar de plus en plus de ses coreligionnaires, il n'est pas tenté par une carrière de haut fonctionnaire ni de cadre supérieur. Alors après un poste dans une société de lobbying — qui soit dit en passant est à l'opposé de ses idées de gauche — le jeune homme décide de devenir reporter et finit par se lancer dans une enquête sur la naissance d'internet. Il découvre ainsi qu'Internet aurait pu se développer en France et non aux USA si un grand patron, Ambroise Roux, le PDG de la CGE (Compagnie générale d'électricité), n'avait pas tout fait pour saborder le projet, uniquement pour le profit de sa société et son intérêt personnel...



Beaucoup de bonnes choses dans ce dernier livre d'Eric Reinhardt, comme une analyse plutôt judicieuse de l'élite bourgeoise économique et politique française. Quelques fondamentaux aussi sur le déterminisme social qui n'ont rien d'original mais qu'il est toujours utile de répéter. J'ai également beaucoup aimé l'incursion éclairée dans la peinture avant gardiste américaine. Pour ce qui est de l'enquête sur l'Internet français et son fossoyeur présumé, Ambroise Roux, elle montre bien le fonctionnement du lobbying pratiqué par les grands patrons français. Un état des lieux connu depuis longtemps qui aurait peut-être mérité un développement plus court et moins d'assertions semble-t-il hasardeuses. Toujours est-il que Comédies françaises est un roman ambitieux, où fiction et réalité se marient avec bonheur pour notre plaisir, merci à Babelio et aux Éditions Gallimard.

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L'Amour et les Forêts



Bon sang ... Quelle écriture de rêve ! Toute en métaphores et en poésie, j'ai eu l'impression de retrouver mes chers classiques lus très jeune ! Un enchantement !



Eric Reinhardt se met lui-même en scène lorsqu'il accepte de rencontrer Bénédicte Ombredanne, une lectrice admirative de son dernier livre et qui lui a écrit une merveilleuse lettre. Ils vont se rencontrer deux fois et correspondre par mails. L'auteur nous raconte la vie épouvantable que subit Bénédicte.



Bénédicte,jeune, était joyeuse et adorait la vie mais un revers amoureux d'importance l'a laissée en pleine dépression et c'est le moment que choisit Jean-François, son futur mari, pour lui faire des avances. Jean-François est aussi terne et insignifiant que Bénédicte était lumineuse et pétillante.

Occasion bénie pour Jean-François pour tenter de séduire cette demoiselle en détresse, voilà donc qu'il sert à quelque chose, qu'il a une aura toute neuve ce personnage falot . Dès leur mariage (que personne n'approuve), il va se comporter en superbe specimen de pervers narcissique, n'épargnant aucune insulte, aucun dénigrement à Bénédicte qui s'enfonce graduellement dans un renoncement à la vie, dans une image de plus en plus déplorable d'elle-même. J'ai lu ici et là qu'elle aurait dû se ressaisir, c'est facile à dire mais lorsque vous êtres la proie d'un P.N., qui souffle en permanence le chaud et le froid, vous perdez tous vos repères et toute confiance en vous. Jean-François dresse insidieusement leurs propres enfants contre leur mère ...



Un jour ou plutôt une nuit de révolte, elle s'inscrit sur Meetic, site de rencontres, et après quelques échanges burlesques avec quelques mâles en rut, elle découvre Christian. Ils décident de se rencontrer, se plaisent, tombent même amoureux. Christian lui propose même de l'épouser et de prendre soin de ses enfants comme un père. Mais voilà, l'opportunité de changer de vie ne convient pas à Bénédicte qui a pourtant passé la plus belle journée de sa vie en compagnie de Christian ... Elle a peur, on ne sait plus très bien de quoi si ce n'est de son mari et puis, à mon avis, c'est un peu tard, elle est déjà complètement détruite par Jean-François et n'ose plus rien entreprendre de son propre chef. Cette journée restera donc le seul point lumineux de sa triste vie.



Il faut bien comprendre la stratégie du pervers narcissique : être creux, coquille vide, il se nourrit de la substance de personnes intelligentes,douces, aimantes,consolatrices pour mieux tenter de s'approprier ces qualités qu'il ne possède point et pour cela c'est une véritable machine de démolition qu'il met en marche, ce qu'il préfère c'est faire passer son(sa) conjoint(e) pour fou(folle) ainsi non seulement plus personne n'accordera de crédit à ce que celui(celle)-ci raconte mais en outre le(la) victime se mettra elle-même à douter de son état mental et n'osera plus prendre de décision ! Je vous invite à lire le livre de Marie-France Hirigoyen "le harcèlement moral au quotidien" qui vous éclairera davantage que je ne puis le faire.





L'amour et les forêts est un livre dur,attachant mais également fortement actuel qui nous laisse désemparés devant la souffrance mortelle infligée aux victimes de P.N. le tout servi, je me répète par une écriture

remarquable. Je n'oublierai jamais ! ...



Et j'ajouterai que Bénédicte n'est en aucun cas une Emma Bovary des temps modernes, Charles, le mari d'Emma n'était pas un tortionnaire mais au contraire un brave gars, peu séduisant sans doute mais profondément gentil et épris de sa femme !
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