Dans notre émission littéraire scolaire Le Secret des livres*, Erwan Seznec répond à une question d'élève sur son roman hilarant "Les fondus de l'Arctique"
* émission primée au concours Médiatiks 2022 organisé par le CLEMI
— J'adore l'Islande ! s'est exclamé Anselme Celsius, alors que le navire était enfin à quai. C'est un pays sympathique, et, quoi qu'on en dise, le climat n'est pas si rude. L'année dernière, l'été a été magnifique, bien qu'un peu court.
— Tout à fait, a approuvé Le Tallec. Si ma mémoire est bonne, c'était un mercredi.
Joris a levé son index vers un point gris qui avançait à la surface de l’eau.- Ours blanc. Ursus maritimus. Carnivore. Vu la direction du vent, il ne nous a pas encore repérés.Effectivement, la situation pouvait être pire.
Le dimanche d'avant, j'avais vu un documentaire sur le plancton, base de la chaîne alimentaire. Prodigieusement ennuyeux. Je me demande s'ils ne passent pas ces reportages le dimanche vers 15 heures pour inciter les élèves à faire leurs devoirs.
— La peur est une émotion très répandue, a expliqué Ernest. C'est un réflexe normal face à l'inconnu. Tous les mammifères, tous les oiseaux, pratiquement tout le monde animal connaît la peur. Je dirais même que la peur est un avantage compétitif dans la sélection naturelle ! Les animaux trop téméraires meurent, alors que les prudents, les timorés, les lâches fuient le danger et survivent !
Ce qu'il y a de bien au Scrabble, c'est que personne ne regarde son voisin. Personne ne m'a donc vu rougir.
-Raconte tes traumatismes.
J'ai réfléchi un bon moment. Je n'en voyais aucun.
(...)
- Tu as peut-être été attaqué par un chien quand tu étais petit ?
- J'adore les chiens. La seule attaque dont je me souvienne est celle du boxer de ma tante, qui me bavait sur les oreilles.
- Une tante qui bavait, ça se raconte, a fait Julien.
Je vais me laisser dévorer plutôt que de tirer sur un animal menacé par le réchauffement climatique ! a piaillé Joris. Il reste seulement 25 000 ours blancs sur terre. Des Joris Gratton, il y en a des millions !
La réunion avait commencé à 15 heures. Au bout de deux heures, j'ai jeté un coup d’œil à mon montre : il était 15h20. Le temps était ralenti, comme au bord d'un trou noir.
L'ours nous avait repérés. Il venait vers nous, nageant à coups de pattes énergiques. Il aurait sûrement très faim après son grand bain. Déjà, moi, quand je sors de la piscine, j'ai les crocs. Alors 30 kilomètres dans l'eau glaciale, pensez donc !
Dans les heures qui ont suivi, nous avons entendu à plusieurs reprises des moteurs de bateau autour de nous. On nous cherchait. C'était une bonne nouvelle. La mauvaise nouvelle, c'est que dans cette brume épaisse nous étions invisibles.