Si peu dormi la nuit dernière, la dernière nuit d’avant la nuit. Comme un animal sauvage, un fauve qui va vers le point d’eau, elle s’est levée cinq, six, sept fois, a regardé s’il y avait oui ou non une élettre dans sa boîte. Souvent l’inconnu ne dormait pas lui non plus, insomnies synchrones, regards blancs de leurs écrans et petits mots de part et d’autre, des une ligne, trois lignes vite expédiées, des sincères et réciproques « bonne nuit », souhaités à l’envi et démentis, charriés par les petites heures qui confluent à l’aurore. On a rien à se dire et on se le dit quand même, et vous, et vous, et toi, « mon aimée », à demain, oui, à demain, sauf cette dernière nuit. Une lionne famélique tournait en rond sous la lune, au sommeil chaloupé, sans la moindre goutte de mot pour désaltérer sa profonde gorge de fauve.