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Critiques de Farida Taher (3)
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Coeur gros, ventre vide

"Coeur gros ventre vide" est un livre qui porte bien son titre. Il s'agit du récit d'une jeune fille de 16 ans prénommée Jeanne et qui vit dans un village picard non loin de Paris. Lycéenne en CAP couture, elle fait partie d'une famille recomposée de quatre enfants. Les deux aînés ont quitté la maison et Jeanne ne vit plus qu'avec ses parents et sa petite soeur de 14 ans, Noémi. Son père est cariste dans une usine et fait les trois huit, sa mère travaille officiellement 25 heures par semaine en tant que distributrice de prospectus. Le couple gagne entre 1800 et 2000 euros par mois. Certes, deux salaires tombent chaque mois, mais entre les traites de la maison et les nombreux crédits à rembourser, la famille ne s'en sort pas. Jeanne et les siens vivent dans la pauvreté.

"Coeur gros ventre vide" est le témoignage de la lycéenne sur la situation précaire dans laquelle sa famille et elle-même vivent. Mise en forme par Farida Taher, réalisatrice de documentaires sur des sujets sociétaux et à l'initiative de ce projet, le récit revient sur tous les aspects de la pauvreté.



Le livre ne suit pas de plan préétabli, mais le fil de la pensée de Jeanne. Il ne s'agit pas non plus d'une oeuvre littéraire. Farida Taher a souhaité conserver le langage et les expressions de la jeune fille, souvent maladroits. Ce choix est à l'origine de bien des répétitions. Des sujets reviennent plusieurs fois dans le livre. La faim, par exemple. Le récit s'en trouve décousu. Cependant, il gagne en vivacité et sincérité.

Cette famille semble tout à fait représentative de celles qui ont du mal à joindre les deux bouts et qui sont nombreuses en France. La faute à une certaine fatalité. Jamais citée explicitement, elle n'en demeure pas moins omniprésente. Les circonstances de la rencontre entre ses parents ne semblent pas présager du meilleur. D'ailleurs, la naissance de Jeanne est imputée à l'absence de contraception. Nonobstant, le lecteur n'a pas l'impression d'avoir affaire à des "cas soces" mais à des gens courageux qui ne parviennent pas à s'en sortir. Les traites de la maison sont difficiles à rembourser, au même titre que les nombreux crédits à la consommation contractés pour payer une machine à laver ou des manteaux d'hiver. Le chauffage coûte cher et la famille préfère s'emmitoufler à l'aide de gros pulls en laine plutôt que d'allumer les radiateurs. Les courses posent également problème. Jeanne a souvent faim. Et pour cause, la famille vit dans la restriction. Beaucoup de riz et de pâtes, très peu de viandes et de fruits et légumes. Heureusement qu'il y a la cantine scolaire, gratuite pour Jeanne et Noémi.



Dans ce récit, il y a des considérations générales mais aussi et surtout, beaucoup d'exemples concrets. Par exemple, le travail de sa mère fait l'objet de plusieurs longues explications. La femme distribue des prospectus dans tout le département de la Picardie et travaille au moins 50 heures par semaine pour un salaire de misère (à peine 500 euros). Le lecteur se sent révolté par toutes ces injustices sociales et la manière dont certaines sociétés profitent du dénuement des gens. Toutefois, le témoignage ne fait jamais dans le pathos et nous n'éprouvons pas de pitié pour cette famille, seulement une vive compréhension.



La jeune fille fait preuve de beaucoup de lucidité et de maturité pour son âge. Elle connaît le prix des denrées ainsi que le montant des crédits qu'il reste à rembourser. La lycéenne se pose beaucoup de questions sur son propre avenir et craint de reproduire le schéma familial. Cependant, Jeanne reste une jeune fille de son âge et des passages nous le prouvent, notamment ceux concernant sa vie au lycée (les garçons, la sexualité). Nous frôlons parfois le hors sujet, mais ces épisodes s'inscrivent dans une démarche plus large : nous décrire la vie bien réelle d'une adolescente de son temps.



En résumé, il s'agit d'un livre fort car nous avons le point de vue non censuré d'une jeune fille victime de la pauvreté. Les simples anecdotes (un Noël après l'heure, très peu de sorties culturelles, pas de vacances à la mer ou au ski) côtoient des bribes d'existence plus marquantes (les humiliations à l'école, la faim, la menace de la DDASS, les mises à l'écart, etc.).

Néanmoins, malgré les nombreuses difficultés de la vie, la famille a su rester soudée et le message délivré s'en trouve renforcé.

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Coeur gros, ventre vide

Un récit assez court mais dense. Le témoignage de Jeanne, qui vit dans une grande précarité malgré que ses deux parents travaillent.

Un tort-le-cou (ça se dit ? Sinon, je viens de l'inventer) à pas mal de préjugés.

Non, on n'est pas nécessairement pauvre parce qu'on est fainéant/dépensier/chômeur professionnel etc...



Les parents de Jeanne triment (elle aussi) mais pour un salaire de misère, les heures sup ne sont pas comptées, les heures de préparation (sa mère distribue des prospectus publicitaires) : aller chercher avec son propre véhicule les journaux et préparer les paquets - non plus



La ddass impose une chambre pour le fils, une chambre pour les filles, avec le mobilier adéquat. Et hop, crédits à la consommation, de peur qu'on leur enlève les enfants ...



Jeanne nous montre l'engrenage dans lequel les personnes en situation de précarité s'enfoncent à cause même de cette précarité.



Un témoignage courageux, intéressant dans un style peu littéraire mais très vrai



Merci à babelio, masse critique et aux éditions Robert Laffont
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Coeur gros, ventre vide

Un livre qui se lit vite, parce qu’on accroche dès la première ligne.

Un livre qui ne raconte rien d’extraordinaire, mais qui captive par ses détails ordinaires.

Voici mon petit résumé de Cœur gros, ventre vide.



J’ai été envahie par l’empathie en découvrant qu’être pauvre ne signifie pas être chômeur, sans revenus, vivre sous les ponts et/ou manger aux Restos du cœur.

On peut bosser, à deux, être propriétaires de sa maison, et être dans la misère, ou presque. Parce que les incidents de parcours mènent parfois rapidement à la spirale du surendettement. J’ai eu mal pour Jeanne, qui ne parvient pas à s’intégrer dans son village ou à l’école, car sa pauvreté semble marquée sur son visage. Ça m’a rappelé l’époque où j’étais ado, dans une école snobissime, où les marques et les grosses villas étaient indispensables, et où je n’avais ni l’un ni l’autre. J’ai ressenti aussi ce rejet, mais je m’interroge parfois sur la véracité de ce ressenti : était-ce bien réel ou me mettais-je à l’écart sciemment, me sentant différente ? Faut que j’en parle à un psy.



J’ai plongé tête la première dans la vie de Jeanne, et en deux jours, j’avais terminé son récit. Touchant.



Et pourtant, contradictoirement, elle a fini par m’énerver, la miss, à force de lire qu’elle a faim, qu’elle a pas de tunes, que tout le monde est méchant avec elle. J’ai eu comme un sentiment de victimisation, un sentiment Caliméresque. Et je me suis dit que mon empathie s’était envolée, de deux coups d’aile, flap flap, que c’était pas bien de penser ce que je pensais, mais j’ai pas pu m’en empêcher de le penser Monsieur le juge, c’est pas ma faute, c’est la faute à ma jeunesse patati patata. Comme une envie de la secouer, de lui dire que si sa famille est dans la dèche, c’est pas totalement sa faute, à sa famille, mais c’est quand même un peu sa faute, à force de faire crédit sur crédit, ben voilà quoi.

Et puis lire d’un côté qu’elle a faim, vraiment faim, et de l’autre que sa mère lui donne 20 eur pour aller aux auto-scooters, ça m’a laissé comme un goût amer en bouche. 20 eur c’est pas grand-chose, me direz-vous. Et puis elle a besoin de s’amuser, la gamine, me direz-vous encore. Oui, et je dois être une vieille ringarde capitaliste égoïste, mais je me dis que si j’avais que 20 eur en poche, et que je devais choisir entre nourrir mes gamines ou leur payer des tours en auto-scooters, ben le choix serait vite fait. Je l’avoue, ça m’a passablement énervée, car j’ai eu la sensation de lire ce qu’on lit quotidiennement dans la presse belge : des lamentations en tous genres, sur des expulsions, des saisies, des gens en difficulté, et quand on investigue un peu… on découvre qu’ils l’ont creusée eux-mêmes, leur tombe financière, en préférant s’offrir un écran plat que payer leur loyer. Je caricature, mais vous voyez le topo quoi. .



Cette histoire de tours en auto-scooter, ça m’a vraiment ôté toute mon empathie, sacrebleu.



Mais ça n’enlève rien à ce récit simple mais de qualité, dont le naturel m’a passionnée et au plaisir que j’ai eu à découvrir ce petit bout de vie ordinaire d’une jeune fille somme toute pas si ordinaire que cela. Je pense qu’elle fera mieux que ses parents, elle a tout compris, somme toute.


Lien : http://www.le-celibat-ne-pas..
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