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Citation de Carosand


Toute sa prime jeunesse, j'ai abreuvé ma fille de conseils dont elle aurait préféré se passer et je lui ai donné la nausée avec des livres et des tableaux qu'elle ne voulait pas. Jusqu'à ce jour à Venise, en vaporetto sur le Grand Canal, où, émue par la splendeur, je lui ai dit :
- Regarde ce que cela peut être beau !
Valentine m'a répondu, l'oeil tourné à l'intérieur sans me voir ni le paysage :
- Si tu me laissais découvrir moi-même ce qui est beau.
C'était l'heure froide où je venais de te quitter, je me réjouissais beaucoup de notre première intimité à deux. Elle non. Notre fille n'avait pas quinze ans, elle se foutait de la lagune argentée et de San Marco et des musées Correr, Accademia and co, dont, elle le savait, j'allais tenter de la gaver. Elle attendait les lettres d'un petit jeune homme. Celui-ci n'a plus de visage ni peut-être de nom pour elle aujourd'hui, mais à l'époque il trouvait le moyen d'effacer le palais des Doges et le Condottiere et jusqu'au pont des Soupirs, le petit jeune homme oublié, et moi, en revanche, je n'ai jamais effacé la leçon de ce matin-là. On ne badine pas avec ce que vos enfants vous apprennent. Jusqu'à la fin du voyage, je n'ai plus attiré le regard de Valentine sur un seul Carpaccio. Et il en sera ainsi jusqu'à la fin de mon voyage, je crois. Je n'oserai plus jamais lui vendre, lui solder, lui fourguer de force la beauté des choses.
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