#03 Les Cavaliers passagers - Semaine internationale contre le harcèlement de rue
Je t'ai toujours répété qu'on naissait seul, qu'on mourait seul, qu'on était seul en somme. Qu'il fallait être indépendant. L'indépendance, la clé du couple. Comme un slogan, comme un mauvais titre de magazine féminin ou comme ce que je croyais être ma vérité. Et pourtant, sans ce réveil à tes côtés, que suis-je? Sans cette autre main, sans cette altérité? Un puits de tristesse ou un océan de solitude. Alors je cours de mains en mains. Certaines sont mieux dessinées que d'autres, plus viriles et plus rassurantes. Il y a des mains respectueuses et des mains qui font se sentir sale le lendemain. Et il y a ce souvenir d'une main qui cherche l'autre avec respect, au réveil. Ce souvenir qui me donne encore envie de pleurer.
J'ai béni ta panne. Non, vraiment, ce n'est pas de l'ironie. Je vois bien ton expression interloquée et la surprise qui se lit sur ton visage. Tu ne me crois pas, c'est cela? Et pourtant, je n'ai jamais été aussi sincère.
Il n'y a aucune juste mesure sur ce site. On passe d'un type qui veut éviter toute «prise de tête», qui veut s'envoyer en l'air mais qui ne veut surtout pas s'attacher, à un type qui cherche une génitrice ou une potiche, quelqu'un qui comblerait le vide abyssal de son existence. J'imagine que les hommes tombent eux aussi sur des cas féminins névrosés, à l'horloge biologique bruyante. On se fiche un peu de la personne, tant qu'elle accepte le rôle. On s'en accommodera.
J'ai l'impression qu'il cherche une personne pour faire office de colocataire et de mère porteuse. Il est à deux doigts de me proposer de m'installer avec lui et de lui faire 2,2 gamins. Bientôt, il me parlera d'acheter un chien. Je le connais depuis deux heures à peine. Flippant.
Comme dans un jeu vidéo, on peut devenir qui on veut sur un site de rencontres, mais le profil irréel finit par laisser place à l'IRL.