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Citations de François-Henri Désérable (577)


Mais le nom de Masha Amini passe de lèvres en lèvres et bientôt tout le pays le murmure, puis le gueule à pleins poumons dans les rues, sur les places, dans les universités de Téhéran, d'Ispahan, de Mahabad ou de Tabriz. Et alors on assiste à des scènes auxquelles on n'aurait jamais cru assister. A Chiraz, on voit une jeune fille juchée sur le toit d'une voiture, son hidjab à la main, crier "Mort au dictateur!"; à Kerman, des étudiantes brûler leur voile et danser autour du brasier; dans une école de Téhéran, des lycéennes tête nue saluer d'un doigt d'honneur la photo de l'ayatollah Khamenei; partout en Iran, des femmes, cheveux au vent, une pierre à la main, prêtes à défier le régime.
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Ils étaient là depuis une bonne demi-heure, quand le directeur a pris congé en leur offrant un coupon de réduction - soixante-dix pour cent sur une chambre, à utiliser dans les six mois, car il en va des coupons de réduction comme de l'amour : ils portent en eux un terme, une échéance, le désamour est immanent à l'amour comme la date d'expiration l'est au coupon de réduction, à la différence que sur le coupon tout est clair, tout est écrit noir sur blanc, on sait au jour près quand il sera périmé, ce qui n'est jamais le cas de l'amour (pp. 100-101).
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« C'était à Roger Grenier qu‘il fallait poser la question. Roger Grenier, quatre-vingt-quinze ans, écrivain, éditeur chez Gallimard où depuis 1949, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu'il neige, il se rend à pied chaque jour que Dieu fait. Pendant longtemps, son rituel fut le même, immuable et sacré : levé a six heures, deux minutes plus tard il était sous la douche, à six heures douze il se rasait, à six heures vingt il enfilait un pantalon puis boutonnait sa chemise, entre six heures vingt-cinq et six heures cinquante il buvait son café en lisant les journaux, à sept heures moins cinq il passait autour de son cou une cravate qu’une minute après il avait fini de nouer, à sept heures moins une il chaussait ses lunettes, et a sept heures précises, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu'il neige il sortait de chez lui, rue du Bac, qu'il descendait d’un pas ferme sur lequel les habitants du VII‘ arrondissement réglaient leurs petites habitudes : le voyant qui passait devant ses fenêtres, le boulanger savait qu'il était temps de sortir son pain du four, la mère de famille de réveiller ses enfants, le facteur d‘enfourcher sa bicyclette et de commencer sa tournée. de sorte que, le 3 décembre 1980, au lendemain de la mort de son cher Romain. quand Roger Grenier. accablé de tristesse, dut garder le lit, il y eut des baguettes trop cuites, des enfants en retard à l’école et du courrier non distribué. L'anarchie. » p. 136
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La mémoire est despotique, mouvante et sélective, elle trie arbitrairement, selon son bon plaisir. P 30
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Il ne faut que deux choses dans la vie : de bonnes chaussures et un bon lit. On passe deux tiers de son temps dans les unes, un tiers dans l'autre.
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Je ne le reconnaissais pas, j’avais l’impression de ne pas le connaître – mais connaît-on vraiment jamais ses amis ? Parfois on ne se comprend plus, on avance à l’aveugle, on se heurte à des murs, jusqu’au jour où l’on finit par se dire mutuellement ce qu’on a sur le cœur, comme on craque une allumette dans la nuit : pas pour y voir plus clair, mais pour mesurer la part de ténèbres que chacun porte en soi. (p.165)
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Tu verras, mon amour, viendra le jour funeste
Où l'amour, mon amour, cet amour un peu fou,
Qui mérite à lui seul une chanson de fête,
Laissera, mon amour, un grand vide entre nous.

Et nous qui nous aimons d'amour comme l'atteste
Tes lèvres à présent dans le creux de mon cou,
Nous nous fuirons l'un l'autre comme on fuit la peste,
Nous qui l'un pour l'autre avions une faim de loup.

Tu feras à mon nom une moue manifeste,
J'aurai dans la bouche comme un arrière-goût,
En prononçant le tien amer et indigeste,
Et serai parcouru d'un frisson de dégoût.


Qu' y peut-on, mon amour, si l'esprit se déleste
Des plus beaux souvenirs quand l'amour se dissout ?
Car l'amour, mon amour, est comme un plimpeste,
On écrit là-dessus, puis on efface tout.
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C'est en 1775 que Gabriel Galois vint au monde — la généalogie est formelle, aussi formelle que les encyclopédies grâce à quoi on sait que la même année Goethe s'établit à Weimar, Beaumarchais joue son Barbier au Théâtre-Français, Pougatchev est décapité à la hache, et le jeune Mozart, qui n'a pas vingt ans, est à Salzbourg où Haydn à son sujet se répand en louanges. Les hommes vaquent à leurs occupations, la vie suit son cours, et celle de Gabriel Galois va bientôt commencer.
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On croit que l’écrivain choisit toujours le sujet de ses livres… Pourquoi le laisser se bercer d’illusions ? Faut-il vraiment lui dire qu’en vérité, c’est le sujet qui le choisit, bien plus qu’il ne choisit son sujet ? P 33
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 Il disait aussi : la rupture amoureuse est pire que la mort, c’est le deuil pour soi-même d’une personne encore en vie, que d’autres pourront voir et entendre et sentir et toucher. 
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C'était passé minuit dans un café bobo
Tu venais d'en pousser la porte entrebâillée
Aux tables de bougies aux murs blancs des flambeaux
Que venait d'allumer la fille ensommeillée

Tu portais des bottes une jupe un blouson
Le blouson était beige et la jupe était bleue
Les bottes rouges et noires comme un tison
- Une Parisienne en bottes de sept lieues

Ardente et enjouée tu m'as donné alors
Un baiser plein de fougue en disant : que calor !
Ton blouson prenait feu au feu de la bougie

Ce qui advint dis-tu se devait d'advenir
Et me voila au moins avec un souvenir
De nos amours : une marche à moitié rougie
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Leur silence n’est ni indifférence à l’égard des manifestants, ni approbation à l’endroit du régime : c’est de la peur. Et la peur paralyse. La peur est l’arme la plus sûre du pouvoir.
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«  Savoir qu’on n’a plus rien à espérer n’empêche pas de continuer à attendre .

MARCEL PROUST .
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(Il ne faut que deux choses dans la vie : de bonnes chaussures et un bon lit. On passe deux tiers de son temps dans les unes, un tiers dans l’autre.)
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Cinq charrettes les attendaient devant la Conciergerie. [...]
Dans la rue Saint-Honoré, à hauteur des Tuileries tous entonnèrent La Marseillaise. Vingt voix fortes qui, à l'unisson, couvrirent le bruit de la foule. Ces hommes qui allaient vers leur mort en chantant la gloire de la Patrie intimaient le respect à ceux qui se trouvèrent sur leur chemin ce jour-là.
Quand ils arrivèrent au pied de l'échafaud, sur cette place dont le nom change au gré des régimes politiques [...] il était onze heures du matin. Le brouillard voilait le soleil ; il pleuvait. Jamais l'hymne composé par Rouget de Lisle n'avait résonné avec auteur de ferveur.
C'est Sillery qui, le premier, arriva sur la plate-forme. Le député de la Somme, doyen des condamnés, salua la foule, à droite, à gauche, tel l'artiste qui s'apprête à quitter la scène de sa vie.
Fauchet, Carre, Lesterpt-Beauvais, Duperret furent les suivants. Le sang giclait, débordait du panier, des caillots se formaient ; l'échafaudage s'imprégnait de la couleur écarlate, de telle sorte qu'il fallut, après que la lame du bourreau se fut abattue sur la nuque de Lacaze, le nettoyer à grand renfort de seaux d'eau.
Le chœur diminuait à mesure que le sacrifice continuait. Boileau, Antiboul, Gardien, Lasource, Brissot, Lehardy, Duprat furent sacrifiés.
Ducos était assis à côté de Fonfrède. Quand ce fut à son tour, il embrassa son ami une dernière fois : 'Mon frère, c'est moi qui t'ai conduit à la mort !" lui dit-il. Et ce frère d'alliance, qui bientôt le rejoindrait dans l'autre monde, tentait de le consoler : "Au moins, nous mourons ensemble !".
Le chant funèbre perdait son intensité, pas sa vigueur. Ils n'étaient plus que six - Gensonné, Mainvielle, Fonfrède, Duchastel, Vergniaud et Vigée. Et les six usaient leurs dernières forces dans les paroles de La Marseillaise, paroles somptueuses desquelles ils puisaient l'énergie d'aller mourir. Gensonné, au moment de monter sur l'échafaud, me chercha du regard. Il ne trouva que mes yeux rougis de larmes.
Bientôt, il n'en resta plus que deux. On a souvent affirmé que Vergniaud eut l'honneur de passer sur la planche en dernier. [...] Et pourtant, ce jour-là, c'est avec Vigée, et non Vergniaud que le sacrifice allait s'achever. Il fut le vingtième à passer sur la planche. Il chantait encore sur la bascule. "Contre nous de la tyrannie, l'étendard sanglant est levé !" Le couteau tomba ; le silence aussi.
[...] C'était le 31 octobre 1793, dixième jour du deuxième mois de l'an II de la République. Il était onze heures et demie. En un demi-tour de cadran, la Révolution avait achevé de dévorer ses propres enfants.
[...] Dix fois j'ai porté les yeux sur l'échafaudage de la guillotine, cent fois j'ai entendu le fracas de la lame libérée par le bourreau, mille fois j'ai humé l'odeur du sang fraîchement versé. Mais jamais plus, Monsieur, jamais plus je n'ai vu des hommes braver la mort avec autant de courage.
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Et pas très loin de cette tombe, m’a dit Vasco, il y en avait une autre, sur laquelle on pouvait lire : Robert L. (1923-2006), époux de Nicole L., née J. (1932-20 ).
(…) Comme si, m’a dit Vasco, être la femme de Robert la définissait tout entière, et que lui mort, il ne lui restait plus qu’à mourir. (…) ce qu’il y a de bien, avec la mort, pour peu qu’on l’appelle réellement de ses vœux, c’est qu’il n’y a jamais à l’attendre longtemps : un revolver, ou du poison, ou une corde, ou un rasoir, ou un peu de bonne volonté, et l’affaire est réglée. (p.160)
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Il en va des coupons de réduction comme de l'amour : ils portent en eux un terme, une échéance, le désamour est immanent à l'amour comme la date d'expiration l'est au coupon de réduction, à la différence que sur le coupon tout est clair, tout est écrit noir sur blanc, on sait au jour près quand il sera périmé, ce qui n'est jamais le cas de l'amour.
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(…) alors on racontait des blagues là-dessus, comme celle, bien connue, qu’a dû entendre Piekielny au mois de juin 1941 de ces trois prisonniers du Goulag qui discutaient entre eux :
- Dis-moi camarade, comment t’es-tu retrouvé ici ?
- A cause du boulot, dit le premier. Un matin, je suis arrivé en retard : j’ai pris dix ans de travaux forcés pour sabotage au profit de l’ennemi.
- Moi, dit le deuxième, je suis arrivé n avance : j’ai pris dix ans pour espionnage au profit de l’ennemi. Et toi ?
- Oh moi, dit le troisième, tous les matins j’étais à l’heure.
- Et alors ?
- Alors j’ai pris dix ans pour conformisme petit-bourgeois.
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Et s'il fallait recommencer l'exercice pour la mort de celui qui fut incontestablement le plus grand esprit français du siècle dernier - inutile de prononcer son nom, vous savez de qui je parle, c'est le plus grand esprit français du siècle dernier ! - alors, d'emblée, un mot s'impose : Élégance.
Car l'élégance, justement, se passe de mots ; un geste suffit.

[...] Lagrange ne s'y trompa guère, qui plus tard dit à Delambre :
"Il ne leur a fallu qu'un moment pour faire tomber cette tête. Cent années, peut-être, ne suffiront pas pour en reproduire une semblable."

[...] Car depuis qu'on lui avait ôté sa liberté, le plus grand esprit français du siècle dernier passait son temps à lire, et semblait résigné à continuer ainsi jusqu'à ce qu'on lui ôtât enfin la vie.
À l'abbaye de Port-Royal, transformée en maison d'arrêt pendant la Révolution, il lisait. Dans l'hôtel des Fermes, reconverti en prison à l'usage des fermiers généraux, il lisait. Quand on vint le chercher à la Conciergerie, un quinquet fuligineux éclairait à peine la cellule assombrie, et le plus grand esprit français du siècle dernier, tapi dans la pénombre, lisait.
Alors, que croyez-vous qu'il fit sur la sinistre charrette ? Le plus souvent, les condamnés criaient, pleuraient, priaient, haranguaient le peuple ou le maudissaient. Le plus grand esprit français du siècle dernier ? Il lisait.

Étrangement, on ne lui avait pas lié les mains. Ultime faveur concédée par le bourreau ? Peut-être Sanson, fût-ce par respect, pitié ou admiration, s'était-il accommodé d'une entorse au règlement pour permettre à son hôte le plus prestigieux de terminer sa lecture. Il était donc écrit que le plus grand esprit français du siècle dernier, dont la vie avait été entièrement vouée au culte de l'esprit, devait poursuivre sa quête de savoir jusqu'au dernier soupir, jusqu'à l'ultime répit.
Devant l'échafaud, le plus grand esprit français du siècle dernier continua de lire jusqu'à ce que son nom fût appelé. Alors il sortit de sa poche un signet, le plaça à la page où il avait arrêté sa lecture et, sans prononcer une seule parole, posa sa tête sur le billot.

Voilà, Monsieur, comment on meurt avec élégance.
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 Elle pleure dans les bras d’Edgar parce qu’elle n’en peut plus d’être elle-même, elle a le sentiment de danser sur une crête étroite, au bord de l’abîme ; et dans ses bras elle n’est plus qu’un pantin pantelant de larmes et qui répète, avec une solennité douloureuse, qu’elle est fatiguée, juste fatiguée. Cette nuit-là ils dorment ensemble, et pour la première fois depuis longtemps Tina se sent apaisée. 
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