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Citations et extraits (9) Ajouter une citation
Nietzsche y soutient [dans Généalogie de la morale en 1887] que la morale la plus courante, qu’il identifie à la conception antinomique du bien et du mal, n’est pas un absolu : elle n’existe pas indépendamment des actions. Pour lui, la morale est créée pour être utile à un groupe et lorsque ce groupe contrôle les discours qui régulent une société, ce qui lui est utile devient la morale. Ce qui existe d’abord, c’est un couple bon-mauvais, déterminé par un pouvoir. Puis le pouvoir dissimule la source de cette première évaluation morale et crée le couple absolu bien-mal. Telle action est d’abord utile et donc jugée bonne : c’est parce qu’elle profite à ceux qui détiennent le pouvoir qu’elle est bonne. Après le renversement, c’est parce qu’elle représente le bien qu’elle est faite. (…) Pour Foucault comme pour Nietzsche, il s’agit d’examiner les discours et de comprendre la manière dont ils organisent le réel pour transformer des décisions arbitraires ou utilitaires en impératifs moraux. (…) Dans La volonté de savoir, Foucault affirme en effet que la sexualité est une création de l’époque moderne. La sexualité serait un ensemble de discours et de techniques, par exemple médicales, destiné à relier et encadrer des comportements humains. Cette sexualité, c’est-à-dire cette manière de comprendre ces comportements, est régie par une volonté de savoir : les sujets sont forcés à produire un discours sur leurs pratiques, par exemple par la confession. (…) C’est parce que le pouvoir exercé par des institutions comme l’Église ou la Médecine s’est dissimulé qu’il a pu naturaliser des comportements (la pénétration vaginale hétérosexuelle) et en pervertir d’autres (à peu près tout le reste). Il est donc possible de déconstruire ce dispositif moral pour en produire un autre, susceptible d’intégrer de nouveaux comportements. (p. 91-92)
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L’un des reproches récurrents adressés à la pornographie, comme à la haute couture, est de mettre en avant un type de corps unique, restrictif et difficile à incarner. Tous les hommes sont musclés et ont de longs et larges pénis ; toutes les femmes sont sveltes mais dotées d’une forte poitrine. En fait, et toujours de la même manière que la mode, la pornographie peut rechercher au contraire des physiques atypiques. (…) Mais ces images ne sont pas les plus courantes, même au sein du matériau pornographique ; le rôle des études pornographiques est donc à la fois de populariser, dans une certaine mesure, des documents ordinairement confidentiels et, plus encore d’en faciliter la compréhension. Le travail sur les pratiques opère de la même manière : loin de ne représenter, on l’a vu, que la pénétration vaginale d’une femme par un homme, la pornographie est susceptible de couvrir l’ensemble des pratiques sexuelles. Les études pornographiques, pour le sujet qui s’y engage, sont donc un moyen d’éduquer le désir à des pratiques et des physiques marginalisés ou exclus par les discours communs. Leur rôle est double : diffuser un matériau difficile d’accès et proposer une médiation ouverte entre la matrice ancienne et la matrice renouvelée. (…) [cette éthique] est la dernière étape d’un parcours qui va de la libéralisation des discours à leur intégration subjective, en passant par leur valorisation politique. Elle occupe néanmoins une place particulière dans le contexte académique, où l’éthique du savoir pornographique est liée à l’éthique de l‘enseignement de ce savoir. (p. 103-104)
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Butler reprend l’idée féministe que le genre est une construction sociale et qu’il n’est naturel que par renversement. Elle développe la même analyse pour l’orientation sexuelle. (…) Selon elle, l’ensemble des discours qui structurent une société constitue une matrice, et traditionnellement, cette matrice est hétérosexiste, c’est-à-dire non seulement hétérosexuelle mais également fondée sur une domination sexiste de la femme par l’homme. La matrice tend à se reproduire : de génération en génération, elle répète les mêmes discours. (Mais à cette force de représentation s’oppose une force de fragmentation : la matrice n’est pas une censure absolue, elle laisse exister des discours à sa marge. Dans la conception néo-foucaldienne, le pouvoir n’est pas nécessairement centralisé. (…) Le pouvoir est diffusé dans l’ensemble de la matrice et, par conséquent, il ne peut pas tout contrôler. De répétition en répétition, la matrice change, jusqu’à devenir tout à fait dysfonctionnelle. Il faut alors en produire une nouvelle. Il est donc possible d’occuper des lieux sociaux non prévenus par les discours régulateurs, des utopies, en quelque sorte, dont l’existence permet de lutter contre l’oppression. En effet, lorsque quelque chose que la matrice n’a pas prévu, la preuve que la naturalité est un processus est apportée : on peut exister différemment. Exister, par son corps et par ses discours, c’est donc aussi faire quelque chose : c’est ce que Butler appelle les actes corporels performatifs. (p. 92-94)
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Un problème se précise en particulier pour l’époque contemporaine : celui de la sexualisation croissante de la société. (…) Dans la perspective des études pornographiques, il y a bien un mouvement de sexualisation, c’est-à-dire une production toujours plus spécialisée de discours sur la sexualité, qui constitue la sexualité à proprement parlant en la séparant des autres parties de l’activité humaine pour mieux l’organiser et la contrôler. Mais pour les commentateurs extérieurs au post-nietzschéisme, la sexualisation de la société prend un sens différent : il s’agit de l’augmentation continuelle des représentations sexuelle dans la sphère médiatique. (…) Mais si les uns voient dans la multiplication des discours, au mieux une possibilité de renouvellement de la matrice hétérosexiste, au pire une accentuation de son contrôle, les autres y découvrent la dangereuse décadence d’une société, où chaque image est prêtre à corrompre l’innocence originelle des enfants. De ce point de vue, la pornographie n’est que l’un des avatars de la sexualisation.(…) comme tout système de discours, la convergence porno-médiatique constitue une régularisation des pratiques.(…) il est en effet rare de voir traiter d’un point de vue positif ou simplement neutre des pratiques comme le sadomasochisme, la sodomie masculine hétérosexuelle ou l’ondinisme. (p. 98-99)
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De la même façon, la pornographie professionnelle peut reproduire les codes visuels de la pornographie amateure : mauvaise qualité d’image, absence d’éclairage, faible variété des angles de vue. Dès lors se constitue le genre « amateur », qui devient avant tout le nom d’un style visuel, souvent marqué par un imaginaire voyeuriste et exhibitionniste, plutôt qu’une information sur les conditions de production du matériel pornographique. (…) Ce n’est pas Internet qui conditionne l’apparition d’une pornographie d’amateurs. A bien des égards, la pornographie d’amateurs est lié au développement du gonzo et croise des aspects déjà présents dans la pornographie professionnelle de la fin des années 1980. Internet agit comme un catalyseur. C’est ce qui se passe avec une autre évolution marquante : la multiplication du matériau pornographique gratuit. La gratuité est pourtant loin d’être la règle en pornographie.(…) Internet est donc à la fois le lieu de la pornographie la plus rentable jamais produite et de la pornographie la plus gratuite qui soit.(p.50-51)
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Pour le législateur et les forces de police, la spécificité d’Internet est d’échapper aux circuits de diffusion matériels et, par conséquent, aux systèmes traditionnels de la censure. (…) les cas illégaux sont utilisés comme arguments forts pour autoriser une censure dont le premier objet est, en fait, la pornographie de manière générale. Cela dit, les distinctions restent difficiles à établir. (…) la zone grise de la pornographie, entre légalité et illégalité, existe depuis la stabilisation des dispositifs de censure dans ce domaine. La spécificité d’Internet réside dans la dé-contextualisation immatérielle des documents et dans la création de réseaux virtuels en dehors des circuits de diffusion habituels. (p. 53)
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C’est dans ce contexte de polémique sociale, dans un milieu universitaire et culturel où les discours de défense sont susceptibles de jouer un rôle plus favorable que dans le flot continu des discours médiatiques, que se sont développées, à partir des années 70 surtout, des études savantes sur la pornographie. (…) Cette seconde polémique, agitée dans le monde plus restreint de la recherche universitaire, n’a pas été étrangère à la première. (…) La même division entre condamnation et défense l’a longtemps travaillée. (…) Parler pornographie, c’est toujours réfléchir à l’oppression sexuelle et à la censure, au féminisme et à la violence. (p. 15)
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Les photographies pornographiques épousent la diversité des pratiques sexuelles attestées et de ce que relève en propre des représentations. À l’instar des dessins et des textes, les photographies couvrent toute l’échelle de la valorisation culturelle, de la production pornographique de masse aux œuvres réputées artistiques. D’un côté, des expressions comme « art érotique » paraissent réserver l’appellation « pornographie » au tout venant de la représentation sexuelle. De l’autre, il existe un rapport direct entre ce qui est représenté et les mécanismes de légitimation sous-jacents à l’étiquetage de telle ou telle représentation. (p. 37)
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Concevoir la pornographie simplement du point de vue des actes (ceux qu’elle montre et ceux qu’elle est censée entraîner), c’est occulter la densité historique, l’existence de traditions culturelles, la permanence d’un décalage dans la fiction, la fragilité du mimétisme. L’inefficacité d’une théorie immédiate de l’illusion mimétique est un lieu commun dont les études littéraires ou cinématographiques ont parfaitement conscience. C’est parce que la pornographie est perçue comme un domaine entièrement différent des autres représentations qu’elle souffre de préjugés depuis longtemps écartés de l’analyse des documents non sexuels. (p. 54)
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