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Critiques de Françoise Cloarec (102)
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

"Séraphine de Senlis :une artiste dévorée par une impérieuse nécessité intérieure dont parlait Kandinsky ( peintre et théoricien de l'art".)

Bernard Lorquin.





Les journées de Séraphine sont noires, sales et pleines de crasse mais ses soirées sont ensoleillées et emplies de couleurs.

Enfant, Séraphine gardait le bétail des fermes voisines. Ensuite, elle travailla comme lavandière, dans un couvent (pour nettoyer le linge sale des autres), puis comme bonne chez des bourgeois.





Mais, seule dans sa petite chambre, Séraphine peignait de splendides tableaux, à la lumière d'une pauvre bougie, sans rien avoir appris sur l'art et la peinture.





Comme Jeanne d'Arc, à l'église, Séraphine entend la Vierge Marie (après tout, elle porte le prénom d'un ange) , alors elle peint des arbres, des feuilles et des fleurs, en chantant des cantiques.

Des tableaux gorgés de lumière et de couleurs! De l'art naïf!





Wilhem Uhde, un collectionneur allemand qui a "découvert" Pablo (avant que le peintre ne devienne Picasso! Braque et le douanier Rousseau) remarque les tableaux de Séraphine.

L'exposition de 1927, à Senlis, permettra à Séraphine de ne plus faire du ménage et de se consacrer à la peinture. Il fallut beaucoup d'insistance à Uhde pour empêcher Séraphine de continuer à faire le ménage chez lui...





"Elle s'adressait au ciel, aux nuages, aux arbres, aux fleurs des champs, à tous les êtres de la nature. Elle était directement en communication avec les puissances cosmiques." Anne-Marie, la soeur de Wilhem Uhde





En 1929, l'exposition "Les peintres du Coeur sacré" apporte une certaine aisance financière à Séraphine qui dilapide son argent...

A cause de la crise économique, Uhde ne peut plus vendre de tableaux, alors l'élan mystique de Séraphine la pousse vers la folie...





En 1931, elle est internée dans un asile...

Elle meurt de faim le 11 décembre 1942 (Son dossier médical disait: cueille de l'herbe pour manger et mange des détritus...)

Son tableau "Pommier, 1928-1930" a été vendu aux enchères, pour plus de 221000 euros...





Tableau des grappes de raisin, 1930: Les grappes de raisin, portées par un tronc de palmier, explosent de couleurs. L'arbre est entouré de petites antennes végétales qui font vibrer le tableau. Les grappes de raisin, souvent représentées dans les églises, donnent le "Vin de l'Eucharistie", c'est le corps du Christ et la communion...
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Séraphine...

C'est ma copine,

une belle âme candide,

pauvre et orpheline,

élevée à la campagne

au milieu des vaches et des champs..en 1864.

Elle se retrouve au couvent

mais très vite elle sent le vent.. s'enfuyant loin de ce carcan, des chamailleries de ces bonnes soeurs...

De place en place elle se deviendra bonne à tout faire dans des maisons, elle s'installe à Sensis et réside dans un appartement-atelier d'une pièce qui sera le nid de toute ses créations.



Aimant la nature, très pieuse et pratiquante, un jour à son oreille, une instance céleste lui ordonne de peindre......Séraphine au prénom angélique

la quarantaine passée, employée comme femme de ménage, autodidacte, va de façon impérieuse passer toutes ses soirées à peindre avec dévotion, sous l'oeil bienveillant de la statue d'une Vierge Marie accompagnée d'une petite lampe ....elle va créer ainsi de nombreuses toiles.. va naître alors des bouquets fleurs "oiseaux plumes" ; des arbres, des cerisiers. .elle peindra sur tout ce qu'elle trouve, tout en chantant, un verre de vin comme assistant, c'est un irrépressible élan qui l'anime..mystérieuse inspiration et une "tambouille" bien à elle, concernant la fabrication de ses couleurs à base de pots de Ripolin.. qui reste encore un mystère à ce jour.



Impossible de ne pas citer, le superbe film où le talent de Yolande Moreau nous fait revivre cette femme touchante et émouvante cette personnalité si particulière ...des photos sont présentées dans le livre.



Un écho à cette chère Camille qui comme Séraphine a peur de se faire empoisonner...et qui finira elle aussi en asile psychiatrique.

Séraphine deviendra riche: un jour, un collectionneur parisien, Wilhem Uhde, découvreur de Picasso, de Braque et du Douanier Rousseau vient à Senlis.Il reconnaît le talent

de Séraphine et va s'affairer à la faire connaître au grand public grâce la vente de ses toiles à Paris. Cet homme est bienveillant, les oeuvres se vendent bien, Séraphine sera ainsi dispenser de ses "travaux noir" disait elle, pour un certain temps elle pourra enfin s'adonner qu'à ses "travaux de couleur".



Comme une enfant et une cigale, elle dépensera au gré de ses envies..elle se fera confectionner une robe de mariée sans qu' il existe de futur mari...la guerre se fera ressentir sur les marchés artistiques..et son mécène connaîtra des revers de fortune et ne pourra plus subvenir à sa situation...demandant à Seraphine de réduire son train de vie. ..celle--ci perd pied peu à avec la réalité..



Une biographie très agréable à lire, cette artiste me va droit au cœur ...sensible et merveilleuse âme, cette artiste féminine retranscrit la beauté de la nature dans une simple inspiration, une sincérité spontanée.. Sa vision lumineuse du monde, aux réfléchissantes couleurs chatoyantes, une harmonie céleste qui lui "dicte " son pinceau...incroyable destin.











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J'ai un tel désir

"Sous le pont Mirabeau coule la Seine

Et nos amours, faut-il que je m'en souvienne

La joie venait toujours après la peine. "

Guillaume Apollinaire.



Françoise Cloarec est écrivaine et peintre. Elle écrit comme elle peint, par petites touches...



Dans ce tableau, les personnages principaux sont Marie Laurencin et Nicole Groult. Les autres sont des ombres, certains des esquisses, les derniers seulement des repentirs...



Vous vous souvenez de Marie Laurencin ?" L'été indien."

"Avec ta robe longue, tu ressemblais à une aquarelle de Marie Laurencin..."

Guillaume Apollinaire lui a dédié son plus beau poème, au moment de leur rupture:

" le pont Mirabeau ".



Le tableau est prêt, mais Marie n'utilise que quelques couleurs:

" le bleu, le vert et le rose laque de garance. " Et puis le blanc et le noir...

Son style, "le Nymphisme", dépeint dans des camaïeux pastels, des princesses et des adolescentes androgynes à la pâleur irréelle.



Elle est naturelle et sans maquillage. Ironique, gaie et spirituelle, fantasque, mordante et charmante. Elle séduira Apollinaire, Georges Lepape et Georges Braque, Pablo Picasso (mais Fernande, la muse de Pablo, veille!) et d'autres artistes du "Bateau lavoir"...



La rencontre de Marie avec Nicole Groult ( la mère de Benoîte Groult) s'est faite simplement.

" Sans s'être jamais vues, elles se reconnaissent, se sourient et deviennent complices".

Sur la photo, les 2 femmes sont très proches et se sourient, se dévorent du regard.

"Un cliché gai, sensuel et amoureux ! "

Benoîte Groult le sait, elles étaient amoureuses !



Marie et Nicole: deux femmes libres, à une époque où les femmes ne pouvaient l'être...



Marie couchait avec Apollinaire, mais rentrait chez elle, le soir.

Nicole aussi, était libre de toute morale. Libre d'aimer même si elle avait un mari.



Elles ignoraient la mauvaise conscience, se moquaient du chauvinisme et du qu'en dira-t-on!

Même séparées par la Vie et des milliers de kilomètres, elles continuent de s'écrire :

" Tes yeux sont deux oiseaux bleus

Tes seins sont deux oiseaux blancs

Ta lèvre un oiseau de feu

Ton cou, un oiseau palpitant

Facile à effaroucher

Il se cache pour m'aimer."

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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Un grand merci à cascasimir qui par sa critique et un bon souvenir du film avec Yolande Moreau, m’a donné envie de le lire. Biographie de Séraphine DE SENLIS (1864-1942), domestique le jour et peintre la nuit, dont en 2012 un tableau a été facturé 261 667 euros.

On la suit de la naissance à sa mort. C’est Wilhelm Uhde, collectionneur allemand découvreur, en autre, de Picasso et Braque, qui par hasard sera ébloui par ses œuvres et l’aidera financièrement. J’avais aimé dans le film quand on la voyait chercher ses matériaux. Nul mention ici. Le reste de son existence, ressemblera hélas, à celui de beaucoup d’artistes surtout femmes. Super !
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

« Quelquefois, pendant le tournage, quand je sentais que le personnage m'échappait, qu'il me semblait que je « fabriquais » au lieu de « vivre », je lui parlais tout bas... je lui demandais de rester avec moi...

Moi qui ne suis pas mystique, je me suis bien gardée de le dire aux autres...

Le voyage en Séraphine était comme une quête de soi... de notre rapport au monde, à la nature et au divin... »

Yolande Moreau



C'est grâce au film "Séraphine" ( 2008 ) du réalisateur Martin Provost avec Yolande Moreau, sensationnelle dans ce rôle, que j'ai découvert l'existence de Séraphine de Senlis.

"Séraphine est pieuse et solitaire", c'est une âme simple. C'est dans la Cathédrale Notre-Dame de Senlis que la Vierge lui ordonne de peindre.

Le génie est inexplicable. Séraphine n'a jamais pris aucun cours, elle peint comme elle respire, c'est un « élan vital », ses peintures explosent de couleurs et de force.

Toute sa vie, elle a effectué chez autrui ce qu'elle appelait ses "travaux noirs", des travaux ménagers pénibles, exténuants. Elle peignait la nuit, uniquement avec du Ripolin mélangé à on ne sait quoi car elle n'a jamais voulu le dire.

En 1912, Wilhelm Uhde, un collectionneur de tableaux, la découvre. Il manifeste un goût très sûr pour des peintres alors inconnus : Picasso, Braque, Dufy etc.

C'est le vrai début de Séraphine peintre.

Puis sa santé mentale se dégrade, « dans cette fin d'un esprit qui sombre dans la démence », brûlé par sa passion.

Le 31 janvier 1932, c'est la fin de Séraphine peintre.

Elle est d'abord hospitalisée à Senlis puis transférée le 25 février 1932 à l'asile de Clermont-de-l'Oise où elle meurt le 11 décembre 1942 dans le plus grand dénuement sans avoir jamais reprit les pinceaux.
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De père légalement inconnu

Comment ne pas être ému à la lecture de ce récit," une fiction librement inspirée de faits réels"? Elle veut un nom, une photo, une tombe peut- être, elle se sent orpheline de pays comme de racines". Tout est dit au début de ce bel ouvrage comme une quête , une recherche éperdue, une étrange histoire d'abandon et d'amour, de destin douloureux qui questionne, une douleur sans nom, infinie, qui ne cessera jamais,une mélancolie pour toujours....Ou l'histoire de la guerre d'Indochine qui approche de son terme scellée par la bataille de Dien Bien Phu.Dans le port de Saïgon, odeurs de vase, de saumure, de fleurs, d'épices, cris des conducteurs de pousse- pousse et des vendeurs de thé, de fruits.....pleurs, disputes, hurlements, sacs, ballots, caisses, valises, amarres,valse des adieux.....visages en pleurs: le 26 décembre1955, des enfants embarquent sur le paquebot le Cyrenia laissant derrière eux une mére au dela des larmes, une terre à feu et à sang, une civilisation bafouée, un passé bercé par l'amour maternel et obscurci de secrets.....l'un d'eux est une fillette dont le prénom est Camille....

Paris 2013, cette même Camille, âgée de soixante cinq ans, mére et grand- mère a construit sa vie à Paris. Exilée de force de Saîgon à l'âge de sept ans, elle a été élevée dans un pensionnat en France. Née de mére annamite et de père présumé français pendant la guerre d'Indochine, elle partira en quête de cet inconnu, désirera mettre un visage,

Un cœur, un nom, un destin, sur l'officier amant de sa mére Thi Vien. De déceptions en espoirs, toute sa vie, jusqu'à la révélation finale que je ne révélerai pas ...la mémoire de Camille ressuscite des mondes flamboyants, odorants, des parfums chauds... Des voix et des ombres....Cette recherche des origines est particulierement bien rendue par la plume fine, efficace, sans pathos, avec empathie de l'auteure , psychologue, psychanalyste , ècrivain et peintre qui nous restitue sobrement ,avec justesse, le destin douloureux de ces enfants nés dans le fracas de la guerre. Le contexte militaire et colonial de l'époque est bien restitué sans parti pris, un roman riche de couleurs et d'odeurs, de domination et de violence, d'exil et de reconstruction...un trés beau livre convaincant, touchant, d'une grande sensibilité,, d'émotion retenue...faisant revivre avec talent le temps oublié de l'Indochine....
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L'indolente

Est-ce un essai, est-ce un roman ?

On oscille entre les deux.

Ce livre nous raconte la vie de Marthe Bonnard, muse du peintre tout au long de sa vie.

J'y ai appris des choses mais je me suis aussi ennuyée.

Beaucoup de répétitions.

Des recherches documentées mais posées là sèchement.

Aucune émotion n'est passée et je n'ai pas réussi à trouver Marthe Bonnard sympathique.

Mystérieuse, menteuse, maladive, dépressive ….....

seul son amour pour Bonnard semble beau et sincère.

Pas de plan vraiment dans le récit.

Des tas de noms d'inconnus.

Des choses vraies certainement mais beaucoup de supputations aussi.

En tout cas je ne savais pas que Bonnard avait peint autant de tableaux ni qu'il avait tant aimé sa femme.
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Un essai biographique passionnant sur une artiste totalement imprégnée de religion qui vivait dans une extrême solitude et dont l’esprit fantasque finira par basculer dans la folie.

Séraphine Louis-Maillard, dite Séraphine de Senlis a vécu à la fin du XIXème et au début du XXème siècle. Elle fut une artiste peintre autodidacte dont l’œuvre, difficile à classer, a été rattachée à l’art naïf. Elle peint la nature, les fleurs, les feuilles, les arbres, les animaux avec une grande originalité.

Pourtant rien ne la prédestinait à devenir une artiste. D’origine très modeste, elle est orpheline dès le plus jeune âge. C’est sa sœur qui s’occupe d’elle dans sa prime jeunesse. Elle participe comme elle peut aux travaux domestiques ; elle garde le bétail des fermes voisines. Dès l’âge de 13 ans, elle commence à travailler comme domestique, bonne à tout faire, chez des particuliers puis au sein d'un couvent. A partir de 1902, elle se met au service de plusieurs maisons bourgeoises de Senlis (Oise).

Très imprégnée de religion, elle a une prédilection pour la Vierge Marie qui en 1905 l’aurait enjointe de consacrer sa vie au dessin. C’est alors, âgée de 42 ans, qu’elle fait ses premiers essais. Elle passe rapidement à la peinture à l'huile à séchage rapide, le Ripolin.

Après ses longues journées de travail, Séraphine s’enferme chez elle, dans la pièce unique de son logement qui lui sert également d'atelier. Elle peint en chantant des cantiques. Sa vie devient très difficile car au XIXème siècle, chacun est tenu de rester à sa place. Pourtant un allemand, Wilhelm Uhde, collectionneur et découvreur de Picasso, de Braque et du Douanier Rousseau croit en son talent. C’est grâce à lui que son travail connait aujourd’hui encore une certaine postérité.
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

C'est avec très peu de "matières" que l'auteur réalise cette biographie. Pourtant il me semble qu'elle s'en sort plutôt bien. Sa profession de psychanalyste l'aidant à tenter de percer le mystère qu'était Séraphine de Senlis. Car c'est une vrai énigme que cette femme. Je ne vais pas ici raconter "son parcours" ni comment elle finira ses jours, sachez seulement que l'histoire de cette femme est émouvante, c'est en même temps l'histoire d'une certaine France, une France rurale. C'est aussi l'histoire d'une époque bouleversée par les conflits militaires, qui vont labouré cette terre ainsi que les esprits.

On a parlé à son sujet de" cas de peinture spontanée". Un film sur sa vie à été réalisé en 2008.
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Dans l'ombre de sa soeur

J’ai la chance de pouvoir habiter dans l’Yonne et je me suis rendue plusieurs fois à Saint-Sauveur, avant l’ouverture de la Maison de Colette et depuis qu’elle a été restaurée. J’y suis encore allée la semaine dernière avec une amie et j’en suis repartie avec cet ouvrage qui me semblait prometteur.



Alors, certes, l’auteure évoque le sort de Juliette Roblineau-Duclos, la sœur aînée des 4 enfants de Sido et sans doute la seule légitime de celui qui était surnommé La Bête, Jules le premier mari de Sido. Elle évoque son enfance, son caractère sombre et tourmenté, son mal-être, sa jalousie féroce envers son mari. Mais je rien appris que je ne savais déjà car, lors des visites commentées de la maison Colette, on évoque toujours celle qui, par son mariage, a ruiné les Colette. Le Dr Roché avait décidé d’épouser Juliette pour son héritage mais après le mariage, quand le mari a demandé des comptes à son beau-père, l’incurie de celui-ci a explosé à la figure de tout le monde. Le capitaine Colette était un piètre gestionnaire et Roché s’est étranglé de rage quand il a compris qu’il avait été floué. La malheureuse Juliette sera tiraillée entre mari et famille et son frère Achille ne lui pardonnera jamais d’avoir cédé à son mari qui souhaitait porter l’histoire devant la justice. Je suis aussi en train de lire les lettres de Sido à Colette (plus quelques lettres à Juliette) et la mère nous donne aussi des renseignements, notamment sur la mort de Juliette qui a mis fin à ses jours. Donc, pour en revenir eu livre de Françoise Cloarec, je suis restée sur ma faim. Juliette restera à jamais dans l’ombre de sa sœur.

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Dans l'ombre de sa soeur

Lire et fréquenter Colette, c'est côtoyer les visages de son enfance évoquée dans « La Maison de Claudine », « Sido » et autres textes.

C'est devenir familier de Sido, du Capitaine, d'Achille et de Léo.



Comme souvent, voilà qu'est omis le nom de Juliette, la demi-soeur aînée, fille du premier mari de Sidonie Landoy, Jules-Robineau-Duclos.

Les souvenirs que Colette nous conte la rendent étrange, à part, dans un monde parallèle, peu présente aux bonheurs familiaux.

C'est la retranchée, celle qui s'oublie…



Pour les lecteurs assidus de Colette, les « Lettres de Sido à Colette » la font resurgir dans l'inquiétude et la douleur.



Le livre de Françoise Cloarec lui donne vie et lui permet d'être au-delà de la mort.



L'autrice a visité la maison de Colette à Saint-Sauveur en Puisaye.

Pénétrant dans la chambre de Juliette, contemplant sa photo, elle se laisse envahir par les sentiments que provoquent le lieu, l'image, le regard, l'émotion, tout un inconnu qui la transperce.



Un travail de recherches, de lectures d'oeuvres, de lettres, de témoignages, un regard thérapeutique vont tenter de reconstruire une vérité, celle de cette jeune fille victime de sa naissance et d'un père alccolique, victime d'un physique particulier, victime de l'arrivée d'enfants d'un second mariage, victime d'un mariage sans amour, victime de sa jalousie destructrice, victime sans défense, sans paroles.



La parole qui aide, tellement absente dans ces relations qu'on ne peut s'empêcher de trouver parfois cruelles certaines paroles de Sido, de Colette et de ses frères.

Pauvre Juliette cloîtrée dans son propre enfermement…



Plus les chapitres s'écoulent, plus on éprouve de la compassion devant cette fille aimée/mal aimée.



Les souvenirs de Colette qui s'égrènent, ne fut-ce que dans « Claudine à l'école », s'éclairent à la violence du mépris, des ragots qui entourèrent la « ruine » de ses parents lorsque le gendre réclama le dû de sa femme. Famille éclatée.

Horreur ces mariages intéressés (de Sido et Juliette), je ne peux m'empêcher de citer la phrase de George Sand : « On les élève comme des saintes, on les livre comme des pouliches ».

Quelle audace, quelle revendication (choquante pour l'époque) de Sido devant le mariage et la place de la femme dans une société dominée par l'élément viril et la cupidité.

Sido, une femme lucide, en avance sur son temps, en contradiction avec beaucoup de ses contemporains, apparaît sensible et exigeante.

Des enfants : Achille le misanthrope, Léo le doux rêveur, Colette la libérée et Juliette la douloureuse, l'inconnue auto-destructrice qui nous est racontée délicatement dans ce livre.



Ce dernier regroupe tout ce qui a été raconté de manière éparse et constitue un tout qui en fait un portrait révélateur d'une femme, d'un milieu social et d'une époque.

Sa voix manque…



Françoise Cloarec effleure pudiquement des éléments de sa propre vie sans doute suscités par la visite fondatrice de la maison de Colette et par l'écriture.



Émouvant, ce livre donne à Juliette la place qu'elle mérite d'occuper et va ainsi au-delà de ce que Colette nous en livrait.



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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Peintre et psychanalyste, Françoise Cloarec nous propose un très joli livre sur Séraphine Louis, dite de Senlis.

Son texte oscille entre l'étude de l'œuvre, son histoire, et le travail biographique.

Comme on ne sait pas grand chose de cette femme originale et mystérieuse qui mourra dans un hôpital psychiatrique, l'auteur construit son propos à partir de rapports de police relatant les faits qui précèdent l'internement et de rapports médicaux qui le légitiment en diagnostiquant la psychose et le délire de persécution. Elle s'appuie également sur quelques écrits d'amateurs d'art ayant découvert puis reconnu le génie de Séraphine en peinture.

Françoise Cloarec reprend sa thèse en psychologie clinique et lui donne une nouvelle forme d'écriture. Elle nous livre ainsi un texte plein de tendresse et d'émotion qui nous présente sa Séraphine.

Le sous-titre est explicite : "la vie rêvée de Séraphine". L'écrivain comble les trous de l'histoire, les amnésies des descendants et des gens qui l'ont côtoyée avec sa sensibilité et ses rêveries qu'elle a collectionnées durant de longues années.

Ce livre m'a beaucoup plu, tant dans sa démarche très respectueuse que dans son propos.

Il met en lumière le mystère Séraphine, l'énigme de son œuvre mais aussi la tragédie, et l'horreur de sa mort honteuse.

Séraphine Louis est morte abandonnée de tous, dans la faim, le froid et le dénuement le plus absolu comme beaucoup d'internés des hôpitaux psychiatriques sous la France de Vichy.

Une autre femme artiste, contemporaine de Séraphine a connu le même sort : Camille Claudel.

Ce travail plein de compassion pour la femme et le peintre est aussi une œuvre de réhabilitation tournée vers l'avenir. Il a été écrit dans l'espoir de changer notre regard sur les "originaux", les "allumés", ceux dont on se moque très facilement et dont on se débarrasse sans scrupules.

des images et des liens sur le blog :
Lien : http://sylvie-lectures.blogs..
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J'ai un tel désir

A travers la vie de Marie Laurencin et son amitié amoureuse avec Nicole Groult, mère de Benoîte et de Flora, c'est à la fois une femme libre et toute une époque que décrit ici Françoise Cloarec, au fil des relations que Marie a nouées grâce à sa liaison avec Guillaume Apollinaire. Enfant qui a connu son père mais n'a pas été reconnue par lui, très proche de sa mère dans une intimité quasi fusionnelle, Marie Laurencin se lance dans la peinture sans y avoir été vraiment encouragée. Elle rencontre Picasso, qui à son habitude, ne dira guère de bien d'elle, mais sera soutenue par Apollinaire envers et contre tout. Leur liaison finira par se rompre, Apollinaire mourra, mais entre-temps Marie aura rencontré la sœur du couturier Paul Poiret, mariée au décorateur André Groult, et les deux femmes entameront une longue liaison que le mariage de Marie avec un allemand et par la suite son exil en Espagne pendant la guerre ne briseront pas. Nicole aura d'autres liaisons et de l'une d'elle naîtront ses deux filles, Benoîte et Flora, que son mari reconnaîtra. La relation privilégiée entre Marie et Nicole deviendra plus distante, et Marie, réfugiée dans sa peinture et protégée (un peu trop semble-t-il) par sa camériste , décédera à 72 ans dans un relatif isolement.

J'ai beaucoup aimé ce livre, qui décrit une artiste singulière en la situant sans cesse dans son époque, ses relations avec les grands artistes de cette époque, notamment Picabia, Cocteau, Max Jacob les Delaunay, le douanier Rousseau, sur lesquels on apprend d'ailleurs beaucoup de détails intéressants, ainsi que sur le regard que Gertrude Stein avait de Marie.

Le caractère de Marie Laurencin nous apparaît tout en nuances, avec une volonté de comprendre ce qui a fait d'elle une femme et une artiste si particulière dans le contexte historique et social qui était celui de la Belle Époque, puis de la seconde guerre mondiale. Femme libre, Marie a pu se construire à la fois grâce à son entourage, et aussi malgré lui. Femme seule, artiste vivant dans son monde intérieur, elle n'a pas toujours compris celui dans lequel elle vivait, un peu en porte-à-faux, se brouillant avec un certain nombre de ses proches. Il nous reste ses œuvres très particulières. "D'où viennent-elles ? Où vont-elles ? Où sont leurs attaches ? Dans leurs rêves dans les couleurs pastels, elles s'évadent du monde vers la lumière."

Un grand merci à Babelio et aux Éditions Stock pour ce livre lu dans le cadre de la Masse Critique.

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Dans l'ombre de sa soeur

Qui la connaît, elle, la « sœur aux longs cheveux », Juliette Robineau-Duclos ?

Colette en parle de temps à autre, au détour d'une phrase. Mais pas beaucoup. Pourquoi ?

Françoise Cloarec est psychanalyste et sa thèse porte sur Séraphine de Senlis. Elle s'intéressera ensuite à d'autres femmes qui sont restées dans l'ombre, comme Camille Claudel ou Marie Laurencin.

Alors qu'elle est à Saint-Sauveur-en-Puisaye, elle décide de suivre la visite guidée de la « Maison de Colette ». Mais, au lieu d'accompagner le groupe, elle va s'attarder dans la chambre de Juliette, que le guide présente comme « une petite fille ingrate », approuvé par les personnes présentes, qui, jetant un regard sur sa photo, disent : « oui, indéniablement, elle est disgracieuse. » Françoise se hérisse : « Immédiatement, je veux la tirer de là (…) Je connais cette émotion, ce besoin de mettre en lumière ceux dont on ne parle pas, les disparus, les moches, les fous, ceux qui sont cachés ou à côté. »

Pour ma part, j'adore Colette. J'ai lu presque toute son œuvre, les correspondances, les biographies de Geneviève Dormann, Jean Chalon, Michel del Castillo et bien d'autres. J'ai lu des documents parlant de ceux qui entourent l'auteure : Marguerite Moreno, Missy, Colette de Jouvenel (sa fille)...

Mais je ne connais pas Françoise Cloarec.

Lorsque j'aperçois son livre sur la table de la librairie, évidemment, je m'en empare.

La couverture, il faut le reconnaître, est saisissante : Gabrielle Colette y apparaît en majesté, alors qu'elle n'est pas au centre de ce travail. Son portrait (un des plus connus) est doux, rêveur, paisible. C'est alors qu'on remarque l'autre : Juliette, tout de noir vêtue, une robe à col montant, sévère, boutonnée jusqu'au menton. Certes non. Elle n'est pas avenante. Elle est le contraire de sa sœur. Sa demi-sœur, en fait.

Françoise Cloarec a de la chance. Lorsqu'elle était à Saint-Sauveur, elle a pu entrer dans la maison, parcourir les jardins, s'imprégner dans sa chambre de la présence de Juliette. L'endroit est un musée. Moi-même, je suis déjà allée deux ou trois fois dans le village de Colette, mais sa demeure (celle de sa mère, en réalité) n'était pas encore accessible au public. La façade avec son pignon, la grille du jardin d'en face, c'est tout ce que j'ai pu voir. L'endroit appartenait à des privés.

Françoise Cloarec est présente dans son livre, de temps à autre, elle intervient, elle explique les incidences de son travail sur sa vie personnelle. On peut deviner que se plonger dans l'existence morose de Juliette éveille des échos douloureux de ses propres souvenirs. Elle est également psychanalyste, elle fait donc aussi parfois allusion à des malheurs qui lui ont été confiés. A l'époque de Sido et de Juliette, on n'en parlait pas. On gardait sa souffrance bien cachée à l'intérieur de soi.

J'imagine que, pour se documenter, cela n'a pas été simple. Juliette est restée « dans l'ombre de sa sœur ».

L'ouvrage s'ouvre par ses noces, un moment normalement heureux et festif. Mais déjà, la pauvre épousée est « seule, assise à la table du banquet, immobile. La tête penchée, entraînée par la masse de ses cheveux bruns, aucune expression ne transparaît sur son visage. » Ce n'est pas une union d'amour romantique. On dirait que la famille est contente et soulagée de s'être débarrassée de cette étrangère, si dissemblable d'eux-mêmes. « Le Capitaine Colette (…) s'abandonne sur une chaise », « Achille ressent un tel malaise qu'il se sauve de la fête. Il saute le mur pour pénétrer dans le jardin de la maison maternelle et se mettre à l'abri. » « Léo, son cadet, s'est éloigné depuis longtemps, il flotte dans son monde. » « Sido s'en veut d'avoir remis sa fille aux mains d'un individu qu'elle connaît à peine et qui ne lui plaît pas. » Quant à Gabrielle (la future Colette), elle se réjouit du départ de sa demi-sœur. Elle va pouvoir déménager dans une pièce spacieuse et lumineuse.

Françoise Cloarec explique le mariage arrangé. Le docteur Roché, le conjoint, n'a éprouvé aucun élan envers cette pauvre fille. C'est une amie de sa famille qui a établi avec lui une liste des partis intéressants et ce qu'il recherchait, c'étaient les propriétés et l'argent. Elle va remonter le temps pour évoquer un cas semblable en tous points : les épousailles de Sido et Jules Robineau-Duclos, le père de Juliette, qu'on surnommait « le sauvage », c'est tout dire, un ivrogne et une brute. Tout bébé, sa fille n'a donc connu que cris et disputes. Sido, qui n'était pas femme à se laisser faire, a bien vite trouvé un amant, qu'elle épousera dès la mort de Jules. Les trois autres enfants, ceux du Capitaine Colette, sont décrits comme lumineux, beaux, sans cesse en mouvement. Juliette, elle, s'enferme dans son refuge où elle passe son temps à lire.

Le récit de Françoise Cloarec est émaillé de citations, la plupart de la plume de Gabrielle, devenue Colette.

J'ai dévoré son essai qui m'a beaucoup plu, même si je n'ai pas appris beaucoup de choses que je ne connaissais pas. Mais l'auteure a donné à Juliette une place à laquelle celle-ci n'a jamais eu droit et expliqué la raison de ce visage austère et fermé.

Cela m'a donné envie de lire ses autres livres consacrés à des femmes en marge de la société, comme Séraphine de Senlis ou Marthe Bonnard.
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L'indolente

Roman ou récit ? Aucune mention n'accompagne cet ouvrage et il est bien difficile de le classer. L'enquête qui a accompagné sa construction fait partie intégrante du récit mais, le fait de ne pas vraiment trouver de réponse au "mystère Marthe Bonnard" fait pencher l'ensemble vers une sorte de biographie romancée. Intéressante à lire pour l'éclairage qu'il apporte sur l’œuvre de Pierre Bonnard et l'influence de sa femme, ultra-représentée dans ses toiles.



C'est d'ailleurs cette contradiction qui a intrigué puis obsédé l'auteure (et on la comprend) : omniprésente dans les tableaux de son mari, peinte dans toutes les positions, avec ou sans vêtements, Marthe Bonnard reste pourtant une totale inconnue, réfugiée derrière une identité qu'elle s'est choisie très tôt, le jour de sa rencontre avec Pierre en 1893. Ce n'est qu'à la mort du peintre, cinq ans après sa femme, que la succession mettra à jour les mensonges de Marthe. Est-il possible que Pierre Bonnard ait vécu pendant toutes ces années avec une femme dont il ignorait le vrai nom de famille et les origines ? A-t-il choisi de ne pas s'interroger ? Malgré toutes ses recherches, malgré les témoignages des descendants de ceux qui ont côtoyé le couple, rien ne permet d'éclaircir ce mystère qui restera à jamais prisonnier de l'intimité du couple. Et c'est tout simplement remarquable que ce couple, très exposé, très en vue à l'époque - on aurait dit très médiatique de nos jours - parvienne à garder son mystère malgré le scandale généré par le règlement de la succession dans les années 50.



Mais cette investigation de la part de l'auteure est surtout l'occasion de nous donner à voir un couple tout à fait extraordinaire pour l'époque, loin des conventions et très ancré dans la modernité. Pierre Bonnard, contrairement à ses prédécesseurs impressionnistes est un peintre qui connaît la réussite et même la gloire de son vivant. Loin de la bohème associée à la vie d'artiste, on est ici dans le confort bourgeois, pas très loin de l'opulence vers la fin de sa vie. La relation qui unit Marthe et Pierre est exclusive et survivra même aux petites incartades du peintre. La façon dont il la représente sans cesse, toujours jeune, jamais marquée par le temps est une fantastique déclaration d'amour. Un témoignage sur leur vie et les sentiments qui les unissent.



Françoise Cloarec nous invite à un voyage dans la première moitié du XXème siècle aux côtés des artistes de l'époque, tels Vuillard, Signac ou Valloton. Ou encore Monet dans la dernière partie de sa vie. Elle éclaire notre connaissance sur l’œuvre du peintre, sa palette de couleurs ou encore ses motivations à peindre les choses et les décors de la vie quotidienne. On découvre également qu'il est à l'origine d'une réflexion puis d'une loi sur le droit moral du peintre sur son œuvre, qui voit enfin l'artiste reconnu propriétaire de son tableau jusqu'à ce qu'il le juge terminé, ce qui n'était pas le cas jusque-là. Pierre Bonnard pouvait garder des années des tableaux dans son atelier avant de les finaliser, parfois pour une seule petite touche de couleur... A sa mort, la valeur des œuvres ainsi conservées se montera à plusieurs centaines de millions de francs, donnant lieu à une féroce bataille entre les héritiers.



Personnellement, je ne connaissais pas du tout cette histoire même si j'ai déjà eu l'occasion de visiter des expositions liées aux œuvres de Bonnard auxquelles le personnage de Marthe est bien sûr toujours associé. Alors d'accord, si l'on cherche des révélations, on risque de rester sur sa faim. Mais on peut aussi apprécier le fait que le mystère reste entier... ce qui est en soi un très joli sujet de livre. Et un bel hommage à ce couple lié autant par l'amour que par l'art.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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L'indolente

En 1893, Pierre Bonnard rencontre Marthe de Méligny. La jeune femme se présente comme orpheline et elle devient immédiatement la muse parfaite du peintre. « Il la dessine comme s’il lui écrivait son désir de la revoir. » (p. 15) Dans le Montmartre du début du XX° siècle, Pierre et Marthe vivent heureux, couple autosuffisant que le luxe n’intéresse pas, uniquement tourné vers la peinture. « Elle est le thème privilégié, le prétexte essentiel de la mise en lumière de son art. Si elle montre sa fragilité, sa force réside en l’amour de Pierre pour elle. » (p. 135) Il faut dire que Marthe n’aime pas paraître, ni fréquenter le monde. Elle préfère rester chez elle, chez eux, entretenir une intimité créatrice que favorisent ses maladies et sa faiblesse nerveuse. Et Pierre est souvent bien heureux de rester auprès de son amante et de son modèle préféré. « Silhouette parfaite, elle donne à voir son corps, ses courbes. Toujours invitant aux regards, cachant ses yeux. » (p. 56) Sans cesse, Marthe se dérobe aux questions sur son histoire, il est impossible de fixer son identité sur le papier, pas comme son corps sur la toile. « Le passé, elle ne va pas l’oublier, elle va le nier. » (p. 18) En réalité, Marthe s’appelle Maria et elle lutte contre un passé qu’elle ne veut pas reproduire. Marthe/Maria cache sa famille, ses premières années et se rend entièrement disponible pour Bonnard en faisant d’elle-même et de son passé une toile vierge sur laquelle l’artiste peut inlassablement projeter ses désirs et l’image inaltérée qu’il a de sa muse amante. « Marthe devient le chef-d’œuvre du peintre. » (p. 27) Dans les toiles de Bonnard, Marthe est éternellement jeune, en pleine santé et belle. « Depuis leur rencontre, le temps s’est aboli : Marthe éternellement jeune, les seins haut, se lave. » (p. 242)



En retraçant l’histoire du modèle de Pierre Bonnard, Françoise Cloarec parle de ses recherches et de son travail autour de Marthe/Maria. « Marthe n’est pas celle que l’on croit, je vois bien qu’il y a du secret. Je cherche la Maria qu’elle a voulu taire dans les toiles, dans sa famille, dans les livres, dans les articles. » (p. 38 & 39) Comprendre qui se cachait derrière Marthe, c’est comprendre pourquoi l’héritage du couple Bonnard a été un tel scandale. Ce n’est certainement pas ce que cherchait le peintre. « Bonnard ne recherche ni l’argent ni la renommée. Sa place en peinture est singulière, peu d’artistes sont aussi effacés que lui. » (p. 97) Marthe de Méligny, c’est un peu la Mona Lisa de Pierre Bonnard, une beauté mystérieuse qui ne livrera jamais tous ses secrets. Et si L’indolente approche du cœur du mystère, il reste suffisamment à distance pour que le lecteur retienne avant tout la beauté des tableaux de Pierre Bonnard. Le reste n’est que littérature.
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Le style que je trouvais un peu décousu au début de ce et qui me déroutait a fini peu à peu par m'apprivoiser et pour finir j'ai été conquise par cette biographie.

Au-delà de l'histoire tout à fait exceptionnelle de Séraphine Louis, dite de Senlis, on apprend beaucoup sur le collectionneur allemand Wilhem Uhde qui la découvrit.

Le dernier chapitre m'a réservé encore quelques bonnes surprises. L'auteur en effet nous fait pénétrer dans l'univers des pensionnaires des maisons d'internement et des conditions extrêmes qui étaient les leurs dans les années 39-45.



Dans sa postface enfin Françoise Clorec tente une approche de définition ou plutôt de non définition de l'art de Séraphine et d'en éclairer,le mystère, à défaut de le comprendre. ... « l'intérêt ici, c'est qu'à travers un discours le lecteur soit conduit à regarder, à s'approcher des toiles de Séraphine. Il faut abandonner la description, l'interprétation, s'en délivrer et se laisser submerger par ce que l'on voit, ce que l'on ressent, céder au souffle qu'elles dégagent. »



Enfin ce livre comporte également une très intéressante et abondante bibliographie, sur le thème des liens entre art et folie, sur celui des naïfs, et de Séraphine bien sûr.
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Avant tout, je suis amoureuse des toiles, de la peinture de Séraphine dite de Senlis. Elles me fascinent et m'emplissent. Elles disent bien plus que ce qu'elles montrent. Il y a des secrets profonds dans cette peinture, et je sais un peu plus pourquoi avec la lecture du livre de Françoise Cloarec '' Séraphine ''.



Séraphine de Senlis est une femme peintre, totalement autodidacte, ce qui me fait toujours doublement plaisir, mais en plus, et ce n'est pas rien, est issue d'une classe sociale, (oh si ça existe même actuellement.) totalement méprisée, puisqu'elle était bonne à tout faire chez des bourgeois.



Jamais Séraphine n'apprit la peinture, et en prime, elle s'y mit à... 42 ans !!





Incroyable !! Elle vendit de son vivant pourtant.



Son travail pictural est très singulier, sa technique unique et restée secrète (Aaah !! Mais je veux savoir !), et son œuvre absolument, totalement magnifique.



Le livre que lui consacré Françoise Cloarec est passionnant. Françoise Cloarec est une afficionada du travail pictural de Séraphine. Elle a d'abord écrit une thèse à son sujet, puis ce livre et à collaboré avec Martin Provost le réalisateur du superbe film '' Séraphine '' avec Yolande Moreau, éblouissante, à l'écriture du scénario.



Il faut lire ce livre, délicat, passionné, en recherche et questionnements, plein d'informations comme d'interrogations, une déclaration d'amour '' renseignée'' sur Séraphine de Senlis, sa vie, son œuvre et tristement, ses dix dernières années en asile...



-" Éloignée de tout académisme et des conventions, Séraphine n' apprend pas une technique, elle l'invente. Peindre est la façon qu'elle a trouvée pour exister. Poussée par cette force irrésistible, elle peut se passer de tout le reste. Le plus important est que Séraphine à réalisé son rêve de peinture. ''

-" Aucune étiquette n'est satisfaisante. Séraphine échappe à tout, à toutes les dénominations, à tous les courants."



C'est en quelque sorte l'histoire d'une femme pauvre, originale, croyante qui quitte son travail de bonne dans un couvent, devient bonne chez des bourgeois de Senlis, et sur un appel de la vierge, se met à peindre à 42 ans. Mais à peindre à sa façon, sans une once d'influences autres, comme en transes, c'est aussi une femme qui va s'épuiser, et respirer du ripolin et de la térébenthine chaque nuit, ce qui est franchement toxique, (Cela m'étonne que ce ne soit pas évoqué dans ce livre comme me pistes possibles de sa maladie et de son affaiblissement psychique avec le manque de bonne nourriture et le trop plein de'' travaux noirs''(elle appelait ses travaux noirs ses emplois de bonne.)...



C'est l'histoire d'une femme artiste autodidacte qui a eu du génie, un génie dévorant, d'autant plus qu'elle ne pu s'y consacrer entièrement.

Il reste ses œuvres sublimes et la tristesse de connaître ce qu'elle éprouva de déception et ensuite de ses misérables dix dernières années d'internement inhumains.

Un livre à lire pour l'amour qui s'en dégage de l'œuvre de Séraphine de Senlis, et sa peinture sensuelle et merveilleuse.

'' Il est clair que les fleurs servent à Séraphine à peindre ses tableaux et non ses tableaux à reproduire des fleurs. '' André Malraux. '' Les voix du silence.
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Femme de peu, d'extraction très modeste, rien ne prédestinait Sėraphine Louis Maillard, dite " Sėraphine de Senlis" (née en 1864 comme Camille Claudel et, comme elle, morte internée dans un hôpital psychiatrique) à être aujourd'hui connue au travers le monde, exposée dans les plus grands musées, sujet de livres et de film.

Françoise Cloarec, psychanalyste, diplômée des Beaux-Arts de Paris et artiste peintre, lui rend un très bel hommage dans cette oeuvre forte. La derniere page tournėe, Sėraphine reste un personnage énigmatique et mystérieux et c'est tant mieux. Reste un sentiment de peine et d'impuissance devant son internement et sa fin poignante.

Moi-même native de Senlis, mon attention à été particulièrement touchée par les descriptions si justes et si belles de cette ville.
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Séraphine : La vie rêvée de Séraphine de Senlis

Françoise Cloarec raconte la vie de Séraphine Louis depuis ses débuts de peintre autodidacte et inspirée jusqu'à sa mort.

J'ai beaucoup aimé l'histoire de cette femme extraordinaire. J'ai vu le très beau film avec Yolande Moreau. Maintenant, je n'ai qu'une envie: aller voir les tableaux de cette artiste!
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